vendredi 11 avril 2025
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Perdus hors du servage

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cerisaie
PHOTO LA CERISAIE - TDC © Gilles Layet

Janvier 1904. Tchekhov, atteint de tuberculose, sur le point de mourir, écrit La Cerisaie. Le servage, esclavage à la russe, est aboli depuis 40 ans à peine et la Révolution de 1905, qui dotera le pays de sa première Constitution, se prépare. Depuis un an les Mencheviks, qui défendent un Parti communiste populaire et rural, s’opposent aux Bolcheviks. Tchekhov écrit une comédie depuis sa campagne, et s’étonne que Stanislavski mette en scène comme un drame ce qu’il a conçu comme la caricature d’un vieux monde en train de sombrer, sans la tendresse de ses drames précédents.

Car on y retrouve les personnages typiques des grandes pièces que Tchekhov a écrites depuis 10 ans. Comme dans Oncle VaniaLa Mouette et Les Trois Sœurs, des aristocrates désargentéset esthètes se repaissent dans l’inactivité, un oncle sans sexualité (homosexuel ?) aime ses nièces, entouré d’anciens serfs devenus moujiks puis marchands enrichis, de serviteurs plus ou moins zélés ou ridicules, et d’un intellectuel, docteur ou précepteur, qui porte l’idéal révolutionnaire, féministe et écologiste. 

On y trouve aussi la jeune aristocrate idéaliste et sa sœur adoptée, terre à terre, qui gère le domaine. Et Lioubov, centre et cœur de la Cerisaie, femme « libre » pétrie de contradictions et de charme, jouée sans concession par Marion Coutris qui laisse éclater sa douleur mais aussi son mépris de classe.

Bien finir

Ainsi la fin de la Cerisaie est bien celle d’une comédie : elle s’ouvre sur un départ, un monde nouveau qui s’ouvre, une promesse explicite : « Pour commencer une vie au présent, nous devrons d’abord expier notre passé, en finir avec lui » explique le précepteur à la jeune héritière d’un servage aboli qui rode encore en coulisses. Lopakhine le capitaliste coupera les arbres, Trofimov le précepteur emmènera tout le monde à Moscou, loin de l’esclavage.

Serge Noyelle a fait le même pari de la jeunesse, confiant à de jeunes acteurs l’essentiel des rôles. Deux mondes coexistent, l’un baroque, fantaisiste et décadent, l’autre plein d’énergie et d’espoir, classique et raisonnable. Renonçant aux costumes, maquillages, décors loufoques et jeux macabres qui ont fait le succès des Nono, cette Cerisaie affirme qu’une génération nouvelle arrive, adepte du texte, sans amplification ni vidéo, sans adresse au public, confiante dans la puissance du répertoire théâtral, et la force du jeu. 

AGNES FRESCHEL

La Cerisaie
Jusqu’au 29 mars
Théâtre des Calanques, Marseille

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Résistances insulaires

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© Marie-Clémence Andriamonta-Paes : Laterit Productions : Cobra Films : Silvão Produções

Martinique, Guadeloupe, Réunion, Madagascar, Zanzibar, Maurice, Comores… Ces noms sonnent encore parfois comme des paradis exotiques mais africaines, océaniennes ou caribéennes, ces îles partagent le souvenir cuisant de l’esclavage et de la colonisation française ou britannique, qu’elles soient ou non, aujourd’hui, indépendantes.

Pour la première édition d’un festival aux objectifs ambitieux, l’association TaniMena propose  d’emblée une programmation qui fait converger les luttes féministes et postcoloniales, en organisant des projections de documentaires et fictions historiques, des débats féministes, des concerts militants. 

En ouverture le 29 mars, au cinéma La Baleine, le film Fahavalo de Marie-Clémence Andriamonta-Paes sur les insurgés de Madagascar en 1947 confronte témoignage des survivants et images d’archives de la répression sanglante (certainement 100 000 morts). Une projection suivie d’un débat avec la réalisatrice.

