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OCCITANIE : Détruire dit-iel

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ART.13 ©️Clarisse Delile

« Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un État. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays. » C’est de l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme que vient le titre de la nouvelle création de Phia Ménard et de sa Cie Non Nova. Et c’est par le gouffre qui existe aujourd’hui entre ces grands principes universels gravés dans le marbre des nations et le récit de jeunes migrantes et migrants rencontrés par l’artiste, confrontés au réel de leur refoulements aux frontières par ces mêmes nations, que le questionnement sur la frontière s’est imposé comme l’enjeu de cette nouvelle proposition. Frontière géographique, mais aussi celles des enfermements divers et variés (idées, catégories, sexualités, identités …) qui dessinent le monde d’aujourd’hui, et le rabougrissent. 

Retour du refoulé

Au début du spectacle, on est face à un jardin, en pleine lumière, à la pelouse impeccablement tondue, ornée de quelques formes décoratives en gravier aux contours nets, entourée d’une haie taillée courte. Au centre trône sur son piédestal la statue d’un Grand Homme, tenant une hâche à la main, posée devant lui. À la fin du spectacle, plus de statue ni de jardin, plus de centre, on sera face à un paysage de décombres, une sorte de chaos crépusculaire, aux accents féeriques. Entre les deux va se dérouler un conte sauvage dans lequel une créature masquée, rampante puis dansante (Marion Blondeau) s’extirpant de dessous la pelouse dans un vacarme de bruit de tondeuses et de tronçonneuses infernal, sorte de faune terrestre puis céleste, va par sa puissance de jeu et de vie, sa grâce spontanée, malicieuse et brutale, détruire le bel ordonnancement et les symboles bien morts du jardin statufié, créer de nouveaux espaces, et rouvrir des possibles au milieu des ruines. Un retour du (des) refoulé(s) sans paroles, légèrement circassien, totalement visuel, musical et chorégraphique. 

MARC VOIRY

Art. 13
28 février
Opéra Comédie, Montpellier, dans le cadre de la saison Montpellier Danse

« Le Molière imaginaire » la chatoyante comédie d’une agonie

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Le Molière imaginaire © Memento distribution

Après Ariane Mnouchkine (1978) et Laurent Tirard (2007), c’est au tour d’Olivier Py de consacrer un film au dramaturge. Ressuscité par un charismatique Laurent Lafitte, on s’intéresse ici à ses derniers instants, le 17 février 1673, soir de la quatrième représentation du Malade imaginaire. Si Olivier Py entreprend de détruire certains mythes, comme celui qui voudrait que le dramaturge soit mort sur scène, c’est une représentation largement imaginée qu’il propose avec ce huis-clos dans le théâtre du Palais-Royal, tourné à la Fabrica d’Avignon.

Trouple de théâtre

En parallèle de la représentation de la dernière comédie de Molière, qui structure la chronologie du film, d’autres scènes sont jouées, en coulisses, dans ce théâtre labyrinthique à plusieurs étages dont l’éclairage à la bougie tamise les couleurs. Des personnages bien connus de l’entourage de Molière – sa femme Armande (Stacy Martin), œuvrant inquiète au salut de son mari à l’agonie, ou encore La Grange (Émilien Diard-Detoeuf), auteur du célèbre registre renfermant de précieuses informations sur la troupe – en côtoient d’autres, occultés par l’histoire officielle. C’est ainsi que les spectateurs assistent, surpris, à des échanges poétiques et érotiques que le dramaturge partage avec Michel Baron, jeune comédien de la troupe avec lequel Molière aurait entretenu une relation amoureuse, comme le confirment plusieurs biographes. À cela s’ajoutent certains mythes – sa traduction de Lucrèce détruite par une servante qui aurait utilisé le papier pour faire des papillotes – ou rumeurs, comme le lien de filiation que ses ennemis lui prêtaient avec Armande, de vingt ans sa cadette. Le public n’est pas oublié, peuplé de ridicules qui évoquent ceux que Molière moque dans ses pièces, comme les trois précieuses édentées faisant figure de Parques annonçant la mort de l’auteur. Le choix de nombreux plans-séquences permet de circuler de manière fluide entre ces différentes scènes réelles et imaginaires.

Les amateurs de vérité historique n’aimeront pas ce film dont l’ambition affichée et assumée est de proposer une version imaginée de l’auteur, recréée, dans laquelle la fiction est délibérément mise au service de la vérité du dramaturge. Ou plutôt de la vérité qu’Olivier Py s’en fait. Libre variation autour de l’agonie de l’auteur, ce film testament est un bel hommage proposé par le réalisateur sur le maître de la comédie classique, avec lequel il lui est ainsi donné de dialoguer, à quatre siècles d’intervalle.

