« Nous vivons une période exceptionnelle, une période dans laquelle on en appelle à la démocratie et à l’État de droit contre des décisions de justice. Une période dans laquelle on bombarde continuellement des populations civiles en prétendant résoudre des conflits.
Une période pendant laquelle une austérité budgétaire sans précédent empêche de faire fonctionner dignement les services publics de la santé, de l’éducation ou de la culture. Une période où on se retrouve comme sidérés face à cette actualité ultra-violente.
Précisément dans ce moment, face à l’obscurantisme, l’autoritarisme et la banalisation des idées d’extrême droite, la culture devrait nous servir de boussole. Or cette dernière est violemment mise en péril. Personne ici, de son vivant, n’a vécu de coupes budgétaires aussi drastiques que celles qui ont lieu actuellement.
Nous sommes dans un lieu exceptionnel où fut inventée et expérimentée la culture de service public par un des pionniers du théâtre national populaire, Jean Vilar. Citons-le, juste pour le plaisir « Le théâtre [et par extension la culture] est une nourriture aussi indispensable à la vie que le pain et le vin. La culture est donc au premier chef un service public, tout comme le gaz, l’eau, l’électricité ».
Nous sommes nombreuses et nombreux à partager cette conviction. Les arts et la culture ne sont pas un lien comme les autres, ils ne doivent pas répondre à la logique du marché, de l’industrie ou de la rentabilité. Pour garantir la diversité des œuvres et développer la pratique artistique nous devons défendre avec force la nécessité d’un service public de la culture et du spectacle vivant.
Qu’en est-il dans notre territoire ?
Dans le cadre de Terre de Culture 2025, la ville d’Avignon consacre un budget annuel particulièrement important à la culture. Le Grand Avignon, quant à lui, a voté un budget de culture à la hausse cette année et le département du Vaucluse a rassuré le secteur en maintenant finalement sa dotation au niveau de l’année précédente.
Mais dézoomons un peu. Cette année, une baisse de 7,7% du budget de la culture a été votée par la Région Sud. Petite joueuse, comparée à la région Pays de la Loire, et ses 73% de baisse ! Christelle Morançais est élue tronçonneuse d’or de l’année 2025 [Lire ici].
Vous pouvez, collectivement, ne pas l’applaudir, sans oublier Kléber Mesquida, tronçonneur d’argent, le président du Conseil départemental de l’Hérault qui reste sur le podium : il était parti sur un chiffre record de 100% de baisse mais a dû se contenter de 25% suite à la forte mobilisation des travailleuses et des travailleurs.
Et que dire des 150 millions de baisse dans le budget du ministère de la Culture qui sont annoncés pour 2025 et sont accompagnés des 2,5 milliards d’économies demandées par l’État aux collectivités territoriales ?
Alors, nous aimerions réaffirmer à Rachida Dati que la culture est essentielle, car c’est notre bijou et nous savons que madame la ministre aime ça… la culture.
Quant à notre ministre de l’Éducation nationale, madame Borne, si elle cherche des idées innovantes pour permettre aux plus jeunes élèves de trouver la voie, nous lui proposons non seulement de dégeler la part collective de la culture, mais également de l’étendre… jusqu’à la maternelle ?
Plus sérieusement : nous sommes des centaines de milliers d’artistes, techniciens, personnels administratifs et d’accueil à œuvrer collectivement pour que le spectacle soit un bien commun. Derrière les œuvres, il y a des professionnels engagés qui continuent, malgré les difficultés actuelles, à faire vivre ce projet politique essentiel.
Que vont devenir nos métiers ?
Que dire à tous les jeunes qui rêvent encore de devenir artistes, techniciens, techniciennes du spectacle vivant ? Que les conditions de travail sont de plus en plus précaires ? Que les plannings se vident ? Que malgré l’inflation, les salaires n’augmentent toujours pas ?
Qu’aujourd’hui, financer une création est devenu un parcours du combattant ? Car oui, c’est la réalité pour une grande partie des travailleurs et des travailleuses de la culture, l’avenir devient moins désirable que le passé. Et nous n’avons pas envie de dire que c’était mieux avant.
Nous voulons crier « ce sera mieux que demain ».
Pour que ce soit le cas, voici nos revendications :
Refinancement immédiat des services publics de l’art et de la culture.
Préservation, sanctuarisation et prolongement du Fonpeps.
Abrogation de la réforme de l’audiovisuel public.
Et pour aller plus loin : engagement financier de l’État dans les écoles d’art territoriales, et entrée des artistes-auteurs dans la caisse commune de l’assurance chômage.
Pour que la culture ne devienne pas un privilège mais demeure un droit accessible à toutes et à tous, restons mobilisés. »
Jérémy Bourges et Marie Hurault, CGT spectacle de Vaucluse
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