Le 31 mars, à la Cité de l’agriculture, une table ronde posera les fondements politiques du festival : il sera question de « Femmes, pensées décoloniales, mythes et spiritualités » dans le contexte des Caraïbes et de l’océan Indien avec une réalisatrice Anne Sophie Nanki, une poète Estelle Coppolaniet une romancière Marie Ranjanoro, modérées par une journaliste Maïne Alloui.

Une rencontre suivie par un concert de maloya en créole réunionnais de Sandra Richard, accompagnée par Audrey Attama et Luc Moindranzé. Étapes ensuite à Zanzibar, puis aux Caraïbes et aux Comores. Avec toujours, des œuvres et des paroles de femmes. Îliennes, en lutte. 

AGNÈS FRESCHEL

Îliennes
Du 29 mars au 13 avril
Divers lieux, Marseille

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Dans les lignes de Laurent Galland

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© XDR

Diplômé de l’École des Beaux-Arts de Montpellier en 1983, Laurent Galland a passé sa vie professionnelle dans le monde de la communication, de la publicité et du design. Depuis une dizaine d’années, il se consacre à ses recherches et productions artistiques à plein temps. Des peintures abstraites : « pas de représentations, mais des états d’être », où il réinvestit certains des processus qu’il a utilisés lors de ses activités professionnelles, liés au monde du print

Par exemple : pas de mélange sur une palette, mais un travail en couches de couleurs successives, directement sur la toile. Laurent Galland créé également ses propres pigments iridescents (qui ont la propriété de changer de couleur selon l’angle de vue ou d’illumination)qu’il applique sur fond noir, lui permettant de moduler des effets de densités, de transparences et de moirages.

Trames superposées

Répétitive 70 (radiale) – acryliques iridescentes sur toile –
100 x 90 cm – 2025

Aléatoirerépétitivediffractiondissymétriquecathodique, sont les titres génériques que Laurent Galland donne à ses peintures, dont une trentaine sont exposées depuis le 13 mars dans les deux salles de la galerie Zemma, accompagnées de deux ensembles de dessins. Utilisant souvent un format entre carré et rectangle (150 x 165 cm), généralement présentées en dyptiques, triptyques, leurs surfaces lisses présentent des trames de lignes parallèles plus ou moins serrées, qui se superposent, progressant en horizontales, courbes, ellipses, rectangles, demi-cercles. 

Bien que peintes à la main, à l’aide de rubans adhésifs, elles ne laissent rien voir des gestes du peintre : l’enjeu étant pour l’artiste de faire disparaître le corps du peintre, pour ne laisser apparaître que le corps de la peinture. Un corps tout en ondes colorées, vibrations, pulsations. Un espace-temps modulant ses profondeurs, en expansion douce, multidirectionnelle, invitant à la méditation. 

MARC VOIRY

Laurent Galland. Ligne médium et médiatrice
Jusqu’au 19 avril
Galerie Zemma, Marseille

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Homme libre, toujours tu chériras la mer* 

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Expositions Océans © Anthony Carayol - Ville de Marseille

2025 est en France « l’année de la mer », thématique nationale visant, selon le ministère de la transition écologique, à « maritimiser les esprits ». Nice accueillera la conférence des Nations Unies sur l’Océan en juin, et Marseille est naturellement dans le mouvement. À travers, notamment, une exposition en accès libre, qui débute au Muséum d’histoire naturelle. Réalisée avec le concours de l’Institut méditerranéen de biodiversité et d’écologie (IMBE) et l’Institut méditerranéen d’océanologie (MIO), elle cherche à faire reconnaître l’importance des milieux marins dans une ville littorale où, paradoxalement, la mer reste relativement méconnue.

