Il y a une reine de la trap, quelque part cachée dans son bunker varois. Cette reine, c’est Trampqueen, ou Delphine à ville, une artiste qui manie l’art des mots, comme du son, avec une fraîcheur et une sensibilité détonantes. Une originalité qui découle certainement de ses influences contrastées, entre rap et grunge, films de zombies et Mary Poppins. C’est ce cocktail qui est à l’affiche le jeudi 15 décembre à l’Usine à Gaz, à Cuers, avant de sortir quelques jours plus tard un nouveau titre.
Une histoire de clown
À bientôt la trentaine, Trampqueen est une artiste jeune. Par l’âge certes, mais aussi par son parcours musical, qui l’a vu éclore sur scène il y a seulement un an. En aout 2021, elle n’a fait que deux concerts, un dans un garage, un autre dans un appartement « devant une vingtaine de personne », dit-elle. Elle a aussi sorti une première mixtape quelques mois plus tôt… le 25 décembre 2020. Mais c’est sur Instagram, où elle est très active, qu’elle se fait repérer. « Un jour, une clown s’abonne à mon compte, et il se trouve que c’était la co-présidente de l’Atom Festival. » Sur les bases de sa seule mixtape au son voodoo-trap, comprendre du rap à l’énergie punk, le festival proche de Carcassonne invite cette artiste à venir se produire le 28 aout 2021. « C’était excellent, c’est à ce moment-là que j’ai compris ce que je voulais faire. »
Cette première étape franchie, elle enchaine alors les concerts. Toujours accompagnée de Liquid Jane (backeuse et manageuse) et John Cooltrain (ingé-son), on l’a vue à la Guinguette Sonore d’Istres, au Ground Zero à Lyon, au Makeda et à La Mesón à Marseille… Sur scène, Delphine se transforme en Trampqueen, un personnage qu’elle a construit dès le début du projet. « Pour moi Trampqueen est une reine post apocalyptique qui vit dans son bunker, coupée du monde, pour se protéger de l’extérieur. » Un bunker dont elle ne sort que pour les concerts. « Sur scène c’est comme la transe, tu t’oublies toi-même, c’est le seul moment dans la société où on peut être plaintif, agressif, faire ce que l’on veut, parce qu’on peut l’excuser par l’art, se cacher derrière. »
Cette démarche d’incarnation descend de son goût pour le cinéma, dont elle se prédestinait plus jeune. « Je me suis rendu compte que j’allai peut-être mettre dix ans à faire un film, alors qu’en une soirée je faisais trois sons. J’avais besoin de créer compulsivement et c’était le média le plus rapide pour moi. »
Dans la foulée de son concert à Cuers, elle s’apprête à sortir un nouveau titre. Encore un 25 décembre, deux ans jour pour jour après sa première mixtape. Après une trêve hivernale loin des scènes, son année 2023 s’annonce chargée : un double EP qu’elle compte produire avec son équipe, et une tournée qu’elle est train de booker elle-même. De quoi prendre la lumière qu’elle mérite, hors de son bunker cette fois.
NICOLAS SANTUCCI
Trampqueen était en concert le 15 décembre à l’Usine à Gaz, Cuers