jeudi 21 août 2025
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Sorry, Baby : La vie, après

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Sorry, Baby d'Eva Victor @A24

La forêt, la mer, le charme bourgeois bohème d’une petite ville universitaire sans doute de la Nouvelle  Angleterre. De petites maisons archétypales. Lydie (Naomi Ackie) arrive de New York passer un long week end chez son amie Agnès (interprétée par la réalisatrice), prof de littérature dans l’université où elles furent étudiantes. Les deux trentenaires, pull oversize et mug en main, sur canapé ou en balade, parlent de sexe et du temps de la fac, plaisantent, rient : connivence qui exclut d’abord le spectateur, entraîné progressivement dans le cercle social et l’espace intime d’Agnès. Un cadre de comédie romantique américaine. Sauf que quelque chose cloche. Et que la joie des retrouvailles entre les deux amies se plombe par instants d’une lancinante gravité. Que l’humour des deux femmes achoppe sur le regard absent ou perdu d’Agnès, la crispation d’une main, un silence, une question inquiète de Lydie, l’allusion au suicide.

Les deux amies finissent leur doctorat sous la direction d’un même professeur Decker (Louis Cancelmi) dont la brillante et séduisante Agnès -admirée par Lydie, jalousée par une autre doctorante Natasha, est la préférée. Agnès est violée par ce prof qui fuit la justice et disparaît. Elle, demeure dans cette université, travaille dans les bureaux occupés autrefois par son agresseur, bloquée dans les lieux du crime et dans ce lendemain douloureux sans surlendemain envisageable. Elle étudie Lolita avec ses élèves, dont l’un d’eux dit qu’il trouve le texte, beau et dégueulasse. Lydie est partie, vit heureuse, va avoir un bébé avec sa compagne Fran. Agnès est seule, ne se voit pas vieillir, ni avoir un enfant.

Parler du viol ici n’est pas « divulgacher » le scénario qui repose essentiellement sur les séquelles profondes du trauma, sur la lente reconstruction d’Agnès, soutenue par l’amitié de Lydie, et par des rencontres chaleureuses. Rien n’est appuyé. Si l’agression est racontée, sans larmes, sans cris, avec une précision policière par la victime sidérée, comme détachée d’elle-même, elle n’est pas montrée. On reste dehors, devant la façade de la maison d’abord éclairée par le soleil d’après-midi, puis rougie par le couchant avant d’être plongée dans la nuit. La maison, le foyer, le refuge, ce qui protège et cache, ce qui délimite l’espace social et l’espace intime reviendront en motif récurrent. Lieu symbolique, comme la maison douce de la chanson d’Anne Silvestre – que la réalisatrice américaine ne connait surement pas, et qui parle aussi de viol, d’intrusion, de destruction. 

« Ce que je veux partager avec les spectateurs, c’est une émotion. Mon film est à la fois une fiction et une histoire très personnelle. J’ai voulu être la plus juste possible dans tout ce que je raconte. »  a déclaré Eva Victor. Star du web, connue pour ses tweets et vidéos humoristiques, sans se départir de l’intelligence du sourire, elle offre ici un premier film largement autobiographique qui puise sa justesse dans son expérience mais surtout dans la subtilité de sa mise en scène.

ELISE PADOVANI

Sorry, Baby, Eva Victor

En salles le 23 juillet

La jeunesse clôture le festival d’Aix en Provence

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Concert de l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée sous la direction d’Evan Rogister le lundi 21 juillet 2025 au Grand Théâtre de Provence. Soprano : Amina Edris. Festival d’Aix-en-Provence. © Vincent Beaume.

Fondé en 1984 à l’initiative de la Région Sud, l’OJM est devenu au fil des ans bien plus qu’un orchestre : un symbole de paix et de culture.Près d’une centaine de jeunes musiciens issus d’une vingtaine de pays -de l’Espagne au Liban, de l’Algérie à la Turquie- se réunissent chaque été à Aix pour cette aventure. Son directeur musical Evan Rogister en est fier : « En ces temps si difficiles, pouvoir rassembler durant deux semaines tous ces jeunes autour de la musique est une chance immense ».