Lors de l’inauguration, Aurélie Biancarelli, adjointe à la recherche de la Ville de Marseille, défendait avec fougue le partage des savoir scientifiques, comme c’est la mission du Muséum, alors que se renforce l’obscurantisme d’extrême-droite. « La science n’est pas une opinion, mais une méthode rigoureuse. (…) C’est un enjeu démocratique. Nier la chute de la biodiversité et le changement climatique ne les feront pas disparaître ! La Méditerranée concentre une pollution plus forte que partout ailleurs, particulièrement le plastique. »

H2O, CO2, O2… tous reliés pour exister

Il est donc étonnant que le comité scientifique de l’exposition ait voulu débuter le parcours sous l’angle de l’exploitation de la mer, raisonnement à l’origine des problèmes en question. D’emblée, des panneaux exposent les services que les écosystèmes marins rendent à l’humanité : séquestration du carbone, alimentation, matériaux de construction, médicaments, cosmétiques… Mettre ainsi l’accent sur les penchants utilitaristes de nos sociétés est un choix que Sandrine Ruitton, enseignante-chercheuse du MIO, justifie ainsi : « Il s’agit peut-être d’une vision anthropocentrée des écosystèmes, mais cela nous a semblé un bon moyen de convaincre les gens de leur importance ». Peut être faudrait-il faire davantage confiance aux visiteurs, en leur proposant de réfléchir au problème de fond, l’attitude prédatrice de l’espèce humaine qui déséquilibre la vie partout sur la planète ? 

D’autant que le reste de l’exposition remplit sa vocation de sensibilisation, à travers des messages fondamentaux. Mieux vaut préserver que restaurer, par exemple, comme on le voit dans le parc marin de la Côte Bleue, protégé depuis 1983, havre des mérous heureux. Fondamental aussi ce point sur le droit de la mer qui est trop éparpillé et manque de cohérence internationale, même si aujourd’hui l’encadrement de l’exploitation des milieux se fait plus strict. Si la prise de conscience se renforce, peut-être que le droit de la faune et la flore marine à une existence libre, dans des milieux naturels d’autant plus résilients qu’on les aura laissés tranquilles, sera reconnu ! Au grand bénéfice de tous les êtres vivants sur la planète, humanité comprise.

GAËLLE CLOAREC

* Baudelaire

Océans
Jusqu'au 13 juillet
Muséum d'histoire naturelle, Marseille

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Derrière le chanteur, l’auteure

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Album Mandy Lerouge © Anne-Laure Etienne
Album Mandy Lerouge © Anne-Laure Etienne

Et si les plus grandes œuvres musicales argentines avaient été composées par une femme, qui plus est… française ? C’est l’incroyable découverte faite par la chanteuse Mandy Lerouge. Derrière le succès du chanteur argentin populaire Atahualpa Yupanqui, on trouve un mystérieux compositeur du nom de Pablo Del Cerro, auteur prolifique d’une centaine de chansons. Mandy découvre que sa véritable identité est… Antoinette Pépin. Épouse du chanteur, elle est toujours restée dans l’ombre de celui-ci. Durant près de trois ans, Mandy Lerouge va mener l’enquête jusqu’à Cerro Colorado, village de la province de Córdoba en Argentine où est située la maison-musée d’Atahualpa Yupanqui.

Grâce à des carnets, des manuscrits et des partitions, la jeune française va découvrir l’œuvre inédite et inachevée de l’immense compositrice décédée en 1990. Ce travail de collectage, de recherche et de réinterprétation donne lieu à son deuxième album – le deuxième de la chanteuse – Del Cerro, petit bijou musical et vocal qui nous entraîne dans une douceur nostalgique sur les pas d’Antoinette, et à travers les grandes étendues sauvages des terres d’Argentine.

Profondeur dramatique

Il règne sur les treize chansons le souffle et le charme d’une poésie parfois désuète qui suggère, effleure. On la préfère dans le « dur », dans des chansons plus incarnées, plus ferventes, comme Los dos abuelosdont le phrasé, parlé-chanté d’une profondeur dramatique envoûte lorsqu’elle raconte l’histoire de ces deux grands-pères qui « galopent dans le sang, l’un, rempli de silence et l’autre, plutôt chanteur. »

Chanteuse et voyageuse, Mandy est née d’un père malgache et d’une mère française. Elle agrandi dans les Hautes-Alpes, s’est basée à Marseille et étanche sa soif de liberté dans des projets qu’elle développe au sein de la Compagnie Le Fil Rouge qu’elle a créée en 2018 afin de produire ses tournées et ses deux albums de manière indépendante, soutenue par une communauté de fans et de partenaires multiples. 

