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Jeunes prodiges à l’honneur

Deux soirées, deux programmes, deux salles combles la même semaine pour Marseille Concerts qui a mis en lumière de jeunes talents prodigieux

C’est d’abord à la basilique du Sacré-Cœur à Marseille que la présidente Karine Fouchet et le directeur musical Olivier Bellamy de Marseille Concerts ont donné rendez-vous pour un programme baroque de très haute qualité. Le concert a débuté avec deux motets de Johann Adolph Hasse (1699-1783). Le premier, Alta nubes illustrata, interprété par Marie Théoleyre est particulièrement ardu. Dans ses œuvres sacrées, Hasse exige un équilibre subtil entre rapidité des vocalises et profondeur spirituelle d’un répertoire sacré. Ses arias sont donc des morceaux de bravoure qui exigent des interprètes à la fois virtuosité et théâtralité dans le récitatif, ce que la soprane réalise avec brio. Après un amen plein d’une belle énergie, au détriment peut-être de la légèreté, elle laisse la place au magnifique Rémy Brès-Feuillet

Malgré son jeune âge, le contre-ténor a déjà multiplié les prix et les scènes. Son émotion à fleur de peau n’affecte en rien son timbre chaleureux, grave et rond – rare chez un contre-ténor – ; cette vulnérabilité apportant une belle intensité à son interprétation de l’Alma Redemptoris Mater, pièce méditative, permettant d’apprécier tout le velours de sa voix. Les deux solistes sont accompagnés par l’ensemble à cordes Palatine, emmené par la direction pleine d’énergie du claveciniste Guillaume Haldenwang. Leur interprétation endiablée de l’Adagio e fuga de Franz Xavier Richter (1709-1789) est à couper le souffle.

Moments de grâce

Puis vient l’heure du monument : le Stabat Mater de Pergolèse écrit juste avant la mort du compositeur. Il a tout juste 26 ans. Dans la basilique s’élèvent les deux voix qui entament l’un des duos les plus célèbres du répertoire baroque. Dès le Stabat Mater dolorosa initial, on ressent la complicité musicale entre les deux interprètes, même si leur placement scénique – assez éloignés l’un de l’autre sans doute pour l’équilibre des voix – ne favorise pas toujours cette connexion qui pourrait renforcer encore l’intensité dramatique. Les moments de grâce s’enchaînent. 

Rémy Brès-Feuillet est excellent dans le Quae moerebat et dolebat, morceau technique auquel il donne une belle légèreté. Marie Théoleyre se révèle habitée dans le Vidit suum dulcem natum. Les deux «  fac ut » claquent et le Sancta Mater en duo est aussi poignant qu’élégant. On touche au divin avec le Quando Corpus Morietur où les deux voix entrelacées vibrent vers le ciel avant de conclure avec un Amen final jubilatoire qui éclate dans une explosion de joie mystique.

Mozart au Pharo 

© Marseille Concerts

Quelques jours plus tard, Marseille Concerts réunit à l’auditorium du Pharo trois jeunes et talentueux pianistes : Rémi Geniet, Gabriel Durliat et Sélim Mazari accompagnés par l’Orchestre philharmonique de Marseille, pour une soirée Mozart d’un genre unique. La configuration scénique constitue déjà un événement : installés face aux musiciens et tournant le dos au public, les trois solistes ont relevé le défi que Mozart s’imposait lors de ses concerts viennois, dirigeant l’orchestre tout en interprétant sa partie au clavier. 

Rémi Geniet ouvre le bal avec le Concerto pour piano n° 12 en La Majeur (K. 414), composé en 1782 alors que Mozart est fraîchement installé à Vienne. Cette œuvre élégante révèle déjà la grâce mélodique qui fera la signature du compositeur. Geniet, jeune virtuose au toucher raffiné, a su restituer cette fraîcheur mozartienne avec une belle sensibilité, dialoguant avec l’orchestre en complicité.

Gabriel Durliat s’est ensuite attaqué au monumental Concerto pour piano n° 23 en La Majeur (K. 488), datant de 1786, période où Mozart atteint des sommets d’inspiration. Le deuxième mouvement, le célébrissime et pathétique Adagio en fa dièse mineur plonge la salle dans un silence religieux. Mais on préfère le pianiste dans les mouvements rapides dans lesquels sa vélocité et sa direction facétieuse retrouve l’esprit – que l’on imagine malicieux – de Mozart. 

Sélim Mazari a conclu la soirée avec le Concerto pour piano n° 27 en si bémol majeur (K. 595) composé quelques mois avant sa mort prématurée. Ici, plus de flamboyance virtuose, mais une œuvre empreinte de sagesse, de gravité et d’une sérénité presque testamentaire. Mazari a su capter cette dimension avec une maturité impressionnante pour un si jeune interprète. 

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Les concerts se sont déroulés le 14 et le 18 octobre à Marseille

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