MATHILDE MOUGIN

Le Molière imaginaire, de Olivier Py
Sorti le 14 février 2024

CRAC OCCITANIE : Gianni Pettena, l’anarchitecte

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Exposition Anarchitecture, Gianni Pettena © Crac 2024

Anarchitecture : le titre de l’exposition dédiée à Gianni Pettena au CRAC Occitanie de Sète ne doit rien au hasard. Au contraire, il s’agit d’un indice d’importance pour mieux comprendre la démarche formelle de l’artiste italien de 84 ans. Un mot qui en dit long sur celui qui a étudié l’architecture à Florence dans les années 60 et n’a pourtant jamais exercé le métier d’architecte, préférant laisser libre court à sa créativité dans le vaste champ de l’art contemporain. Pas question pour Gianni Pettena de mettre des frontières entre les disciplines. Dans un manifeste publié en 1973 et intitulé L’Anarchitetto : Portrait of the Artist as a Young Architect, il se définit lui-même comme un « anarchitecte ». Ce terme à la fois poétique et décalé résume son parcours d’aspirant architecte devenu artiste, écrivain, penseur, passeur, provocateur peut-être aussi. Du moins d’émotions. C’est avec une facilité déconcertante qu’il a réinventé les espaces du CRAC, entre minimalisme et onirisme grâce à des installations anciennes comme d’autres plus récentes. On y découvre toute la liberté conceptuelle d’un homme qui fut l’un des piliers de l’architecture radicale italienne, portant un regard très personnel sur l’architecture et le design. Au fil des salles, l’art de Gianni Pettena nous immerge, nous amène à changer de perspective et remettre en cause notre rapport à l’espace, à l’utile, à l’évident. Tout en replaçant le corps humain au centre de tout comme pour mieux le reconnecter à son environnement naturel. 

Fantôme du passé

Étonnant Tunnel sonore, dessiné en 1966 mais réalisé pour la première fois lors de cette exposition. Soit une succession de cadres de métal qui se transforme en instrument géant quand un personnage revêtu d’un costume d’écailles le parcourt. Le corps est souvent invisibilisé, comme dans l’installation Presenza/Assenza datée de 2020, où l’artiste laisse en creux les traces de sa présence, fantôme du passé comme de la création achevée. Dans une autre salle, une architecture de raphia sature nos sens d’un paysage inattendu aux senteurs exotiques. Un peu plus loin, des manteaux se transforment en chaises et des chaises se portent sur le dos pour se faire nomades et affirmer leur présence dans l’espace public avec une certaine radicalité. La dernière salle est celle qui nous emmène le plus loin. Paper est uneinstallation créée pour la première fois en 1971 à Minneapolis : un monde de bandelettes blanches de papier qu’il faut défricher pour avancer, faire naître l’architecture qui construit l’espace tout en la détruisant, permettre au visiteur d’agir sur son environnement de manière consciente. Une invitation à inventer un autre langage où le corps a toute sa place. 

ALICE ROLLAND

Anarchitecture
Jusqu’au 1er septembre
CRAC Occitanie, Sète 

Turquoise et gestations

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Lorsque l'enfant paraît © Marcel Hartmann

Le décor délicieusement kitsch, murs turquoise, canapé de velours rouge assorti à la robe d’Olympe, épouse de Charles Jacquet, sénateur, sous-secrétaire d’État à la famille, correspond à l’esthétique convenue de l’intérieur « bourgeois ». Au fil des actes, les murs se referment, rétrécissant l’espace, signifiant l’impasse dans laquelle les personnages se trouvent. Le sénateur, formidable Michel Fau, vient d’obtenir la fermeture des maisons closes et l’augmentation des peines sur les délits d’avortement, alors que vingt-cinq ans auparavant il n’avait pas hésité à le demander à sa maîtresse. 

Le voici qui apprend coup sur coup que sa femme, sa secrétaire, sa fille, sa bonne, sont enceintes. Craignant ridicule et médisances qui pourraient mettre un frein à sa carrière, il se met à envisager l’avortement, principalement pour son épouse, Catherine Frot, éblouissante de verve dans son rôle de femme potiche, drôle, fine jusque dans les lourdeurs de sa « partition ». Elle porte la pièce, donnant de sa poésie aux autres comédiens, émouvante dans la perte de repères de son univers, et les a-priori de classe qui la constituent et pourraient la rendre tout simplement atroce : méprisée par son mari, elle méprise la bonne avec une sorte d’innocence !