Ouverture

La soirée a débuté avec l’explosive ouverture des Maîtres Chanteurs de Nuremberg de Wagner. Fidèle à la tradition des grandes ouvertures classiques, cette œuvre offre aux musiciens un terrain d’expression idéal. Le chef galvanise l’énergie de ses jeunes instrumentistes avec facétie, n’hésitant pas à jeter sa baguette en l’air avant de la rattraper pour mieux repartir dans un nouveau galop musical. 
La soirée s’est poursuivie avec Voici la vaste plaine, un air tiré de Mireille, de Charles Gounod. Si la soprano égyptienne Amina Edris, techniquement irréprochable, a porté la partition avec intensité, son interprétation parfois trop lyrique et sophistiquée a peut-être manqué de la naïveté spontanée et de la simplicité que requiert un rôle loin des héroïnes tragiques ou raffinées du grand répertoire romantique.

Création collective

Puis est venue l’heure du rendez-vous attendu : la composition collective de l’OJM. Sous l’égide du saxophoniste Fabrizio Cassol, le quintet de Charles Kieny (accordéon) Goergios Markopoulos (clarinette) Myrsini Pontikopoulou Venieri (violon), Fahed Ben Abda et Dalal El Bied (chant) accompagné par l’orchestre symphonique, a offert au public une pure merveille, ovationnée durant de longues minutes.

Pour clôturer ce concert, l’orchestre s’est attaqué à la Symphonie n°1 en ré majeur de Gustav Mahler, chef-d’œuvre aux multiples facettes. De l’évocation mystérieuse de la nature au scherzo rustique inspiré des danses paysannes autrichiennes, jusqu’au mouvement funèbre célèbre pour sa sombre reprise du Frère Jacques en mode mineur, quitransforme la comptine enfantine en danse macabre, la formation symphonique a su déployer une palette émotionnelle riche. Le final apocalyptique est grandiose, donnant toute leur place à des cuivres flamboyants.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Le concert de l’OJM s’est déroulé le 21 juillet au Grand Théâtre de Provence

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Italo et disco

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© Ciao Moka

Faire vibrer la culture italienne dans une des villes les plus italiennes de France. C’est le bel objectif du festival Ciao Moka, qui n’a pas failli à sa mission pour cette nouvelle édition 2025. Dans l’échange et la porosité des cultures, il a proposé une multitude d’événements, entre danse, gastronomie ou musique, comme c’était le cas ce 19 juillet sur le toit-terrasse de la Friche la Belle de Mai.  

Il y avait d’abord, sous un ciel bleu-gris, DJ Costegno et ses vinyles. Alors que le publicarrive déjà en nombre, le napolitain-marseillais fait résonner ses platines dans l’espace, d’unson parfois méditerranéen, parfois caribéen, aux rythmes animés, aux basses envoûtantes.

Le ciel a viré à l’orange quand la Trévisane Taranta Lanera, basée aujourd’hui à Bordeaux, se poste au micro, tambourin en main, toute de brume, de roses rouges et de métal clinquant.À elle de transformer les traditionnelles tarentelles sudistes en d’électroniques ritournelles aux airs de chœur antique futuriste. Comme dans la légende à l’origine de cette musique, on croirait qu’une tarentule a piqué l’auditoire en transe…

Enfin, dans le noir de la nuit, arrivent Maria Chiara Argiro et ses acolytes. La romaine de naissance et londonienne d’adoption, lunette de soleil sur le nez, enchaîne les chansons de son dernier album Closer. La guitare retentit comme le chant des baleines, et la voix de l’artiste, mixée en direct, semble se fondre dans cet arrière-plan mélodique, laissant la part belle à d’expérimentales rythmiques cyber-acoustiques. Pour finir d’emporter le public sur la doucevague musicale de cette nuit d’été.

GABRIELLE SAUVIAT

Ciao Moka s’est tenu du 18 au 20 juillet, dans divers lieux à Marseille.

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« La diffusion de la création artistique est libre »

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© X-DR

Rachida Dati a créé en avril 2025 un poste de Haute fonctionnaire pour la Liberté de création au ministère de la Culture, et y a nommé Juliette Mant, adjointe à la culture d’Arcueil. Une nomination qui en dit long sur la nécessité, pour les programmateurs, les collectivités et les artistes, de pouvoir en rappeler la loi, et préserver un droit fondamental. Celui-ci a été défini en 2005 dans la Convention de l’Unesco sur la liberté artistique, qui regroupe un ensemble de droits protégés en droit international. Dont « le droit à la création sans censure ni intimidation ».

