mercredi 27 novembre 2024
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Les artistes en exil prennent leurs quartiers

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Artistes en exil © XDR

Sur la place du lycée Thiers à Marseille (1er arrondissement), ne soyez pas étonnés de croiser un atelier de création de maquettes, une performance de théâtre ou une initiation à la boxe. Toutes ces capsules artistiques sont le fruit du travail des artistes-réfugiés accompagnés par l’association l’Atelier des Artistes en exil. Chaque fin de soirée jusqu’au 19 juillet, des ateliers, des spectacles, des performances sont proposés à tous les publics, enfants comme adultes, avec en point d’orgue une « party en exil » le 13 juillet sur la place Jean Jaurès. Une dizaine d’artistes venus du monde entier offriront à partir de 18h30 heures une prestation artistique, souvent musicale mais pas seulement. 

Drapeau blanc

Année olympique oblige, c’est le thème du sport qui est cette année mis en avant. Des liens entre les pratiques sportives et artistiques que l’on retrouve à plusieurs endroits du programme : c’était le cas hier soir avec un atelier de création de trophées en argile par Yana Rozdobudko, ce sera encore le cas vendredi 19 juillet avec une masterclass d’initiation à la boxe professée par l’artiste-boxeur Asar Niazai. Sur la place du lycée Thiers, on retrouvera aussi un concert de rap syrien avec Wadee (le 16), une chorégraphie sociale intitulée La Ruche par la danseuse russe Dasha Sedova (le 17), ou encore un atelier de création de carte du monde animé par Natalia Permitina (le 18), avant, le même soir, une performance musique et théâtre signée Tatiana Calderón.  

Dans la place 

Rendez-vous est donné ce samedi 13 juillet sur la place Jean Jaurès, où, dès 18h30, une dizaine d’artistes se succèdent devant le parc à jeux. On retrouvera le rappeur Wadee cité plus haut, mais aussi le jazz fusion de l’Ukrainienne Mavi Pasha, ou le duo électro russo-ukrainien Verhovski x Majouga – qui commence à se faire un nom sur la place musicale marseillaise. On attend aussi, entre autres surprises, une performance des artistes birmans Yadanar Win & Ko Latt – dont on a déjà apprécié le travail lors de l’édition 2023 du festival Visions d’exil.

Cette programmation est proposée par l’Atelier des Artistes en exil. Une association qui assure aux exilés des espaces et matériels de travail, conseil juridique, cours de français… que ce soit dans leurs locaux parisiens ou ceux ouverts à Marseille depuis octobre 2021. 

NICOLAS SANTUCCI

Les quartiers d’été de l’Atelier des Artistes se tient jusqu’au 19 juillet sur la place du lycée Thiers et sur la place Jean Jaurès, Marseille. 

Insomnie cinématographique, CINEMA SUR COUR

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@Envie de Tempête

Drive-in à la marseillaise sans voitures et sur transats dans la cour Jobin de la Friche La Belle de Mai (Marseille). Grand écran déployé, la nuit blanche intitulée Cinéma sur cour se déclinera en quatre séances. Pour débuter, à 22 heures, un ciné-karaoké en (bonnes) compagnies : John Travolta et Olivia Newton-John, jeunes, beaux, toniques à souhait, dans la comédie musicale Grease de Randal Kleiser sorti en 1978 mais reprenant le look glamour des années 1950 et offrant une BO culte irrésistible. Qui n’a jamais chanté : « You’re the one that I want, your are the one I want, Oh Honey ! »

Doigts de rose

À minuit, en présence des réalisateur·trices Marcia Romano et Benoît Sabatier, une avant-première, Fotogenico (Sélection ACID 2024) où la « caméra libre se glisse dans les anfractuosités » de la cité phocéenne : un père se lance sur les traces de sa fille morte à Marseille. Le quinqua quelque peu hagard, découvre les mensonges de la disparue et  s’immerge dans la vie underground qu’elle menait. Comédie décalée, débraillée, poétique, sur une musique électronique post punk qui réveillera les plus somnolents. Vers 2 heures du matin, horreur, sexe, épouvante et frissons garantis : on retrouvera les années 1980, version « Slasher », avec le cauchemar éveillé des meurtres de Krueger dans Freddy-Chapitre 1 : Les Griffes de la Nuit de Wes Craven. Et cerise(s) sur le gâteau, le plaisir de revoir Robert Englund.