On navigue dans un monde qui se déglingue avec efficacité, usant du burlesque et de la férocité joyeuse pour faire tomber les masques de cette comédie humaine peuplée d’hypocrites. Le mensonge est souverain dans ce bal des illusions : la jeune fiancée n’est pas si rangée, le fils « bohème » est sans intérêt… L’égoïsme de tous souligne avec acidité l’obsolescence d’une morale bourgeoise qui se défait dans les soubresauts de l’après-guerre. On rit en établissant des parallèles avec notre temps, et c’est amer.

MARYVONNE COLOMBANI

Lorsque l’enfant paraît 
jusqu’au 22 février
Jeu de Paume, Aix-en-Provence

Hoorsees, Seppuku et Camille Potte 

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Hoorsees © X-DR

L’EJ c’est le S, le projet de l’Espace Julien qui confie un mercredi par mois les clés du Café Julien à un collectif musical émergent, s’associe avec Le Scan Club. Cette émission de Radio Grenouille, qui discute une fois par mois des musiques actuelles, est en charge de la programmation. Deux groupes et une expo sont ainsi à découvrir. Le quatuor parisien Hoorsees dont le dernier album « Big » cherche à « réconcilier l’indie pop des disquaires les plus érudits avec le top 50 ». Puis le loufoque collectif marseillais Seppuku, obsédé par les albums concepts et la peur de se prendre au sérieux. Une « Expotte » de l’illustratrice Camille Potte, bien connue du milieu musical, sera à découvrir sur les murs de l’Espace Julien. Une soirée à l’entrée libre à ne manquer sous aucun prétexte, ne serait-ce que pour le blind-test – avec cadeaux à la clé – qu’organise Le Scan Club ! 

R.G. 

28 février
Café Julien, Marseille

Sexualité de classe

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La Puce a l'oreille de Georges Feydeau - Mise en scene Lilo Baur - Comedie-Francaise © Brigitte Enguerand

Les applaudissements du public conquis retentissent alors que les comédiens-français reviennent pour saluer sur la scène de l’Opéra Comédie de Montpellier. Viennent de se dérouler deux heures de quiproquo hilarants à la résolution interminable, deux heures de situations rocambolesques et de critique bourgeoise de la bourgeoisie, deux heures de Feydeau. 
Pour cette version de La Puce à l’oreille, créée en 2019 à la Comédie-Française, la metteuse en scène Lilo Baur a décidé de substituer aux intérieurs parisiens du début du siècle dernier, un chalet de montagne dans les années 1960. On ne peut que saluer l’extrême cohérence de la mise en scène et des ajustements dans le texte, qui permettent de créer un univers complètement consistant et ajoutent une réelle plus-value au comique de ce classique du théâtre de boulevard. Le jeu des acteurs, inspiré à la fois des grands du burlesque et de feuilletons des sixties, est particulièrement impressionnant et confine parfois à l’acrobatie, notamment au cours du deuxième acte, lorsque le rythme s’emporte et que chacun tente de sauver sa peau. 

Méta-bourgeois


Seulement, le même problème se pose toujours lorsque l’on cherche à revisiter des pièces comme celles de Feydeau sans trop en altérer le texte : aucune modernisation de la mise en scène, si brillante soit elle, ne saurait gommer les traces de l’époque et de la classe sociale de l’auteur dans le texte. Feydeau est bien loin d’être le plus misogyne de ses confrères, et on pourrait même qualifier certains personnages de la pièce – Lucienne et Raymonde – de femmes fortes. Elles cherchent tant bien que mal à faire respecter leur volonté dans leur vie amoureuse et sexuelle et, bien que pleines de contradictions, ne sont pas potiches. Mais nous sommes bien obligés de constater que ce traitement n’est accordé qu’aux personnages de bourgeoises. Les femmes qui travaillent, les domestiques et la tenancière de l’hôtel du Minet Galant, sont bien plus creuses. Leur vie sexuelle, débridée et dénuée de toute réflexion, les rend risiblement esclave de leur désir et de celui des hommes. Et ce n’est pas un détail, considérant que la majeure partie de l’intrigue est relative aux activités sexuelles des uns et des autres. Évidemment, il n’est pas possible, en étant de bonne foi, de reprocher à Feydeau sa notion très floue du consentement, mais nous pouvons tout de même nous interroger : est-ce pertinent de rire des bourgeois en adoptant leur point de vue ?

