lundi 21 avril 2025
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Prendre corps

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Prendre Corps © Simon Void

Avec un père, grand-père et arrière-grand-père restaurateurs, Solène Petit avait de qoi aimer la bonne nourriture. Logique donc, quand au moment de mener un projet personnel dans le cadre de ses études de comédienne, de partir faire un tour de France culinaire. Il faut dire qu’elle est aussi, au même moment, très perturbée par un deuil amoureux, l’amenant à se poser des questions sur les liens entre désir, féminité, nourriture, chair et chaire, patriarcat et entrecôte. De ces interrogations et de ce périple est né Prendre corps, spectacle performatif, où, accompagnée d’un musicien live, la comédienne propose l’histoire d’une femme, de radios et de chansons qui donnent faim, de métamorphoses émotionnelles, de deuil amoureux et de quête de soi.

MARC VOIRY

17 janvier
Théâtre d’Arles

La même chose mais…

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© Anne-Sophie Turion

Autrice, metteuse en scène et performeuse, créant des pièces aussi bien pour la scène que pour l’espace public, Anne-Sophie Turion a rejoint les artistes de la Bande du ZEF, scène nationale de Marseille, depuis septembre dernier. Ce 16 janvier, elle y propose, en sortie de résidence et dans le cadre de la semaine de clôture de Chroniques – Biennale des imaginaires numériques, la première étape de travail de sa nouvelle création La même chose mais pas tout à fait pareille, qui verra le jour en 2026. Un dispositif participatif et déambulatoire, dans lequel chacun·e est amené·e à expérimenter des situations d’interactions incongrues, et à tenter de reconquérir ses propres facultés d’attention, mises à mal quotidiennement par les effets d’un monde numérique omniprésent.

MARC VOIRY

16 janvier
Le Zef, scène nationale de Marseille

Incendies d’hiver

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Los Angeles brûle, Hollywood, emportant notre imaginaire largement colonisé par les marques, les sons, les séries américaines, si bien qu’on voit un peu de nous-mêmes partir en fumée dans un incendie d’hiver qui n’a plus de fin. Comme un Joker sortant de sa boite à ressort Trump parle de « canular climatique » et relance les énergies fossiles, alors que le vent attise les braises et que les nappes phréatiques sont à sec. 

L’incendie se propage plus vite encore dans les esprits que dans la cité des anges.  Zuckerberg rejoint Musk dans l’entreprise libertarienne, se préparant à étouffer les esprits plus sûrement que dans un sac plastique. La toile, lentement, enserre et anesthésie notre matière grise, pour lui injecter des overdoses de mensonge et de haine.

Défendre nos archipels

Plus loin dans l’Océan indien Mayotte se noie dans le déni. Le cyclone puis la tempête qui se sont abattus sur le département français sont directement dus au réchauffement de la surface marine, les tourbillons se rechargeant par l’évaporation d’une eau à plus de 30°. Peu importe, les responsables désignés sont les étrangers clandestins, les Comoriens des îles voisines, et non le changement climatique, ou les intérêts de la France dans le Canal du Mozambique qui l’ont amenée à garder la colonie, à faire une exception au droit du sol, à envoyer ses barbouzes (souvenez-vous de Bob Denard !) renverser les gouvernements des Comores libérées. Sans jamais construire les équipements minimaux à Mayotte, rebaptisé « l’archipel mahorais » pour mieux nier qu’elle appartient, géographiquement, historiquement, culturellement, à l’archipel comorien. 

Condamné à maintes reprises par l’ONU, la France a maintenu sa politique coloniale, et Bruno Retailleau, Manuel Valls, Estelle Youssoufa, Marine Le Pen trouvé leur prétexte lointain pour remettre en cause le principe même de la citoyenneté française, depuis une île déchirée. 

