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Dans l’adversité

Sélectionné à la 62e Semaine de la Critique de Cannes, Levante de Lillah Halla nous emmène dans le Brésil de Bolsonaro, où infusent fascisme et activisme religieux

Sofia (Ayomi Domenica) a 17 ans, joue au volley-ball dans l’équipe féminine de C.Leste. Un club incluant des lesbiennes, et des transgenres sous la direction ferme et maternelle de la coach incarnée par Grace Passô. Remarquée par une sélectionneuse, Sofia se voit proposer une bourse et un contrat professionnel au Chili, après la fin de la compétition en cours, où elle sera observée de très près. Une chance inouïe et l’accomplissement de ses rêves. Mais alors que l’équipe vient de remporter les quarts de finale, la jeune fille, bisexuelle, en couple avec une autre joueuse, s’aperçoit qu’elle est enceinte. L’avortement est illégal au Brésil. Pour les pauvres, s’entend. Les riches trouvent toujours un arrangement. Dès lors, pour la jeune sportive qui ne veut pas de cette grossesse, commence un parcours de combattante.

Fureur de vivre

Malgré la pression des sponsors du club, les actions intrusives des agents fondamentalistes, doucereux et abjects, qui piègent, traquent et menacent de prison les jeunes filles voulant avorter. Malgré la réprobation sociale, le regard des voisins, les tags sur les murs citant l’Epître aux Romains, le caillassage de sa maison, les menaces et les insultes, Sofia tient bon. Elle – qui a perdu sa mère –, peut s’appuyer sur un père aimant, apiculteur de métier, doux comme le miel de ses abeilles, et une tante bienveillante. Mais c’est du collectif de ses copines surtout, qu’elle tire sa force. Des filles solidaires, joyeuses, espiègles. Le titre du film Levante – qui signifie « soulèvement », désigne aussi une plante rituelle censée donner des pouvoirs surhumains. Un titre qui sied bien à ce film, construit comme un thriller d’une incroyable énergie. La réalisatrice capte l’exultation des corps, jeunes, vigoureux, sans formatage aucun, saisis plein cadre dans les vestiaires, sous la douche, dans les activités sportives, festives ou amoureuses. Des corps qui crient comme les couleurs orange et rose, et vibrent sur la musique signée Maria Beraldo et Badsista (DJ, cofondatrice du collectif féministe Bandida, qui fait vibrer les clubs de São Paulo avec sa ghetto house).
Fureur de vivre contre l’oppression, l’étouffement, la dépression, la violence politique.
La réalisatrice Lillah Halla, entourée d’une équipe très féminisée, propose ici une tragédie sociale plus qu’individuelle, dénonçant un système pervers, hypocrite dont les contradictions mortifères, seront soulignées par un dénouement ironique qu’on ne dévoilera pas.

ÉLISE PADOVANI

Levante, de Lillah Halla
Sorti le 6 décembre
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