lundi 9 décembre 2024
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Édène, satire à blanc 

Avec cette adaptation théâtrale, Alice Zeniter propose une réactualisation superficielle de Martin Eden

En 1909, Jack London crée le personnage de Martin Eden, un homme de la classe ouvrière qui cherche à devenir écrivain afin de conquérir une jeune bourgeoise. Son parcours permet à l’auteur d’aborder les débats littéraires de son époque, le fonctionnement du monde de l’édition et les conflits de classes. Avec Édène, Alice Zeniter [Lire l’entretien qu’elle nous avait consacré ici ou la critique de son dernier roman ici] transpose la trajectoire du personnage originel et les thèmes de l’œuvre à notre époque contemporaine. 

Nous rencontrons Édène, alter-ego féminin du protagoniste de London, lors de sa première venue chez Ariane et Rose, deux sœurs issues de la bourgeoisie de gauche. Amoureuse de Rose qui étudie la littérature, la protagoniste se met en tête de devenir autrice. Elle commence alors à écrire à propos des femmes avec lesquelles elle travaille, et de Gigi, son amie qui l’héberge. Les conflits qui en résultent font écho des débats littéraires actuels, comme le consentement des personnes représentées dans l’écriture du réel.

Représenter le réel 

Les difficultés d’Édène à être publiée permettent de faire émerger un discours fort sur les intersections entre rapport de classe et légitimité littéraire. En outre, la représentation des enjeux sociaux propres au parcours de la protagoniste reste extrêmement caricaturale. Le choix – revendiqué par Zeniter – de faire de sa protagoniste une femme noire n’a aucun impact sur le récit. Peut-être ne souhaitait-elle pas produire un pamphlet intersectionnel pour se concentrer uniquement sur les rapports de classe, même si ceux-ci sont traités de manière superficielle, voire ridicule. Lorsque les blanchisseuses entament un mouvement social, leurs revendications et leurs conflits internes sont tournés en dérisions par une mise en scène n’assumant pas de moments de tension et met davantage la focale sur leur manque d’expérience militante. De façon générale, le point de vue adopté est presque toujours celui des bourgeoises, qu’il soit méprisant ou fétichisant, ou celui d’Édène, qui malgré son appartenance de classe, méprise elle aussi profondément ses collègues.  

CHLOÉ MACAIRE 

Édène a été joué du 27 novembre au 1er décembre à La Criée, théâtre national de Marseille.

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