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La vie d’Adela

À Aix-en-Provence, Les Nuits Pianistiques célèbrent le piano romantique et fougueux d’Adela Liculescu.

Le festival des Nuits Pianistiques demeure, depuis plus de trente ans, un rendez-vous précieux pour les Aixois. Il leur permet de retrouver des pianistes rares, menant souvent des carrières de soliste et de pédagogue hors des sentiers battus, mais également de suivre le parcours de leurs recrues. C’est notamment le cas de Jacques Rouvier, présent sur le concert de clôture du 4 août, et dont Adela Liculescufut l’élève lors de l’Académie d’été de 2010. Désormais trentenaire, l’artiste roumaine s’est adonnée ce 27 juillet à un concert particulièrement ambitieux, sur le plan de l’exécution comme sur celui de l’interprétation. 

Pistes noires

C’est en effet dans le foisonnement stylistique et l’aboutissement d’un langage hors normes que le Carnaval de Schumann se distingue des œuvres pour piano d’alors. Les vingt-deux morceaux se succèdent comme autant d’esquisse : Pierrot, Arlequin, Pantalon et Colombine se déclinent les uns les autres ; Chiarina, lyriquissime, incarne le piano tempétueux de Clara ; Paganini et Chopin convoquent le spectre de ces compositeurs admirés. L’enchaînement est tout trouvé pour la Ballade n°1 qu’Adela Liculescu exécute sans filet : du désespoir quasi muet, comme pris à la gorge, au déchaînement empressé sur les successions chromatiques d’octaves sans fin, l’enchaînement se fait dans une même impulsion, sans laisser à l’auditeur et surtout à l’interprète le temps de reprendre son souffle. 

Il y a encore du Schumann dans ce Chopin-là. L’amitié entre compositeurs, leur capacité à célébrer le langage de l’un et à faire muter le style de l’autre constitue le fil rouge de ce récital ambitieux. Les Liebesleid et Liebesfreud composés pour piano et violon par Kreisler prennent ainsi, sous la plume de Rachmaninov, des airs de pistes noires aussi fournies que de très inspirées pages de Liszt. Liszt dont la transcription de la Valse de Faust de Gounod demeure également longtemps en tête : pour le maître hongrois, comme pour ses camarades, l’art de la transcription demeurait un exercice de style réjouissant destiné, comme le rappelle Michel Bourdoncle en ouverture du concert, à mettre en lumière des artistes injustement méconnus.

Suzanne Canessa

Les Nuits Pianistiques se sont tenues jusqu’au 4 août
Suzanne Canessa
Suzanne Canessa
Docteure en littérature comparée, passionnée de langues, Suzanne a consacré sa thèse de doctorat à Jean-Sébastien Bach. Elle enseigne le français, la littérature et l’histoire de l’Opéra à l’Institute for American Universities et à Sciences Po Aix. Collaboratrice régulière du journal Zébuline, elle publie dans les rubriques Musiques, Livres, Cinéma, Spectacle vivant et Arts Visuels.
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