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Capter la jeunesse 

En quatre épisodes, la mini-série Rêves esquisse les contours d’une génération d’ados au temps des crises sanitaires et des menaces planétaires

Arthur Perole est chorégraphe. Artiste associé aux Théâtres en Dracénie, il entreprend en 2019 un projet de danse avec une classe du collège Ferrié de Draguignan. La réflexion s’oriente autour de la transe et de l’identité. Et pour la deuxième année du travail, il s’associe au cinéaste Pascal Catheland pour capter la parole de ces adolescents de 14 ans. Entre septembre 2020 et juin 2021, alors que la pandémie masque les visages et que la spontanéité des échanges est considérablement entravée, par un intelligent travail de maïeutique, les deux réalisateurs font naître et formaliser les pensées de 17 collégiens·iennes. Des 50 heures de rush tournées, ils font une série documentaire d’1h40. Ce sera Rêves, en quatre épisodes thématiques : Mad World, Les Amours, Comme un adulte, et Mon corps. Les deux Emma, les deux Julien, Alexandre, Sébastien, Louann, Sarah, Noa, Benjamin, Jade, Samantha, Gabriel, Louise, Nicolas, Angèle et Matteo… Des ados de la classe moyenne française.

Questions d’ados

Face caméra, sur fond blanc, chacun·e répond aux questions des réalisateurs : « Comment as-tu vécu le confinement ? Comment vois-tu le futur ? À quoi rêves-tu ? Qu’est-ce que l’amour ? Le Covid a-t-il changé la donne ? Comment t’évades-tu ? Qu’est-ce que c’est qu’être adulte ? À quel moment as-tu senti que l’enfance était finie ?  Veux-tu avoir des enfants ? Et si tu te décrivais ? Qu’est-ce que la transe ? » La parole individuelle de plus en plus intime devient chorale. Elle s’orchestre à deux, trois ou plus. Les ados sont saisis dans leur établissement varois : couloirs, consignes, salle de classe, réfectoire, cour de récréation. Les adultes à peine entraperçus disparaissent très vite. Les réalisateurs, toujours hors champ, semblent même, quand ils questionnent, baisser la voix. Pour mieux faire entendre celle de cette génération née en 2007-2008, se prenant la crise sanitaire, en pleine adolescence,  consciente des tourmentes écologiques et économiques à venir. Jeunesse connectée, qui fantasme parfois le passé sans réseaux de leurs grands parents, mais ne peut se passer des applis. Plus mûre et plus lucide que certains voudraient le croire. Globalement pessimiste mais capable de rêves et d’espoirs. Moments statiques entrecoupés par la danse des jeunes corps sur de la musique techno, dans une la fête costumée, pailletée et nocturne. Des corps en trans(e)formation, dont on voit les perceptibles changements au cours de l’année de tournage.

Avec les idées de passage, de traversée, de métamorphose, de péril, d’inquiétude et d’exaltation, qui s’y associent, le mot « transe(s) » aurait pu titrer le film. Rêves lui a été préféré pour son potentiel de projection. Rêvons donc.

ÉLISE PADOVANI

Rêves, de Pascal Catheland et Arthur Perole
En salles le 29 novembre
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