Au Palais de Pharo de Marseille, le Trio Moreau brille dans les trios de Brahms et Schubert
C’est une salle comble – et renflouée par quelques rangs – qui a accueilli samedi 13 janvier les frères Moreau. Mené par l’aîné Edgar, violoncelliste soliste récompensé de deux Victoires de la musique classique, le trio familial s’est plongé dans deux œuvres d’un romantisme ardent et délicat. Loin de poser les basses des harmonies, le violoncelle s’y fait mélodieux, moteur et central, dans le développement de thèmes et motifs entêtants, héritiers de Beethoven. Face à ce violoncelle sachant se faire aussi tendre qu’héroïque sur les pages de Brahms puis de Schubert, ce n’est pas le violon de la tout aussi excellente sœur Raphaëlle que l’on découvre mais celui du plus jeune frère, David, à l’écoute de son aîné, d’une justesse et d’une pureté de son admirable. Au piano, le benjamin Jérémie limite les épanchements avec d’autant plus de facilité que la finesse de son toucher et l’élégance de ses intonations forcent l’émotion et l’admiration. Le trio de Schubert se révélant, hormis l’Andante con moto rendu célèbre par Barry Lyndon, d’une technique et d’une virtuosité particulièrement exigeantes sur la plupart de ses mouvements. Le trio ne mise cependant pas sur la vélocité et les effets pour séduire : les musiciens prennent le risque de la lenteur, de l’expressivité et même de l’intériorité. Le risque s’avère payant : du trio de Brahms, dense et contrapuntique, au chant intérieur de Schubert, encore pétri de sonorités mozartiennes sautillantes, on découvre un trio à la complicité rare. Donnée en bis, la transcription pour trio du prélude pour deux violons et piano de Chostakovitch laisse l’assemblée dans un état de grâce.
SUZANNE CANESSA
Le concert a été donné le 13 janvier au Palais du Pharo, Marseille.