Quand l’aube pointera ses doigts de rose (et de sang) on finira avec Basile Martin, un jeune gars qui ayant rêvé de Faftao-Laoupo, créature annonciatrice de votre avant-dernier sommeil avant la mort, s’est résolu à plus jamais dormir ! Un film-ovni des années 1980, signé Alain Guiraudie: Pas de repos pour les braves !  

Tout au long de la soirée, si vous n’avez pas apporté votre pique-nique, une restauration sur place sera possible, et, aux aurores épuisées, un petit-déjeuner préparé par Les Grandes tables, sera proposé à ceux qui auront tenu le choc.

ÉLISE PADOVANI

Cinéma sur cour

18 juillet

Friche la Belle de Mai, Marseille

Mangeons les enfants pauvres !

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Modeste proposition © M.Voiry

Avant le soir donnait rendez-vous le 10 juillet au square Bertie Albrecht, au pied de l’abbaye Saint-Victor (Marseille) pour une intrigante et Modeste proposition en faveur d’un cannibalisme raisonné proposée par la Cie L’Art de Vivre, connue pour son goût de la fantaisie qui ambiance ses propositions théâtrales et musicales associant distinction et trivialité, expérimental et variétés. Et ses nombreux projets participatifs menés depuis sa base du Comptoir Sainte-Victorine à Saint-Mauront, dans le 3e arrondissement de Marseille. 

Les temps changent ?

Modeste proposition en faveur d’un cannibalisme raisonné est en fait un texte du XVIIIesiècle, un pamphlet écrit en 1729 par Jonathan Swift, l’auteur des Voyages de Gulliver, publié anonymement, dont le titre d’origine est Modeste proposition : pour éviter que les enfants des pauvres ne soient une charge pour leurs parents ou leur pays, et pour les rendre utiles au public. L’Art de Vivre, plus exactement le comédien Pit Godaert l’a actualisé pour la France du XXIe siècle, tout en reprenant la proposition principale de Swift : pour le bien de la société, il faut donner à manger aux riches les enfants des pauvres. Un spectacle en forme de conférence foraine mis en scène par Yves Fravega, créé dans le Off du Festival d’Avignon en 2017. Pour cette reprise au square Bertie Albrecht, c’est Paul Fravega qui reprend le rôle du conférencier. 

Rationalisme économique

Il apparaît devant un rideau de baraque foraine en chemise verte surmontée d’un jabot violet, veste noire et fleurs à la boutonnière, équipé d’une canne et d’une valise à roulettes, figure blanche, yeux cernés de noir, lèvres gourmandes rouge sanguin, on hésite entre clown et vampire. Il semble parfois se délecter de son exposé, voire en être possédé, parfois s’en horrifier, accompagné d’une bande son de notes d’orgue, de musiques de cérémonies tribales, ou de mélodies classiques. On rit tout en s’interrogeant au cours de sa démonstration illustrée en trois temps : 1 – Constat chiffré de la situation de la pauvreté en France. 2 – Présentation du projet. 3 – Arguments imparables en appui, puisés notamment dans les traditions de peuples premiers, dans les lumières littéraires et philosophiques de Montaigne, Levi-Strauss, Rousseau, ou chez des diététiciens. Car, en se penchant vraiment sur le cannibalisme, on se rend compte qu’il a de nombreuses vertus, outre nutritives. Bien sûr, il faut mettre de côté « les préjugés moraux qui encombrent la réflexion ». Mais dans certains naufrages ou accidents d’avion, n’est-ce-pas grâce au cannibalisme que des personnes ont survécu ? Et finalement, une vie de pauvre vaut-elle vraiment la peine d’être vécue, alors qu’elle pourrait être utile à l’ensemble de la société ? Surtout lorsqu’on connait la situation de la pauvreté en France et ses conséquences, criminalité, mendicité, prostitution, etc… Sans compter qu’elle donne une mauvaise image de notre pays à l’étranger, dissuadant les investisseurs. D’où le cannibalisme : un vrai projet de développement durable, écologique et solidaire, parfaitement adapté à notre époque. On vote ?

