lundi 25 novembre 2024
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Toko Blaze : un oiseau qui fait mouche 

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Toko Blaze © X-DR

Zébuline. Quand on regarde l’historique de votre carrière, il n’y a quasiment pas une année sans projet, ou disque. Qu’est-ce qui vous motive à créer sans cesse ?  

Toko Blaze. C’est la passion avant tout. Sortir des projets c’est un prétexte pour monter sur scène, prendre la parole, et la donner aux autres. Et maintenant, avec les nouveaux outils, c’est beaucoup plus facile d’être productif qu’à l’époque, quand il fallait forcément aller en studio pour enregistrer. Aujourd’hui, tout est possible depuis chez soi. 

Cet album a tout de même été produit en studio, et avec Gari Gréu, pourquoi ce choix ?

On a plus ou moins toujours travaillé ensemble mais sur des projets parallèles (avec Oai Star notamment), et on s’est souvent croisé sur scène, au micro. Quand il m’a proposé de réaliser ce projet avec son label It’s Ok, on s’est directement mis au travail. D’abord sur l’écriture – on avait 25 maquettes présélectionnées – pour enfin arriver à une dizaine de titres. Entre l’écriture, les prises de sons, les arrangements, le mastering… le travail a commencé il y a un an.

L’album s’ouvre avec Come Back au quartier, mais vous qui avez vécu en Afrique, à Marseille et à Vitrolles, à quel quartier pensez-vous ?

Quand je dis « Come back au quartier » c’est plutôt le retour au cocon familial. L’endroit où tu te sens en sécurité, dans un environnement familial. Je pense par exemple à l’Afrique, où tous les membres de la famille habitent souvent les uns à côté des autres. Avec le temps, la famille s’agrandit, et ça crée des micros-villages dans le village. 

Dans le titre Au milieu des loups, vous parlez d’une personne rejetée parce que différente, qui va finalement faire de cette différence sa force. Est-ce qu’il y a là quelque chose d’autobiographique ? 

Ca peut être autobiographique mais c’est aussi de l’observation. J’ai longtemps travaillé en milieu scolaire, et j’ai vu des enfants mis de côté, parce qu’ils n’apprenaient pas de la même manière que les autres. Il faut toute la force de caractère de l’enfant, et la force mentale des parents, pour que l’enfant puisse raccrocher les wagons, sinon ils sont oubliés et livrés à eux-mêmes. C’est un clin d’œil à tous ces enfants que l’on croit différents, alors qu’ils n’ont juste pas la même manière d’appréhender les choses. 

Vous avez connu l’extrême-droite dans votre jeunesse à Vitrolles. Qu’est ce que vous ressentez quand vous voyez le Rassemblement national atteindre des niveaux jamais connus en France aujourd’hui ?

Quand l’extrême droite est arrivée à Vitrolles ils ont tout verrouillé. C’était compliqué pour les associations, qu’elles soient culturelles ou socio-éducatives, car ils ont tout fait fermer. Mais si on a beaucoup parlé de Vitrolles, c’est parce qu’il y a eu une mobilisation à la différence d’autres villes, comme Marignane, Toulon ou Orange. Des journalistes sont venus, et ont pu constater ce qu’il s’y passait. Aujourd’hui, le discours d’extrême-droite s’est banalisé. Ce qui était tabou, non-dit, est aujourd’hui ouvertement exprimé. 

Dans votre biographie vous parlez de certaines censures dont vous avez été victime par les diffuseurs locaux dans votre carrière. A quoi faites-vous référence ?
Dès que tu commences à pointer certaines choses du doigt, ça ne plaît pas à tout le monde. Et il faudrait faire attention car ce sont les financeurs, les gens qui te portent, qui te lancent dans des dispositifs. On devrait avoir le droit de dire les choses, même quand c’est la gauche qui fait de la merde.  

Et donc aujourd’hui vous faites attention, vous vous retenez ? 

Non si j’ai envie de dire les choses je les dis. Si on m’empêche de jouer, j’irai jouer ailleurs. À l’époque, il n’y avait pas de lieux, et on jouait dans des usines désaffectées, dans des garages, dans des caves… s’il faut y retourner, on y retournera !

