vendredi 22 août 2025
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Marseille, du Nord au Sud 

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Fruit de quatre années de travail passionné, le double disque Légendes du Nord et Histoires du Sud, porté par l’Orchestre de Mandoline des Minots de Marseille (OMMM), est bien plus qu’un simple enregistrement musical, c’est un projet artistique, éducatif et citoyen.

Initiée en 2021 par le mandoliniste et compositeur Vincent Beer-Demander, épaulé à la direction par Catherine Arquez, cette aventure musicale fédère plus de 250 enfants âgés de 7 à 17 ans, issus des seize arrondissements de Marseille. Réunis chaque semaine dans leurs écoles, centres sociaux ou au sein du Conservatoire Pierre Barbizet, ces musiciens en herbe ont appris à manier l’un des instruments les plus méditerranéens qui soient : la mandoline.

Au fil des saisons, le répertoire s’est étoffé, les concerts se sont enchaînés, les rencontres ont fleuri. En novembre 2024, l’enregistrement en studio de ce double CD est venu concrétiser cette progression collective. L’album réunit quatre pièces de Vincent Beer-Demander, conçues pour orchestre de mandolines.

La première, Légendes du Nord, est un conte musical inspiré de sa rencontre avec Rachel Tolkien. Celle-ci fait partie de la quatrième génération de la famille du célèbre auteur du Seigneur des Anneaux. L’œuvre musicale va y puiser l’univers onirique des elfes, des nains, des chevaliers, des géants, des princesses et des démons de glace.

Festin musical

La deuxième pièce, Le Festin musical rend hommage aux communautés de la diversité marseillaise les plus représentées. On pourra se délecter avec bonheur des savoureux KeftaAlgerianaFiadona de BonifacioArarat d’ErevanCaviar de la mer Noire et Tiramisu du Panier

Viennent ensuite Trois portraits américains, dédiés aux mandolinistes Mike Marshall, Ricardo Sandoval et Hamilton de Holanda. Enfin, retour aux sources avec 7 couleurs, première des quatre créations de l’OMMM, donnée à l’été 2021 au théâtre du Merlan (devenu le Zef).

On retrouvera aussi sur l’album des amis et compagnons de route de l’orchestre comme Raphaël Imbert (saxophone), Claude Salmieri (piano) et Grégory Daltin (accordéon). La richesse sonore de l’ensemble, la fraîcheur de l’interprétation et l’engagement des jeunes musiciens impressionnent. On y entend non seulement des talents en devenir, mais surtout une volonté collective d’apprendre, de se rassembler, de créer. 

À l’heure où les politiques culturelles cherchent à renouer le lien entre création, éducation et territoire, Légendes du Nord et Histoires du Sud s’impose comme un modèle inspirant. Un disque à écouter, certes, mais aussi une histoire à partager, celle d’une ville qui fait de la musique un langage commun, entre le nord et le sud, entre enfants et artistes. L’album est disponible en ligne et dans plusieurs enseignes culturelles.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Légendes du Nord et Histoires du Sud, Orchestre de mandoline des Minots de Marseille.

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Les « fous » se posent à Marseille

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© Hervé Richaud

Jusqu’au 25 octobre à La Compagnie, Le Chemin des Fous présente quatre ans de production artistique par les membres accueillis au sein du Refuge Migrant.es LGBTQIA+ de Marseille (RML). Jeunes, émigrés, et queer, ils ont participé chaque semaine à des ateliers proposés par de nombreux artistes marseillais, pour créer cette exposition en partenariat avec RIFT, la Pride et le Festival de Marseille.

Sur des écrans plats, quelques-uns retracent leur périple sur une carte. Un parfum de lassitude plane face aux questions habituelles : « d’où viens-tu ? », « pourquoi es-tu parti ? », « pourquoi la France ? »… Certains le disent lors du vernissage : ils en ont assez de devoir justifier leur venue, leur présence, voire leur existence.

Dans des vidéos « submersives » projetées sur les murs d’une des salles, on entend le slogan : « Rien sans nous et sans nous rien », comme un écho aux pancartes de la première salle « Refugee Lives Matter », « Queer Lives Matter », puis « Lives Matter », tout simplement, car si les droits de certains ne sont pas respectés, le sont-ils vraiment pour les autres ?

C’est tout l’objet de l’association RML que d’offrir à ces personnes doublement marginalisées un espace de liberté d’expression. Le RML les aide en outre à gérer demande d’asile et recherche d’emploi, et a participé à la Pride, le 5, sur un char réservé.