CHLOÉ MACAIRE

La Puce à l’oreille par la Troupe de la Comédie Française a été présenté du 15 au 17 février à L’Opéra Comédie, une programmation du Domaine d’O, Montpellier

Ouvrir la cage

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Open Cage © Caillou

L’entre2 BIAC a débuté le 26 janvier  avec Friendly de la cie Les Attentifs, duo cirque-théâtre sur l’amitié inter-sexe. Dans Open Cage, il s’agit également d’un duo : celui d’un homme (Damien Droin) enfermé dans sa chambre d’hôpital, la « cage » du titre, cage à la fois physique et mentale, avec son infirmière (Sarah Devaux). Chambre scénographiée sur un plateau surélevé et en pente, qui se retrouvera assez vite à la verticale, avec un lit à armature métallique, qui, par effet de gravité, tout comme les personnages, glisse dangereusement vers le vide noir. 

Sur le côté un escalier métallique, où apparaît l’infirmière, en version « réelle », combinaison blanche, et en version « rêvée », habillée de rouge. C’est la version rêvée qui accomplit des séquences de danse-acrobatique avec l’homme tout autour du lit, dessus, dessous, puis en danse-voltige, à travers chutes et envols. Ou en enroulements acrobatiques sur des cordes lisses, qui tombent des cintres, et semblent parfois animées d’une vie propre. Le tout accompagné d’une musique aux accents sombres, méditatifs, tendus. Aucune parole est prononcée, ce sont les corps qui parlent, à travers leurs équilibres, déséquilibres, chutes et envols. Des séquences en théâtre d’ombres introduisent le spectacle, projecteurs placés sous le trampoline, rideau plissé accueillant les ombres, qui sera plus tard le support d’une séquence de danse acrobatique très « plastique » de Sarah Devaux. Enfin, une dernière chute, un dernier envol, et c’est avec l’infirmière « réelle » que la « cage » s’ouvrira. 

MARC VOIRY

Open Cage a été présenté le 15 février chez Archaos dans le cadre de L’Entre2 BIAC
À venir 
Damien Droin
sera présent avec sa compagnie Hors-surface pour Au bout la mer, clôture de l’Entre 2 BIAC organisée par la Mairie du 1/7 sur le Vieux-Port, avec la restitution de l’atelier collectif À ciel ouvert, et le spectacle Envol, dans le cadre des Olympiades culturelles

Del Cerro

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© Anne-Laure Etienne

Intriguée par la signature de Pablo Del Cerro, attachée à une centaine d’œuvres d’Atahualpa Yupanqui, alors qu’elle faisait des recherches autour de l’œuvre musicale de ce dernier, la chanteuse Mandy Lerouge a mené une véritable enquête durant près de trois ans. Pablo Del Cerro était une femme, française, compagne d’Atahualpa Yupanqui, compositrice tout aussi géniale que discrète. Le spectacle qui découle de cette recherche et de ces rencontres nous fait plonger à notre tour dans les bonheurs de la quête, part des voix enregistrées de personnes qui ignorent qui est cette Antoinette Peypin, mais aussi de celle, émouvante, de son fils qui évoque ses parents. Les chants souvent donnés en primeur sont entremêlés aux bribes du récit, prennent une épaisseur nouvelle, habités d’un parfum de légende. La voix souple de Mandy Lerouge se glisse avec aisance dans les méandres des textes et des mélodies, accompagnée par le violoncelle augmenté d’Olivier Koundouno, la guitare de Diego Trosman, les percussions et la batterie de Javier Estrella.

M.C.

Le 23 février
Cité de la Musique, Marseille

OCCITANIE : Hémorragie interne 

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Romeo Castellucci © Luca Del Pia

« Ce qui m’intéresse dans Racine, c’est son inactualité ». En soulignant d’entrée ce paradoxe, le metteur en scène italien, plutôt habitué du théâtre de la cruauté d’Artaud que de la retenue bienséante de Racine, débusque en Bérénice les oppositions qui en font la force spécifique.

Bérénice, tragédie sans mort et sans action, met en jeu la fin d’une histoire d’amour, pour les trois protagonistes principaux. Un amour au schéma tragique classique – Antiochus qui aime Bérénice qui aime Titus qui aime… Rome- sauf que personne ici, ne laisse la passion amoureuse dévorer l’intérêt supposé de la cité. Argument peu tragique…

Bérénice, pièce classique, ne repose sur aucun mythe, aucune tragédie grecque. Son personnage titre, Bere-nike, celle qui porte la victoire, est étrangère. Grecque justement, ou macédonienne, Reine de Palestine. Jean Racine s’approprie l’histoire romaine pour l’opposer à la sphère grecque, qui a inventé la Tragédie. Il invente ainsi, en France la tragédie de la Raison d’État, qui repousse l’étrangère, comme Louis XIV avait renoncé à Marie Mancini pour épouser l’Infante d’Espagne. Rendant la tragédie raisonnable, le contemporain de Descartes l’inscrit, dans Bérénice, très loin de ses fureurs fondamentales.