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR NICOLAS SANTUCCI

À venir
23 octobre : « Musiques à l'œuvre » avec Toko Blaze au Théâtre de l'Œuvre (Marseille).
2 novembre : Oai Reggae Party (avec Gari Grèu, Léo Achenza et Rastyron) au Théâtre de l'Œuvre.
Du 7 au 10 novembre : tournée régionale Class'Eurock
30 novembre : sortie de l’album Drôle d’oiseau

Opéra Orchestre National de Montpellier Occitanie : vacances rousses et femmes d’exception !

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Opera Orchestre © XDR

Halloween, fête celtique païenne, s’amuse avec nos peurs, instaurant avec la mort un rapport d’étrangeté qui permet, en particulier aux enfants, son nécessaire apprivoisement. 

Vivre cette cérémonie à l’opéra, lieu de tous les artifices flamboyants, est possible à Montpellier grâce à trois propositions. Tout d’abord, en participant à un Escape game à la recherche du fantôme de l’opéra dans les coulisses, les dessous de scènes et les escaliers dérobés de l’Opéra Comédie. Les étudiants du master création en spectacle vivant de l’université Paul Valéry guident les visiteurs pour des séances d’une heure (quand on en réchappe !) qui débutent toutes les demies heures, de 15h à 20h, du 25 octobre au 3 novembre…

D.Day

Le 31 octobre à 17h, l’orchestre symphonique dirigé par Nathanael Iselin livrera le concert d’Halloween idéal pour les milléniaux : John Williams (Les dents de la mer et Harry Potter) et Bernard Hermann (Psychose) côtoieront les grands tubes du romantisme gothique : L’Apprenti sorcier de Dukas, le Mephisto de Liszt, le Faust de Smetana, les danses des Pattes de poule de Moussorgski ou de la Fée Dragée de Tchaïkovski. Un programme fantastique et sorcier à souhait !

Plus satanique, la proposition de What The Fest ?! propose dès 20h Dark Halloween qu’aucune fée bienfaisante ne viendra troubler. Un bal des vampires, des sorcières et des freaks, qui annonce complet comme les précédentes années… 

Femmes en avant

Avant cela, l’OONM propose de célébrer les 20 ans de carrière à Montpellier (après sept ans à Bordeaux) de la violoniste supersoliste Dorota Anderszewska. Supersoliste, dans un orchestre, c’est le grade suprême, celui qui permet de diriger le pupitre des violons, d’en assumer les solos, mais aussi de jouer les concertos. Celui de Max Bruch est un des plus impressionnant du répertoire, par ses difficultés successives qui demandent toutes les qualités de rapidité, de puissance, de timbre. Le concerto sera suivi par La Mer calme de Mendelssohn et La Tempête de Tchaïkovski, et précédé par Glitterring promenade de Santa Ratniece, compositrice lettone qui aime à faire glisser les sons. La saison Unanimes de l’OONM, à chaque concert symphonique, programme l’œuvre d’une compositrice, alors que l’œuvre de Santa Ratniece, qui est jouée partout dans le monde, reste rare en France. Sauf dans un opéra dirigé par une femme ? 

Agnès Freschel

Escape game - les secrets du fantôme de l'opéra
Du 25 octobre au 3 novembre

Dorota Anderszewska : 20 ans de musique à l’Opéra Orchestre
25 et 26 octobre

Concert halloween
31 octobre

Dark Halloween - What the fest ?!
31 octobre
Opéra Comédie, Montpellier

TOULON : Rade Side fait mélange à trois 

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iTi © X-DR

Scène de musiques actuelles itinérantes du Var, Tandem 83 offre à l’automne un temps fort apprécié au-delà de ses frontières départementales. Et dixième édition oblige, il n’est pas inintéressant d’aller fouiller dans les archives de Rade Side, pour constater que le rendez-vous s’est toujours appuyé sur ses deux jambes, à savoir l’électro-pop et le rock, d’abord sous la direction de Sylvain Besse, et désormais avec Charlie Maurin. Cette année encore, du 24 au 26 octobre à Toulon, Rade Side sert donc ce plat sucré-salé dont il connaît parfaitement les équilibres… si n’est celui de la parité homme-femme. 