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Del Cerro, de Mandy Lerouge
Art Trouble

Une recette de cheffe 

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Beethoven-Wars
© X-DR

Laurence Equilbey étonnera toujours, allant sans cesse vers de nouveaux registres. C’est le cas avec ce Beethoven Wars, dans lequel la musique du grand compositeur sublime un manga digne de Star Wars projeté sur écran. Après son succès à la Seine Musicale, le spectacle est arrivé au Grand Théâtre de Provence ce 22 mars. 

La cheffe n’est pas venue seule. Elle est accompagnée de l’Insula orchestra qu’elle a créé et du chœur . Elle a imaginé ce spectacle avec le scénariste Antonin Baudry. Le film animé par vingt graphistes déroule une fresque épique imaginée d’après deux œuvres méconnues de Beethoven – Le Roi Étienne et Les Ruines d’Athènes. 

Terre des ancêtres

Sur une planète éloignée, deux enfants, Stephan et Gisèle, font face à la fin d’un monde dévasté. « Né avec la guerre, la guerre s’installa dans nos vies et y resta. J’allais devenir le roi Stéphan », introduit le hérosIssus de peuples ennemis, les deux enfants devenus des adultes balafrés et courageux se lancent dans une quête spatiale qui les ramènera sur la Terre, planète de leurs ancêtres depuis longtemps inhabitable ; l’occasion d’offrir au spectateur des paysages sous-marins avec poissons et cachalots et d’une Grèce antique enneigée dont les monuments tentent de percer derrière la jungle. 

Sur scène, cent musiciens et chanteurs donnent vie aux images. Les chœurs sont puissants, parfois martiaux, toujours dramatiques, tout comme la belle interprétation des solistes, la basse Mathieu Heim et la soprano Ellen Giacone, évoquant des statues fossilisées sous la glace. L’immense machine se déploie sous une direction implacable et exigeante qui se prête aux nécessités d’un orchestre qui, lié aux images, se doit d’être drastiquement en place. 

Au terme de batailles intergalactiques nos héros réussiront-ils à créer cette terre où « le flambeau de la paix éclaire et protège et sur laquelle nous cultiverons les arts et les sciences ?» Tous les codes du manga sont là avec cette vision manichéenne d’un monde où seul règne le bien ou le mal et qui saisit peu la complexité. Pour autant, ce « combat pour la paix » parle à la salle et en particulier aux 300 étudiants présents, invités par le Crous.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Beethoven Wars s’est tenu le 22 mars au Grand Théâtre de Provence.

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Un tour à Babel 

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Bia Ferreira © Jean de Peña

Marché aux plus

La singularité de Babel Music XP réside dans ses ses multiples facettes, et le très large programme imaginé par l’équipe de Latinissimo et Olivier Rey, directeur du festival. Ce « hub méditerrannéen des musiques mondiales » se concrétisait, pendant trois jours, en un salon installé à la Cartonnerie de la Friche Belle de Mai accueillant sur la période plusieurs milliers de professionnels ; les acteurs culturels mondiaux ont pu se rencontrer, s’informer, échanger et créer des projets communs.

Autour de ce centre névralgique s’articulaient une série de speed meetings par pays et tables rondes balayant les problématiques et enjeux actuels du secteur tels que la liberté de création, l’hybridation, l’accueil d’artistes étrangers, l’innovation, les marchés musicaux mondiaux… Un copieux programme de réflexion et de concertation plus que précieux en ces temps de replis identitaitres. 

Plus hybride était le format proposé le jeudi 20 à la Cité de la Musique, entre échanges et concert. Mise en abîme de la thématique du métissage musical, l’objet d’écoute et de réflexion était le projet d’Ablaye Cissoko et Cyrille Brotto ; magnifique alliance entre la voix envoûtante du griot de Saint-Louis du Sénégal et l’accordéon aux teintes valsées et populaires du multi-instrumentiste français. Ensemble, il créent un voyage ultra sensible sur le thème de l’exil et du déracinement. 