Opposer nos arts

C’est pourtant à partir des îles que s’est déployée la pensée archipélique, faite d’hybridation des cultures, des terres, des mers, des héritages. Faite « d ‘ambigu, de fragile, de dérivé » comme l’a théorisé Edouard Glissant. Grâce à elle, nous pouvons opposer à ces incendies la force de nos imaginaires et de nos luttes, la fraternité de notre devise, la liberté de créer sans le jugement truqué et tronqué des algorithmes, le pluralisme d’une presse indépendante des intérêts capitalistes, la beauté de la marge, de la germination, de l’intime. 

Rien de mieux, pour cela, qu’un tour à Avignon pour voir Catarina et la beauté de tuer des fascistes. Ou dans les bibliothèques marseillaises pour ressentir l’exil. Sur les scènes, partout. Et si l’incendie d’hiver les détruit, nous les reconstruirons.

AGNES FRESCHEL

Retrouvez nos articles Société ici

La chute des anges 

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La chute des anges © Pierre Planchenault

Artiste associée à la Biac 2025 [lire ici], Raphaëlle Boitel présente notamment La chute des anges, un spectacle d’anticipation dystopique sur fond de paysage en noir et blanc. Un monde orchestré par des machines, où les êtres de chair et d’os sont eux-mêmes devenus mécaniques, formatés, et sous surveillance. Sur scène, un groupe d’hommes et de femmes, interprété par sept circassien·e·s, survivants d’un monde sous silence, aux gestes et mouvements d’automates, parfois burlesques, se regardent sans se voir, s’accrochent la vie, et aspirent à s’envoler. Entre bras mécaniques articulés, mât chinois, et voltige, un spectacle qui fait référence à l’allégorie de la caverne de Platon. Conçu par une artiste dont les créations, d’une grande puissance visuelle, évoluent à la frontière du cirque, du théâtre, du cinéma et de la danse.

MARC VOIRY

Du 15 au 17 janvier 
La Criée, Théâtre national de Marseille

La Biac, un départ en beauté 

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BIAC Ouverture à la Friche © Pierre Gondard

C’est toujours un bonheur de constater combien le cirque remporte les suffrages, toutes générations confondues, avec une fréquentation record à chaque ouverture de la Biennale internationale des arts du cirque : près de 15 000 personnes ont bravé le froid polaire pour assister aux propositions gratuites sélectionnées par Archaos. Parmi les temps forts du week-end, la performance de Tatiana Mosio-Bongonga, une habituée du festival. Toujours des riffs noisy pour accompagner sa traversée sur un fil sonorisé, et quelques nouveautés – arpenter le fil en binôme, ou encore… la tête en bas. Autant de figures mettant en relief la spécialité de la compagnie Basinga : faire de l’ascension du funambule une prouesse participative, requérant la force motrice du public – l’action se voyant en temps réel sur la tension du fil, et donc l’élévation de l’acrobate ! Samedi, le mistral et les étourneaux étaient de la partie, créant de ces images éphémères à la fulgurante beauté, comme seuls savent le faire les propositions en espace public, à fortiori en hauteur. Autre complice de la BIAC, la Franco-Brésilienne Alice Rende livrait son irrésistible Passages – contorsions dans un tube de plexiglas géant – dans un nouvel écrin adapté : sous le dôme du GMEM. 

Poésie bruitiste 

Édition après édition, la Biac se fait aussi tête chercheuse, célébrant des esthétiques très différentes. Ôde à l’authenticité et à la sobriété, les acrobaties sur chaises de la Cie Allégorie reflétaient l’alchimie discrète et facétieuse régnant entre ses trois membres : deux acrobates et une chanteuse. Une parfaite maîtrise de la montée en tension, faisant frissonner de concert les premiers rangs ! Plus tard dans l’après-midi, l’acte avant-gardiste de Club optimiste se réservait aux plus âgés. Un « élan de musique et d’acrobatie, entre transe et performance exutoire » revendiquée par sa créatrice Fanny Alvarez. FEU : comme une décharge électrisante, une expérience radicale et bruitiste mettant parfois les nerfs à rude épreuve – les bouchons d’oreille n’étant pas superflus –, et réussissant son pari : célébrer l’ambivalence du feu, à la fois festif et menaçant, chaleureux et brûlant, rassembleur et clivant… Une manière encore inédite d’exploiter la verticalité minérale de la cour Jobin, suspendant sans distinction acrobate comme grosse caisse à l’imposant porte à faux de la Tour Panorama ! Quant aux acrobates de la Cie Rhizome, explorant un agrès inédit avec la nouvelle création Rouge Merveille, on les retrouvera dès le 9 février sur une monumentale spire haute de 6m, lors du final dominical Au bout la mer sur la Canebière. 