Des inquiétudes nouvelles

Si ce droit peine à s’installer pour tous·tes, la France était à peu près, depuis la fin de la guerre d’Algérie, préservée de la censure artistique. Mais « L’ordonnance Dieudonné », comme le rappelle Juliette Mant, est venue changer la donne : le 9 janvier 2014, l’humoriste, condamné auparavant pour antisémitisme, a vu son spectacle Le Mur interdit à Nantes au motif de « trouble à l’ordre public » parce qu’il « porte atteinte à la dignité humaine » et à la « cohésion nationale ». 

Cette mesure, qui allait à l’encontre de la décision précédente du tribunal administratif, a été imposée par le ministre Manuel Valls, et a immédiatement suscité l’inquiétude des magistrats : comment garantir que ces concepts flous, entre les mains de forces réactionnaires ou fascisantes qui exercent localement le pouvoir, n’en viennent pas à interdire l’immoralité, la critique politique, l’évocation de la guerre génocidaire à Gaza, le « blasphème », la nudité, les représentations de l’homosexualité ou du queer, le « wokisme » ? 

J’veux du queer !

Comme l’explique Alexie Lorca, adjointe à la culture de Montreuil, « le problème est qu’il est difficile de faire comprendre aux féministes, aux antiracistes, qu’interdire une œuvre artistique au prétexte des valeurs réactionnaires qu’elle diffuse est dangereux pour la démocratie ».

En effet, ceux qui voudraient interdire la Mégère apprivoisée ou Tarzan (où les singes sont plus malins que les Noirs) mesurent-ils qu’ils attaquent aussi la liberté des artistes qui expriment des concepts émancipateurs ? On ne peut pas interdire les artistes russes, les compagnies israéliennes, y compris ceux qui soutiennent leur gouvernement, sans prendre le risque de vouer au silence les Palestiniens sous prétexte d’un risque de trouble à l’ordre public. Sans prendre le risque d’une censure d’extrême droite.

Délit d’entrave

Aymeric Sasseau, adjoint à la culture de Nantes, souligne que la loi est appliquée avec plus ou moins de célérité et de rigueur. Les responsables d’un bar associatif lors d’un festival organisé dans sa ville ont été convoqués par la police et ont dû répondre d’un tag ACAB (All cops are bastards)  en « 72h chrono ». En revanche les intégristes catholiques qui ont empêché, « par une manifestation violente assortie de coups de pieds », le concert de l’organiste Anna von Hausswolff en décembre 2021 à Nantes d’abord, puis à Paris, ne sont toujours pas inquiétés.

AGNÈS FRESCHEL

Soutenir le peuple palestinien, illégal en France ? 
Le 2 juillet dernier, le préfet de Haute-Loire interdisait un rassemblement de soutien au peuple palestinien organisé à Chambon-sur-Lignon. Quelques jours plus tard, le 9 juillet, Victor Cachard, libraire de la petite ville, recevait cette lettre de la préfecture :
« Par arrêté préfectoral du 2 juillet 2025 j’ai interdit, au titre du code de la sécurité intérieure, tout rassemblement de soutien au peuple palestinien […] eu égard au risque de troubles de l’ordre public. En dépit de cette interdiction le rassemblement s’est tenu le 4 juillet et vous avez été identifié comme l’un des organisateurs ». 
S’ensuivent l’évocation de 6 mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amendes, et la menace d’un signalement au Procureur de la République. Un cas qui ne relève pas de la liberté artistique mais de la liberté de manifestation. Cependant la menace sur un libraire qui organise des débats s’est exprimé clairement, et sans trouble à l’ordre public constaté lors de cette manifestation « illégale ». Illégalisée ? A.F.

Quand la bise fut venue

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Non, l’hiver n’est pas encore là ! Mais Zébuline prend quelques semaines de vacances, et vous pourrez retrouver vos hebdos à partir du 27 août. Et pas d’inquiétude, on continue à arpenter les festivals et publier nos critiques ici même. Vous pouvez aussi prendre le temps de lire nos deux magazines d’été sortis en juin et juillet. Bref on vous dit bonnes vacances, on s’y adonne un peu nous-mêmes. Et on vous claque la bise, sans vous mettre de vent.