Pour l’électro-pop, c’est au Live le vendredi qu’il faut se rendre. En tête d’affiche, la « petite » salle du Zenith accueille Isaac Delusion, un duo déjà passé dans ce festival en 2017. Depuis, les Parisiens ont fait du chemin, mais à leur rythme, puisqu’ils ont attendu cinq ans avant de sortir un nouvel album Lost and Found, paru en janvier dernier. Un objet sonore fait d’expérimentations bienvenues, et dans lequel on découvre avec intérêt la voix de Loïc Fleury – « leader » de la formation. Avant eux sur scène, Brique Argent, révélé par son premier prix aux Inouïs du Printemps de Bourges, rendant grâce à l’originalité de son projet, entre piano-voix et électro. Enfin, en ouverture, les jeunes de Le Bleu, groupe suivi de près par Tandem cette année, et qui viendront apporter leur touche pop/rock à la soirée.

Place au rock le samedi, avec deux groupes à la solide réputation. Meule, une des dernières belles surprises de la scène rock française, qui allie l’originalité des compositions à un dispositif scénique lui aussi tout à fait original : deux batteurs jouent – quasiment – sur la même batterie, face-à-face, et au premier plan sur scène. Derrière, un troisième balance le son typé kraut-garage avec machines et guitare. Il y aura du post-punk aussi, avec Mad Foxes, à cheval entre noise et pop, Fontaine D.C. et Elton John.

iTi, l’extra-terrestre 

Pour cette édition 2024 de Rade Side, iTi fait figure d’extra-terrestre dans la programmation le jeudi soir. Non pas seulement pour ses trips psychédéliques inspirés, fait de boucles orchestrales où l’on sent les influences rock de l’artiste, mais aussi parce qu’elle est une des seules femmes présentes sur scène. « Même si l’on est sensibles à la question, la programmation reflète le manque de représentation féminine dans les groupes de rock », explique Tandem… qui a pourtant suivi de nombreux projets portés par des femmes ces dernières années (Gami, Liquid Jane, Mega Lune…).

La question sera d’ailleurs posée dans un des ateliers professionnels que Rade Side organise en marge des concerts : « Ressources humaines : comment favoriser la féminisation des métiers techniques »… Et la féminisation des scènes aussi ?    

NICOLAS SANTUCCI

Rade Side
Du 24 au 26 octobre
Divers lieux, Toulon

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Un nouveau salon du livre à Marseille

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Le temps d’un week-end, 100 auteurs, des éditeurs, traducteurs, illustrateurs et poètes vont investir la Citadelle de Marseille et le Palais du Pharo. Pour un Salon du livre métropolitain qui ambitionne de mettre en lumière le dynamisme éditorial d’un territoire qui recense 89 maisons d’édition et 77 librairies. Pour cette première édition, l’Espagne est à l’honneur avec deux grandes éditrices, Isabel Obiols (Anagrama) et Carme Riera (Alfaguara) qui dialogueront avec la Française Anne-Marie Métaillé. Une conférence de Magali Dumousseau-Lesquer, spécialiste de la culture underground des années 1980 reviendra sur La Movida, ce mouvement né avec la mort de Franco et qui ouvrit en Espagne une décennie de tourbillon artistique. 

Tout au long des deux jours, le public pourra découvrir des auteurs comme le Catalan Joan-Lluis Luis, lauréat du prestigieux prix Omnium, Antonio Altarriba Ordoñez, essayiste et romancier, l’illustratrice Ana Peynyas, première femme récompensée par le prix national de bandes dessinées pour Estamos todas bien. Rencontres également avec Alfons Cervera, auteur de romans centrés sur le souvenir de la guerre civile, ou Pablo Martin Sánchez, premier membre espagnol de l’Oulipo.

48 rencontres ponctueront le salon, axées principalement sur des thématiques de société comme l’IA, le rap, et la littérature avec Bettina Ghio, les luttes féministes avec Margaux Mazelier, journaliste spécialisée dans les questions de genre. Un beau moment devrait réunir le public autour du livre : Revenir – expérience du retour en méditerranée (éditions du Mucem et Onamosa 2024) avec Ariella Aïsha Azoulay qui enseigne la théorie politique à Brown University dans une perspective anticoloniale, Adoram Schneidleder, experte du Moyen Orient, Marion Slitine, commissaire de l’exposition Ce que la Palestine a à nous apprendre (Institut du monde arabe 2023) et Giula Fabbiano, spécialiste des mobilités et des pratiques mémorielles postcoloniales. 

