lundi 25 novembre 2024
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Africapt : lumière sur les écrans africains

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Quand le pays d’Apt se revêt des couleurs d’automne, on sait que c’est le moment de partir en voyage en cinéma africain à l’occasion du festival Africapt. Cette année, pas moins d’une vingtaine de longs métrages, fictions et documentaires sans oublier trois séances de courts métrages sont présentés au cinéma César d’Apt mais aussi dans les villages environnants. Des films, de nouveaux talents ou de cinéastes confirmés, qui parlent de questions sociales, culturelles, politiques, ou interrogent et font rêver…

Du nord au sud

Cinq longs métrages viennent d’Algérie : L Effacement de Karim Moussaoui, une chronique familiale et sociétale, un climat de tension jusqu’au dénouement final. 2G de Karim Sayad explore la réalité des anciens passeurs à Agadez en 2021 ; La Langue du feu de Tarek Sami propose un périple entre la Jungle de Calais et l’Afrique du Sud ; Marin des montagnes de Karim Aïnouz, un voyage en Kabylie, dans une quête des origines paternelles. Sans oublier le superbe Bye Bye Tibériade, récit émouvant d’une Palestine déchirée par l’actrice Hiam Abbass et sa fille Lina Soualem.

Deux fictions venues du Maroc : Jours d’été de Faouzi Bensaïdi, film qui explore la complexité des liens familiaux et la fuite inéluctable du temps en revisitant La Cerisaie d’Anton Tchekhov. Et La mer au loin de Saïd Hamich Benlarbi, un parcours initiatique à Marseille qui commence comme un film noir, un mélodrame au rythme du raï.

De Tunisie, le deuxième long de Mehdi M. Barsaoui, Aïcha (Section Orizzonti à la Mostra), inspiré d’un fait réel. Et d’Égypte le beau documentaire de Nada et Ayman El Amir, Les Filles du  Nil, qui nous fait partager les doutes, les peurs, les joies, l’énergie d’adolescentes, femmes en devenir. Avec The village next to paradise du Somalien Mo Harawe,on suit la galère d’un père aimant mais un peu défaillant et dans Demba du Sénégalais, Mamadou Dia, la vie d’un père veuf tourmenté et désarmé suite à la mort de sa femme. Venu aussi du Sénégal, l’Ours d’Or de la Berlinale, le très réussi Dahomey de Mati Diop.

Des zébus francophones

Abderrahmane Sissako fait se rencontrer l’Afrique et la Chine dans Black Tea, et grâce à Raoul Peck, on découvrira le travail du grand photographe sud-africain, le premier à avoir exposé au monde entier les horreurs de l’apartheid dans Ernest Cole, photographe. Deux films venus de Madagascar : une fiction, Disco Afrika : une histoire malgache,Luck Razanajaona s’interroge sur le présent de Madagascar qui se reconstruit. Et un documentaire : Chez les zébus francophones de Lova Nantenaina, l’histoire de Ly, l’un des derniers paysans orateurs de la capitale. Coconut head generation d’Alain Kassanda montre la force du cinéma, avec des étudiants de  l’université d’Ibadan, qui n’ont pas « la tête creuse ». Toutes les couleurs du monde de Babatunde Apalowo raconte une histoire d’amour « interdite », entre deux hommes, dans un Lagos poétique.

Africapt c’est aussi des courts-métrages, un ciné-concert (le groupe Oriki propose un voyage dans le Dakar de Djibril Diop Mambéty), et des rencontres avec les cinéastes tous les matins. Un programme alléchant pour tous ceux qui aiment ou ont envie de découvrir le cinéma africain.