Bérénice, tragédie de la langue, des mots qui se disent et blessent, de la séparation acceptée et du deuil de l’amour, cherche le naturel, l’éprouvé, loin des fureurs et des violences, loin des actions, jusqu’au départ. Nécessitant un grand naturel et une grande simplicité, la tragédie est pourtant écrite dans cet alexandrin qui sublime et contraint le jeu, le rythme, l’expression même des idées et des sentiments, recherchant un naturel profondément artificiel.

Enfin Bérénice, tragédie janséniste, repose sur une injustice inacceptable pour un chrétien, puisque Bérénice est privée de la Grâce qu’elle mérite, et Titus, rare personnage de Racine sans faute et sans faille, empêché de vivre son amour pur et sincère. Le Ciel serait-il vide ?

Transcender les oxymores

C’est fort de ces paradoxes que Roméo Castellucci propose son Bérénice. Il s’attache à cette cruauté de la raison, la concentrant autour de douze performeurs représentant la foule, et deux comédiens (Cheikh Kébé et Giovanni Manzo) qui tournent autour du mythe vivant qu’est aujourd’hui Isabelle Huppert. « L’actrice définitive », dit le metteur en scène. 

La musique aussi, composée par Scott Gibbons, sample ses mots, ses soupirs, ses colères. Les confidents disparaissent, les dialogues deviennent monologues, isolant encore le trio au cœur d’un monde bruissant de voix intérieures. 

Bérénice est une « hémorragie interne », pas une goutte de sang n’est versée, mais c’est tout un monde, d’accueil de l’étranger, de primauté de l’amour sur la raison, qui s’écroule avec leur renoncement intime. Inactuel ? 

AGNÈS FRESCHEL

Bérénice
Du 23 au 25 février
Domaine d’O, Montpellier

Le cirque rebondit à Marseille

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Clôture de la BIAC2023, Bleu Tenace © Pierre Gondard

Après un accent porté sur le cirque régional et le cirque au féminin, en 2024, année olympique oblige, c’est le sport qui sera au coeur de la nouvelle édition d’Au bout la mer ! Cirque. Ce 25 février, la mairie des 1er et 7e arrondissements et Archaos, Pôle national du cirque, invitent les Marseillais à découvrir deux spectacles et de multiples ateliers et rendez-vous toute la journée, sur la Canebière, gratuitement et en plein air. Une manifestation qui “ouvre cette année dédiée aux Jeux olympiques à Marseille” explique Sophie Camard, maire du secteur. 

Culture sport

Pour clôturer la nouvelle édition de l’Entre2 Biac, Au bout, la mer ! fait appel à deux compagnies qui offrent une place toute particulière au sport. Il y a d’abord Envol, de la compagnie toulonnaise Hors Surface avec le trampoline au centre du spectacle. “C’est un projet né il y a trois ans, avec la volonté de faire un pont entre l’art et le sport”, explique Damien Droin, son directeur artistique. Une création qui accueille “des musiciens lives qui viennent accompagner la création in situ”, poursuit-il, et également des anciens champions du monde de trampoline, comme Christophe Chapin. Le deuxième temps fort est proposé par le collectif Uni-Sphère et son spectacle Podium, qui joue lui du ballon rond, pour en faire un tableau à cheval entre danse, jonglage et football. 

Ces deux collectifs ont aussi pris part à un travail réalisé en amont de la manifestation, avec des ateliers qui accueillent des Marseillais amateurs, dont la restitution aura lieu ce 25 février. Le collectif Uni-sphère présentera le résultat d’une semaine passée avec des jeunes des quartiers Nord de la ville. La compagnie Hors surface quant à elle, dévoilera un spectacle pensé pour des trampolinistes amateurs à la rencontre de l’horizontalité et de la verticalité. 

Et aussi

Comme chaque édition d’Au bout, la mer !, le rendez-vous propose également de nombreuses activités. Des ateliers de jonglage, de funambulisme et de parkour. Un marché des producteurs – complémentaire de celui qui se tient désormais sur le Vieux-Port ; un stand de disquaires ; les Philosophes Publics pour converser avec les passants, les jeux pour enfants préparés par Terre Ludique et des sorties en mer organisées par Marseille capitale de la mer

NICOLAS SANTUCCI

Au bout, la mer !
25 février
Canebière, Marseille

Envol, compagnie Hors Surface
12h30 et 15h30

Podium, collectif Uni-Sphère
12h15 et 15h15