Des livres d’ici

Les rencontres des éditions Actes Sud mettront l’accent sur la collection Mondes sauvagesavec son fondateur Stéphane Durand, biologiste, Raphael Mathevet écologue et géographe, et David Grémillet océanographe, spécialiste des oiseaux marins et la collection Voix de la terreavec sa directrice Sabah Rahmani qui travaille aux côtés des peuples autochtones. Les éditions marseillaises Bruit du Monde seront représentées par des romanciers : Rémi Baille auteur des Enfants de la Crique, Fabio Fiori, marin voyageur pour Le souffle de la Méditerranée et Christian Astolfi pour L’œil de la perdrix

La BD ne sera pas oubliée avec la présentation en avant-première du dernier Corto Maltese La Ligne de vie (Casterman 2024) avec Juan Fiaz Canales, Rubén Pellejero et Patricia Zanotto qui, depuis 2015, imaginent de nouvelles épopées au baroudeur de feu Hugo Pratt. Les plus jeunes, quant à eux, pourront rencontrer des auteurs jeunesse et investir le village des contes.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Salon du livre métropolitain
Du 25 au 27 octobre
Citadelle de Marseille, Palais du Pharo
Marseille

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Reda Kateb : « Je ne me suis jamais dévoilé autant que dans ce film »

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Sur le fil © Jérôme Prébois

Zébuline. Votre premier film se déroule dans un espace particulier. Comment êtes-vous entré en contact avec ce monde-là ?

Reda Kateb. En tant que spectateur, j’aime que le cinéma me donne accès à des mondes que je ne connais pas. Lorsque j’ai découvert le livre de Caroline Simondset son travail pour Le Rire Médecin, j’ai su que je pourrais en tirer un film intéressant. J’ai toujours été fasciné et très touché par l’impact que peut avoir le geste artistique dans la vie, autre que celui d’être admiré, placé sur un piédestal. Ce qui se passe dans une chambre d’hôpital est de l’ordre du rituel. Il y a plus d’acteurs que de spectateurs ! Et même l’enfant interagit avec les clowns : personne n’est passif dans cet échange. Aujourd’hui, une littérature médicale montre que cet art-là améliore les réactions au traitement. C’est cette histoire de lien que je voulais raconter. Mon travail d’observation à l’hôpital Necker a duré à peu près six mois. J’ai senti que ce terrain était vraiment fort pour raconter cette histoire : ce que j’ai senti dans les services hospitaliers pour enfants, c’est à quel point les artistes et les personnels du soin étaient dans le vrai, dans une sorte de bain de vérité, de révélateur d’humanité. 

Comment avez-vous ensuite construit votre scénario ?

Je me suis retrouvé, alors que je n’étais qu’observateur, à chanter Une souris verte à la petite Baya. Puis à rendre visite à d’autres enfants avec la même intensité. Je n’ai ensuite filmé que des scènes auxquelles j’avais pu assister : voir des clowns, entonner une reprise très personnelle de Sur la route de Memphis, une infirmière esquisser un pas de danse, un enfant sourire ou un couple de parents venant d’apprendre un diagnostic, et se serrant dans les bras. Dans une même journée, on peut rire ou pleurer en l’espace d’une demi-heure. J’ai voulu raconter cette énergie-là, très particulière. J’ai ensuite pensé au personnage de Zouzou, une acrobate accomplie, très douée mais vivant comme dans une bulle, qu’une chute forcerait à repenser son rapport à son corps et à son art. J’ai pensé que cette rencontre avec une autre forme d’art, le clown, lui permettrait de retrouver goût à l’art et surtout à la vie.

Comment avez-vous choisi la distribution de ce film ? Et pourquoi ne pas y être intervenu en tant qu’acteur ?