MARC VOIRY

Modeste proposition en faveur d’un cannibalisme raisonné a été présenté le 10 juillet au square Bertie Albrecht, Marseille.  

Métissage ou Tout-Monde

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ABSALON ABSALON © XDR

Étant donné le joyeux bazar de l’adaptation d’un roman lui-même extrêmement déstructuré, ou du moins magnifiquement polynarré, on se permettra de commencer par la fin du spectacle de cinq heures qui se déroule, se visionne, se vit et se partage à la Fabrica en ce début si politiquement perturbé du Festival d’Avignon

Puisque les choses, entre Noirs et Blancs, ont si mal commencé, comment en sortir et écrire un autre avenir ? Séverine Chavrier, au lieu de nous laisser sans réponse, cite Édouard Glissant, son Tout-Monde, la nécessaire créolisation, l’acceptation du métissage de tous par toutes les histoires. L’idée même d’Absalon Absalon, écrit en 1936, est de faire exploser le racisme d’un sud encore ségrégationniste. Et l’essence même de l’adaptation de Séverine Chavrier, conçue collectivement, s’est construite à partir des expériences des acteureuses danseureuses, racisé·es ou non, au moment où la menace Trump revient en trombe, et où l’extrême droite menace de prendre le pouvoir en France. 

Histoires percutées

Absalon Absalon raconte, dans une chronologie désordonnée, l’histoire d’un parvenu blanc, Sutpen, dans le sud raciste entre guerre d’Indépendance et guerre de Sécession. Histoire que le lecteur, confronté à des bonds chronologiques et à des points de vue divers, des récits multiples de la même scène, reconstitue peu à peu, jusqu’à la révélation raciste des motivations de Sutpen, et de son fils légitime Henry. Le titre fait référence à la Bible où Absalom, fils de David, tue son frère pour protéger leur sœur de leur relation incestueuse. C’est l’intrigue même du roman de Faulkner, qui raconte cependant une autre histoire, celle des Blancs et des Noirs, de l’esclavage et du viol, des métisses et des héritages, des relations de classes et de violence.

Séverine Chavrier rajoute six couches à cette complexité narrative, l’entrecoupant de références à d’autres relations Noirs/Blancs, actuelles, historiques, à d’autres guerres, à d’autres continents et d’autres esclavages, d’autres exploitations sexuelles et d’autres dépendances, et au capitalisme américain né de la traite et de la plantation, puis de Ford et Disney. 

Pourtant l’histoire répétée de Sutpen et ses enfants, légitimes ou bâtards, reste comme le fil du spectacle : le dispositif scénique, qui permet de superposer l’espace de la scène à un espace filmique fait d’images directes et de transmissions de coulisses, de montages, additionne les informations. Le temps parfois s’y attarde un peu trop, et les cinq heures du spectacle gagneraient sans doute à resserrer un peu certains passages, à sortir davantage des écrans. Mais le plaisir pris  à la musique, au cinéma, aux actrices virtuoses, aux danseurs formidables, aux dindons qui traversent (si si), à l’ironie mordante, à la révolte constante, à la jeunesse et aux récits, jusqu’aux révélations émaillées qui font le suspense de Sutpen, valent bien quelques passages plus faibles d’une œuvre qui défend, sans la nommer, la notion d’archipel : faire ensemble, dans la diversité des peuples et de leur relation.

AGNÈS FRESCHEL

« Absalon Absalon » est donné jusqu’au 7 juillet à la Fabrica, Avignon. 