GABRIELLE SAUVIAT

Le Chemin des Fous
Jusqu’au 25 octobre
La Compagnie, Marseille 

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Rencontres d’Arles

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© Adam Ferguson

Des dizaines d’expositions ont débuté le 7 juillet aux Rencontres d’Arles, autour du fil conducteur des « images indociles ». Parmi celles-ci, On Country à l’église Sainte-Anne, où une dizaine de photographes australiens, autochtones et non-autochtones, explorent les liens complexes à la terre dans ce pays marqué par deux siècles et demi de colonisation.

À l’église des Trinitaires, Futurs ancestraux, exposition où de jeunes artistes brésiliens passent au crible le passé raciste, colonial et homophobe de leur pays. 

À la Maison des peintres, un focus sur l’œuvre de la photoreporter Claudia Andujar. Et à l’église Saint-Blaise, Nan Goldin présente Le Syndrome de Stendhal, diaporama qui met en regard des images de chefs-d’œuvre de l’art classique, de la Renaissance et du baroque avec des portraits de ses proches et de ses amours.

Jusqu’au 5 octobre
Divers lieux, Arles et même ailleurs

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Mercredis du port

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Gratte Ciel Fuego © Alain Julien

Théâtre, cirque, art de rue, musique, ateliers, danse et apéros : les Mercredis du Port organisés par Le Citron Jaune sont de retour sur le port de plaisance de Port-Saint-Louis-du-Rhône, tous les mercredis du mois de juillet.

C’est la compagnie Gratte Ciel qui ouvre les festivités ce mercredi 9 juillet à 19h30 avec Fuego, et pour célébrer cette ouverture comme il se doit, ils ont mis les petits plats dans les grands : estrade, drapeau, feu d’artifice. L’occasion de retrouver la folie douce de cettecompagnie arlésienne, adepte des acrobaties aériennes explosives.

Un spectacle suivi à 21 h par un rendez-vous dance-floor avec le Mange bal, qui organise surle quai du Port une improbable rencontre entre bal folk et free-party, revitalisant clarinette et accordéon.

9 juillet
Quai du Port, Port-Saint-Louis du Rhône

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Fadas du monde

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Collectif Xanada © X-DR

Du 10 au 13 juillet, le Village des Fadas du Monde à Martigues propose une multitude de propositions artistiques et culturelles gratuites : de la musique, du théâtre, des sports, de la danse… 

Signalons côté concerts, le 10 juillet à 20h, une véritable machine à faire danser : Sekouss, c’est-à-dire douze percussionnistes au groove et à l’énergie plus qu’euphorisantes. Suivis à 22h par les Repris de justesse, groupe de reprises où passent notamment Jacques Brel et Iggy Pop. 

Côté spectacles, le 11 à 18h et 19h30 Radio 2000 Opus 2 par la Cie du Grand Hôtel, deux compères, techniciens d’électroménager, du genre embobineurs, vous attendent sur leur stand. Et à 22h30, Roadmovie sur place & sans caméra du Collectif Xanadou, l’histoire d’une voiture qui prend vie, fait grève et refuse de transporter qui que ce soit… 

Du 10 au 13 juillet
Base nautique municipale de Tholon, Martigues

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Billy Budd : mer agitée, désirs enchaînés

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The Story of Billy Budd, Sailor — Festival d'Aix-en-Provence 2025 © Jean-Louis Fernandez

Ted Huffman et Olivier Leith ont proposé à Aix-en-Provence en création mondiale, une adaptation en opéra de chambre de Billy Budd de Britten (1913-1976), œuvre elle-mêmeinspirée d’une nouvelle d’Herman Melville. Si cette production tient peu la comparaison avec la magistrale version originale avec orchestre, ce format, réduit, est cependant une bien belle réussite.

Cet opéra, exclusivement masculin, se déroule au XVIIIe siècle, à bord d’un navire de guerre britannique, L’indomptable, régi par des lois morales où émotions et désirs n’ont pas droit de cité. Britten, qui vit alors son homosexualité dans une Angleterre conservatrice où celle-ci est encore criminalisée, trouve ici un terrain d’expression symbolique.

Tragédie du non-dit

La force de cette pièce réside dans la dynamique entre trois personnages : le jeune Billy, d’une beauté et d’une innocence lumineuse, interprété par Ian Rucker, baryton à la voix claire et souple qui incarne le mousse désarmant, marqué par un bégaiement, illustrant, latragédie du non-dit, de la parole empêchée, de l’amour réprimé. 