Je ne voulais pas apparaître en tant qu’acteur, et j’ai eu la chance que la production me suive dans ce choix-là alors qu’il n’était pas forcément le plus bankable. Pourtant, je pense ne jamais m’être dévoilé autant que dans ce film ! Le passage derrière la caméra signifiait, à l’instar de mon héroïne, aborder mon art sous un angle différent, et peut-être plus intime. Je ne concevais pas ce projet sans Aloïse Sauvage. Je suis particulièrement admiratif de son travail. Je la trouve très actuelle, très contemporaine. Elle n’est pas qu’actrice : elle est également une acrobate très douée, on la connaît aujourd’hui surtout en tant que musicienne et rappeuse, ses chansons commencent à être dans toutes les oreilles… Elle me fait penser à ma petite sœur, qui a quinze ans de moins que moi. Il y a un déficit de représentation de ces femmes-là, de cette génération-là au cinéma. Je tournais avec elle lorsque je découvrais le livre de Caroline Simonds. Et je n’arrivais pas à envisager d’autre actrice pour le rôle. C’était son premier long-métrage en tant que rôle principal, et mon premier long-métrage en tant que réalisateur. Nous nous sommes donc accompagnés sur cette expérience, cette double première fois ! J’ai aussi vite pensé à Elsa Wolliastondans le rôle de Tamara, la directrice de l’association. C’est une grande artiste, précurseuse dans la danse contemporaine africaine : elle a vécu au Kenya et aux États-Unis. J’ai vite su que c’était elle que je voulais. Je ne voulais pas d’une actrice trop connue ou technique, mais quelqu’un qui amène un charisme, une histoire, dans son regard et dans sa présence, un mélange d’autorité et d’une réelle sensibilité. 

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR SUZANNE CANESSA dans le cadre d’une rencontre aux Cinémas Aixois

Sur un fil, de Reda Kateb
Présenté en avant-première le 24 octobre dans le cadre de la 46e édition de CINÉMED
En salles le 30 octobre

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DIASPORIK : Comment finit l’Etat de droit

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Capture d'écran d'une émission CNN sur les attaques terroristes à Paris, mentionnant les craintes des communautés musulmanes face aux représailles après les attaques. Image tirée de l'article 'Diasporik : comment finit l'état de droit', explorant la stigmatisation des diasporas et les dérives de l'État de droit après les attentats.
Le Repli de Joseph Paris

Diasporik. Quel est le point de départ de ce film documentaire ?

Joseph Paris. Le Repli est un film qui analyse la montée des discours racistes en France depuis le début des années 1980 et la restriction des libertés depuis 2015. J’ai commencé à y travailler en réaction aux discours publics post-attentats de 2015, en particulier celui sur la déchéance de nationalité prononcé par François Hollande devant le congrès réuni à Versailles. On se souvient comment il avait affirmé que la France était attaquée en tant que patrie des droits de l’Homme, proposant au même moment le projet de déchéance de nationalité, au mépris de la devise républicaine et en violation de l’article 1 de la déclaration des droits de l’homme : la déchéance de nationalité c’est l’inégalité des citoyens devant la loi.

J’ai commencé à filmer l’obsession sécuritaire qui se mettait en place, en même temps que je faisais retour sur les archives politiques des 40 dernières années pour comprendre la progression de ces discours. La difficulté de produire un film sur ces thématiques a permis de l’inscrire dans un temps long : celui des archives, qui nous font revisiter la progression des discours islamophobes des années 1980 jusqu’à aujourd’hui, et aussi l’accélération sécuritaire depuis 2015, illustrée notamment par la pérennisation de l’état d’urgence.

Selon vous, pourquoi est-il difficile pour l’opinion publique de comprendre que les Français de confession musulmane sont également victimes du terrorisme ?

J.P. Dans l’imaginaire collectif le monde musulman est associé à la violence, au fanatisme et au terrorisme. Mais admettre que les musulmans sont les premières victimes du terrorisme c’est remettre en question le récit officiel du « eux contre nous ». Cela remet aussi en question toute l’architecture du contre-terrorisme qui se fonde sur l’idée d’un ennemi intérieur lui-même l’extension de l’ennemi extérieur. 

À quoi correspond la«zone grise » dont vous parlez dans le documentaire ? 