Entre musiques et lagune

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Keziah Jones © Penelope Caillet

Difficile d’envisager un été sans le Festival de Thau. Chaque année, on attend avec impatience l’occasion de savourer la richesse des musiques qui font vibrer notre époque tout en rassasiant notre regard d’un sublime coucher de soleil sur l’étang et sa lagune. Avec la possibilité, pour les amateurs, d’en profiter pour déguster des fruits de mer et un petit verre de blanc. Cette année encore, jusqu’au 21 juillet, la programmation s’annonce musicale, festive, partagée et engagée. La pluralité des expressions musicales a toujours été un choix défendu avec force. De même que la volonté de ne pas se cantonner à des têtes d’affiche, mais au contraire d’inviter à la découverte. Sa devise ? « Résister, créer, enchanter ». Ce goût de l’éclectisme musical s’illustre cette année par un voyage à travers les esthétiques et les générations. Une aventure qui débute en itinérance sur le territoire. 

À vous de choisir si vous une escapade au jardin méditerranéen de Montbazin (le 16 juillet) portée par la fusion arabo-andalouse-électro de Rabie Houti Band ou une parenthèse hors du temps à la fabuleuse abbaye de Valmagne pour se perdre dans un dialogue sans fin entre la kora virtuose de Ballaké Sissoko et le violoncelle sensible de Vincent Ségal (le 17 juillet). La fête continue sur le port de Mèze, lors de quatre soirées à partager sans modération. Au programme : le groove teinté de blues de la pétillante Selah Sue (le 19 juillet), le blufunk dansant de l’inimitable Keziah Jones (le 20 juillet), l’énergie transcendante du showman Faada Freddy (le 20 juillet), ou encore le rock flamenco enflammé du mythique duo de guitaristes Rodrigo y Gabriela (le 21 juillet). Sans oublier deux coups de cœur programmés le même soir (le 18 juillet) : Maya Kamaty, belle découverte évoluant entre rap créole, percussions traditionnelles et rythmique électro et Yamê, révélation masculine des Victoires de la musique 2024. Une voix librement imprégnée de jazz, de soul et de rap. À découvrir.

Fakear et l’engagement citoyen

Festival associatif et indépendant depuis sa création en 1991, le Festival de Thau affiche haut et fort son engagement éco-responsable précurseur, lequel fait partie intégrante d’un projet artistique au service d’une vision durable permettant de préserver une lagune méditerranéenne fragile tout en favorisant la réflexion. C’est pourquoi Fakear, musicien électro mondialement connu pour ses morceaux planants et son engagement écologique, propose un DJ set à l’heure de l’apéro (le 20 juillet).Avant d’échanger en live sur son engagement citoyen dans la lutte contre le réchauffement climatique avec Clémence Meunier, journaliste indépendante et présidente de l’association « Music declares emergency France ». Au Festival de Thau, l’engagement est plus qu’un principe. C’est une signature.

ALICE ROLLAND

Festival de Thau 
Du 10 au 21 juillet
Mèze et sur la lagune de Thau 

Jazz sans frontières dans le Gard 

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Markus Stockhausen Group © Andre Elbing

Le petit village du Gard, niché entre Nîmes et Montpellier, est devenu depuis 1994, l’année où Fabrice Manuel, enfant du pays, a fondé avec un noyau d’amis le festival Jazz à Junas, un nouveau grand rendez-vous du genre. Depuis, il résonne sur les places, dans la garrigue, les Carrières de Junas, dites « Du Bon Temps », et dans les rues, dont certaines ont été rebaptisées de noms d’artistes : telles que la rue Dave Holland, la rue Youn Sun Nah, la rue Anne Paceo. Plus de 6 000 spectateurs pour les 30 ans du festival l’année dernière sont venus écouter Paolo Fresu, Anne Pacéo, Sandra N’kaké, Lars Danielsson, Nils Petter Molvaer, Daniel Humair, Vincent Peirani, Le Sacre du Tympan. 

