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Vous êtes la beauté du monde 

Le Festival C’est pas du Luxe ! qui a réuni à Avignon 71 propositions venues de toute la France, est bouleversant d’humanité

Avec Emmaüs et les associations du champ social, du secours populaire à ATD quart monde, C’est pas du luxe ! réunit des projets impliquant des personnes en grande précarité, affirmant que les droits culturels les concernent, et que nous avons besoin de leur regard. Un autre festival d’Avignon, devenu rapidement incontournable, soutenu par tous les acteurs culturels de Vaucluse. 

Dans la rue, une ouverture en fanfare, et tout au long du week-end des danses, des acrobates, une chorale de la cloche. Dans les théâtres et lieux d’expositions certaines propositions parlent directement de la pauvreté, d’autres, comme Nichoir 93 au Théâtre des Halles, sont plus sensibles : désirs d’envols, replis et embrassements y sont vécus par trois hommes, habitants précaires du Bois de Vincennes. Qu’est-ce qu’un maison, une porte, une fenêtre ? demandent ceux qui n’en ont pas. 

Savoir et beauté 

Qu’est-ce que le savoir ? Didier Ruiz a réuni aux Célestins des scientifiques et des experts pour un speed dating dispensant un très sérieux coq à l’âne, de l’apiculture urbaine à la mécanique des fluides. Parce que le droit à la culture c’est aussi l’accès aux savoirs, sans isolement ou désert numérique, par la conversation.

Qu’est ce que la beauté, et qui la voit ? Se demande-t-on à la Maison Jean Vilar. Sans doute le questionnement le plus bouleversant. Révéler la beauté expose les images et les textes de précaires qui aiment un papillon posé dans la boue, un regard bleu et tendre, une fleur de bitume, têtue. Le portrait dans tous ses états expose les photos auto-commentées des bénéficiaires d’Entraide et Abri. Dans des podcasts les apprentis du restaurant solidaire Graines de piment se confrontent à Bourdieu, mais aussi à la pensée de Jean Vilar sur le service public du théâtre, s’emparant avec émotion des textes de Laurent Gaudé ou Wajdi Mouawad. Découvrant, ou affirmant, l’importance des nourritures de l’esprit.

Dans le jardin de la Maison, la création d’Edith Amsellem (Cie Ed’O) a quatre fois fait vibrer La Beauté, en un défilé qui effeuillait 15 pensionnaires de Rosmerta, lieu d’accueil de mineurs isolés, autogéré, à Avignon. Comme dans une fashion week, avec trois passages par mannequin, pour 20 minutes de spectacles. 

Un premier passage en famille royale de ces treize jeune ivoiriens ou guinéens et de leurs deux éducatrices, déguisés en rois et princesses d’opérette, colorés, saturés et enrubannés ; un deuxième débarrassé de la première couche de vêtements, disant leurs rêves d’avenir, footballeur, scientifique, cuistot ou ministre de l’éducation populaire ; un dernier, disant d’où ils viennent touchant à l’exil, à la guerre, au racisme, à l’intime. À la beauté, révélée, de ceux que l’Europe s’escrime à renvoyer, dès leur majorité atteinte, vers un chez eux qui n’existe pas.

Agnès Freschel

C’est pas du luxe ! a eu lieu à Avignon du 27 au 29 septembre.
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