Celui-ci est l’objet d’un désir trouble de la part de Claggart, capitaine d’armes, interprété avec une noire intensité par Joshua Bloomer. Ce dernier, incapable d’assumer l’attirance qu’il éprouve pour Billy préfère fomenter sa perte. Son aria central O beauty, O handsomenessgoodness! déploie une interprétation radicale, celle d’un personnage rongé par la frustrationqu’il détourne en haine.

Face à eux, le capitaine de navire Vere, campé par Christopher Sokolowski, semble droit dans ses bottes. Mais sa voix trahit l’ambiguïté. Il incarne cette figure du témoin déchiré entre sa fonction et sa tendresse pour Billy. Son grand monologue final, après l’injuste condamnation à mort de Billy, le montre hanté par la culpabilité de celui qui, lui non plus, n’a pu ni dire, ni sauver.

Le sommet émotionnel est atteint par Billy in the Darbies, solo de Billy juste avant son exécution, porté par le phrasé juvénile, presque enfantin de Rucker. Cette acceptation paisible de la mort, servie par la mise en scène, donne à Billy une dimension christique.

Si le livret, coécrit par Britten et E.M. Forster, n’évoque jamais explicitement l’homosexualité, tout le suggère. Ce « sous-texte » devient aujourd’hui central dans les lectures contemporaines. Cette création l’assume avec justesse et élégance. Soixante-dix ans après sa création, l’histoire de Billy Budd ne cesse de résonner.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Spectacle donné le 5 juillet au Théâtre du Jeu de Paume, dans le cadre du Festival d’Aix-en-Provence.

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Ayo : la musique est politique

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AYO © Sophie KOELLA

Zébuline. Dans Mami Wata, votre septième album, il est question d’eau, et de féminité. 
AyoOui, je l’ai dédié à l’océan et à la féminité, Mami Wata, c’est une déesse dans la religion yoruba, qui est aussi ma tribu et celle de mon père [au Nigéria, ndlr]. En tant que mère de trois enfants, je dis toujours que la vie commence dans l’eau, quand on est enceinte, c’est comme si on avait un océan en nous et pour moi c’est assez symbolique. Aussi, je parlais de féminité, il y a une chanson qui s’appelle Woman, qui donne une voix aux femmes qui n’en ont pas, qui ne sont pas entendues. Pour moi, c’est très important d’être solidaire avec une sœur, j’aime bien voir les femmes comme si nous étions toutes liées.

Il y a aussi un hommage à Mahsa Amini, l’étudiante assassinée par la police des mœurs iranienne. 
Oui, mais c’est aussi un hommage à toutes les autres femmes qui se font tuer par le régime iranien. C’est Mahsa qui m’a inspirée, c’est grâce à elle que j’ai fait des recherches sur ce sujet et tout ce que j’ai trouvé m’a tellement brisé le cœur. On est en 2025, et on parle encore de pays où certains n’ont pas le droit de s’exprimer ni de porter ce qu’ils veulent… On doit être tous ensemble, on ne doit pas faire comme si on ne voit pas ce qu’il se passe ailleurs. On ne peut pas dire que ça ne nous concerne pas. 

Vous parlez aussi des violences domestiques et sexuelles dans votre album, pour vous c’est important d’évoquer ces problématiques à travers la musique ? 
Très important. Je crois même que l’on connait tous quelqu’un qui a vécu ou qui a eu des problèmes à la maison… c’est presque normal. Il y a beaucoup de femmes qui se font violenterpar leur mari… alors, j’essaye trouver une façon de parler de ces sujets sans être trop dans le négatif. 

Vous parliez de cette inspiration de la culture de votre père, vous êtes né en Allemagne, est-ce une manière de vous reconnecter avec vos racines nigérianes ?
Je dis toujours que c’est presque comme si je n’ai pas vraiment besoin de me reconnecter à mes racines. Je suis née et j’ai grandi en Allemagne, mais il n’y avait pas un jour où quand j’allais à l’école je n’entendais pas les insultes racistes de la part d’autres enfants. On ne peut pas être déconnecté de nos racines, c’est plutôt l’opposé en fait, on se connecte encore plus. Aujourd’hui, je me sens comme une citoyenne du monde avec tous les endroits où j’ai vécus, les gens que je vois et tout ce que j’ai fait.  