Interrogés par des chercheurs de l’Institut de Recherche et de Développement (IRD), ces deux artistes ainsi que la chanteuse marocaine Malika Zarra évoquaient à travers leurs expériences dans la musique, leurs rencontres ou leurs constats les apports mutuels des hybridations musicales.

Musiques d’ensemble

Autour de ce macrocosme musical était proposée une photographie des musiques mondiales via une longue série de showcases d’artistes et groupes aux nationalités, esthétiques et personnalités aux univers variés.

Ces formats courts se découvraient en itinérance en centre ville, jeudi 20 mars. L’Alcazar, l’Espace Julien et le Makeda se partageaient un public fait de professionnels badgés et d’auditeurs curieux. L’on salue particulièrement la présence scénique coutumière et toujours aussi intense de la chanteuse Casey, dans le projet métissé Expéka [lire encadré], le folklore galicien exalté et spirituel du duo espagnol Caamaño&Ameixeiras et l’ovni à double batterie Trucs

Vendredi 21, bien dans ses pénates (et pour la dernière fois), Babel Music XP proposait une deuxième soirée de concerts au Dock des Suds, dont nous pouvons citer la magnifique découverte de Bia Ferreira. « Femme orchestre », la musicienne et chanteuse, seule avec sa guitare, emplit l’espace visuel et sonore d’un prestation aussi charismatique que qualitative. Outre un don très clair pour le rythme – que Bia ne peut s’empêcher de slapper ou frapper sur sa guitare, entre deux phrasés musicaux –, sa voix profonde et habitée rejoignait ses engagements contre le racisme, pour l’égalité, l’éducation et la place des femmes qu’elle a défendus pendant ses prises de parole. Un grand moment. Notons aussi l’énergie solaire du groupe Kin’Gongolo Kiniata, venu de Kinshasa, et le trip-hop/rock (nostalgique) de la rappeuse sud africaine Yugen Blakrok

LUCIE PONTHIEUX BERTRAM

Le festival Babel Music XP s’est tenu du 20 au 22 mars à Marseille.
ExpéKa à l’Espace Julien

Ce 20 mars, le festival Babel Music XP passait aussi par le cours Julien. Au programme, un concert de l’excellent groupe antillais d’ExpéKa. Au départ, il y a la flûte de Célia Wa, délicatement rejointe par les percussions, dont le tambour ka frappé par Olivier Juste. S’ajoutent le sampler de Sonny Troupé, la basse de Stéphane Castry, le clavier de Didier Davidas. 

Au chant, bien sûr, Casey, illustre rappeuse, notamment connue pour la puissance de ses textes. Ce sera encore le cas ce soir, quand elle reprendra son morceau Chez Moi, dans lequel elle parle d’exil, et des réminiscences de la période esclavagiste. 
En français, en créole et au sifflet, les artistes en symbiose ont échauffé l’Espace Julien avecjazz, rap et gwoka. De quoi offrir au public venu du monde entier une belle diversité des sonorités caribéennes. 

LILLI BERTON FOUCHET 

Concert donné le jeudi 20 mars à l’Espace Julien, à l’occasion de Babel Music XP.

Laure Prouvost s’installe au Mucem

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Laure Prouvost Visual Arts, Artist Portrait. Portrait of artist Laure Prouvost by Gene Pittman, June 14, 2017. Part of the upcoming exhibition, Laure Prouvost, Medtronic Gallery (Gallery 7), October 12, 2017 - February 11, 2018. Laure Prouvost (French, b. 1978; lives and works in Antwerp) produces visually and aurally rich moving image installations in which she conflates reality and fiction, words and images, reveling in moments of mistranslation that open up new avenues for meaning. Narrated by the artist’s soft, seductive voice, and interspersed with spoken and written directives that often address and appeal to the viewer, her works confound expectations through a rapid-fire succession of moving image and sound. Recent presentations have featured immersive mixed-media installations that combine painting, sculpture, collage, drawing, and found objects alongside the moving image work. In conjunction with the new installation in the Medtronic Gallery, Prouvost will create a theatrical performance work commissioned by the Walker. Curators: Victoria Sung with Gwyneth Shanks. Laure Prouvost is made possible with generous support from the Andrew W. Mellon Foundation.