JULIE BORDENAVE

Quel cirque ! jouait les 11 et 12 janvier en ouverture de la Biac à la Friche Belle de Mai, Marseille.  

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La Mélodie du bonheur

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© Ars Lyrica

Génération après génération, on ne se lasse pas de cette comédie musicale créée à Broadway en 1959 par Richard Rodgers et immortalisée au cinéma par Julie Andrews. C’est l’histoire pleine d’espoir de Maria envoyée par son couvent comme gouvernante dans la famille du capitaine Von Trapp à la veille de la Seconde Guerre mondiale et alors que le nazisme s’empare de l’Autriche. À l’inverse de l’éducation rigide du père veuf, Maria prône les joies du chant et de la musique et va permettre à la famille de fuir dans la poésie la montée de l’État totalitaire. 35 chanteurs et musiciens se produisent sur scène dans une version moderne proposée par Ars Lyrica en prise avec l’actualité. On y retrouvera des chansons éternelles comme Do, ré, mi à entonner en famille.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Du 16 au 18 janvier 
Grand théâtre de Provence, Aix-en-Provence

Le Village des sourds

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LE VILLAGE DES SOURDS 2023 © Emilie Brouchon

Créé en 2023 devant un public entendant et malentendant, Le Village des sourds célèbre le pouvoir des mots, qui permettent de faire face à l’ignorance tout en s’ouvrant au monde. Sur un texte de Léonore Confino, mis en scène par Catherine Schaub et interprété par Jérôme Kircher et Ariana-Suelen Rivoire, l’action se déroule à Okionuk, petit village polaire. Mais son existence paisible va être ébranlée par l’arrivée d’un marchand inquiétant, vendant des objets terriblement désirables contre des mots. Achat après achat, les habitants se dépossèdent de leur langue tandis que le marchand étend son emprise sur eux… L’histoire est racontée par Youma, une adolescente sourde, la seule avec son interprète Gurven à avoir conservé une langue secrète – la langue des signes. 

MARC VOIRY

Du 15 au 18 janvier
Théâtre Liberté, scène nationale de Toulon

L’amante anglaise

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L'Amante Anglaise, Sandrine Bonnaire © Pierre Grosbois

Inspiré par un fait divers survenu en 1949 à Savigny-sur-Orge qui passionna Marguerite Duras, L’amante anglaise met en scène les interrogatoires de Pierre et Claire Lannes, après le meurtre sanglant d’une cousine sourde-muette hébergée par le couple. L’épouse assume avoir assassiné sa parente, mais demeure incapable d’expliquer son geste, et son mari cherche à la faire passer pour folle. Ce dispositif de l’interrogatoire place la parole et ses silences comme seul point de focal de la narration, ce que cherche à magnifier Jacques Osinski dans sa mise en scène en proposant une scénographie épurée, au plus proche du public, avec Sandrine Bonnaire dans le rôle de la tueuse. 

CHLOÉ MACAIRE

16 et 17 janvier 
Le Liberté, scène nationale de Toulon

Pourquoi un arbre est une poule ?

