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Créatures de la Nuit

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En plein cœur du Parc Longchamp, le Muséum d’histoire naturelle de Marseille propose depuis samedi l’exposition Nous les chauves-souris, un éclairage photographique destiné à tous·tes les curieux

L’exposition s’inscrit dans le cadre del’opération Le jour de la nuit, dont la dix-septième édition a eu lieu le 11 octobre pour sensibiliser à la pollution lumineuse, avec plus de 436 événements en France. La journée a permis plusieurs collaborations entre le Muséum et le Groupe Chiroptères de Provence : projection de Cavernicoles, court métrage de la photographe et vidéaste animalière Manon Béréhouc, conférences, ateliers de construction de nichoirs et ateliers de sensibilisation sur les chiroptères. Toute la semaine, des balades nocturnes ont également permis d’observer et d’écouter ces animaux.

Si ces événements ont introduit le public aux chiroptères, l’exposition permet maintenant d’approfondir ses connaissances. Dans l’escalier du musée, on retrouve une série de portraits de différentes espèces. L’occasion de découvrir : le Murin de Capaccini, le Petit Murin ou même le Grand Rhinolophe. L’exposition, à portée pédagogique, s’adresse aux familles comme aux passionnés de nature, et offre la possibilité de reconnaître la Pipistrelle commune ainsi que le Murin de Daubenton, rares espèces à ne pas avoir disparu des rues de Marseille.

CARLA LORANG

Du 18 octobre 2025 au 31 décembre 2025 au Muséum d’Histoire Naturelle de Marseille
En parallèle, le Muséum propose du 18 octobre au 2 novembre des activités ludiques. Les petits jeux du Muséum permettent de découvrir les expositions en jouant, et l’Anim’expo Ca’malins invite les enfants à explorer la famille des camélidés, chameaux et dromadaires, à travers des mini-expositions et activités. Enfin, des visites flash sur l’intelligence animale sont proposées tout au long de la semaine dans le parcours permanent. Début décembre, une nouvelle exposition temporaire prendra place : Alice et les drôles d’oiseaux, qui invite le public à réfléchir sur le « passage du temps et le croisement entre nature rêvée et réalité » à travers les œuvres de Bernard Briançon et les collections du Muséum. Il s’agit aussi des derniers jours pour plonger dans l'exposition Océans. Conçue en partenariat avec l’Observatoire des Sciences de l’Univers Pythéas, l’Université d’Aix-Marseille (AMU) et le CNRS, elle propose à travers huit escales de mieux comprendre les écosystèmes marins.

Danse, glace et poésie dans le bassin du Mucem

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Donné dans le cadre du festival En Ribambelle, la metteuse en scène Élise Vigneron et la chorégraphe Satchie Noro invitent avec Mizu à un voyage à travers les états de l’eau

Une structure flotte sur l’eau. Un grand arc en bois posé dessus attire les regards. De l’autre côté du bassin, des passants intrigués, observent. L’heure est au questionnement.Puis deux protagonistes entrent en scène. Elles portent quelque chose, mais difficile à première vue de deviner quoi. Un grand sac ? Un énorme blouson ? Une immense glacière ? Il semble que les deux artistes tentent d’en sortir quelque chose… ou peut-être quelqu’un ? Soudain, la musique se lance. Les chaînes sont relâchées, la plate-forme s’éloigne peu à peu sur l’eau.

La glace, la danse et l’eau

Les bruits de l’eau nous plongent immédiatement dans l’atmosphère. Puis une voix résonne : « Tout organisme est soumis à des changements d’état » entend-on. Les mots défilent : « fonte », « glace », « états »Le spectacle Mizu, qui signifie eau en japonais, prend alors tout son sens. L’eau est au cœur de la création, elle façonne le décor, la matière et le mouvement. La marionnette de glace prend vie grâce à la marionnettiste Sarah Lascar, et bouge au rythme de la danseuse Satchie Noro. Les corps et la matière se répondent.

L’éphémère en mouvement

Les acrobaties s’enchaînent, Satchie Noro escalade la marionnette, la gravité semble parfaitement maîtrisée. Peu à peu, des morceaux de glace commencent à s’effriter. La musique s’accélère, puis, soudain, les bras, les pieds de glace tombent. Pourtant, la marionnette continue de virevolter, sous le regard du public. Puis le tempo ralentit, la danseuse recule et la marionnettiste lâche les fils. La glace se brise sur le sol. Silence. Peu à peu, la marionnette de ferraille semble se relever, avant de s’allonger aux côtés de la danseuse dans l’eau, comme si cela marquait le passage à un nouvel état.