Dominante allemande

À chaque édition, Jazz à Junas met en avant un pays invité : en 2024 c’est l’Allemagne. Avec des ensembles renommés, tel le Markus Stockhausen Group, quatre musiciens improvisateurs (Markus Stockhausen: trompette, Jeroen Van Vliet : piano et clavier, Jörg Brinkmann : violoncelle, Christian Thomé : batterie) qui invitent pour cette occasion gardoise l’impressionnant guitariste Nguên Lê à se produire avec eux. Triosence est un trio « songjazz » (Bernhard Schüler : piano, Omar Rodriguez Calvo : contrebasse, Tobias Schulte : batterie) très connu en Allemagne, collectionneur de prix prestigieux. Jakob Manz, saxophoniste de 23 ans, enflamme les critiques, qui le comparent à des références telles que David Sanborn, Lou Donaldson, Klaus Doldinger. Il sera présent avec sa Groove Connection (Karin Hammar : trombone, Simon Oslender : claviers, Bruno Müller : guitare, Larry Danielsson : basse, Per Lindvall : batterie) pour un hommage au son funk, soul et rythm and blues des années 1970. Également à Junas Nora Kamm, saxophoniste, chanteuse et compositrice allemande, installée en France depuis 2011, qui, après de nombreuses collaborations (Michel Benita, Andy Sheppard, Manu Dibango…) vient de publier One, premier album sous son nom.

Métissage allemand

L’Allemagne s’acoquine par ailleurs volontiers à Junas avec des musicien·ne·s d’autres horizons : l’Occitanie pour le duo Saxicola Rubi (Dirk Vogeler : clarinette basse, sax soprano ; Laurent Rochelle : clarinette basse, sax soprano) et le Dieter Ilg Trio (Dieter Ilg : contrebasse, Rainer Böhm : piano, Patrice Héral : batterie). Un trio qui jouera des œuvres de Bach dans une version jazz retravaillée par Ilg. La trompettiste française Airelle Besson est elle en trio avec deux musiciens allemands : Sebastian Sternal au piano et Fender Rhodes et Jonas Burgwinkel à la batterie. Dans le Tingvall Trio, Jazz Awards pour chacun de ses albums studio, on trouve aux côtés du compositeur et pianiste suédois Martin Tingvall, le contrebassiste cubain Omar Rodriguez Calvo et le batteur allemand Jürgen Spiegel.

Jazz à Junas 2024 se clôturera avec une affiche franco-coréenne prestigieuse puisque Youn Sun Nah, accompagnée de deux pianistes-claviéristes Eric Legnini et Tony Palemean, viendra chanter les morceaux issus de son dernier album Elles, consacrées à des grandes voix féminines.

MARC VOIRY

Jazz à Junas
Du 17 au 20 juillet
Divers lieux, Junas

Effervescences a cappella

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L'ensemble Les Voix animées © X-DR

C’est en compagnie de deux courts métrages de Charlie Chaplin que quatre complices des Voix animées se rendent en terres avignonnaises. Délaissant les chants de la Renaissance et les partitions de Josquin des Prés, c’est au répertoire de Bach, Brahms, Verdi mais aussi de Chaplin, Scott Joplin, Les Frères Jacques que le quatuor de l’ensemble à géométrie variable fait appel pour suivre de ses performances vocales les acrobaties virtuoses de Charlot. Le spectacle déjà bien rôdé est une pépite qui égaiera de sa verve la Collection Lambert d’Avignon dans le cadre du Off et d’Interférences, événement musical créé par la Fevis. 