ANNIE GAVA

Africapt
Du 7 au 12 novembre
Apt et alentours
africapt-festival.fr

L’affaire Nevenka

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Soy Nevenka d'Icíar Bollaín © Epicentre Films

À celles et ceux qui continuent de penser qu’au fond les femmes disent non en pensant oui, il faut dire – a minima – d’aller voir Soy Nevenka (Je suis Nevenka). Et aux autres aussi, tant la force d’une fiction servie par l’incroyable performance de deux acteurs (Mireia Oriol et Urko Olazaba), associée au talent de la réalisatrice, transcendent le fait divers, frappent de plein fouet le spectateur et, mieux que toute argumentation, mettent en évidence les mécanismes d’une emprise

Nevenka Fernández, jeune diplômée de 25 ans, est élue conseillère municipale à Ponferrada, sur la liste du charismatique et populaire maire Ismael Alvarez. Le quinquagénaire, qui l’a repérée, a la réputation d’être un « coureur de jupons ». Chargée de la commission des finances, elle perd vite sa naïveté et ses illusions devant les magouilles du politicien qui ne supporte pas qu’elle se refuse à lui après une courte relation consentie. 

Dès lors, se met en place un harcèlement privé et professionnel, qui plonge Nevenka dans l’enfer. Elle sera la première femme à oser porter plainte contre un homme de pouvoir. Seule, contre une société qui voudrait bien fermer les yeux. Contre l’opinion qui la traite d’affabulatrice. Contre ses parents qui voudraient bien éviter le scandale et conserver les subventions de la ville pour leur entreprise, et contre certaines de ses amies qui travaillent pour le maire. Pionnière d’un #Metoo avant l’heure, elle gagnera le procès intenté contre son harceleur, pour affirmer sa dignité. 

Comme un animal traqué

Icíar Bollaín et sa coscénariste Isa Campo sont restées au plus près de la réalité, menant une enquête préalable dans la ville, s’appuyant sur le compte rendu du procès et les témoignages. Elles reconstituent très intelligemment l’état d’esprit d’une époque où le machisme allait de soi, où une mère devant l’effondrement de sa fille ravagée par les violences d’un homme qui aurait pu être son père, est capable de lui dire : « Dans quel état TU t’es mise ! ». 

Mais  Soy Nevenka n’est en rien un documentaire. Pas un film de procès non plus. Cet épisode final, quoique très fort – avec le réquisitoire d’un avocat général d’anthologie – n’occupe que peu de place.  Le film s’ouvre comme un thriller dans le halètement affolé d’une femme qui semble traquée alors qu’explosent les feux d’artifice d’une fête votive, séquence suivie du dépôt de la plainte chez l’avocat, puis il revient en arrière. 

La photo (Gris Jordana) fait archive et « texture cinématographique » : palette de couleurs des années 90, bleus pour la protagoniste, ocres et gris pour les personnages secondaires et les nombreux figurants qui rendent sensibles la solitude de la victime. On entre dans le processus qui transforme une jeune femme belle et intelligente en un être dévasté ayant perdu l’estime de soi, paralysé comme un animal dans des faisceaux de phare. Grâce à une mise en scène au cordeau, on partage son calvaire sans échappatoire. 

ÉLISE PADOVANI

Soy Nevenka  d'Icíar Bollaín
Projeté en avant-première dans le cadre de Cinehorizontes
En salles le 6 novembre

Photo Marseille : Territoires en photographies

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Daegu reflection, Kim Saehyun Project © Hyunmin Ryu

Pour sa 14e édition le festival Photo Marseille a souhaité rendre hommage à sa terre natale, à ses habitant.es, aux photographEs qui en renouvellent les représentations. L’ouverture officielle du festival a eu lieu le 10 octobre avec l’exposition collective Être(s) d’ici sur le quai d’honneur du Vieux-Port de Marseille, et dans la foulée se sont ouvertes plusieurs expositions, à la Galerie Zoème, à Maupetit, aux Territoires partagés au Pangolin (jusqu’au 24 novembre). Enfin, du 20 novembre au 20 février les parcs municipaux, exposeront des Regards d’enfants pour penser le territoire, restitutions d’ateliers photos menés dans le cadre du programme « Réussite Éducative » de la Ville de Marseille. 

Prix Maison-Blanche

Le point culminant du festival est le Prix Maison Blanche qui se déroule chaque année à la Mairie des 9/10. Y sont exposés depuis le 17 octobre les travaux des cinq lauréats. 

