Il y a ceux qui étaient venus en avance avec leurs coussins ou leurs sièges, ceux qui sont simplement passés et se sont arrêtés, debout. Ceux qui se sont mis à leur fenêtre et ceux, plus téméraires, qui sont montés sur les toits, assis sur les cheminées.
Il faut dire que dès les premières notes le ton est donné : l’orchestre joue avec brio des tubes classiques, en commençant par une Ouverture du Barbier de Séville endiablée. Les visages des musiciens rayonnent, et ils prennent un plaisir visible, et audible, à jouer dans cette proximité avec le public. La direction enjouée et généreuse de Frédéric Tibone les laisse d’ailleurs presque seuls par moments, suggérant à peine quelque forte, guidant quelque accelerando, souriant après un solo remarquable…
De fait chaque pupitre, cordes, vents, percussions, est d’une unité qui n’empêche pas la virtuosité individuelle. Ainsi Da-Min Kim, violon super soliste de l’orchestre, dans Don Pasquale, mais aussi hautboïste, flutiste, clarinettiste solistes tout au long du concert, et un pupitre de cors qui sait jouer pianissimo.
L’opéra est populaire !
L’orchestre enchaine les ouvertures et suites les plus difficiles du répertoire opératique italien, Rossini, Donizetti, Verdi, dont ils ont une maitrise exceptionnelle, et dont le public apprécie le sens dramatique et le romantisme sans limite. A l’Ouverture de la Chauve Souris (Johann Strauss fils) et sa valse prise sur un tempo d’enfer, succède la sublime Suite de Carmen, véritable traversée de l’opéra, tambour de basque, flute et harpe subtiles dans l’Aragonaise, et éclat formidable des Toréadors ! Chaque mouvement est applaudi, sans que les musiciens s’en offusquent : aller vers le public, c’est aussi admettre qu’il ne connaisse pas les rituels !
Après des applaudissements triomphaux, l’orchestre offrait en premier bis l’ouverture de Guillaume Tell, dont tous les violons d’orchestre redoutent le long tricotage ! Sur un tempo d’enfer, ils passent l‘épreuve en souriant, et enchainent en reprenant en second bis le finale de la Suite de Carmen, que le public suit en tapant dans ses mains, en chantonnant parfois…
Une vraie soirée d’amour entre un orchestre et sa ville ! Qui aurait sans doute mérité plus de confort pour les 2000 personnes rassemblées, dont la plupart ne voyait pas la scène, et aucun les percussions spectaculaires, tout au fond.
JULIUS LAY
Le concert gratuit de l’orchestre philharmonique, temps fort de l’Eté Marseillais, a été donné sur le parvis de l’opéra le 22 juillet