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La poésie complice d’Aylen Printchin et Lukas Genusias

Dans leur dernier album, le violoniste et le pianiste se plongent dans la première moitié du XXe siècle et trois de ses compositeurs les plus emblématiques.

Deux musiciens hors pair pour trois chefs-d’œuvre ! L’album concocté par le violoniste Aylen Pritchin et le pianiste Lukas Geniusas nous embarque dans un voyage qui suit trois compositeurs majeurs des débuts du XXe siècle par le biais de trois œuvres qui marquent aussi l’itinéraire qui a façonné la complicité du duo des deux interprètes. La troisième Sonate pour violon et piano de Debussy les a réunis lors de la demi-finale du concours Tchaïkovski 2019 et le Duo concertant de Stravinsky accompagna leur premier récital, il y a dix ans. Quant à la Sonate en ut majeur pour violon et piano de Reynaldo Hahn, elle est « au cœur de [leur] duo » ainsi que le précise Lukas Geniusas : la poésie du Colloque sentimental de Verlaine (« Dans le vieux parc solitaire et glacé / Deux ombres ont tout à l’heure passé […] / Tels ils marchaient dans les avoines folles, / Et la nuit seule entendit leurs paroles ») y croise une expression élégante et resserrée qui semble charmer l’essence même du temps, l’enveloppant dans l’orbe de ses phrasés.

Dans les tourments d’une époque

C’est ainsi que l’on entend ce diamant taillé après la fluidité foisonnante de la Sonate de Debussy qui convoque pour les deux artistes les vers d’Anna Akhmatova, (« Si vous saviez de quels débris se nourrit / Et pousse la poésie, sans la moindre honte, / Comme les pissenlits jaunes, comme l’arroche / ou la bardane au pied des palissades »). Les désordres de l’âme sont ici coulés dans une sculpture moirée où se dessinent les impatiences, les étonnements, les élans, les exacerbations d’un esprit qui semble chercher à tout appréhender. Le duo devient alors le support unique d’une pensée qui se déverse sur le monde, l’effleurant, le recomposant, unissant dans un même regard la réalité et l’image que l’on s’en fait. Le Duo concertant de Stravinsky éclot ensuite dans la netteté de ses orchestrations, de sa rigueur quasi mathématique et pourtant (ou sans doute en raison de), d’une émotion complexe et vive où affleurent les bouleversements du monde à l’instar de ceux d’une psyché en proie aux tourments d’une époque. La fragilité des deux compositeurs précédents qui rend compte, en misant sur un sentiment d’étrangeté, des remuements tragiques des débuts du XXe, se replie sur les échappatoires du rêve, reste sensible dans l’acharnement des cordes, des rythmes marqués du piano, leurs assoupissements, leurs hésitations, leur finesse marmoréenne. La fusion spirituelle des deux instrumentistes permet une transmutation de la matière en idéal. On est subjugué par la beauté de l’ensemble.

Maryvonne Colombani

Lukas Geniusas est en concert le 31 juillet au Festival international de piano de La Roque d’Anthéron.

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