mercredi 2 octobre 2024
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Au Mac, Paola Pivi en VIP

Pour lancer sa nouvelle dynamique, le Musée d’art contemporain de Marseille accueille It’s not my job, it’s your job / Ce n’est pas mon travail, c’est ton travail  de Paola Pivi. Une exposition accessible et malicieuse

Artiste italienne (née en 1971 à Milan) qui vit à Anchorage en Alaska et qui expose un peu partout dans le monde Paola Pivi (Lion d’or de la Biennale de Venise en 1999) a déjà été invitée pour une réouverture à Marseille : c’était celle des Musées de Marseille, après la période des divers confinements, à l’été 2021. Elle y avait présenté 25 000 Blagues Covid (Ce n’est pas une blague), une collection d’images, de mèmes et de blagues écrites sur le virus, une multitude de « créations » d’internautes de soixante pays qu’elle avait collectées en 2020, imprimées et affichées sur des cimaises à l’intérieur de la chapelle du Centre de la Vieille Charité. L’humour comme un refuge, et des blagues perçues par l’artiste comme les archives collectives d’une expérience inédite et universelle. Une exposition résonnant également avec une part d’histoire de la Vieille Charité, lieu d’enfermement, 300 ans plus tôt, des malades de la peste qui ravagea la ville.

Au boulot !

La voici donc de nouveau invitée pour quatre mois dans cette ville qu’elle dit aimer. Pour sa dimension multiculturelle d’une part, sa nature aussi, et la façon dont les habitants utilisent leur ville comme un terrain de jeu (rassemblement improvisés, graffitis…). Mais cette fois pour une autre réouverture, celle du Mac, fermé depuis quatre ans pour travaux de mise aux normes, désamiantage surprise et rénovation. Sous le titre  It’s not my job, it’s your job / Ce n’est pas mon travail, c’est ton travail elle y présente dans le hall, qui a gagné en transparence et en hauteur, et dans les trois premières travées d’exposition rénovées (qui seront désormais dédiées aux expositions temporaires) quelques-unes de ses œuvres « iconiques » et une installation inédite Free Land Scape spécialement conçue pour l’espace architectural du musée. 

Paola Pivi, Yellow again_, 2016_Aluminium, ostrich feathers, engine, Ø 210 × 41 cm_Courtesy Massimo De Carlo and the Artist

L’art de Paola Pivi mêle le familier à l’étrange, on y rencontre par exemple des ours polaires à plumes de couleurs s’adonnant au yoga ou se suspendant à des trapèzes, des zèbres gambadant dans l’Arctique, des poissons rouges prenant l’avion… Un art à l’aspect bon enfant, décoratif, décomplexé tout autant qu’ironique, aux titres décalés, crées par l’auteur-compositeur Karma Culture Brothers. Des titres qu’elle voit comme des fragments de poésie, une façon de suggérer au public : « Vous êtes les bienvenus ici, profitez-en ! ». D’ailleurs, certaines de ses œuvres sont participatives, dans le sens où les visiteurs sont invités non pas seulement à contempler ses productions, mais à y entrer, à les traverser, ou à y rester un moment. Comme par exemple dans son Installation de matelas présentée en 2019 au Maxxi de Rome, gigantesque étendue de matelas couvrant plus de cent mètres carrés, dominée par une autre, identique mais à l’envers, qui créait une sorte de caverne feutrée. 

Bleu Denim

À contempler donc dans le hall du Mac la légèreté de ses jantes de vélos de toutes tailles, garnies sur leurs pourtours de plumes d’oiseaux divers, tournant sur elles-mêmes à l’aide de petits moteurs électriques. Plus loin dans les travées, la même petite ambiance de cirque empaillé, avec ses ours polaires fluos grandeur nature, tout en plumes colorées, gros doudous dans diverses positions, près desquels on peut se photographie gaiement, en se doutant, ou pas, de l’allusion ironique de l’artiste sur le réchauffement climatique. Et à pratiquer, en enlevant vos chaussures, Free Land Scape, créée spécialement pour l’espace architectural du Mac, proposé par l’artiste à la fois comme une installation, une sculpture, et une réflexion sur l’architecture : une structure en U en métal disposée à la verticale, profonde, parcourant l’espace des premières travées, sur laquelle est installée une grande toile en jean, appelée aussi toile Denim, qui était, avant l’appropriation américaine des années 1950, le « bleu de Nîmes » ! 

Vue de l’exposition © Malaika Mariejeanne – Agence Jam Teery

Une passerelle suspendue, une grande vague bleue dans laquelle on avance en étant déstabilisé, déséquilibré. Présentée comme un clin d’œil ludique et métaphorique au visiteur à propos d’un espace qu’il découvre ou redécouvre par le déséquilibre, l’hésitation, tout comme l’expérience que l’on peut faire de la création artistique. Ou de la globalisation économique du monde dans laquelle tout un chacun est également pris. Lorsque personne n’est installé dans l’œuvre, ou lorsqu’une personne y avance, mais qu’on le voit depuis un autre espace, on voit la toile qui bouge, comme une vague bleue : une connotation méditerranéenne revendiquée.

MARC VOIRY

It’s not my job, it’s your job / Ce n’est pas mon travail, c’est ton travail
Jusqu’au 6 août
Musée d’art contemporain, Marseille
musees.marseille.fr

Débordé !

La cour du Mac était noire de monde en cette soirée d’inauguration, quatre fois plus de monde qu’attendu ! Autant dire que l’accès à l’exposition (et au buffet…) ont été complètement pris d’assaut, il a fallu patienter un bon moment ! Auparavant, prise de parole surprise au son de « Macron démission » par une vingtaine de jeunes gens munis de banderoles CGT Spectacle et Snap (Syndicat national des artistes plasticiens), dénonçant la réforme des retraites, mais aussi la paupérisation et le mépris que subissent aujourd’hui les écoles d’art et leurs étudiant·e·s. Pas d’occupation du Mac néanmoins, le maire Benoît Payan a pu ensuite faire l’éloge de celles et ceux qui ont œuvré pour la rénovation du musée. Et annoncé le nom de sa nouvelle directrice : Stéphanie Airaud, nourrie de sa longue expérience du Mac Val, à Vitry-sur-Seine. Se ménageant un cercle dans le nouveau hall, au milieu d’un public compact, cette soirée d’inauguration s’est terminée par une danse sexuellement suggestive, interprétée par six danseur·euse·s de (La)Horde, Ballet national de Marseille. M.V.

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