Yasser Louati. La zone grise a été théorisée par Abu Musab Al Suri, tête pensante de Daesh. Pour lui, il s’agit de la faire disparaître. Elle correspond à la zone de cohabitation pacifique entre musulmans et non musulmans en Occident, plus particulièrement en Europe. C’est cette zone où chacun trouve sa place et qui s’oppose à une séparation. Ce qui est terrible, c’est que la presse majoritaire, les intellectuels publics, les polémistes, une partie influente du monde de la culture, et les gouvernements successifs depuis Hollande, ou Le Pen-compatibles sous Macron, disent et font exactement ce que Daesh attend d’eux. À savoir détruire cette zone grise et ne parler des musulmans qu’avec un discours belliqueux.

« Le Conseil Constitutionnel a nourri le monstre qui s’en prend désormais frontalement à lui »

Comment évaluez-vous la situation française en matière de racisme et d’État de droit, alors que Bruno Retailleau déclare que « L’État de droit, ça n’est pas intangible ni sacré » ?

J.P. Cette déclaration ne sort pas de nulle part, elle fait suite notamment au lapsus de Macron visible dans le film, lorsque en voulant promettre la sortie de l’état d’urgence, sa langue fourche et il n’annonce rien de moins que « la sortie de l’État de droit », avant de se corriger. Lapsus qui sera rapidement suivi d’un acte : en promulguant la loi de « sortie de l’état d’urgence », qui en fait inscrit dans le droit commun l’essentiel des mesures de l’état d’urgence, il s’entoure du ministre de l’Intérieur, en l’absence notable de la ministre de la Justice. Il assume ainsi l’effacement de l’État de droit jusque dans l’image. Cela s’inscrit aussi dans un empilement de lois sécuritaires depuis 40 ans, qui constituent de sérieuses entorses aux libertés fondamentales. En les ayant laissé passer, le Conseil Constitutionnel a nourri le monstre qui s’en prend désormais frontalement à lui.

On est en train de vivre un véritable effondrement de l’État de droit. Dans le film, Mireille Delmas-Marty, professeure au collège de France, explique que ce glissement sécuritaire que nous vivons comme un autoritarisme, peut se changer en totalitarisme. Une telle alerte fait froid dans le dos. Oui l’extrême droite est aux portes du pouvoir, voire a déjà un pied dedans, et les politiques menées ces dernières années nous laissent sans le rempart du droit pour faire face. C’est sur le dos des minorités que toutes ces lois ont été votées ; on voit bien aujourd’hui qu’elles se traduisent en effondrement des libertés pour toutes et tous. 

L’islamophobie sur fond de racisme postcolonial semble endémique. Quels sont les éléments qui les réactivent aujourd’hui?

Y. L. Cette islamophobie est comme un virus dormant qui se réveille lorsque les conditions sont réunies. Aujourd’hui, le virus a même muté au vu du peu de résistance des institutions, de l’état du débat public et la normalisation totale de l’islamophobie au sommet de l’État. Rappelons-nous : Darmanin a accusé Le Pen d’être trop molle, non pas sur l’islamisme, mais sur l’islam.

« La gauche a soit refusé de prendre au sérieux l’islamophobie soit l’a alimentée »

Dans les plis du repli, il y a des mouvements sociaux de la classe ouvrière immigrée des années 1970, assimilés à de l’agitation communautaire voire à du terrorisme.

J.P. Ce qu’il s’est passé dans les années 1980 est très éclairant pour comprendre l’état du débat public aujourd’hui. Cette mémoire renvoie à une trahison de la gauche d’une telle ampleur qu’il est diffcile de l’admettre pour les électrices et électeurs de gauche. On se souvient généralement du « tournant de la rigueur » du gouvernement de Pierre Mauroy, un moment pendant lequel le Parti Socialiste se reconfigure idéologiquement en tournant le dos aux classes populaires pour adopter les thèses néolibérales et se construire une respectabilité auprès des milieux d’affaires. Mais on se souvient moins que ce tournant a eu pour premières victimes les classes ouvrières immigrées. Ce qui ressort des archives visuelles de ces années-là, c’est la manière dont le gouvernement de gauche a donné une monumentale résonance médiatique aux accusations portées par le patronat contre les grévistes, majoritairement immigrés, de l’industrie automobile. Accusations selon lesquelles les grèves étaient menées non pas pour exiger de meilleures conditions de travail, mais qu’elles seraient le fait d’une agitation religieuse extrémiste.