Une œuvre fragile

Mizu réunit différents univers : la marionnette, la danse et le cirque. Une création d’Élise Vigneron et Satchie Noro, qui explore la transformation et la fragilité de l’existence. Une œuvre suspendue entre la matière, la glace et l’eau, où chaque mouvement est un pas de plus vers un nouvel état. Mizu émerveille, questionne. Un spectacle poétique, qui sonne comme une métaphore du temps qui passe. Cependant au rythme où se réchauffe notre planète, on se demande si l’œuvre va pouvoir être jouée encore longtemps !

CARLA LORANG

Spectacle donné du 19 au 21 octobre, dans le cadre du festival En Ribambelle, au bassin du J4, esplanade Gisèle Halimi, Marseille.

Mine de rien

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Au ZEF, Frédéric Ferrer orchestre un théâtre-réalité aussi cocasse que politique autour du projet de mine de lithium dans l’Allier — une farce écologique et participative où les Nicole font tout sauter

Il y a la télé-réalité, il y a aussi le théâtre-réalité – militant ! Comment Nicole a tout pété se présente comme un contre-débat sur une situation bien réelle : un projet de mine dans le massif central, que ses promoteurs ont baptisé du joli prénom d’Émilie. Frédéric Ferrer, auteur, metteur en scène et acteur a imaginé ce vrai/faux débat comme un pied de nez à cet effet de propagande en renommant le projet N.I.C.O.L.E et (presque) tous les personnages de la pièce Nicole – du nom d’un ouragan de catégorie 1.

Le parti pris est celui de l’ambiguïté : est-ce du théâtre ou un débat parodié ? Le décor est celui, réaliste, d’une salle des fêtes, avec son écran pour vidéo-projection. Le public s’y laisse tout d’abord prendre : certain•es spectateurs•trices lèvent la main pour poser des questions comme s’ils ou elles étaient venu•es donner leur avis. La pièce est composée comme un concerto fait de tableaux successifs pour cinq Nicole, trois animateurs, deux industriels et une autorité publique.

Concerto pour mille voix

Le président du CNDP resitue la soirée au sein d’une série invraisemblable de 20 débats programmés dans la région, saucissonnant la question en sous-problématiques sans intérêt. L’entreprise de Ferrer consiste à démonter cette logique de fragmentation de la question écologique pour la ramener à une approche fondamentale : a-t-on besoin de tant de lithium ? Une Nicole du côté du (vrai/faux) public crie sa colère. Il faut extraire, dit-elle, une tonne de terre pour obtenir les neuf kilos de lithium nécessaires à un SUV d’une tonne, lequel servira à acheter une baguette de 250 g.

Frédéric Ferrer injecte en permanence de l’humour et du cocasse tant les bourdes s’accumulent, surtout du côté du président du CNDP avec ses deux assistant•es. À grand coup d’images de synthèse impressionnantes et de graphiques fort scientifiques, il se lance dans une grande remise en perspective de l’évolution du climat depuis… le carbonifère. La sous-préfète ou les représentant•es de la société suédoise candidate à l’exploitation de la mine en rajoutent quelques couches. L’auteur, en somme, œuvre comme Platon : un dialogue pour laisser se développer le pluralisme des opinions. Ici, la thèse « le lithium dans l’Allier n’est pas une solution pour lutter contre le réchauffement climatique » emporte massivement l’adhésion d’un public très majoritairement jeune au ZEF de Marseille.

CAMILLE LEPATT
Comment Nicole a tout pété a été joué les 14 et 15 octobre au ZEF

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Que reste-t-il de nos amours ?

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Au Pavillon Noir, Ben Duke passe le mythe de Roméo et Juliette au vitriol

Et si Roméo et Juliette avaient survécu ? Si, vingt ans après, les amants de Vérone se retrouvaient englués dans les compromis, les rancunes et les petits naufrages du quotidien ? Le chorégraphe britannique Ben Duke, figure majeure de la scène contemporaine avec sa compagnie Lost Dog, s’empare du mythe shakespearien pour en faire une comédie désenchantée, drôle et cruelle à la fois, où l’amour s’essouffle dans le mouvement même de sa représentation.