Combien de bises, d’ailleurs ? À Avignon on vous en assène trois. Les bucco-rhodaniens, bien qu’habitant les Bouches-du-Rhône, sont adeptes du deux bises, et laissent en suspens les bisous vauclusiens, sans compter les Belges qui pratiquent l’unibise, et les bouches parisiennes qui partent dans l’autre sens au risque de l’effleurement inopiné des lèvres… 

D’ailleurs, depuis le COVID, la bise, fauteuse de troubles à la santé publique, avait reculé dans les usages, soulageant toutes celles qui se voient imposer, l’été, les joues poisseuses des inconnu.e.s qu’une étrange règle leur réserve. Car entre hommes inconnus on se serre la main, et les garçons choisissent quels garçons les embrassent. Peut-être le consentement pourrait commencer là, en cessant de différencier  celles à qui on impose sa bouche, parfois désirée, et ceux à qui on fait sentir sa poigne ? 

Avis de coup de vent

D’autres bises, pourtant, s’annoncent à la rentrée, en attendant un hiver que l’on espère pas trop glacial. Ce sont de véritables ouragans qui vont s’abattre sur les finances des collectivités publiques astreintes à des coupes sans précédents, alors que l’État distribue 211 milliards d’aides aux entreprises, sans contrepartie, par an, et que les économistes les plus sérieux conseillent à la France d’augmenter les impôts des plus riches et de taxer le capital, dans un pays où une poignée de milliardaires n’a jamais possédé autant, ni délocalisé et désindustrialisé aussi tranquillement.

Un d’entre ces profiteurs qui veulent reconquérir et reconstruire une France chrétienne débarrassée des Sarrazins, finance un spectacle où des drapeaux nazis s’affichent sur un monument patrimonial,  Stérin peaufine son projet Périclès, tandis que Bolloré continue de mettre la main sur les médias et la ministre de la Culture (qui vient d’être renvoyé au tribunal correctionnel pour corruption) de détruire le service public d’information et la décentralisation culturelle. 

Ce sont les œuvres, la création, les patrimoines et matrimoines divers, les combats des invisibilisé·e·s qui sont attaqués violemment. Mais qui s’imposent aussi, fièrement, sur toutes nos scènes. Il est grand temps, pour les forces progressistes, artistiques et politiques, de faire tourner les vents, et éclater nos tempêtes. À la rentrée ?  

Agnès Freschel


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Les Rolling Stones au Lavandou 

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© Dominique Tarlé

Au départ il ne devait y rester qu’un jour, il y resta 6 mois. En 1971, les Rolling Stones sont à l’apogée de leur carrière. Le groupe existe depuis 9 ans, ils viennent de sortir l’album Sticky Fingers, mais pour échapper au fisc anglais les rockeurs posent leurs valises dans une des plus belles maisons de la Côte d’Azur… la Villa Nellcote. C’est ici que le jeune photographe Dominique Tarlé les rejoints, et c’est ici qu’il signera une des plus impressionnantes sériesde photos consacrées à un groupe de rock. Ce travail, très connu et déjà mainte fois publié ou exposé, est à redécouvrir à l’Espace culturel du Lavandou jusqu’au 27 septembre.  

La force des photos de Dominique Tarlé réside avant tout dans le temps qu’il a passé avec le groupe, et l’intimité qu’il a créée avec lui. Sur les images, souvent en noir et blanc, parfois en couleur, on suit la vie quotidienne de ces supers stars. Dans l’immense manoir néo-classique se bousculent les guitares, les pianos, les trompettes entre les cendriers. Se bousculent aussi les moments intimes. La vie des couples, les repas partagés sur l’immense terrasse, les sorties en mer ou à moto. Pendant ces quelques mois passés dans la Villa Nellcote, les Rolling Stones signeront Exile on Main Street, que beaucoup considèrent comme leur meilleur album. On avait le son, et grâce à Dominique Tarlé, on a aussi les images. 

