mercredi 2 octobre 2024
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Souad Massi : « Le combat continue » 

Chanteuse, auteure et compositrice, Souad Massi est actuellement en tournée avec son dernier album "Sequana". Rencontre

Zébuline. Votre deuxième concert en France a eu lieu dans notre région, en 1999, aux Suds, à Arles, dont vous êtes d’ailleurs devenue une fidèle. Que vous évoque cette époque à laquelle vous veniez de quitter l’Algérie pour vous installer définitivement en France ?
Souad Massi. Ma première sortie d’Algérie était pour un concert au Cabaret Sauvage, à Paris. La deuxième date était en effet à Arles. C’était pour moi une très belle découverte ; je suis tombée amoureuse de la ville. Cette époque m’a marquée. J’en garde de très bons souvenirs.

Presque vingt-cinq ans et dix albums plus tard, vous jouez au Silo, à Marseille. Que diriez-vous qui a fondamentalement changé dans votre approche de la musique, de la composition ?
J’ai évolué, appris des choses, fait des rencontres, artistiques et humaines. J’ai appris à aller à l’essentiel dans la musique, à ne pas surcharger d’arrangements, à aller vers la mélodie et mettre plus en avant le texte. J’ai toujours aimé le folk. Mais je m’ouvre plus à d’autres musiques aujourd’hui. Parce que j’ai beaucoup voyagé, embrassé d’autres cultures. C’est magnifique de pouvoir traduire tout ça dans une chanson.

Quand vous étiez encore en Algérie, vous vous êtes aussi tournée vers le flamenco et le rock !
Plus jeune, j’écoutais beaucoup Paco de Lucía et Camarón. On donnait des concerts de rumba et de flamenco. Le rock me faisait un bien fou. J’ai même fait partie d’un groupe de hard rock.

Souad Massi © Yann Orhan

Sequana, votre dernier album, est marqué par les contributions de Justin Adams, Piers Faccini ou la flûtiste Naïssam Jalal. Trois artistes qui se nourrissent de croisements d’esthétiques, entre folk, musiques du monde, classique ou rock. Vous reconnaissez-vous dans cette famille de musicien·nes ?
Je choisis les collaborations avec des artistes qui me ressemblent. Quand j’ai contacté Justin Adams, je connaissais très bien son parcours, sa richesse musicale et sa curiosité. Il m’a écoutée, structurée et a su traduire mes envies. Avec Piers Faccini, on a presque le même univers. Il est dans la recherche. J’adore sa voix. C’est pour ça que je l’ai invité sur Mirage, une chanson qui me tient à cœur. J’ai rencontré Naïssam Jalal lors d’un festival. Je suis tombée sous le charme de cette grande artiste qui a un son particulier. Je ne connais pas beaucoup d’artistes femmes comme elle dans le jazz.

Pourquoi l’avoir appelé Sequana ?
On sait peu de choses sur cette déesse gauloise [liée à la Seine, ndlr]. Je ne connaissais pas Sequana et je suis tombée sur une statuette. J’ai découvert qu’elle avait un pouvoir de guérison et que les gens se rendaient à son sanctuaire près de Dijon pour faire des vœux. J’ai été étonné d’apprendre que même des chirurgiens y allaient pour lui demander son soutien. C’est aussi un endroit où les visiteurs allaient chercher un apaisement. Cela m’a inspirée.

Qu’avez-vous voulu exprimer à travers ce disque?
Avec le Covid, j’ai eu le temps de réfléchir et de me poser plein de questions. J’en ai profité pour écrire. L’album parle de la complexité des relations humaines, de la solitude, de l’adolescence et de la jeunesse qui peuvent parfois être vécues comme des périodes très difficiles. Ils ont à subir ce que les adultes choisissent pour eux. Ils peuvent se sentir incompris et vivre à leur niveau des injustices. Je rends aussi un hommage à Victor Jara, artiste chilien résistant qui est un héros pour moi. Dans la chanson Dessine-moi un pays, je parle de toutes ces personnes contraintes de quitter leur pays d’origine pour fuir la guerre et la misère. La chanson Sequana est dédiée à mes filles de 17 et 12 ans ; j’ai essayé d’y mettre un concentré de bonnes énergies.

Comment avez-vous vécu la vôtre d’adolescence ?
J’ai l’impression d’être passée de l’enfance à l’âge adulte. Je n’ai pas le souvenir d’avoir eu une adolescence compliquée. J’étais introvertie et suis toujours très pudique. Il n’y avait pas non plus beaucoup de communication dans ma famille malheureusement. Je me réfugiais dans la lecture et j’ai créé mon monde imaginaire.

Que représente pour vous la journée du 8 mars ?
Une date importante pour que le combat continue. Je soutiens plusieurs associations qui se battent pour l’égalité. Il faut sensibiliser les femmes et les hommes sur la question du respect. Il faut aussi une loi qui nous protège.

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR LUDOVIC TOMAS

Sequana de Souad Massi
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