Dans le hall,  quatre panneaux où se répondent une vingtaine de natures mortes hétérogènes, parfois abstraites, toutes en jeux de formes, couleurs et lumières d’Anaïs Boileau ;  quatre photographies dynamiques de petits groupes de new-yorkais.es réalisées à Coney Island, fameuse plage à l’extrême sud de Brooklyn, de David Godicheau. Et les photographies réalisées par l’allemand Louis Roth, du chantier de la nouvelle capitale administrative égyptienne, montrée comme une fantasmagorie urbaine en plein désert, destinée à devenir à terme la capitale de l’Égypte en remplacement du Caire côtoient celles de l’italien Davide Degano, autour de l’identité italienne, entremêlant présent, passé colonial et vagues migratoires, combinant portraits, paysages urbains, et documents d’archives. 

Sae-hyun 

Sur les murs du salon d’honneur, les photographies du coréen Hyunmin Ryu, premier prix, qui verra son travail publié dans un ouvrage édité par le Bec en l’air. Une dizaine de ses photographies aux mises en scène malicieuses sont exposées mettent au centre son neveu Sae-hyun, avec lequel il a vécu pendant six ans dans la même maison. Un neveu qui est devenu aussi « un ami, un frère, un fils » sur lequel il porte un regard malicieux, à la fois bienveillant et aiguisé, qu’il photographie dans des mises en scènes ludiques inspirées du quotidien parfois nimbées d’un halo mélancolique, détournant la classique photo de famille de façon réjouissante.

MARC VOIRY 

Photo Marseille
Jusqu’au 13 novembre - Être(s) d’ici – Quai d’honneur
Jusqu’au 23 novembre- Accidentes geo-gráfico de Laura Quinonez – Galerie Zoème
Jusqu’au 24 novembre - Villa San Remigio de William Guidarini - Librairie Maupetit 
Jusqu’au 24 novembre - Chaos calme d’Anne-Sophie Costenoble - Le Pangolin
Jusqu’au 24 novembre - Prix Maison Blanche – Mairie du 9/10Jusqu’au 30 novembre. From the dust of the 21st century de Sandy Ott – Territoires partagés
Du 20 novembre au 20 février - Regards d’enfants pour penser le territoire - Parcs Longchamp, Font Obscure et François Billoux 

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Au Forum de Berre, lumière sur Augusta Holmès : compositrice oubliée de l’histoire

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Camille et Augusta au Forum de Berre © X-DR

Augusta Holmès se rêvait sous les traits de Richard Wagner : poétesse, librettiste, compositrice et musicienne accomplie, la belle irlandaise naturalisée française aura créé quatre opéras, vingt-quatre œuvres symphoniques et d’innombrables mélodies. Elle fut cependant, comme bon nombre de ses semblables ayant marqué la seconde moitié du XIXe siècle, délibérément effacée de l’Histoire de la musique. On ne saurait donc que trop remercier l’association Intim’Opéra, d’avoir voulu rendre justice à cette musicienne impressionnante, rêvant, à l’instar de son idole, de donner naissance à un art total. 

Sur la scène du Forum de Berre, on découvre, entonnées avec musicalité et sensibilité par la soprano Lucile Pessey, le ténor et comédien Yves Coudray, et accompagnée finement au piano par Marion Liotard, des pièces dont Augusta Holmès a non seulement signé la musique, mais également les textes. Loin de l’esthétique sage, intime et réservée prêtée alors aux femmes musiciennes, ses œuvres se distinguent alors par leur goût du monumental, leur vigueur textuelle, et même un certain ton guerrier. Les mélodies et autres extraits d’innombrables pièces entrent ici en résonance avec d’édifiants extraits de la presse d’alors, plus misogynes les uns que les autres. On devine, en filigrane, avec quelle animosité une œuvre ambitieuse a alors été accueillie : tolérée tant qu’elle se cantonnait à un rôle de pianiste accomplie ou de cantatrice piquante, la compositrice s’attirait les foudres de ses contemporains dès qu’elle se piquait de toucher au plus prestigieux des arts. Elle finit sa vie ruinée, témoin de son inévitable disgrâce. Seul le soutien de son ami Camille Saint-Saëns demeurera sans faille : on découvre, le temps de quelques lettres et autres vers très inspirés, quelle poésie – et quel amour, visiblement sans retour – animaient ce compositeur capable de reconnaître en Augusta Holmès une réelle homologue. Il est grand temps, pour le monde encore étriqué de la musique classique, de lui donner raison.