NICOLAS SANTUCCI

Rolling Stones 1971
Jusqu’au 27 septembre
Espace culturel du Lavandou

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Othoniel, exceptionnel 

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© Thibaut Carceller

Artiste et concepteur de l’installation, Jean-Michel Othoniel propose un récit poétique avec l’exposition COSMOS ou Les Fantômes de l’Amour à découvrir jusqu’au 4 janvier 2026. Un travail de deux ans, présenté dans dix lieux d’exception d’Avignon (Palais des Papes, Bains Pommer, Collection Lambert…) qui a nécessité le déploiement de 600 ouvriers. Jean-Michel Othoniel y place ses rêves et ses voyages pour proposer une « montée en puissance » avec comme thématique principale le mouvement et l’eau. L’exposition ne compte pas moins de 260 œuvres dont 140 qui ont été spécialement conçues pour les dix institutions culturelles de la Cité des papes. Comme l’explique la maire d’Avignon Cécile Helle, l’objectif est de faire cohabiter un artiste contemporain avec un lieu emblématique du patrimoine avignonnais. L’occasion aussi de célébrer le 25eanniversaire d’Avignon capitale européenne de la culture. 

Fontaines de jouvence

© Thibaut Carceller

Parmi les lieux investis, l’emblématique Palais des Papes, une invitation à la découverte de 133 œuvres – principalement des sculptures – en dialogue avec les sonnets de Pétrarque. À la fois une déambulation poétique au cœur d’un lieu autrefois habité par le pouvoir, et une volonté de l’artiste de se positionner comme prescripteur de messages, bien plus qu’un simple créateur. La grandeur est au rendez-vous, La Grande Chapelle est revêtue de trois astrolabes dorés à la feuille d’or, et suspendus dans le vide – une installation qui a nécessité une intervention minutieuse de la part des ingénieurs. 

À la chapelle Saint-Martial, un des quinze espaces du palais investis par l’exposition, l’artiste présente soixante peintures à l’encre, des monotypes colorés et inspirés par les fleurs et dont la composition se multiplie à l’infini. 

Dans chaque espace qu’occupe l’exposition, un moment de la vie de l’artiste est présenté. Aux Bains Pommer – nouveau musée d’Avignon inauguré le 20 juin – il présente ses souvenirs d’enfance avec l’installation de 14 fontaines faisant référence à cette eau joyeuse et exotique. Au Musée Lapidaire, on voyage à travers la recherche de son identité, mais aussi en Inde où il a travaillé le verre, et on regarde ému ce monolithe orné de pierres taillées à la manière des pierres précieuses.

L’artiste explore différents matériaux pour répondre aux contraintes climatiques : peinture à l’or, équinoxe miroir, ainsi qu’un verre résistant à la chaleur développé à Marseille. Favorable à une culture populaire, il confie son souhait de voir un large public pousser les portes des lieux culturelsqu’il a investis. Au public d’aller découvrir son œuvre renversante, et de lui donner raison. 

© Thibaut Carceller

THIBAUT CARCELLER

COSMOS ou Les Fantômes de l’Amour 
Jusqu’au 4 janvier 2026
Divers lieux, Avignon

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La seconde Vague

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© Matea Ilieva

Débutée le 16 mai avec une série de concerts prestigieux – les chanceux ont déjà pu entendre Gautier Capuçon, Shani Diluka, Sandrine Piau, Khatia Buniatishvili, Bertrand Chamayou et bien d’autres –, La Vague Classique continue en juillet, reflue en août, pour mieux revenir en septembre et proposer une rentrée dédiée à la jeunesse.

Les 15, 17 et 19 juillet le festival investit la Collégiale Saint-Pierre pour trois soirées avec l’ensemble Matheus, sous la direction de Jean-Christophe Spinosi. Ils mélangent les genres avec bonheur entre pur classicisme (Mozart, de Haydn et de Beethoven), baroque (Les Vêpres de la Vierge de Monteverdi) et Bel Canto flamboyant avec un gala Rossini. En parallèle, une exposition à la Villa Simone met à l’honneur tout l’été la photographe Marianne Rosentiehl, dont les portraits vibrants ont saisi l’âme des plus grandes figures culturelles de notre époque.

On va aimer la Rentrée

En août la Vague se met en vacances pour mieux revenir en septembre avec une série de concerts face à la mer – gratuits sur réservation – à la Maison du Patrimoine du Brusc qui conjuguent jeunesse et romantisme.