Tour des chapelles

Renouant avec leurs fondamentaux, les musiciens partiront à Nice puis à Aix-en-Provence, Collobrières et Toulon et habiteront par les élans de la musique vocale sacrée de la Renaissance les voûtes des diverses chapelles de ces villes, Chapelle du Saint Suaire, Des Oblats, des Pénitents Gris, Saint-Pons… Deux programmes sont proposés : In memoriam où deux grands polyphonistes anglais de l’époque élisabéthaine seront à l’honneur, William Byrd et Thomas Weelkes, décédés tous deux en 1623, il y a 400 ans ; Magnificat, avec des musiques de Tomás Luis de Victoria, compositeur majeur de la fin de la Renaissance espagnole et le compositeur italien emblématique de cette période, Giovanni Pierluigi da Palestrina. 

Entre Pierres et mer

Le treizième cycle du festival Entre Pierres et Mer se déclinera en trois étapes, toutes passionnantes : Cantus Firmus qui s’intéressera aux « flamboyances contrapuntique franco-flamandes du XVe siècle » avec des pièces de Guillaume Dufay qui s’inspirera d’une chanson populaire L’Homme armé pour construire les étapes classiques de la messe, mêlant avec espièglerie profane et sacré. Comme chaque saison, une création commandée par les Voix Animées sera jouée en première mondiale. Pour ce faire, le compositeur a une double contrainte : écrire pour des voix a cappella et pour l’Abbaye du Thoronet. En effet, à chaque concert, on a l’impression que les pierres de l’édifice répondent et offrent leur voix aux résonances de celles des chanteurs. L’édition 2024 aura le privilège d’entendre la création d’un motet de Fabio Marra. Le deuxième volet, Harmonia Sacra sera dédié « aux génies de la musique de la fin du XVIème siècle », Palestrina et Orlande de Lassus et le troisième temps, Parodia, poursuivra l’exploration de la construction de la messe à partir de chants préexistants. Ici, Palestrina et son disciple Tomás Luis de Victoria composent chacun une messe parodie sur leur propre motet pour le temps de Noël, O magnum mysterium… Pinces sans rire ces musiciens de la Renaissance !

MARYVONNE COLOMBANI

Du 10 au 17 juillet
Collection Lambert, Avignon
Du 19 au 28 juillet
Tour des Chapelles
9 août au 13 septembre
Cycle entre pierres et mer

Dans la cour de récré européenne 

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Fabrizio Solinas dans Little Garden © X-DR

À peine le début des vacances, et c’est déjà l’heure de la récréation à Aubagne. Avec son ambiance de kermesse, Festimôme est de retour pour une 23e édition. Du 19 au 21 juin, le parc Jean Moulin se peuple de manèges, de jeux en bois et de nombreuses familles venues assistées aux différents spectacles de la programmation amusante et éclectique. 

Cette année, ce festival international de cirque et d’arts de la rue accueille nombre d’artistes et de compagnies italien·ne·s. Ce sont Fabiola et Giulio, les marionnettes de la compagnie La Fabiola, qui ouvriront le bal avec Attenti a quei due. On retrouvera ensuite pêle-mêle la circassienne et performeuse Firenza Guidi qui viendra présenter sa nouvelle création, 6MEMOS, dans laquelle elle et ses partenaires déploient un monde de jeu dans un univers post-apocalyptique, le jonglage de Fabrizio Solinas dans Little Garden, et le pluridisciplinaire Rococó de la compagnie Rampante. 

Magnétique

Luigi Ciotta pioche lui aussi dans les arts du cirque, et les mélange à la magie et au théâtre d’objets pour proposer Abattoir Blues, un spectacle dans lequel il aborde le travail en abattoir et, par ce prisme, la bestialité et la dignité des êtres vivants. Ironie ou hasard de la programmation, les deux représentations d’Abattoir Blues (le samedi et le dimanche) sont précédées des 3 petits cochons du Théâtre Magnetic, une réécriture caustique du célèbre conte dans le vocabulaire du théâtre d’objets. 

Ce sont les Suisses de la compagnie Zali qui viendront clôturer ces trois jours de festivités avec Tpia, leur dernière création de trapèze aérien. Un week-end plein de jeux et de surprises, au rythme des concerts du groupe Papa Merlin en journée, et de rag’n’Swing et de Talin en soirée.