SUZANNE CANESSA

Camille et Augusta a été donné le 18 octobre au Forum de Berre.

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« La Nuit de l’Anim’ » de retour aux Variétés

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Mémoires d'un escargot@Arenamedia

Du vendredi 1er novembre 20 h au petit matin du samedi 2, ça s’anim’ au cinéma Les Variétés de Marseille. Toute une nuit consacrée au cinéma d’animation, en format long ou court.

Au menu, une avant première (le film sort le 25 janvier 2025) : Mémoires d’un escargot de l’Australien Adam Eliot. On y suit les malheurs de Grace la mal nommée, orpheline séparée de son frère jumeau, fillette délaissée harcelée à l’école, sauvée par sa passion pour les escargots, ces lents gastéropodes qui savent rentrer dans leur coquille. Un film en stop motion, Cristal 2024 du long métrage à Annecy, pour sa qualité technique, son inventivité, sa poésie, sa drôlerie et sa tristesse.

Un coup de cœur: Mutafukaz de Shojiro Nishimi adapté d’une BD, mêlant les genres – films d’action, de gangsters, de SF. Avec en prime les voix d’Orelsan et de Gringe.Enfin un film culte Team América : police du monde de Trey Parker, satire trash et déjantée.

Une riche sélection de courts métrages complètera le programme, parmi laquelle, à l’occasion de la sortie récente du merveilleux Flow, le chat qui n’avait plus peur de l’eau, 7 films de réalisatrices issus de Sacrebleu Production.

Entre les projections, on pourra déambuler. Participer à la création collective d’une affiche, en acquérir une déjà faite, ou chanter en mode karaoké. Collations offertes à chaque pause après minuit pour se maintenir en forme.

Notons un before à cette nuit-événement le vendredi après-midi à 15h30 : la présentation en avant-première par Michel Hazanavicius de son conte animé adapté du roman de J.-C. Grumberg : La Plus précieuse des marchandises. Qui nous plonge dans une forêt polonaise  enneigée, traversée par les trains de la mort, en pleine Seconde Guerre mondiale. Une bûcheronne recueille un bébé tombé d’un convoi. L’animation comme moyen peut-être de dire plus et mieux l’horreur et la beauté.

ÉLISE PADOVANI

La Nuit de l’Anim’

Du 1er au 2 novembre

Les Variétés, Marseille

Une Antigone d’or palestinienne

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© eurozooms

La tâche du Jury de la 46e édition du CINEMED, présidé par la réalisatrice, scénariste Katell Quillévéré, n’a pas dû être facile car les 8 fictions présentées en compétition, très différentes, avaient toutes d’indéniables qualités. C’est au film du Palestinien, Mahdi Fleifel, To a Land Unknown qu’ils ont attribué le grand prix : l’Antigone d’or. Un film, témoignage d’une réalité cruelle et universelle.

 Reda et Chatila
Ils sont palestiniens et viennent d’un camp de réfugiés au Liban : deux cousins, Chatila (Mahmood Bakri) et Reda (Aram Sabbagh), toujours avec son skate-board. Ils habitent dans un squat à Athènes et rêvent de pouvoir partir à Berlin. Mais sans papiers et sans argent, peu de chance d’y arriver. Il s’agit donc de s’en procurer. Les deux cousins multiplient les combines, promeneurs qu’on arnaque dans les parcs, vol de chaussures dans les magasins et revente, prostitution parfois. La somme d’argent qu’exigent les passeurs est d’autant plus difficile à obtenir que Reda a une fâcheuse tendance à se défoncer et à dilapider l’argent péniblement amassé. Chatila le plus responsable des deux, met consciencieusement de côté leurs gains car il espère pouvoir faire venir plus tard en Allemagne sa femme et son fils qui vivent encore dans un camp libanais. Il pique régulièrement des colères contre Reda, qui reste toutefois sa seule attache dans cette ville. Avec Malik (Mohammad Alsurafa), un jeune garçon de 13 ans, abandonné en Grèce et qui voudrait rejoindre sa tante en Italie, ils partagent quelques moments chaleureux, les seuls de cette vie de galère. Mahdi Fleifel les suit dans leur errance, dans une ville aux ruelles taguées, sales, loin des lieux emblématiques, dans des squats où s’entassent tous ceux qui sont là et voudraient partir, et que la caméra de Thodoris Mihopoulos filme, révélant leur misère.