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© Pierre Planchenault

C’est encore un cran au dessus de l’éternelle question sur « l’oeuf ou la poule ». Un arbre n’est pas une poule, c’est évident, et pourtant pouvoir décrire ce qui n’existe pas fait partie des joies du langage humain. Le chorégraphe Marc Lacourt et l’illustratrice Delphine Perret s’autorisent – et donc autorisent autrui – à suspendre la rationalité le temps d’une représentation. Et d’autres règles aussi : avec eux, on peut dessiner par terre ou sur les murs, ce qui ne manquera pas de ravir les enfants de 4 à 7 ans auquel ce spectacle est destiné. « Parce que le monde est un grand théâtre que l’on apprend très tôt à regarder et à ordonner, amusons-nous à construire d’autres mondes. » Mais oui !

GAËLLE CLOAREC

15 et 18 janvier
Théâtre Massalia, Marseille

L’art peut-il changer le monde ?

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Le 4e Mur (C) Le Pacte

Le « quatrième mur » au théâtre ou au cinéma, est le mur imaginaire qui sépare le lieu de la fiction, l’illusion, de la salle, le lieu du réel. C’est aussi le titre d’un roman de Sorj Chalandon, prix Goncourt des lycéens 2013, que vient d’adapter David Oelhoffen. Un livre dense dont il va mettre en scène la deuxième partie, qui pour lui pose la question essentielle du pouvoir de transformation de l’art : comment un projet artistique peut-il réellement changer la réalité ?

Samuel Akounis rêvait de monter Antigone d’Anouilh sur la ligne verte à Beyrouth, en faisant jouer des acteurs de toutes les communautés. Tombé malade, il fait jurer à Georges (Laurent Laffite) son ami, de prendre la suite, de rassembler les acteurs et de monter la pièce. En 1982 Georges part donc au Liban. Le choc est brutal pour lui qui ne connait ni le Liban, ni la guerre. Il parcourt la ville en compagnie de Marwan (Simon Abkarian) son guide, peu convaincu par le projet : « C’est plus pour vous donner bonne conscience que pour régler nos problèmes ! »En effet, n’est-ce pas naïf, voire indécent, de penser que le temps d’une représentation théâtrale, les tensions vont s’apaiser alors que le fracas de la guerre est partout, que les gens manquent de tout.

Mais Georges a fait une promesse, il ne croit plus à la politique, il veut essayer de transformer le monde par l’art. En créant un microcosme utopique : pour lui, le théâtre se fait résistance en faisant cohabiter des acteurs des différents clans en conflit : Charbel (Pio Chahine), chiite maronite, sera Créon, Imane la sunnite (Manal Issa) sera Antigone, le jeune druze, Nakad (Tarek Yaakoub) sera son fiancé Hémon, Khadija la chiite (Kitham Al Lahham) Eurydice… Chacun doit laisser sa religion au vestiaire !

L’Antigone d’Anouilh qui avait été jouée pour la première fois en 1944 en pleine occupation et collaboration, ne représente-t-elle pas la résistance ? Néanmoins, la guerre est là, partout, et le cinéaste a décidé de nous la montrer dans toute son horreur aussi bien dans le théâtre où ils se retrouvent pour répéter que dans les camps de Sabra et Chatila : « La guerre est une chose abominable et mon objectif était de la filmer comme quelque chose de terrible, la rendre insupportable aussi bien moralement que visuellement. » La mise en scène est soignée : le travail du directeur de la photo Guillaume Deffontaines est remarquable, ainsi que le travail de l’ingénieur du son, Pierre Mertens.

Quant aux acteurs, ils sont étonnants de justesse, en particulier Laurent Laffite qui incarne Georges, ce metteur en scène, toujours entre le théâtre et le réel, entre l’illusion politique et le tragique de la guerre, qui veut y croire jusqu’au bout, malgré tout. Les scènes de répétition, plus légères, plus joyeuses, dans ce théâtre à moitié détruit pouvaient donner l’espoir que l’art pouvait changer le monde… Tout comme ce film tourné en 2022, deux ans après l’explosion du port de Beyrouth, deux ans avant le déclenchement de la guerre ! « L’art, c’est des défaites magnifiques ! » On en sort bouleversé…

ANNIE GAVA

Le Quatrième mur, de David Oelhoffen
En salles le 15 janvier