Artiste contemporaine et vidéaste française, distinguée notamment par le Turner Prize en 2013, représentante de la France en 2019 à la 58e Biennale d’art contemporain de Venise, Laure Prouvost a déjà montré certaines de ses créations à Marseille, notamment quelques-unes de ses vidéos au FID 2023, et deux phrases poétiques et politiques cousues sur les voiles de quai du bateau du festival Art Explora, en escale au Vieux-Port l’année dernière. 

De ce mois d’avril à septembre prochain, le Mucem l’a invitée à investir le fort Saint-Jean. Sous le titre Au fort, les âmes sont, elle y réactualise, au féminin, le mythe d’Icare : après s’être brûlé les ailes, il tombe dans la Méditerranée et, sous l’eau, se transforme en anémone-magicienne. Un conte comme « une ode à la mémoire, à la nature et à l’avenir, et contre la course au progrès et l’exploitation déraisonnable des ressources et des êtres qui caractérisent notre manière d’être au monde. » 

Les quatre installations qui s’appuient sur ce conte associent sculptures, objets, projections vidéo, sons (Icare, Us, Elle en haut de la tour du Roy René, Mire le Mirage chapelle du fort Saint-Jean, Sous les Flots les Âmes Sont salle d’exposition place du Dépôt, Into All That Is Here salle de la Casemate) et se visitent en accès libre, sans itinéraire imposé. À noter que Laure Prouvost est également invitée par les Musées de Marseille à investir la chapelle de la Vielle Charité (installation visible à partir d’avril) ainsi qu’à projeter l’un de ses films au [Mac] (visible à partir du mois de mai).

MARC VOIRY

Du 2 avril au 28 septembre 
Mucem, Marseille

Hispanorama : il n’y a pas que du cinéma  

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La réalisatrice Laura González, sur le tournage de Milonga © X-DR

Zébuline. En amont du festival, vous organisez une exposition autour du personnage de bande-dessinée Mafalda. Pourquoi ce choix ?
Monique Anfré. Chaque année, au festival Hispanorama, il y a la projection des films, deux par jour, le concert d’inauguration (là ce sera Raphaël Lemonnier & La Trova Project) et une exposition. Pour Mafalda, c’était son anniversaire, il y avait donc matière à exposition. Il y a donc deux parties, une série qui s’appelle Mafalda et l’environnement et la série Impair, une dizaine de dessins de presse de Joaquín Salvador Lavado, dit Quino, le célèbre dessinateur argentin. Chaque fois, on essaye de trouver un artiste en lien avec l’esprit hispanique, par exemple le photographe Salgado, il y a deux ans ou Jean-Michel Gassend, qui avait fait l’exposition Art visionnaire d’Amazonie. Même s’il s’agit d’un festival de cinéma, nous sommes en fait à la croisée des arts, on ne pourrait pas faire sans cela. 

Quels sont les invités pour cette 13e édition ?
Le jour de l’inauguration, le 29 mars, il y a Laura González, réalisatrice uruguayenne du film Milonga, elle sera aussi présente en débat. Le 30 mars, ce sera l’Argentin Mauricio Albornoz Iniesta, réalisateur de Una Cancion para mi tierra. Ensuite, le mardi et mercredi, ce sont des professeurs d’espagnol qui vont faire l’analyse filmique. Le 4 avril, il y a aura un échange avec Ève Giustiniani, spécialiste en études hispaniques.