Le 6 septembre, c’est le jeune prodige Ryan Wang qui ouvrira ces moments musicaux. À seulement 17 ans, ce pianiste canadien est un petit génie. Il a commencé à jouer du piano à l’âge de quatre ans, a donné son premier récital solo à l’âge de six ans. Il est aussi le plus jeune lauréat du prestigieux Prix Cortot. Il s’est déjà produit sur certaines des plus grandes scènes du monde et impressionne par sa maturité artistique. Au Brusc, son récital sera largement consacré à Chopin.

Le 13 septembre, c’est au tour de Karen Kuronuma de prendre place au piano. Révélation de la Fondation Gautier Capuçon, elle fait partie de cette génération d’artistes qui marient virtuosité et profondeur. Son programme est un voyage dans l’univers romantique et impressionniste, de Chopin à Liszt, en passant par Debussy et Ravel. Une soirée qui s’annonce tout en nuances et en contrastes, à l’image de son jeu raffiné et expressif.

Enfin, le 20 septembre, Adi Neuhaus refermera ce triptyque pianistique. Héritier d’une grande lignée de musiciens, ce jeune artiste israélien porte en lui une tradition exigeante et passionnée. Avec un programme, lui aussi centré sur Chopin mais aussi Rachmaninov, il promet de faire vibrer la Maison du Patrimoine de ses élans les plus lyriques. 

La Vague Classique se clôturera le 21 septembre à la Collégiale Saint-Pierre, avec un concert orchestral – gratuit également avec réservation – sous la direction musicale de la violoniste Laurence Monti et Julie Sevilla-Fraysse au violoncelle, accompagnées par l’Orchestre de l’Opéra de Toulon. Au programme, les Concertos pour violoncelles n°1 et 2, et la Symphonie n°29 en la majeur K. 201 de Mozart, solaire, dans une atmosphère à la fois solennelle et festive, pour dire adieu à cette saison d’exception.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

La Vague Classique
Jusqu’au 21 septembre
Divers lieux, Six-Fours-les-Plages 

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Montpellier fait deux rêves

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© X-DR

Sur un Os, L’exposition monographique de Françoise Pétrovich, même si elle ne se revendique pas rétrospective, en a tout de même un petit peu l’air. L’artiste qui expose beaucoup en France et à l’international, dont les œuvres les plus connues sont des portraits d’une adolescence douce, méditative, taiseuse, achetées par de nombreuses collections publiques et privées, n’a pour l’instant pas fait l’objet de grande rétrospective. L’expositiondu MO.CO. pourrait en être une sorte de préfiguration : on y trouve des travaux récents, anciens, de nouvelles réalisations créées pour l’occasion, et un aperçu de la large palette des techniques qu’elle utilise.

Des mots

Après la première salle dont les murs accueillent en rang d’oignons des portraitsd’adolescents mutiques, aux couleurs non naturalistes, emblématiques de la pratique picturale de l’artiste, des travaux plus anciens (années 1990) sont exposés dans les salles qui suivent. Où l’on a la surprise de découvrir une Françoise Pétrovich utilisant et jouant avec les mots, souvent avec ironie, sur des supports préexistants : bavoirs, napperons, broderies, cartes postales, cahiers d’écolier… Un grand ensemble de huit dessins sur toile est même accompagné d’une bande audio old school où sont prodigués des conseils de bonne tenue morale et professionnelle aux jeunes apprentis. 

Trois plateaux

Les trois plateaux du MO.CO accueillent ensuite, le premier, des ensembles de peintures grands formats, quadriptyques, diptyques, ainsi qu’une double ligne murale monumentale constituée de 18 dessins au lavis d’encre. Des portraits et des motifs récurrents, notamment un paysage d’île arborée, des portraits de jeunes gens évanouis, soutenus par les épaules par deux mains.

Le deuxième plateau est entièrement consacré à une installation vidéo, créée spécialementpour l’exposition : voiles blanc, ventilateurs, peintures murales, voix spectrales, bruits d’ailes et de sabots de chevaux, autour de la projection de la vidéo Papillon évoquant desmétamorphoses. Une ambiance évanescente qui contraste avec les fortes présences -même si elles évoquent paradoxalement un retrait, un effacement- des peintures et dessins de l’artiste.

