mardi 1 octobre 2024
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Ivres de vie, avides de bonheur 

Nous ne parlerons pas du gouvernement.

Ce matin devant moi au supermarché une femme s’est mise à pleurer. Elle avait dans son panier deux baguettes, une boite d’oeufs et quatre pommes. Il lui manquait 40 centimes.

Avant cela, par deux fois, dans la même rue, des hommes jeunes, propres et délicats, m’avaient demandé de l’aide « pour le café du matin » et « pour un croissant », luxe suprême. En sortant du supermarché, après avoir réglé les 40 centimes de la dame qui s’apprêtait à renoncer à une de ses pommes, un autre homme m’a demandé un paquet des mouchoirs qui dépassaient de mon caddie. « Pour ma dignité », dit-il. 

Nous ne parlerons pas du gouvernement. 

Et pas plus de ceux d’avant, de Manuel Valls qui renverse les orientations de Jean-Marc Ayrault et impose une politique d’austérité aux conséquences sociales dramatiques. Des 1801 décès (officiels) de SDF entre 2007 et 2011, alors que Sarkozy avait promis de mettre fin au sans-abrisme. De l’effarante augmentation de la pauvreté et de l’extrême pauvreté en France ces 20 dernières années, extrême pauvreté qui touche majoritairement des femmes, et souvent des mères isolées. Un enfant sur cinq vit actuellement de l’aide alimentaire, vestimentaire et sociale. Il est question ici des moins de 3 ans, de bébés affamés.

L’austérité a un coût, que ne payent pas ceux qui en décident. 

Nous ne parlerons pas non plus du désespoir des enseignants qui ne peuvent plus enseigner, des étudiants laissés au bord d’un parcours sup que seuls les riches peuvent contourner. Nous ne rappellerons pas les « morts inattendues » qui se multiplient aux urgences, la baisse sans précédent de l’espérance de vie en bonne santé, l’explosion des souffrances psychiques et des maladies mentales. La question restera donc posée, sans autre réponse que la vôtre : comment appelle-t-on ceux qui, en conscience, mettent en danger la vie des autres ? 

Ici, dans ces pages, parce que nous restons ivres de vie et avides de bonheur, nous vous parlerons  de ce qui résiste. De C’est pas du luxe !, magnifique festival qui redonne dignité et force aux sans-abris, en espérant que le combat de la Fondation Emmaus ne souffre pas des crimes de L’Abbé Pierre. De Mouss et Hakim, qui passent à L’Offensive. De SOS Méditerranée qui prépare sa fête. De tous les acteurs culturels qui, hier, ont appelé à faire front contre l’extrême droite, et la regardent aujourd’hui s’installer en arbitre, prête à les briser. 

Sortir, vivre, créer, danser, est leur réponse, splendide, à l’austérité. 

AGNÈS FRESCHEL

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