CHLOÉ MACAIRE 

Festimôme 
Du 19 au 21 juin
Parc Jean Moulin, Aubagne 

Pas un festival, une politique

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La Veillée de la Cie Opus © Nicolas Joubard

Zébuline. Pourquoi refusez-vous de parler de festival quand vous présentez les Fadas ? 

Florian Salazar-Martin. Parce que, plus qu’une programmation, c’est l’incarnation d’une politique, quelque chose qui se tisse et qui se maille, tout au long de l’année, et se fabrique ici, avec les gens, pour eux. Qui entre en résonance avec les politiques environnementales, sociales et d’éducation. Je suis adjoint à la culture mais aussi à la ville durable et à la biodiversité. Les fadas, c’est une conception durable de la culture.

Vous êtes aussi un adjoint durable !

Oui ! Mon premier mandat date de 1995, j’ai eu le temps de construire une politique ! Pour moi, une politique culturelle ne se conçoit vraiment que si elle bouscule tout le reste et permet de mieux vivre ensemble. Les Fadas, c’est l’idée que l’on peut créer un espace commun en proposant des projets un peu fous, décalés, gratuits, en allant dans tous les quartiers, en construisant des projets ensemble, en les ajustant avec le temps, en les actualisant. Aujourd’hui par exemple, le Comptoir des fadas qui aura lieu le 16 juillet avec Nora Hamadi parlera des élections, européennes et législatives, sur le principe d’une parole partagée et respectueuse. Ca n’était, évidemment, pas prévu avant les élections.

Mais pourquoi ces Fadas sont ils « du monde » ?

Parce qu’évidemment il s’agit d’ouvrir la ville aux cultures du monde. En accueillant des artistes en résidence, comme Nausicaa Favart Amouroux qui vient exposer ses photographies des salines de Cotonou, au Bénin, et les mettre en résonance avec des images des salines de Martigues. La mémoire de Martigues, celle de toutes les villes méditerranéennes d’ailleurs, repose sur des apports extérieurs, des gestes communs qui nous relient avec d’autres villes côtières, d’autres savoir-faire. Le Tout-Monde, dirait Glissant. On aurait pu l’appeler les Fadas du Tout-Monde ! On est conscients de cette créolisation que vivent toutes les villes méditerranéennes ouvrières, aujourd’hui en transition, mais fortes de leur culture populaire, celle qu’on transmet en parlant, en tchatchant, en mangeant ensemble, et en voyant ensemble des films, des concerts, en rencontrant des artistes, des scientifiques, des écrivains…

Il est difficile de se retrouver dans cette programmation…

Oui, parce qu’elle évolue tout le temps, mais les gens ont l’habitude, ils savent que tous les lundis pendant l’été il y a des concerts, on a déjà eu Jo Corbeau et Nevché qui a présenté son nouvel album, on a 25 séances de cinéma en plein air gratuites, avec des films sur la question sportive cette année, au musée Ziem on a refait l’accrochage avec une exposition Vivant, faune et flore, qui procède de décisions collectives du personnel et des usagers, et qui offre un regard nouveau, lié à la biodiversité, sur les peintres comme Ziem, Derain, Guigou, Soarès… On cherche à prendre, à reprendre contact avec les gens pour qu’ils contribuent à l’espace commun. C’est une espèce de bouillabaisse, ça n’est pas évident à communiquer, mais ça marche. Il faut venir voir.  

Il y a un temps fort tout de même, dans cette politique continue, ce sont les 9 jours du Village des Fadas… 

Oui, cette année on le fait à la base nautique, un site extraordinaire, qu’on transforme en lieu de vie continue, où on peut se restaurer, et où les concerts et spectacles, mais aussi les discussions, se succèdent. Yan Madé, auteur de BD, y sera présent toute la semaine. Il s’est installé dans le Tétrodon pour y créer une œuvre…

Le Tétrodon ? 