On est accueilli à l’entrée du troisième plateau par une sculpture de petite fille en bronze patiné de noir, tenant entre ses dents un os gigantesque. Un plateau scénographié par l’artiste avec sur les murs une série d’une dizaine de portraits aux visages blancs, tels des masques, entourant des ensembles de sculptures, beaucoup de petits formats en bronze patiné de noir et quelques céramiques émaillées, disposés sur divers socles disposés au centre, évoquant des créatures de contes bizarres et cruels.

Métal

À 1km de là, au Mo.Co Panacée, le parcours de l’exposition de Jean-Marie Appriou s’organise dans les différentes salles ainsi que dans le patio autour de cinq éléments : eau, terre, ciel, feu, éther. On entre dans une sorte de science-fiction onirique, avec des sculptures et bas-reliefs de métal, avec parfois des ajouts d’éléments en verre, présentant des créatures fantastiques, des grottes où des mains poussent au milieu de stalagmites et stalactites, un bateau flottant dans l’air avec une figure figée regardant au loin, des têtes humaines apparaissant dans un fourmillement de plants de maïs, ou l’ensemble des créatures du zodiaque, tout autour d’un cosmonaute en apesanteur.

Toute une imagerie de chimères fantastiques, hybridation végétal humain, animal-humain, têtes sans corps, tels des vestiges d’un monde futur ou disparu, de légendes étranges auxquelles le travail du métal et du verre par l’artiste donne une présence et une expressivitéétonnante.

MARC VOIRY

Sur un os – Françoise Petrovich
Jusqu’au 2 novembre
MO.CO

La cinquième essence – Jean-Marie Appriou
Jusqu’au 28 septembre
MO.CO Panacée

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Forces obscures au centre d’Arles

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SILVIA PRIO GYPSY WITCHES © X-DR

Lieu dédié à la jeune photographie, la Fondation Manuel Rivera-Ortiz fête en cet été 2025 ses dix ans en accueillant dans ses espaces de l’Hôtel Blain, les travaux de huit photographes, toutes des femmes, qui se penchent sur « ces croyances populaires qui, entre dévotion et transgression, transcendent les cultures et les époques ». Car « La société occidentale, en érigeant le rationalisme en norme, a souvent rejeté ou minimisé les formes de spiritualité qui échappent à ses cadres institutionnels. Pourtant, ces croyances et ces pratiques marginalisées continuent d’exister, porteuses d’une autre lecture du monde. Peut-on encore accepter l’inexplicable ? ».

Chasse aux sorcières

Parmi les huit séries présentées, quatre sont particulièrement inspirées par la figure de la sorcière, tour à tour crainte et réhabilitée, devenant symbole de pouvoir, de résistance et de connaissance interdite.

Gertrud

C’est ainsi que dans sa série Gertrud on the silence of mythMaja Daniels revisite, à travers des images fixes et animées ancrées dans le présent, les événements déclenchés par l’histoire de Gertrud Svensdotter, jeune suédoise de 12 ans qui en 1667 fut accusée de marcher sur l’eau.

Dans Gypsy WitchesSilvia Prió présente une vision poétique du monde magique des femmes tziganes qui, depuis des siècles, sont les détentrices de la lignée de l’art de la voyance. 

Dans Malleus Maleficarum, Virginie Rebetez, à travers le personnage de Claude Bergier, accusé de sorcellerie et amené au bûcher en 1628 à Fribourg, s’intéresse aux médiums et guérisseurs très répandus dans cette région catholique de Suisse.

Et dans Witches in ExileAnn-Christine Woehrl met en lumière le sort de femmes exilées dans le nord du Ghana, contraintes de fuir leurs villages pour se réfugier dans des camps de sorcières, où elles perdent tout : famille, maison et dignité.

Une exposition « amplifiée » par l’exposition Fotohaus qui met en avant la scène photographique franco-allemande autour d’un thème commun : « Kontroverse & Paradoxe – Ou comment réenchanter le monde ». Des images témoignant, face aux différentes crises actuelles, notamment écologique, différentes formes de résistance et de résilience.

MARC VOIRY

Sortilèges
Jusqu’au 5 octobre
Fondation Manuel Rivera-Ortiz, Arles

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