Le rôle éducatif est au cœur de votre festival. 
Avec notre association Agissez dans votre ville, nous faisons des ciné-débats mensuels, autour de films récents sur un fait de société. Les professeurs d’espagnol de notre association travaillaient dans leurs cours d’espagnol sur le cinéma déjà, et c’est cela qui nous a entrainés vers ce festival hispanique. Les élèves de lycée sont sollicités pour créer l’affiche, via un concours au mois de janvier, ils étudient les différents films que nous allons passer et interviennent dans le cours du festival. Ils présentent oralement le synopsis des films, à chaque fois, il y a toujours deux élèves qui s’alternent, un en français, l’autre en espagnol. Donc pour eux c’est un exercice didactique et introductif, ils arrivent à s’exprimer devant un public. Enfin, il y a des élèves qui font des bandes-annonces pour le festival, on en sélectionne une qui passe régulièrement avant le début de chaque film. 

Pour terminer, pouvez-vous nous parler des thématiques des différentes diffusions ?  
Dans les films, beaucoup d’humanisme, des histoires femmes, de gens qui se décarcassent et puis des enfants qui cherchent à se dépatouiller dans la vie. 

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR LILLI BERTON FOUCHET

Hispanorama
Du 29 mars au 4 avril
Saint-Maximin-La-Sainte-Baume

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Joanne Leighton  : Danser le lac et la forêt

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THE GATHERING, Choregraphie et direction Joanne Leighton, Collaboration artistique Marie Fonte, Creation Bande Sonore et Musique originale Peter Crosbie, Creation Photographique et Video Flavie Trichet Lespagnol, Costumes Maite Chantrel, Lumieres et Scenographie Romain de Lagarde, Realisation scenographie Pierre Yves Loup Forest, Gaston Arrouy, le Grand R (La Roche sur Yon) le 3 mars 2025. Avec : Anthony Barreri, Stephanie Bayle, Lauren Bolze, Hippolyte Desneux, Marie Fonte, Flore Khoury, Elisabeth Merle, Maureen Nass, Sabine Riviere, Antoine Roux Briffaud (photo by Patrick Berger)

Joanne Leighton vit et enseigne en France, elle a dirigé le Centre chorégraphique national de Belfort puis installé sa compagnie WLDN à Paris, mais elle est profondément marquée par son Australie natale, et par la relation à une nature grandiose et vierge. 

Sa compagnie doit d’ailleurs son nom au Walden de David Thoreau, ce récit d’une Vie dans les bois qui depuis le XIXe siècle américain a posé l’idée d’un retour vers la nature. Les danseurs, avant d’aller sur scène, en lisent en confidence des extraits aux spectateurs, plaidoyer pour la simplification des besoins humains, éloge du temps pris à regarder les couleurs du lac, les formes des pierres, les liens avec la vie. 

Faire corps

L’écologie de Joanne Leighton n’est pas plus naïve que celle de Thoreau, elle est un projet de société en danse. Sur le plateau les interprètes ne cessent de faire lien, dessinant des formes avec les galets et les branches, faisant évoluer et vivre une forêt qui se déploie sur un rideau écran qu’ils tirent et qui pose un décor d’arbres, projections vibrantes des photographies de Flavie Trichet-Lespagnol. 

Les corps deviennent une entité qui bouge savamment, en silence, en produisant des sons percussifs, ou sur une musique (Peter Crosbie) qui répète ses motifs rythmiques, et les décale subtilement. Les séquences s’enchaînent, rapprochant les danseurs comme un groupe unique ou chacun danse pourtant différemment, formant des sous-groupes de quelques individus, jamais pourtant jusqu’à l’isolement, au solo. Comme les cellules fondamentales ils forment ensemble un corps qui les dépasse, dont ils ont une conscience commune. 

Un hymne à la vie, sans exploit ni performance, mais jamais minimaliste : c’est la robustesse de chacun qui s’affirme dans l’endurance, et le geste juste pour s’inscrire dans le corps commun. 

Agnès Freschel

Gathering a été créé au Zef, scène nationale de Marseille, les 18 et 19 mars, et joué au Théâtre de L’esplanade, Draguignan, en ouverture de L’ImpruDanse qui se poursuit jusqu’au 4 avril.

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