Thriller nerveux

Mahdi Fleifel s’est inspiré de faits réels, d’histoires vécues pour réaliser ce premier long métrage de fiction. « Athènes me rappelait Beyrouth » a précisé le cinéaste, né à Dubaï, élevé dans le camp libanais d’Ain el Helweb qu’il avait évoqué dans son documentaire A World Not Ours en 2012. Quant à Chatila et Réda, superbement interprétés, ce sont George et Lennie, les personnages de Des Souris et des hommes de John Steinbeck, qui les ont inspirés : Mahdi Fleifel nous les a rendus attachants malgré leurs errements et leurs méfaits. « Chatila, on est des monstres ! » reconnait Reda. Et comme le récite Abu Love, un des personnages, citant des vers de Mahmoud Darwich « Tu n’as pas de frères, mon frère, pas d’amis, mon ami, pas de citadelle, pas d’eau, pas de médicaments […] Dans cet espace ouvert aux ennemis et à l’oubli, fais de chaque barricade un pays. ». Ils nous font sourire aussi parfois, surtout Réda qui accumule les bêtises. À travers eux, le cinéaste parle bien évidemment du destin des Palestiniens, sanslourdeur, dans un rythme rapide, tel un thriller nerveux, ponctuant son film de moments à la limite du comique.

 « Lorsque nous avons entamé ce projet, les événements en Palestine venaient de reprendre. Cela a eu un impact profond sur nous tous, (…) Nous avons réalisé qu’il n’y avait rien à dissimuler. Nous avions le choix entre rester passifs, figés devant les informations, ou bien investir corps et âme dans la réalisation de ce film » a déclaré le réalisateur au moment de sa présentation à la Quinzaine des cinéastes à Cannes.

Un film qui résonne encore plus fort en cette période.

ANNIE GAVA

Sortie en salles le 12 mars 2025

Montpellier : un mercredi marocain à Cinemed

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C’est au cinéma Rabelais de Montpellier que cette journée du festival Cinemed a commencé, avec un premier film du programme « Courts métrages marocains ». Les Poissons du désert d’Alaa Eddine Aljem nous a emmenés en plein cœur d’un désert du sud marocain, sous un soleil de plomb. Un père fossoyeur, une mère qui se meurt et un fils qui rêve de devenir pêcheur. Un film où les regards en disent plus que les mots.

On se retrouve ensuite dans les montagnes de l’Atlas, enneigées, où deux bergers, un père et un fils doivent sauver leur troupeau mais le village le plus proche est désert, à cause d’un phénomène étrange et inquiétant : Qu’importe si les bêtes meurent de Sofia Alaoui. Le reste du programme nous a permis de découvrir les courts de Sofia El Khyari, dont le très beau L’Ombre des papillons, une rêverie nostalgique, au rythme de la saudade, des images peintes à la main, encre et aquarelle, des images où l’on sent la texture de la peau.  On pouvait prolonger cette séance par l’exposition, Aux sources de l’imaginaire qui donnait à voir la matière derrière les créations des films d’animation de cette artiste plasticienne et cinéaste.

L’après midi, une table ronde, animée par Tewfik Hakem, a réuni des représentant.e.s de la jeune génération du cinéma marocain, bien équilibrée, trois femmes et trois hommes, accompagné.e.s par le « grand frère » , le modèle, Faouzi Bensaïdi dont on pouvait revoir Mille mois et Déserts.