Sur scène, Ben Duke et Solène Weinachter font face à un public érigé en thérapeutes de couple. Ils rejouent, non sans les modifier et les commenter amplement, leurs souvenirs d’adolescents tragiques. Ils se testent, s’interpellent, s’invectivent. Le théâtre et la danse s’entrelacent dans un dialogue efficace nerveux où la physicalité devient langage conjugal : portés qui s’effondrent, étreintes qui virent à la lutte, gestes qui traduisent la fatigue d’aimer. Tout passe par le corps — la transe, le dégoût, le désir, puis la lassitude. Mais aussi par un texte bien senti, qui sait doser humour et émotion.

L’idiot et l’emmerdeuse

La verve anglo-saxonne transparaît dans la virtuosité et la versatilité du jeu : les interprètes sont acteurs autant que danseurs, et manient la parole avec une précision comique et un sens du rythme qui rappellent la rigueur du théâtre britannique. La pièce n’échappe pas à quelques clichés : querelles domestiques, lassitude, traits genrés. Et si ce portrait certes hilarant, mais un peu attendu, faisant de la belle et poétique Juliette une emmerdeuse en puissante, et du querelleur Roméo un idiot patenté, la simplicité du dispositif et la sincérité l’emportent. Là où le Baz Luhrmann de son enfance glorifiait le clinquant et la passion adolescente, Ben Duke montre l’après-coup, le moment où la légende s’effrite et où l’on continue pourtant de jouer sa partition.

Une allusion fugace à The Graduate – l’autre histoire d’un couple désenchanté – vient sceller ce regard tendre et lucide sur l’usure des corps. Roméo et Juliette, devenus quadragénaires, n’ont plus la fougue de leurs vingt ans, mais conservent une beauté mélancolique : celle de ceux qui, ayant aimé trop fort, n’ont plus d’autre choix que d’en chérir le souvenir.

SUZANNE CANESSA

Juliet & Romeo a été joué les 15 et 16 octobre au Pavillon Noir, Aix-en-Provence.

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Un concert bien tissé

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Ce 16 octobre, le Théâtre du Jeu de Paume a accueilli Le Café Zimmermann pour un concert intitulé De Bach à Mozart

Le Café Zimmermann est un ensemble de musique baroque, en résidence dans les théâtres depuis 2011. Jeudi soir, ils sont six : Pablo Valetti (violon), Céline Frisch (clavecin), David Plantier (violon), Peter Biely (alto), Karel Valter (flûte), Ludovico Minasi (violoncelle) et Davide Nava (contrebasse). Le concert se tisse autour du mécène Gottfried van Swieten, qui a eu un rôle majeur dans la transition du baroque au style classique, notamment en introduisant de nombreuses œuvres de Bach à Mozart.

D’un Bach à l’autre

La musique débute avec la Symphonie en sol majeur du fils Bach, Carl Philip Emmanuel. Le baron van Swieten lui commandait volontiers des œuvres, appréciant sa liberté créatrice et lui en laissait champ libre. La pièce est ainsi marquée par un tempo rapide, des contrastes, de nombreuses cadences et la présence de réponses à l’unisson. Ensuite, c’est Céline Frisch au clavecin qui nous interprète le Prélude et fugue en fa dièse mineur de Bach père, et pourrait-on dire le père de tous les musiciens – Johann Sebastian. La pièce est intégrée au deuxième livre du Clavier bien tempéré et elle déploie toute sa maîtrise du contrepoint. La salle entière tend l’oreille et écoute ce petit instrument d’où sort une musique un peu rêveuse, douce et mélancolique. Le Quatuor avec flûte en ré majeur lui succède, et on y devine la même inspiration.

Hommage à un mécène

C’est à ce moment-là que Pablo Valetti nous introduit le sujet du concert : une sorte d’hommage au rôle du mécène, sans qui à l’époque les musiciens n’auraient pu se financer, un message qui sonne comme un rappel dans le climat actuel – l’importance de gratifier et honorer tous les acteurs culturels autour des concerts. Le morceau utilise une flûte traversière en bois à deux clés, et se trouve caractérisé par des articulations reconnaissables du style de Mozart, et une influence audible du morceau précédent lorsque les cordes jouent un contrepoint en pizzicati. Ensuite, en trio, les cordes interprètent l’Adagio & Fugue avant de finir avec La Symphonie n°104 dite « de Londres » de Haydn, la dernière symphonie du compositeur et un parfait exemple de classicisme, et encore une fois, incarne l’importance du baron van Swieten.

LAVINIA SCOTT
Concert donné le 16 octobre au Théâtre du Jeu de Paume, Aix-en-Provence.

