C’est une version XXL du photographe et réalisateur allemand Peter Lindbergh qu’offre l’association L’Œil en Seyneà la VillaTamaris, grâce à la collaboration de la Peter Lindberg Foundation. Untold Stories comporte 140 tirages sélectionnés par l’artiste peu de temps avant sa disparition en 2019, ainsi que deux installations monumentales : Manifest et ses immenses dos bleus collés aux murs, et Testament composée d’un film et de douze portraits. Une exposition testamentaire, donc, et une manière de se retrouver face à lui-même, prévue à l’origine pour le Kunstpalast de Düsseldorf et présentée pour la première fois en France.
Une exposition manifeste
Réputé mondialement pour avoir photographié les icones de la mode depuis les années 80, Peter Lindbergh se dévoile ici dans sa relation intime avec ses modèles, mannequins et actrices, toujours en quête de vérité et de sincérité de part et d’autre. Pas de tricheries – ce qui n’exclut pas la sophistication – mais des photos en noir et blanc, brutes, sculptées, inspirées par ses modèles. Toujours en quête de leurs vibrations intérieures, toutes racontent une histoire et chaque séance est une nouvelle aventure. Une rencontre qui dépasse le cadre strict de la mode au point de faire passer le vêtement au second plan. D’ailleurs, dans le choix opéré par Peter Lindbergh, peu de couvertures de presse mais des portraits sensibles, les paysages de son enfance, des scènes de rues, des nus tantôt inspirés de la statuaire antique tantôt libérés de toutes contraintes, et encore des regards… Savant dosage d’instants volés et de poses scénographiées.
Exceptés les visages aux cadrages serrés, ses photos ouvrent sur l’ailleurs et fouillent le décor : une usine désaffectée, une fenêtre embuée, un café… Des scènes qui ont une âme et se révèlent en profondeur grâce au commissariat d’Emmanuelle de l’Ecotais, chargée de la collection photographique du Musée d’art moderne de la ville de Paris.
L’exposition se clôt de manière solennelle avec Testament qui plonge le visiteur dans une salle tendue de noir pour mieux accueillir les portraits en couleur de Emer Carroll, photographié derrière une vitre sans tain dans sa prison de Floride, un texte et un film (long plan fixe) qui témoignent de sa réflexion sur la peine de mort : « Chaque être humain ne vient-il pas au monde innocent ? ».
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Untold Stories
Jusqu’au 18 décembre
Villa Tamaris centre d’art, La Seyne-sur-Mer
villatamaris.fr