lundi 15 avril 2024
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Nougaro-ci, Nougaro-là

Sur un texte subtil, drôle et profond, Ici Nougaro propose un hommage émouvant au musicien et à tous ceux qui l’admirent

Le parti-pris est original. Parler de Nougaro par le biais de son sosie officiel, Mathias, un quadragénaire à la dérive, un perdant pas toujours magnifique, un qui est resté « inconnu au bataillon ». Mathias soliloque, s’adressant à Jacques, son acolyte silencieux, qui lui répond pourtant… en musique. L’un est en blanc (au début), l’autre en noir ; l’un parle, l’autre joue. Duo de clowns tristes, désabusés, mais toujours portés par la fièvre « nougarienne » car, s’insurge Mathias, « rien ne m’empêchera de nougariser ». Dans un décor tout en obliques – des toiles colorées suspendues, qui cachent, dévoilent ou servent d’écrans, au sol à la géométrie anguleuse –, à l’image peut-être d’une vie à faire comme si, Mathias se débat dans ses déboires. Maintenu à la surface par la vénération qu’il voue à ce « frère qui [l’] accompagne » envers et contre tout. Et donc, malgré tous les ratés d’une existence passée dans l’ombre, l’espoir subsiste. 

Un travail remarquable
Car il y a la musique, et les mots, de Nougaro. Dans son texte, Charif Ghattas a habilement glissé des paroles de chansons ; certaines qu’on reconnaît, d’autres – magnifiques – que l’on découvre. Grégory Montel (dont on peut lire ici l’entretien) les scande, les chante, les murmure, les crie. Et l’on croirait voir et entendre Nougaro lui-même. Tout y est, le phrasé et l’accent si particuliers, la puissance de la voix, la gestuelle syncopée. Composition fascinante, remarquable travail d’acteur. Quant à Lionel Suarez, sa virtuosité éclate tout au long du spectacle. Dans les arrangements et le medley qu’il a concoctés, dans ses envoûtants solos aux tonalités de tango, dans toutes les réponses musicales qu’il lance, comme des bouées de sauvetage, à son partenaire.

Un beau moment de scène donc, dont on sort transporté. Par la performance de l’acteur comme par celle du musicien. Ému aussi d’avoir retrouvé, le temps d’un spectacle intimiste et touchant, la grande voix d’un poète disparu.

FRED ROBERT

Ici Nougaro 
Jusqu’au 28 janvier
Théâtre des Bernardines
Marseille
08 2013 2013
lestheatres.net
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