Oui, c’est un habitat modulaire conçu pour être produit en masse pour installer des villages collectifs. Dans les années 1970, avant la crise pétrolière. Olivier Bedu a restauré ce Tétrodon retrouvé à Fos-sur-Mer, c’est aujourd’hui un exemplaire unique, classé, le Tétrodon de Martigues, témoin de toute une histoire, et revisité…  

ENTRETIEN REALISE PAR AGNES FRESCHEL

Les Fadas du Monde 
Jusqu'au 21 juillet
Martigue

Mäkelämania au Festival d’Aix

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Création

En ouverture des deux soirées de concert, était donnée, en création mondiale, une œuvre commandée conjointement par l’Orchestre de Paris et le Festival d’Aix à la jeune compositrice britannique Charlotte BrayA Sky Too Small. Les premières notes données sur le fil des violons se charpentent avec les graves des cuivres, vibrations pailletées dans une esthétique de l’attente. Le silence se sculpte sur les pizzicati étouffés des violons tandis que s’élabore un tableau sonore constitué de traits en écho avant que l’ensemble s’embrase. L’évocation de la liberté volée, – l’histoire est celle d’une personne injustement emprisonnée-,  trouve des tonalités sombres et glaciales en une construction proche du poème symphonique où la fin est un reflet douloureux du début. Malgré cette tension qui met tout en cage, même le ciel, naissent ici et là des fleurs mélodiques dont la fragile beauté nous donne encore l’espérance d’une possible réconciliation des êtres. 

Le goût du spectaculaire

Lumineuse dans ses grands contrastes, ses crescendos vertigineux, ses entrées aux accords nets, selon le « goût français », d’où le nom de « Paris » qui lui est accolé, la Symphonie n° 31 que Mozart composa en 1778, rompait avec les angoisses précédentes, jouant des ambivalences entre les tonalités majeures et mineures. Les timbales annoncent les orages romantiques tandis que pour la première fois chez Mozart, apparaissent les clarinettes… Après une pause nécessaire, la Symphonie fantastique de Berlioz déployait sa foisonnante instrumentation, ses couleurs, ses accents. La direction d’une précision tranchante apportait un velouté subtil à cette partition révolutionnaire. Le chef, habité, danse, mime, joue, en osmose totale avec son orchestre, ciselant les détails, offrant une liberté vivifiante aux instrumentistes qui épousent avec virtuosité toutes les inflexions du propos. La quintessence du mouvement romantique se voit résumée ici, dans une interprétation d’une fougue, d’une intelligence et d’une poésie rares. 

Post-romantisme

Deuxième volet du diptyque symphonique, le concert du 14 juillet était consacré à la Nuit transfigurée de Schönberg et à la Quatrième Symphonie en sol majeur de Mahler. D’emblée, Klaus Mäkelä sait faire entrer public et orchestre dans la chair de l’œuvre. Le travail subtil des aigus façonne l’invisible et l’indicible. Théâtral, l’orchestre nous emporte dans son rêve nourri des vers de Richard Dehmel où « la lune court au-dessus des grands chênes » et voit un couple sa « trahison », son pardon au cœur de la quiétude des arbres. Suivait cette évocation frémissante l’œuvre mahlérienne, dont le lyrisme intègre danses villageoises, grelots, se plaît aux ruptures, aux amples vagues des cordes éclairées par les sonorités rutilantes des cuivres, utilise les altos et les violoncelles sur les parties mélodiques réservées traditionnellement aux violons, leur accordant une épaisseur veloutée. Dans le mouvement final, la voix de la soprano Christiane Karg énonce les « joies de la vie céleste » avec une aisance et un naturel qui en rendent la beauté évidente. Un art de la joie qui nous transcende…

Deux membres éminents de l’orchestre, Gilles Henry (violon) et Jean-Michel Vinit (cor) faisaient leurs adieux lors des première et seconde soirée, autre moment d’acclamations pour un public dont les applaudissements ont retenti comme rarement au GTP !

MARYVONNE COLOMBANI

Les 13 & 14 juillet, GTP, Aix-en-Provence, Festival d’Aix