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Salon du Livre Métropolitain : L’Espagne a pris la Citadelle

Le premier prix du premier Salon du Livre Métropolitain récompense Alana S Portero, autrice trans pour son roman La Mauvaise habitude qui brise les codes autobiographiques

En arrivant à la Citadelle, on ne peut manquer l’exposition Corto Maltese qui domine la forteresse. L’aventurier a trouvé au fort d’Entrecasteaux, un lieu à sa mesure. Son père Hugo Pratt est décédé en 1995 mais ses périples continuent grâce à Juan Diaz Canales et Rubén Pellejero qui, depuis 2015, imaginent de nouvelles épopées au marin ténébreux Présents lors du Salon du livre métropolitain qui pour cette première édition a mis l’Espagne à l’honneur, les lecteurs sont venus en nombre pour se faire dédicacer le dernier « Corto » Ligne de vie, (Casterman). 

À l’autre bout de la Citadelle, un évènement se prépare : la remise du premier prix littéraire métropolitain, doté de 10 000 € visant à récompenser un auteur et son traducteur  issu d’un pays du pourtour méditerranéen. 

Sur la tribune, le jury est présent, composé de personnalités du monde du livre. 135 romans avaient été sélectionnés. Le palmarès tombe récompensant quatre livres mixant dimension intime et politique : le prix spécial du jury va à Guerre et pluie de Velibor Colic (Gallimard) qui raconte l’enrôlement du jeune homme d’alors dans l’armée croato-bosniaque lors de la guerre avec l’ex-Yougoslavie, le troisième prix va à Madre Piccola (Zulma) de l’Italo-Somalienne Ubah Cristina Ali Farah, un roman sur la diaspora somalienne et le second au libyen Hisham Matar pour Mes amis (Gallimard), une réflexion sensible sur l’exil. 

Enfance queer

Enfin, les lauréates sont Alana S. Portero et à sa traductrice Margot Nguyen Béraud pour un premier livre La mauvaise habitude (Flammarion). Le récit brise les codes du roman d’apprentissage, très longtemps circonscris dans un monde masculin et aisé, pour déployer une vision féminine ouvrière, urbaine et trans, s’attachant à décrire les difficultés des enfances queer. La romancière se souvient des mots de Pedro Almodovar avant son départ. « La France est exigeante avec la culture et ne se laisse pas séduire facilement, mais si elle te donne son amour, elle ne le te retire jamais ». 

© François Moura / MAMP.

Sous-sols

Avec la Citadelle, deux autres lieux -les locaux de la Métropole au Pharo et des salles de l’hôtel Sofitel-, ont été mobilisés pour les cinquante tables-rondes autour de la littérature et du livre comme transmission de connaissances ; un pari ambitieux mais qui a déconcerté les visiteurs qui avaient parfois du mal à se repérer entre les différents espaces. 

De même si les éditeurs locaux, invités en nombre, une quarantaine, – et parmi eux Alifbata, Bizalion, Chemin des crêtes, les Enfants Rouges, Melmac Cat et l’Écailler- se félicitent de cette première initiative, ils regrettent d’avoir été « relégués » au sous-sol du bâtiment de la Métropole, loin de l’épicentre des animations de la Citadelle et des librairies représentées : Nozika, Vauban, les Voix du Chapitres et la Grande librairie internationale et sans qu’une seule table ronde n’évoque l’édition dans la seconde région éditoriale de France.

Antifascisme au Pharo

Dans l’amphithéâtre du Pharo, une rencontre vient de commencer sur le thème la bande dessinée, un témoignage historique et sociologique sur l’Espagne. Antonio Altrarriba, romancier, scénariste s’est fait connaître en France pour l’Art de voler (Denoël) roman biographique racontant la vie de son père anarchiste, militant antifasciste, exilé, déporté. 

« Il revient en Espagne sous le franquisme pour travailler la terre dans un village d’Aragón. Dès lors son exil est intérieur et il se suicide à l’âge de 90 ans, estimant que sa vie a été un échec » témoigne Antonio. «Transmettre la mémoire de mon père c’était écrire celle de milliers d’Espagnols confrontés au fascisme qui clive encore aujourd’hui le pays en deux blocs ». Le septuagénaire dialogue avec une jeune femme Ana Penyas. Dans Nous allons toutes bien (Éditions Cambourakis)elle déroule l’histoire de ses grand-mères Maruja et Herminia : « Les femmes de leur génération ont toujours été les personnages secondaires d’autres vies que les leurs : épouse de, mère de, ou grand-mère de. Ce livre leur rend hommage et s’attache à leur confier le premier rôle ».

Anne-Marie Thomazeau

Le Salon du Livre Métropolitain a eu lieu du 25 au 27 octobre à la Citadelle et au Pharo, Marseille

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