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Au bout, la mer… et Kinchasa

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La nouvelle édition d’Au bout la mer, proposée par la mairie des 1er et 7e arrondissements, mettait ce 19 octobre la musique à l’honneur. Le raï de Benzine, la Sicile de Spartenza ou le bouzouki de Deli Teli [lire ci-dessous]. Un tour du monde qui est aussi passé par le Congo et sa capitale Kinshasa, dont est originaire la formation Fulu Miziki.

Sur scène ils sont cinq, au look afro-futuriste qui sent bon la street et la débrouille : jupe plissée faite de dizaine d’accréditations, chemise en cartes à puce… même direction artistique pour leurs instruments, faits de matériaux recyclés.

Et puis il y a la musique, qu’ils nomment « twerkanda », où les rythmiques afro se confrontent à la house, au disco… au punk aussi. Une danse qui a imprégné les milliers de spectateurs réunis devant la scène, au milieu d’une Canebière qui a retrouvé ses origines voyageuses.

NICOLAS SANTUCCI

Battaglia

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Nouvelle création de la compagnie Émile Saar, conçu et mis en scène par Marie Lelardoux, Battaglia (Dessous les œillets) est un spectacle qui interroge l’absence, la trace et le pouvoir évocateur du théâtre. Deux « artéologues » – un homme et une femme – entreprennent de remonter les strates de l’Histoire à travers le fragment d’une œuvre perdue, un tableau de bataille, tandis qu’un enfant en devient la mémoire vivante.
Au cœur du spectacle, la question de la transmission et de la mémoire : que reste-t-il de l’Histoire, des récits intimes, quand l’œuvre tangible a disparu ? L’écriture visuelle de Marie Lelardoux mise sur le hors-champ, sur les voix modérées, « celles qui voient et témoignent plutôt que celles qui dominent la scène ».

M.V.
24 octobre
Théâtre des Halles, Avignon

Kery James

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Figure majeure du rap français, Kery James a débuté dans le groupe Idéal J (avec DJ Mehdi) à la fin des années 1990, puis s’est imposé ensuite en solo, par un ton vif et une plume affûtée, avec des titres tels que Banlieusards, Je ne crois plus en l’illicite ou encore Lettre à la République.

Le vendredi 24 octobre, il est présent sur la scène du Théâtre des Salins pour un concert acoustique intitulé R(résistance) A(amour) P(poésie), accompagné d’une formation réduite : Pierre Caillot à la batterie et aux percussions, Nicolas Seguy aux claviers et Malcolm et Jean-Brice Ardenne aux chœurs. Un concert « sans artifice », dans un format intimiste : scénographie épurée, puissance du texte, musicalité et émotion au premier plan.

M.V.
24 octobre
Les Salins, Scène nationale de Martigues

Le Cartable Rouge

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Le Cartable Rouge est la nouvelle création jeune public (à partir de 5 ans) de la Compagnie Dune. Née d’une fascination pour la façon dont les enfants se racontent des histoires, la pièce adopte leur point de vue pour explorer les temps forts de la vie scolaire : la découverte, la différence, la rencontre avec l’autre. Deux personnages singuliers, Mathéo et Ludovic, tour à tour drôles, tendres et maladroits, apprennent à cohabiter et à se comprendre. Par leurs jeux, leurs conflits et leurs réconciliations, ils invitent le jeune spectateur, dans une pièce mêlant création sonore, théâtre d’objets, jeu clownesque et mime, à réfléchir avec eux sur le respect, l’empathie et la tolérance.

M.V.
24 octobre
Théâtre du Jeu de Paume, Aix-en-Provence

Maroc : « Moins de stades, plus d’hôpitaux ! »

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Difficile de cerner le mouvement #GenZ212, apparu fin septembre sur l’application Discord. Né dans un climat de désillusion politique, il illustre la capacité d’une génération à s’organiser hors des cadres traditionnels. Sans partis ni syndicats, plus de 200 000 jeunes Marocains y débattent et programment des mobilisations, réclamant plus de justice sociale, des services publics dignes et une redistribution équitable des richesses nationales.

Déclenché après la mort de huit femmes enceintes à Agadir, faute de soins adaptés, le mouvement a dénoncé un système sanitaire défaillant et une corruption endémique. Un slogan rassembleur s’est imposé : « Moins de stades, plus d’hôpitaux ». Ces manifestations ont révélé une génération Z, née entre 1997 et 2010 qui refuse la résignation ou l’exil, et veut construire son avenir au Maroc.

