lundi 29 avril 2024
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AccueilScènes : 13 Vents : en avant les artistes ! 

[SPÉCIAL SAISON] : 13 Vents : en avant les artistes ! 

Dans une démarche militante, le CDN de Montpellier met à disposition des artistes un espace et un temps d’expression long, nourrissant une relation au spectateur faite de multiples strates créatives

La règle est simple, la formule rodée : à chaque mois, son artiste ou son équipe artistique invitée. C’est le cas depuis l’arrivée de Nathalie Garraud et Olivier Saccomano à la tête de la direction artistique du centre dramatique national de Montpellier en 2018. L’hospitalité au temps long y est érigée au rang de norme, d’équité créative, de mission des plus fondamentale destinée à valoriser l’expérience et la recherche. Tout en tentant de transformer durablement les rapports entre les artistes et les publics. Pendant quatre semaines, il y a souvent une pièce de répertoire et une œuvre récente. Ainsi qu’un Qui Vive!, parenthèse joyeuse et rafraîchissante sous le signe de la découverte dont le programme est conçu avec les invités. Après un mois de janvier consacré au comédien Nicolas Bouchaud, maître d’un jeu théâtral singulier, févriers’annonce sous le signe de l’étonnement. Celui de Pierre Meunier et Marguerite Bordat, déterminés à nous montrer ce que l’on ne voit pas, puisant dans des matières brutes pour nous emmener ailleurs. La Bobine de Ruhmkorff (31 janvier au 2 février)est une réflexion incongrue autour de la bobine d’induction, capable de transformer un courant électrique de faible tension en très forte intensité. Le procédé, certes ingénieux, se transforme en une parfaite (bien que surprenante) illustration des mécanismes de l’attirance sexuelle. Cette pièce ancienne est mise en écho avec leur dernière création, pourtant très différente, Bachelard Quartet (7 au 9 février), une ode aux quatre éléments qui font la vie, sorte de rêverie lucide et subtilement sonore, irriguée par les mots poétiques du grand penseur Gaston Bachelard. 

Parole adolescente

Mars se fait triplement féminin, la parité est prise très au sérieux aux 13 vents. Quel est ce trio ? Céline Champinot, artiste associée, Marion Aubert, membre de l’Ensemble associé et Rébecca Chaillon. Trois autrices qui se connaissent bien, trois lieux, trois pièces puissantes s’intéressant à la question de la métamorphose, qu’elle soit liée à l’adolescence, à la folie ou à l’amour tragique. Au théâtre Jean Vilar, Plutôt vomir que faillir de Rébecca Chaillon (du 6 au 8 mars) fait sauter les tabous de la parole adolescente, traversée par le rejet des normes, la relation difficile au corps, la violence indomptée… À La Vignette, dans Juliette et Roméo sont morts (26 et 27 mars), Céline Champinots’intéresse à l’amour suicidaire qui hante la tragédie de Shakespeare et aux désirs qu’il met en exergue à un âge lui aussi adolescent. Pour ce qui est de Mues, à voir aux 13 Vents (13 au 15 mars), dont le texte signé Marion Aubert et la mise en scène par Marion Guerrero, raconte la lutte d’une femme pour ne pas se perdre dans la brume de la folie alors qu’elle arpente un coin perdu des montagnes des Cévennes dont on ne sait plus si elles sont rêve ou cauchemar. 

Expérience unique

En avril, Adrien Béal embarque le public dans une expérimentation scénique troublante, aussi précise que déroutante. On découvre avec curiosité ses deux dernières pièces, des créations collectives enthousiasmantes de l’ordre de l’expérience unique. Les pièces manquantes (puzzle théâtral) (3 et 4 avril), met six personnages, trois hommes et trois femmes, face à des situations que l’on préfèrerait éviter. Certaines pièces de puzzle manquent, chaque fois différentes, ce qui rend la représentation unique, alors que l’incompréhension nourrit un jeu théâtral déconcertant. Aussi dérangeante que la précédente, Toute la vérité (23 au 25 avril) se concentre sur cinq gestes transgressant des interdits de la société, notamment parce qu’ils sont en lien avec la sexualité, le désir, la famille. Les sens sont troublés, les perceptions déstabilisées, les habitudes repensées. Mai-juintermine la saison en duo avec Madame l’Aventure de Lionel Dray et Clémence Jeanguillaume, une pièce répétée et créée sur le plateau des 13 Vents, également co-production du CDN, et jouée dans le cadre du festival Le Printemps des Comédiens(31 mai au 2 juin et 7 au 9 juin). Ce périple théâtral s’inspire librement des grands récits d’aventure, faisant vivre sur scène « un monde plein de terreur, de suspens, de sang et d’ennui ». 

Toute la programmation de cette deuxième partie de saison est aussi traversée par une saison poésie se déroulant en itinérance citadine. Dans plusieurs lieux de Montpellier (Madredriosa, Black Out, Le Dôme), à plusieurs moments, on peut y écouter des artistes reconnus (Rébecca Chaillon le 29 février, Fantazio le 21 mars, Cécile Mainardi le 2 mai) comme des poètes en devenir, lesquels osent faire sortir ce qui les anime lors de scènes ouvertes toujours étonnantes d’inspiration comme de spontanéité. Les 13 Vents est la maison des artistes, de tous les artistes.

ALICE ROLLAND

13 Vents
Centre dramatique national 
Montpellier
13vents.fr
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