« Il y a un temps pour tout » ! Comme celui d’être une mère courage, ou celui d’accepter que le fils, un « enfant différent » ait grandi… Le temps d’accepter que le noyau fusionnel soit en train d’éclater. Mona (Laure Calamy) vient d’apprendre que son fils Joël (Charles Peccia-Galletto), atteint d’une déficience intellectuelle, qu’elle élève seule depuis trente ans, attend un bébé avec Océane (Julie Froger) également handicapée, qu’il a rencontrée dans un centre de travail spécialisé. La nouvelle de la grossesse d’Océane bouleverse aussi bien les parents d’Océane dont le père se demande si sa fille a été capable de « donner un consentement éclairé » que Mona qui entretient avec son fils une relation très fusionnelle. Océane et Joël n’ont aucun doute : ils veulent garder le bébé, affirment-ils à la psychologue qui leur fait passer un entretien.
« Je veux le bébé, c’est mon droit » dit frontalement Joël à sa mère, que cette situation désarçonne, d’autant que son fils ne lui en avait pas parlé. Sortie faire un tour pour oublier, elle rencontre un belge, Franck (Geert Van Rampelberg)… et c’est la première fois qu’elle arrive à vivre un moment comme si son fils n’était pas là. Mona a toujours fait croire à Joël que son père vivait dans l’Antarctique. Espérant sans doute le faire changer d’avis, elle l’embarque dans sa voiture pour l’y emmener. Une belle séquence sur une plage ou mère et fils se rapprochent jusqu’au moment où dans un restaurant face à la mer, il apprend qu’il est au bord de la Mer du Nord. Joël n’est pas dupe : « Tu ne me prends pas pour un con ? » Le cordon ombilical est en train d’être coupé…
Une grande Calamy
Si la relation mère-fils a été souvent traitée au cinéma, si le problème du handicap a été le sujet de beaucoup de films, documentaires et fictions, l’originalité de Mon Inséparable est la manière de dresser le portrait de cette mère aimante, excessive, pleine d’énergie mais aussi trop envahissante, trop protectrice, sans la juger. Laure Calamy est parfaite dans ce rôle, tour à tour d’une sobriété étonnante quand elle apprend la nouvelle, montrant son amour quand son fils a besoin d’elle, désespérée et prête à craquer devant les situations nouvelles qu’elle doit affronter, dont la mort de sa mère. Et aussi avec les yeux d’une femme qui va de nouveau croire en l’amour. Un mélange de fragilité et de force, de mélancolie et de joie de vivre. Toute une palette d’émotions. Une grande actrice.
On saluera aussi la prestation des deux jeunes acteurs Charles Peccia-Galletto et Julie Froger qui ont parfaitement interprété leurs personnages fragiles et surs de leur décision. Une mise en scène soignée et des images superbes : Mona et son fils à la piscine sous l’eau, symbole de leur lien et plus tard, Mona, seule, qui se « jette à l’eau » tout habillée, sous les yeux surpris de Franck, prête à vivre sa vie. Le choix de centrer le film sur ce personnage de mère courage, qui va redevenir femme, donne à Mon Inseparable toute sa force. Un premier film réussi et touchant d’Anne-Sophie Bailly – également coscénariste de Le Procès du chien, sorti récemment en salles.
ANNIE GAVA
Mon inséparable, d’Anne-Sophie Bailly
En salles le 25 décembre