C’était difficile pour vous en tant qu’artiste féminine afrodescendante de vous faire une place dans la scène musicale ? 
À mes débuts en France, on m’a dit « ah non, nous on a déjà un artiste noir », donc ils n’ont pas voulu me signer alors qu’on ne va jamais dire « j’ai déjà un artiste blanc ». Ça m’a choqué à l’époque. Aujourd’hui, je ris de ça, mais ce n’était pas facile, et je suis contente de voir qu’aujourd’hui ce n’est plus comme ça. 

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR LILLI BERTON FOUCHET 

Les Nuits d’Istres 
Du 7 au 11 juillet 
Pavillon de Grignan, Istres

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Katerine et Kompromat prennent le Large

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Philippe Katerine @ Arthur Lacube

La pérégrination vers le Théâtre Silvain offre au festivalier une balade en bord de mer, et même la possibilité d’un avant-plouf, qui par le temps caniculaire qu’il faisait pendant le festival, était tout sauf un luxe ! 

L’écrin, amphithéâtre tout de pierres (chaudes), sera d’ailleurs l’objet d’un « c’est mon premier amphi ! », scandé sur scène par la magnétique Rebeka Warrior, qui s’y produit le jeudi 26 avec son projet Kompromat. Raison probable au guichet fermé ce soir-là, et à une excitation générale du public, à qui l’admiration pour le duo Warrior/Vitalic aura permis quelques heureuses découvertes, puisque le festival proposait chaque soir deux artistes de moindres renommées à côté de ses têtes d’affiche (La Flemme et Def Mama Def notamment).

La nuit (enfin) tombée, Kompromat entrait en scène, devant un public massé. Si le groupe est apprécié pour son univers froid, Rebeka Warrior a ce don rare d’attraper tous les regards, tous les sourires, et de chauffer la foule à coup de générosité scénique naturelle. En tout, une heure d’une techno affûtée ornée de textes tantôt prophétiques, tantôt militants. La chanteuse passera même un long moment à chanter depuis les bras tendus de ses fans d’auditeurs, leur demandant l’autorisation de se lever sur leurs mains. Un show ébouriffant, donc, dont beaucoup sortiront sonnés, et frustrés d’être lâchés dans la nature dans cet état. 

Phil good

Place ensuite à un autre temps fort de cette édition 2025 : Philippe Katerine. Quel que soit la connaissance de ses projets ou l’amour qu’on lui porte, on ne peut que lui reconnaître un grand art du spectacle. Bien sûr, les changements de costumes plus farfelus les uns que les autres – on le verra quasiment nu, en princesse gonflable, en boule géante… – et la scénographie spectaculaire y sont pour beaucoup. Ici, la présence d’une excellente formation musicale, que l’on devine très soudée, ajoute au show une dimension mélomane bienvenue, et sublime la prestation de l’ovni adulé. 

Car cet ovni-là fait preuve d’un partage avec le public qui semble être unique, installant une complicité qui donne à tous l’impression de le connaître depuis des lustres. Un concert comme une pause joyeuse, rêve absurde, ou pamphlet léger. Et, à l’écoute, on se rend compte sans problème que le bougre est bien meilleur chanteur que ce qu’il essaye de nous faire croire. 

LUCIE PONTHIEUX BERTRAM

Le festival Au Large se tenait du 26 au 28 juin 2025 au Théâtre Silvain, Marseille.

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Un tourbillon d’humanité signé Mehdi Kerkouche

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© Julien Benhamou

Une communion en mouvement. C’est l’expérience que l’on vit avec 360Mehdi Kerkouche bouscule les codes traditionnels du spectacle vivant. Ici, pas de scène frontale, pas de gradins ni de quatrième mur : les huit danseurs évoluent au centre d’une tour placée sur une scène circulaire, surélevée au milieu du public. Une scénographie à 360 degrés. Ce dispositif place chacun sur un pied d’égalité – danseurs et spectateurs –  tous debout, libres de se mouvoir, d’observer, ou même de danser.

Avec Mehdi Kerkouche, le public n’est pas passif. Il vit l’expérience en même temps que les interprètes. Cette proximité, renforcée par les intrusions régulières des danseurs dans la foule, transforme la représentation en expérience collective. La musique de Lucie Antunes, mêlant textures électroniques et sons organiques, électrise le corps. Fumée et lumières stroboscopiques, le spectacle flirte parfois avec l’énergie d’une rave, d’une transe où l’humain se célèbre dans ce qu’il a de plus instinctif.

