Il y a quelques semaines, c’est le froid et le vent qui ont perturbé la représentation de Collapsing Land à La-Seyne-sur-Mer dans le cadre du festival Regards sur rue. Ce dimanche sur la Canebière, ce sont les rayons d’un soleil déclinant qui sont venus en partie aveugler les nombreux spectateurs venus assister au spectacle. Pourtant, à travers les rayons, c’est un spectacle aussi beau qu’impressionnant qui a été donné par la compagnie La Tournoyante de Simon Carrot. Une œuvre chorégraphique et circassienne bouleversant nos repères gravitationnels, agitant nos peurs, et nos certitudes.
90° au soleil
Beaucoup de monde s’est réuni sur la bas de la Canebière, entre le carrousel et le palais de la Bourse. Au milieu du pavé, une imposante scène est déjà installée. La structure, forgée par les Ateliers Sud Side, laisse deviner des vérins qui promettent de belles surprises à venir. À côté d’elle, un set de piano/machines va assurer la partie musicale en live. Et c’est d’ailleurs sur un vrombissement de basse que s’ouvre Collapsing Land. Cachés sous la scène, les artistes font vibrer la structure, puis montent, un à un ou deux par deux et entament le ballet. Les premiers gestes chorégraphiques sont tantôt lents, tantôt rapides, toujours très dessinés. Mais la première surprise apparaît quand les gestes deviennent de moins en moins naturels. Quand le danseur se penche d’un côté ou d’un autre, que la gravité – malgré toutes les séances de gainage possibles – ne pourrait laisser passer. L’astuce réside sous les pieds, les danseurs ont dans leurs chaussures des aimants, qui seront actionnés tout au long de la pièce par leurs partenaires de jeu, cachés ou non sous la scène.
Puis la structure se met à s’incliner. D’abord de quelques degrés, puis beaucoup plus franchement, et jusqu’à 90°. Pendant tout le spectacle, les danseurs·euses se joueront de l’inclinaison, d’une performance physique et technique qui ne gâtera que très peu la cohérence artistique. Car dans Collapsing Land, outre le visuel frappant – et la musique électro de bon ton – il faut aussi y voir l’allégorie d’un monde à la dérive, d’un sol qui se dérobe sous les pieds, et de l’opiniâtreté de l’espèce humaine à vouloir le dompter. D’ailleurs, la scène finale montrera tous les danseurs au sommet de la structure totalement inclinée. Les optimistes y verront la réussite de l’être humain face à l’impossible, les pessimistes la folie d’une espèce bien heureuse de dominer un monde pourtant à l’envers.
Du Bleue plein les yeux
Collapsing Land était le point final d’Au bout, la mer ! Bleue qui a réuni sur la Canebière des milliers de personnes – malgré la concomitance avec La voie est libre plus loin sur la Corniche. À l’initiative de la mairie des 1er et 7e arrondissements et produite par Karwan, cette journée consacrée aux arts et à la science autour des enjeux environnementaux, a proposé une multitude de rendez-vous : les lettres d’amour à la mer clamées par l’artiste Louvalemonde, l’acrobate de l’identité Bahoz Temaux (Cie La Meute), le bateau origamique de Frank Bötler, ou une mise en lecture de témoignages issus du travail des équipes de SOS Méditerranée (des naufragés ou des bénévoles) par les élèves du Groupe Phare.
NICOLAS SANTUCCI
Au bout, la mer ! Bleue s’est tenue le 20 octobre sur la Canebière.