Samedi matin, l’Orchestre de Mandoline des Minots de Marseille, créé il y a trois ans par le compositeur Vincent Beer-Demander, nous présentait les premiers mouvements de sa création en cours, La légende du Nord : une épopée aux relents elfiques, mise au point avec Rachel Tolkien, petite-fille du célèbre auteur. Un astucieux dispositif, plaçant les jeunes musiciens au coeur même de l’auditoire dans une salle Tomasi transfigurée, rendait l’expérience particulièrement saisissante : lutins guillerets à la flûte traversière, inquiétudes du trémolo de mandoline, accents enveloppants de tuba ou de violoncelle… Un aperçu réjouissant de cet époustouflant travail collectif réunissant des minots de tous quartiers – Air Bel, Vaillant, Saint-Just Corot… – dans une pratique hebdomadaire. Il faut dire que la mandoline, instrument méditerranéen par excellence, noue une relation historique avec Marseille : c’est ici que fut créée la première classe de mandoline au monde, en 1921. À terme : c’est une classe par établissement scolaire qui est visée ! Enjoué, le compositeur profitait de chaque séquence pour en détailler les principes d’orchestration – brillante idée de mêler théorie et mise en pratique immédiate, tout en permettant aux enfants spectateurs de voir leurs pairs jouer en live, selon le principe immuable du festival : « être dans le son ».
De fait, les expériences immersives se succédaient durant tout le week-end. Ici une prise en main d’instruments, là une Cuisine musicale décomplexée permettant au plus petits de se familiariser avec un répertoire classique – Bizet, Rossini – agrémentés d’un instrumentarium de casseroles ou bouteilles en verre. À l’étage,Musique à l’image explorait le potentiel expressif du paysage sonore, accompagnant le bestiaire en métal du sculpteur Thierry Fabre: errements d’une baleine mélancolique au marimba, rencontre fortuite entre un marcassin facétieux et un calamar indolent… Sous les boiseries de la salle Billioud, les enfants captivés n’en perdaient pas une miette. Et si le VJing très abscons du dominical Vents à emporter a perdu l’attention de quelques jeunes spectateurs, déjà proches de la sieste méridienne, on ne peut que souligner l’exceptionnelle diversité qui préside au choix de cet excellent festival jeune public !
JULIE BORDENAVE
Un week-end au Conservatoire se tenait les 9 et 10 décembre au Conservatoire Pierre Barbizet, dans le cadre de la 5e édition du festival Tous en sons, Marseille.