Vibrer ensemble

Dans cette œuvre sans narration linéaire, ce sont les émotions qui guident. Colère, euphorie, tendresse ou joie : chaque tableau est une image à ressentir. Dans une scène, deux danseurs tournent autour de la tour comme les aiguilles d’une montre. L’un marche, l’autre court. Un moment suspendu qui résonne comme la métaphore du temps qui passe, renforcée par le passage du jour à la nuit pendant la représentation. 

360 ne raconte pas une histoire, cela raconte l’humanité – dans ses conflits (des danseurs se battent et tombent au sol), dans sa beauté (la plateforme qui tourne sous l’effet des corps), et dans sa capacité à vibrer ensemble. Chaque applaudissement devient impulsion. Chaque vibration, langage. Une œuvre sensorielle, où le chorégraphe transforme la danse en purgatoire collectif, en miroir de nos existences.

MANON BRUNEL 

Spectacle donné du 25 au 27 juin au Centre de la Vieille Charité, dans le cadre du Festival de Marseille.  

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Année blanche

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Sept Prix Nobel d’économie, dans une tribune publiée dans Le Monde, rappellent que les milliardaires français possèdent 30% du PIB national, qu’ils n’ont jamais été aussi riches et que, grâce à des optimisations fiscales, ils contribuent très peu au budget de l’État. Ils exhortent à rééquilibrer le budget de l’État par une taxation des milliardaires.

Mais le gouvernement s’oriente plutôt vers l’idée d’une année blanche : en 2026 on gèle tout, les salaires et pensions, les dotations aux collectivités territoriales, les bourses, les allocations, primes d’activité et minimas sociaux, qui ne sont plus indexés sur l’inflation. On récupère ainsi quelques milliards de plus de la plus inégalitaire des façons : en dépouillant davantage les plus pauvres et les plus fragiles.

Pendant ce temps, la planète brûle, les incendies dévastent nos vies, la santé mentale et physique des Français se dégrade, et nous plongeons dans un avenir obscurci où la perspective de cette année blanche prend des allures de spectre menaçant. Nous allons manquer d’enseignants, de lits d’hôpitaux, de suivi psychiatrique, d’aides à l’emploi, au logement, d’aides sociales, de crédits pour la recherche, pour l’université, pour les étudiants, les réfugiés, les maltraité·e·s, les retraité·e·s, pour la transition énergétique, pour la protection du vivant.

D’or et d’argent

La ministre de la Culture représente parfaitement cet effort demandé aux plus démunis par un monde affichant son outrecuidante fortune : elle annonce 6 petits millions supplémentaires pour le spectacle vivant. Veut-elle ainsi déminer une fronde contre sa venue dans les festivals, et l’appel au boycott de la CGT spectacles ?  

Mise en examen pour « corruption passive » dans l’affaire Carlos Ghosn, elle vient de perdre son procès en diffamation contre Aurélie Filippetti, n’a pas déclaré 420 000 euros de bijoux (une paille) dans son patrimoine, et semble, d’après Complément d’enquête, avoir reçu 250 000 euros d’honoraires de GDF au moment où elle défendait l’industrie gazière au Parlement européen. Et  s’est attaquée violemment, en direct, à un journaliste qui osait l’interroger à ce propos. 

Mais si sa réforme de l’audiovisuel public n’est pas passée, elle reste aux commandes d’un ministère dont tous les dispositifs, tous les élans sont à l’arrêt. Qui saupoudre un plan camping, un plan ruralité, une restauration du patrimoine religieux… mais laisse les réseaux labellisés face aux résultats de 12 années blanches : sans indexation de leurs subventions sur l’inflation importante des coûts, sans rééquilibrage entre Paris et le reste du territoire. Une année blanche qui viendra s’ajouter aux baisses des dotations d’Etat aux collectivités, poussées à les répercuter sur les crédits culturels.

Défendons nos couleurs

Le temps du refus est advenu. Jamais le rainbow flag et toutes les déclinaisons LGBTQIA+ n’auront mieux agité leur résistance colorée que pour la Pride marseillaise historique du 5 juillet, destinée à « Briser la vague réactionnaire ». Jamais la diversité, la puissance, la fréquentation optimale de nos festivals ne se sera opposée avec tant de force aux accusations délirantes d’élitisme, de wokisme et de dispendiosité. 

Face aux années blanches et à la noirceur du monde, imposons nos couleurs.

AgnÈs Freschel


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