mercredi 15 mai 2024
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« Le Cid » prend un coup de jeune

Ressusciter le chef-d’œuvre de Corneille en 1h10, c’est un pari que Claire-Estelle Murphy et Marc Vermeer réussissent avec fougue et malice.

Après avoir écrit de joyeuses comédies, Pierre Corneille s’attèle à une tragi-comédie : Le Cid. Il n’a que trente ans lorsqu’il écrit ce chef d’œuvre qui, aujourd’hui encore, passionne la nouvelle génération. Il circule en effet dans cette pièce un souffle juvénile où l’on s’aime à en mourir, où l’on manie l’épée pour une simple gifle, où l’on part au combat pour accrocher victoire et honneurs concomitants. Rodrigue et Chimène, héros légendaires, voient leur amour contrarié par l’égoïsme, l’intransigeance bétonnée par la notion d’honneur de leurs pères respectifs. L’un insulte l’autre. Le fils doit venger cet affront dans le sang au risque de perdre sa belle… et sa gloire guerrière. Fameux dilemme cornélien !

De la musique aussi

Pour redonner vie à ces amours difficiles, Marc et Claire-Estelle proposent un arrangement en jouant de larges extraits de la tragédie. Ils laissent le soin à Don Sanche (le rival malheureux de Rodrigue) de résumer la situation. C’est diablement efficace et peut donner l’envie aux nouveaux spectateurs de se plonger dans l’univers cornélien magnifié par la beauté des alexandrins, la psychologie rigide des héros embarqués malgré eux dans des situations tortueuses. Grâce à leur jeunesse, leur beauté et surtout leur plaisir évident d’interpréter un tel texte, les deux comédiens rajeunissent une œuvre digne d’un film de cape et d’épée. La mise en scène minimaliste laisse le champ libre aux mots du poète et aux musiques délicates composées et interprétées par Chimène elle-même ! Claire-Estelle aussi à l’aise au piano qu’à la flûte, glisse dans la représentation une élégance douloureuse qui sous-tend les conflits politiques ou amoureux. Les voix sont belles et se répondent à merveille dans les duos les plus célèbres où l’aurait préféré l’absence de piano en accompagnement ; elle dilue la beauté de la musique de Corneille qui n’a guère besoin d’être surlignée.

Jean-Louis Châles

« Le Cid » est donné jusqu’au 29 juillet à 19h au Théâtre des Trois Raisins (Avignon).

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