Les détails, le premier roman de la journaliste suédoise Ia Genberg, livre un étonnant portrait des années 1990 qui, par certains aspects, semblent déjà bien loin de nous
Ia Genberg propose le récit intimiste d’une femme qui revit plusieurs épisodes de sa vie à Stockholm. Elle évoque les quatre personnes qui ont été les plus importantes pour elle et composent ainsi quatre moments forts comme autant de projecteurs sur des parties effacées. Elle semble laisser venir les souvenirs dans le désordre, sans chronologie, accueillant les images, feuilletant des livres, à la recherche des traces plus ou moins appuyées des « méandres du temps. » Elle évoque la bande d’amis aux portraits pleins de justesse et d’humour, le parti-pris d’opposition aux règles de la société, les concerts et les fêtes. Elle se remémore l’époque des bottins de la Poste dans lesquels on pouvait retrouver les adresses des gens qui avaient un téléphone chez eux – et seulement ceux-là – car les autres étaient introuvables et perdus. L’autrice relate donc des modes de vie qu’elle a elle-même pratiqués, une époque où l’on vivait sans téléphone portable et sans internet, et où l’on entendait le clapotis des machines à écrire, si caractéristique. Plus près de nous, Ia Genberg nous replonge dans la soirée inoubliable qui a marqué le passage à l’an 2000.
Vivre le présent
L’autrice nous propose une façon aléatoire d’organiser le temps et s’interroge sur les empreintes laissées par les gens seulement croisés ou aimés, puis perdus. Ainsi les objets, les vêtements, les livres occupent-ils une place particulière dans ses souvenirs, des « détails » qui donnent son titre au roman. Au point que ceux-ci cachent parfois l’essentiel, ou du moins le floutent. Mais la vie n’est-elle pas faite de ces petits riens qui accompagnent les moments forts et les rencontres constructives ?
CHRIS BOURGUE
Les détails, d’Ia Genberg
Le bruit du monde - 21 €
Traduit du suédois par Anna Postel