Premier roman de Stéphane Signoret, One Way or Another est un voyage hallucinant dans le New York punk-rock des années 1970
Comme One way or another, titre de la chanson du groupe Blondie – qui donne son nom à ce roman –, d’une manière ou d’une autre, tous les chemins mènent à New-York pour Tom, le héros de cette aventure. Son rêve de devenir une rock star s’est fracassé lors d’un passage éclair et raté dans « la ville qui ne dort jamais », des années plus tôt. Désormais quadragénaire désabusé, il tente de recréer dans son magasin de disque baptisé « Little Apple » un sanctuaire dédié à la Big Apple fantasmée. Les murs de son magasin racontent son obsession : portraits de Paul Auster et de Jean-Michel Basquiat, affiches de Taxi Driver, sérigraphies de soupes Campbell signées Warhol. Dans les bacs s’alignent les vinyles du Velvet Underground et de Lou Reed. Mais Tom déprime, réalisant soudain qu’il est passé de l’âge des projets et du « tout est possible » à celui des regrets et du « trop tard ».
Téléportation salvatrice
Une nuit, victime d’une agression, Tom se retrouve projeté dans le New York des années 1970, très exactement en 1974. Ce dispositif narratif, simpliste mais redoutablement efficace, permet à Stéphane Signoret de nous transporter dans une ville alors au bord du gouffre. Les services publics ne fonctionnent pas, les rues sont envahies par les SDF, les rats et les toxicomanes, le Bronx et Harlem sont des zones de non-droit où la violence et la drogue tuent. Pourtant, c’est précisément dans ce chaos urbain, que va naître l’une des plus extraordinaires ébullitions culturelles de l’histoire du rock.
République bohême
Nous voilà en soirée au CBGB, le club mythique fondé en 1973, devenu le berceau du punk rock américain. Sur sa scène défilent les Ramones en train d’inventer le punk à coups de trois accords rageurs, une Patti Smith mêlant poésie beat et fureur électrique, les Talking Heads, Debbie Harry et son pop-rock glamour. Avec Tom, nous couchons au Chelsea Hotel, ce bâtiment victorien de briques rouges du 222 West 23rd Street, sorte de république bohème qui a vu défiler Arthur Miller, Tennessee Williams, Jack Kerouac, Bob Dylan et Jimi Hendrix. Leonard Cohen y a écrit Chelsea Hotel #2 après sa rupture avec Janis Joplin. Dans un club, au détour d’un couloir de club nous croiserons même Andy Warhol, le grand prêtre du pop art dont l’esprit de sa Factory plane sur l’époque.
Stéphane Signoret sait de quoi il parle. Guitariste du groupe Pleasures, cofondateur du Lollipop, magasin de disque et lieu de concerts marseillais, il possède une culture encyclopédique sur cette époque mythique. Avec ses 120 pages publiées chez Melmac Cat, petite maison d’édition marseillaise mais oh combien prolifique, il file droit au but, comme un bon morceau de Tom Verlaine : précis, nerveux, sans détour. Cette lettre d’amour à New York 1974, pose aussi des questions : que faire de ses rêves non réalisés ? Est-il vraiment trop tard ? Et si une seconde chance se présentait, que ferions-nous ? En refermant le livre, on a comme une envie folle de ressortir nos vieux vinyles. Signoret a pensé à tout, en nous proposant sa playlist nostalgique et pointue et les liens QR code pour y accéder.
ANNE-MARIE THOMAZEAU
One way or another, Chronique rock new-yorkaise, Stéphane Signoret
Melmac Cat - 12€
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