Y a-t-il continuité ou rupture par rapport à la génération précédente ? La nouvelle génération est-elle plus audacieuse au niveau formel ? Le changement de pays modifie t-il les imaginaires ? Le cinéma reconnecte-t-il aves ses origines ? Y a t-il censure pour certains films ? Les coproductions sont elles une chance pour les cinéastes ?

Durant presque deux heures, les cinéastes Alaa Eddine Aljem (Le Miracle du Saint inconnuYasmine Benkiran (Reines) Ismaël El Iraki (Burning Casablanca), Sofia El Khyari, Asmae El Moudir (La Mère de tous les mensonges  ) et le producteur-réalisateur Saïd Hamich Benlarbi (La Mer au loin)ont parlé de leur travail, de leurs imaginaires, de leurs aspirations et de leurs difficultés parfois. « Quand on a quelque chose à raconter, on doit trouver une voie-voix .Un cinéaste ça résiste tous les jours ! » a conclu le « grand frère »

Une rencontre qu’on pouvait encore poursuivre  en allant voir la douzaine de longs métrages programmés lors de cette 46e  édition de Cinemed.

ANNIE GAVA

Photo  © A.G.

Toulon. FiMé : de l’amour au masculin    

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Photo en noir et blanc de Buster Keaton, acteur emblématique du cinéma muet, tenant plusieurs chapeaux de paille dans une scène iconique. Cette image illustre l'article sur la 18e édition du FiMé, qui met en lumière des films classiques des années 1920, tels que *Les Trois Âges* de Buster Keaton
Les Trois Âges de Buster Keaton © X-DR

Depuis 2005, le FiMé, Festival International des Musiques d’Écran, explore les croisements entre musique et cinéma, en créant des ciné-concerts, programmés dans différentes communes de la métropole toulonnaise. Sa 18e édition, du 2 au 10 novembre, prend pour thématique l’amour, ses passions et ses contrariétés. Sous le titre « Je t’aime moi non plus », sept films vont être projetés au cours de sept soirées, du drame au burlesque en passant par la comédie satirique, accompagnés de musique interprétée en live. Et, hors thématique, quatre courts-métrages de Maya Deren, cinéaste expérimentale américaine des années 1940, invisibilisée, dont l’influence artistique est revendiquée notamment par David Lynch. Seule femme réalisatrice présente dans cette 18e édition du FiMé, dans laquelle les films, réalisés dans les années 1920, portent les signatures de Tod Browning, Buster Keaton, Alfred Hitchcock, Buntarō Futagawa, Jacques de Baroncelli, Ernst Lubitsch, Sam Taylor et Fred Newmayer. 

Femmes non plus

Sur le versant concerts, les hommes sont également très largement majoritaires : c’est le trio Méandres (Fabien Genais, Emmanuel Cremer, Uli Wolters) qui accompagnera L’Inconnu de Tod Browning (le 2 à Six-Fours) et le pianiste Axel Nouveau pour Les Trois Âges de Buster Keaton (le 3 à Ollioules). Sébastien Arcos, Romain Redon et Laurent Beauchier pour The Ring d’Alfred Hitchcock (le 5 à La Garde) et Yaguara (alias Franck Micheletti) et Jean-Loup Faurat pour les courts-métrages de Maya Deren (le 6 au Télégraphe, Toulon). Et Mauro Coceano et Bastien Ferrez pour So this is Paris de Ernst Lubitsch (le 10 au Pradet). Seules musiciennes invitées, la pianiste Caroline Coq pour Pêcheur d’Islande de Jacques de Baroncelli (le 8, cinéma Le Royal, Toulon) et Fumie Hihara, joueuse de koto, aux côtés du pianiste Sébastien Damiani pour Orochi de Buntarō Futagawa (le 7, Théâtre Liberté, Toulon).  

