Aller aux 7 clous, c’est forcément rencontrer le propriétaire des lieux : les expositions se déroulent dans le loft de Patrick Raynaud, rue de Crimée, au bas du boulevard National, et il faut prendre rendez-vous avec lui pour les visiter. Cet ex-artiste et ex-directeur de plusieurs écoles d’art continue ainsi à partager son goût pour l’art, la transmission et les rencontres, en organisant (et finançant) des expositions qu’il invente, quand ça lui chante. Et en l’occurrence, I am Mehdi : Mehdi est un jeune voisin de Patrick Raynaud, fréquentant ses vernissages.
S’intéressant depuis longtemps à l’art et à la mode, et sollicitant même de son propre chef certains photographes et artistes qu’il admire pour poser pour eux (Pierre et Gilles, par exemple). Sa façon à lui « d’être artiste », discrètement, car sa famille, dont il dépend pour tout, a un rapport plus qu’hostile à cette passion. C’est ainsi que Patrick Raynaud a eu l’idée d’imaginer cette nouvelle exposition chez lui : non pas d’un artiste, mais d’un modèle. Et de demander, en plus des images de Mehdi qui existaient déjà, à des artistes ami·e·s d’en faire d’autres.
Faux désordre
Les photographies, reproduction de peinture et dessins de tous formats sont affichés directement sur les murs, distribués dans un faux désordre. Proposant des jeux de regards, des rapprochements d’attitudes, de poses, d’échos formels entre archives personnelles et œuvres. Crâne rasé sauf le dessus, oreilles décollées, grand front, grand yeux, nez aquilin, bouche pulpeuse entourée le plus souvent d’un bouc barbe, petit gabarit, svelte et musclé, Mehdi y figure en gros plan, en pied, de profil, de face, en plongée ou contre-plongée, portraits ou buste. Il ne sourit jamais, est quasiment toujours seul et, lorsque son regard n’est pas tourné vers l’intérieur, semble habité par un doute, une question, une tristesse.
Tout en mettant en valeur son visage et sa musculature, quelques artistes s’amusent à le mettre en scène dans des clichés marseillais ou orientalistes (Pierre et Gilles, Alix Temmelin), confrontent sa masculinité et sa féminité (Robert Escalera, Sofiane Vincent), le sculptent dans des ombres et lumières méditerranéennes (Marc Antoine Serra, Mathias Cassado Castro), ou le saisissent dans des noirs et blancs brutaux ou délicats (Julian Johannes Olbrich, Mr Collodion, Arnaud du Boistesselin). On le quitte, allongé sur le parquet des 7 clous, photographié par André Mérian, le long du mur, habillé de noir, main sous la tête, désœuvré, regard tourné vers le plafond.
MARC VOIRY
I am Mehdi
Jusqu’au 15 avril
Les 7 clous,Marseille
06 80 57 29 84
septclousamarseille.com