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Tatouer nos mémoires

Dans le cadre de l’exposition Tatouage des musées de Marseille, une table ronde organisée par l’association Ancrages sur le tatouage amazigh ouvrait de belles perspectives et souvenirs

« Le tatouage amazigh : fonctions sociales et usages contemporains. » Le sujet de la table ronde pouvait paraître étroit, peu susceptible de concerner hors d’une communauté. Pourtant ce sont les particularités mêmes de cette histoire, celle des femmes dites berbères (déclinaison du mot barbare), qui touchent à une universalité : celle de la transmission, par les femmes et leur corps, des marques de la beauté, de la fierté, du sacré. Ou de l’appartenance, du réprouvé, du harām.
Pour les trois femmes amazighes présentes, l’histoire du tatouage est la même :  Malika Assam, maîtresse de conférence en langue et culture amazighes, Raïssa Leï, chorégraphe et artiste engagée pour la transmission des cultures amazighes, et Samia Chabani qui organisait la table ronde, ont toutes trois une mère, ou une grand-mère, qui portait ces tatouages géométriques. Ils ont été une marque de fierté, puis de honte. En France, leurs mères étaient comparées à des Apaches, et au Maroc moquées ou déclarées impures. 

Ce rejet a commencé dans les années 40, mais n’a atteint les villages que dans les années 60 : toutes les femmes amazighes nées avant avaient le visage tatoué, non comme un rituel de passage, comme nous l’apprend Malika Assam, mais comme un ornement. A visée esthétique, comme les bijoux, les vêtements, les tatouages n’étaient pas non plus un langage, précise-t-elle : certains signes varient d’un village à l’autre, d’une femme à l’autre. Raissa Leï souligne pourtant que certains tatouages ont un sens, certes variable, sans pour autant signer une appartenance, mais une singularité de chacune, une manière de valoriser le corps, qu’on retrouve aussi dans la pluralité des danses d’Afrique du Nord.

Ornements millénaires 

Des ornements, une esthétique du corps qui remonte à des millénaires, bien avant l’invasion arabe. La culture amazighe, c’est d’abord une langue, parlée, dans ses différences, « de l’ouest du Maroc à l’est de l’Égypte ». Au temps des pharaons, les textes les nomment les Libyens, et les représentent, hommes et femmes, avec des tatouages, 3000 ans avant notre ère. Plus tard désignés comme Maures, ils sont aussi représentés en Occident avec des tatouages. Animistes, puis Juifs pour partie, désignés comme des « berbères » (étranger en grec) par les Romains puis très majoritairement convertis à l’Islam dès le VIIe siècle, les Amazighs ont conservé et transmis leur culture par les femmes. Par la beauté, le corps, la cuisine, le tissage, les bijoux.

Et le tatouage. Sa pratique se répand aujourd’hui en Europe loin des marins et des prisons qui ont longtemps été le lieu d’un tatouage populaire, réprouvé, masculin. L’exposition Tatouage, Histoire de la Méditerranée, visible pour quelques jours encore, démontre que l’usage contemporain, esthétique, figuratif souvent, du tatouage, prend ses racines dans l’embellissement individuel d’un peuple qui se désignait lui même comme celui des êtres libres. 

Une conviction que Nicolas Misery, commissaire de l’exposition et directeur des musées de Marseille, veut concrétiser en acquérant la série de portraits de Dalila Dalléas Bouzar, Les Princesses. « Pour rééquilibrer le fonds des musées de Marseille, qui contient peu d’œuvres de femmes, et très peu  d’artistes du Maghreb ». 

Agnès Freschel

Tatouage, Histoire de la méditerranée se tient jusqu’au 28 septembre au centre de la Vielle Charité, Marseille

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Nos articles Diasporik, conçus en collaboration avec l’association Ancrages sont également disponible en intégralité sur leur site

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