MARC VOIRY

FiMé
Du 2 au 10 novembre
Divers lieux, Toulon Provence Méditerranée

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L’Opéra de Marseille, Lucie Leguay et Francesca Dego en virtuoses

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© DR

Belle idée que d’avoir confié les rennes du Philharmonique de Marseille à Lucie Leguay ! Pour sa première rencontre avec l’orchestre phocéen, la jeune cheffe a emmené ses musiciens sur des terres trop peu explorées. Tout commence ici par une ouverture familière : celle de L’Enlèvement au sérail, interprété pour l’occasion moins « à l’italienne ». L’énergie et la précision de Lucie Leguay célèbrent la joie mais également la ferveur d’un compositeur se rompant à l’exercice du Singspiel : contrastes saisissants, humour et virtuosité jalonnent cette partition lue à toute berzingue. 

Jeunesse dans le mouvement

La transition avec un des plus célèbres opus de Mendelssohn se fait ainsi tout naturellement : le Concerto pour violon n°2 est d’un romantisme encore corseté : l’économie des moyens orchestraux s’impose encore face à la vélocité et le brio de l’instrument soliste, déployant ici ses capacités de jeu avec un goût prononcé pour le ludique et l’expressivité. Francesca Dego ne fait qu’une bouchée de ses ornementations en cascade : son violon se fait dansant, riant, évoquant tout particulièrement sur le troisième mouvement les facéties qui se feront également entendre sur Le Songe d’une Nuit d’été. Au retour de l’entracte, l’orchestre s’attaque à l’immense première symphonie de Chostakovitch. Monument également d’expressionnisme, de pétulance mais aussi de grotesque et d’étrangeté, cette grande œuvre révolutionnaire d’un compositeur à peine âgé de 19 ans emprunte autant aux envolées mahlériennes qu’à la sauvagerie de Stravinsky. La direction se fait une fois de plus impeccable, tant dans sa lecture de cette œuvre encore trop rare sur les scènes orchestrales que dans son exécution particulièrement aboutie. De quoi attendre de pied ferme un retour de Lucie Leguay à la tête d’un orchestre décidément plein de ressource.

SUZANNE CANESSA

Concert donné le 20 octobre à l’Opéra de Marseille

Vrrraiment ! : le contemporain se dessine dans la ville  

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Festival VRRREIMANT!, 2023. Metaxu © Virginie Sanna

Le premier week-end de novembre, les murs du centre ville de Toulon se couvre d’art et résonnent de musique. C’est la 13e édition du festival Vrrraiment !, un évènement de dessin contemporain, de musique et de performance qui s’intéresse aux interactions entre image et son et se déroule à la fois dans la galerie du Metaxu et dans l’espace public, sur la place et dans le passage du Globe. 

La galerie invite cette année dix dessinateur·ice·s aux vocabulaires artistiques divers, allant d’un univers proche de la bande dessinée pour Victor Hamonic à une pratique plus artisanale avec Laetitia L’Heureux. Au premier jour du festival, les artistes se retrouvent dans l’espace nu de la galerie, avec tous les outils nécessaires à disposition. À partir de ce canevas vierge, iels composent des œuvres devant le public. Le processus créatif est donc le point de focal de l’événement. 

Collaboration interdisciplinaire 

À ce travail in-situ s’ajoute une programmation musicale en extérieur, avec là encore une dizaine d’artistes invités dont l’ordre de passage n’a pas encore était confirmé à l’heure où nous écrivons cet article. L’ouverture devrait être assurée par Eva Galiauskas et Romuald Chaloin Galiauskas avec une performance alliant électro trompette et dessin en live, dans l’esprit du festival. Les deux jours suivants, des lives courts et éclectiques s’enchaîneront sur la place et dans le passage du Globe et les dessinateur·ice·s sont invités à collaborer avec les musiciens, seuls ou à plusieurs. Iels découvrent la musique en même temps que le public, et improviseront des œuvres en lien avec l’univers sonore. 

Le dimanche après-midi, le festival se déplace complètement en extérieur avec une performance musicale et visuelle proposée par Sophie Menuet, avec plusieurs machines à coudre disposées dans l’espace public, puis un concert de l’Orchestre Nour de Toulon

CHLOÉ MACAIRE 

Vrrraiment !
Du 1er au 3 novembre 
Place et passage du Globe,
Galerie Metaxu, Toulon