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Enquête dans les bas-fonds de Barcelone

Couronné par cinq Gaudi Awards, Les Mystères de Barcelone, premier film de Lluís Danés arrive sur nos écrans le 28 septembre

Le réalisateur espagnol Lluís Danés dit avoir voulu montrer « la façon dont le pouvoir crée des monstres de contes de fée en cachant les vrais ». On est en 1912, à Barcelone. Gaudí, le moderniste, construit ses immeubles. La bourgeoisie prospère tandis que les quartiers pauvres de la cité deviennent des coupe-gorges sordides. Des enfants des rues disparaissent mais on ne s’en soucie que lorsque c’est une petite fille riche, Teresa Guitard, qui est kidnappée. On veut alors une coupable, quitte à bâcler l’enquête. Ce sera Enriqueta Marti (Nora Navas), psychologiquement instable, un peu proxénète, un peu guérisseuse. Dans l’effervescence de la rédaction du journal tenu par son oncle, peu convaincu par la culpabilité de celle qu’on appelle désormais « la vampire de Barcelone » et qu’on accuse de tous les crimes, Sebastià Comas (Roger Casamajor), photo reporter morphinomane, enquête. La corruption, la complaisance complice des autorités pour les vices des élites, un journalisme plus avide de scoops que de vérité, en connivence avec le pouvoir, les légendes urbaines et la vindicte populaire pour un bouc émissaire qui sauve les apparences et les vrais coupables, tous ces thèmes ont maintes fois été traités par le cinéma mais rarement comme une expérience hallucinatoire. Venu du monde du cirque, du théâtre, de la vidéo, le réalisateur choisit pour ce thriller historique, inspiré d’une affaire réelle, et somme toute proche du monde d’un Dickens, un style expressionniste et onirique, entre Lynch et Fellini, Tim Burton et Guillermo del Toro. Il mêle animation et prise de vue, passe du noir et blanc à la couleur où domine le rouge. Rouges, le sang, la lumière des bordels, les robes de la maquerelle en chef, et celle de la cantatrice. Noirs, le théâtre des ombres, la charrette de mort qui emporte les petites victimes vers les vices des grands, la bouche de la ville-monstre, Moloch de l’ère industrielle qui avale la chair de tous les parias et leurs illusions. Noir, le cœur des hommes. 

Le titre français du film Les Mystères de Barcelone renvoie à la littérature feuilletonnesque de Sue ou du jeune Zola, et met en relief la ville, matrice de cette noirceur. L’horreur se tapit dans le labyrinthe des venelles du quartier El Raval, semblable à celui du Londres de Jack l’Eventreur, le brouillard en moins. Le titre espagnol La vampira de Barcelona, quant à lui, met en avant la présumée coupable, instrumentalisée comme tous les personnages féminins de ce conte cruel.

ÉLISE PADOVANI

Sortie en salles le 28 septembre

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