Une jeunesse sans relais politiques

Les mobilisations du 27 septembre rappellent la colère accumulée d’une jeunesse sans emploi ni espoir de mobilité sociale. Au Maroc, un quart des jeunes de 15 à 24 ans est classé dans la catégorie des NEET, Not in Education, Employment or Training, sans formation ni emploi. Chez les jeunes femmes rurales, ce taux dépasse 50%. Beaucoup se tournent vers l’émigration, mais la réalité du déclassement à l’étranger rend cet horizon de moins en moins désiré.

La génération #GenZ212 (212 est l’indicatif du Maroc) partage, avec d’autres mouvements du Sud global, népalais ou malgaches, une rupture générationnelle : le rejet du fatalisme et de la peur. Leur révolte rappelle les aspirations portées par le Hirak dans le Rif en 2016. Ces mouvements populaires étaient nés de drames sociaux emblématiques, celui de la mort du vendeur de poisson Mouhcine Fikri, broyé dans une benne à ordures, écho marocain au suicide de Mohamed Bouazizi en Tunisie, déclencheur du Printemps arabe, en 2010.

Crise de gouvernance et colère sociale

Les griefs des manifestants se concentrent aujourd’hui sur le gouvernement d’Aziz Akhannouch, suspecté de conflits d’intérêts et de prédation économique. Son nom est cité dans des affaires liées à des appels d’offres truqués et des subventions publiques détournées. Le mécontentement a également été amplifié par l’appauvrissement de la classe moyenne : chômage à 13,5%, inflation de 80% en cinq ans, et un salaire minimum plafonné autour de 330€.

Le roi Mohammed VI, affaibli par des problèmes de santé, a prononcé un discours au Parlement le 10 octobre, sans aborder directement la contestation. Il y a toutefois appelé à accélérer les réformes sociales, en insistant sur la réduction des inégalités et la lutte contre la corruption. Le mouvement, dans un geste symbolique de loyauté, a suspendu ses actions ce jour-là.

Rupture générationnelle et numérique

Les jeunes du mouvement s’appuient sur une culture numérique fluide : plateformes décentralisées, messageries sécurisées, votations en ligne. Leurs échanges mêlent créativité visuelle, ironie et autodérision. Leur revendication dépasse la politique : ils réclament un cadre de liberté économique et civique, avec accès aux plateformes de paiement international (PayPal, Stripe), des exonérations pour jeunes créateurs, et une simplification administrative.

Mais ces aspirations se heurtent à un État obsédé par le contrôle, où la surveillance numérique se fait plus intrusive. L’usage central de Discord leur permet toutefois de contourner les hiérarchies, de mutualiser les expériences et de créer une forme d’organisation horizontale inédite au Maroc.

Solidarité diasporique

Beaucoup de Marocains résidant à l’étranger soutiennent activement le mouvement #GenZ212, relayant ses appels et renforçant sa visibilité. Partagés entre espoir et inquiétude, la situation de leur pays d’origine leur tient à cœur, ayant constaté l’ampleur de l’inflation, à leur retour estival. Acteurs clés de la stabilité économique, grâce à leurs transferts financiers, ils incarnent un patriotisme critique, exigeant justice et réformes sociales pour la jeunesse marocaine.

Car derrière la colère apparaît une exigence ferme, celle d’un nouveau contrat social.Pour des analystes comme Rachid Achachi, docteur en économie, la sortie de crise passe par un capitalisme d’État réformé, conjugué à une ouverture politique plus radicale. Il plaide en faveur de mesures pour l’entrepreneuriat des jeunes et de l’innovation, dans une perspective à long terme.

Entre colère silencieuse et créativité collective, #GenZ212 incarne le refus d’un Maroc à deux vitesses. Ni révolutionnaire, ni loyaliste, cette génération souhaite un pays à son image : connecté, équitable et libre.

La question désormais est de savoir si le pouvoir prendra en considération les attentes de la jeunesse.

Le mouvement continue
À Rabat ce 18 octobre, quelques dizaines de manifestants se sont rassemblés pour demander la libération des personnes arrêtes pendant le mouvement GenZ212. Les manifestants ont brandi des drapeaux pirates issus du manga One Piece – symbole de la GenZ à travers le monde – et ont scandé « Détenus, restez sereins, nous poursuivons la lutte », rapporte l’Agence France Presse.

SAMIA CHABANI

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