L’islamophobie a été utile à la gauche pour décrédibiliser les mouvements sociaux menés par les travailleurs immigrés, alors qu’il était attendu qu’elle les soutienne. C’est pendant le mandat de François Hollande que Manuel Valls, devenu Premier ministre, a affirmé, en pleine mobilisation contre la loi El Khomri, que ce qui prime ce n’est pas le chômage mais la bataille identitaire. Au point que Marine Le Pen a déclaré qu’elle avait l’impression de se lire en lisant les propos de Valls sur l’islam.

Quelles sont selon vous, les exploitations politiques de ces dérives ? 

J.P. L’extrême droite se retrouve sans réelle opposition depuis des décennies, sa normalisation était inéluctable. L’islamophobie a fait converger les tenants de la « néo-laïcité », qui est la laïcité redéfinie pour être un concept islamophobe, et la fachosphère. Malheureusement, la gauche a soit refusé de prendre au sérieux l’islamophobie soit l’a alimentée, tout en se proclamant républicaine et défenseure de la laïcité. Elle a porté aux portes du pouvoir les héritiers de Pétain.

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR SAMIA CHABANI

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Le Repli, de Yasser Louati et Joseph Paris
En salles le 30 octobre

Projections et débats
4 novembre
En présence de Yasser Louati, militant témoin dans le film
Cinéma Utopia, Avignon

5 novembre 
En présence d’Issam El Kalfaoui (Collectif Vérité pour Souheil) et du collectif Vérité et Justice pour Amadou Koumé et d’Ancrages
Cinéma Le Gyptis, Marseille

Distillerie d’Aubagne : une création avant Place aux Compagnies

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Portrait en noir et blanc d'un homme au visage grave, marqué par les épreuves. Son regard intense et sa tête rasée sont mis en valeur par un éclairage sombre qui accentue les ombres sur sa peau nue, évoquant la dureté des thèmes abordés dans la pièce
L'URUGUAYEN © Christophe Chave

Zébuline. L’Uruguayen a été créé en 2021 et joué plusieurs fois dans la région, sur les scènes de Gap, de Briançon et au Théâtre Vitez, qui en étaient les producteurs. Pourquoi le reprendre aujourd’hui ? 

Christophe Chave. Parce que le spectacle a eu du succès, et que son actualité politique est de plus en plus évidente. L’Uruguayen n’est pas une pièce de théâtre, mais une correspondance avec un ami resté en France. Dans ses lettres, Copi décrit un pays dévasté par la dictature. Avec toute la folie de son théâtre, ces morts qui ressuscitent, le pape et le président qui interviennent, le sexe et ses mots crus. 

Violents ? 

Non, pas de violence mais le langage est très cru, et les relations sexuelles y sont évoquées très directement. On ne le conseille pas aux moins de 16 ans. Les mots, leur empêchement, leur surgissement sont le sujet du seul en scène : dans ce pays réel et fantasmé, la liberté d’expression est bafouée au point qu’on ne prononce en moyenne que trois mots par jour. Ceux qui disent les mêmes deviennent frères de sang, et appartiennent au même parti politique. Tout se réduit, et quand la réalité bascule le personnage n’est plus en capacité de le voir.

L’Uruguayen n’est pas porté par vote compagnie.

Non, c’est un projet de Stéphane Pastor, qui m’a demandé de la mettre en scène.

Mais Place aux Compagnies, que vous avez mis en place à la Distillerie d’Aubagne est aussi très politique…

Oui. C’est un dispositif de soutien à la production des compagnies en région, qui vient donc appuyer les politiques culturelles des collectivités et de l’État. En offrant des moments de résidence aux compagnies émergentes – ou émergées, je n’aime pas trop le terme – et en invitant les professionnels à venir découvrir ces spectacles en sortie de résidence ou en première de création, pour qu’ils puissent être diffusés et programmés. Le public est bien sûr invité à découvrir également, et tout est gratuit. 

Quelques éléments du programme ? 

Cette année il y a neuf compagnies, avec huit projets de spectacles et une conférence gesticulée.  Les spectacles ont lieu le vendredi, après une semaine de résidence, dans des formes plus ou moins abouties : certains commencent à répéter, d’autres sont à la fin du processus. À partir du 8 novembre et jusqu’au 14 décembre  il y aura Valérie Paüs (Avignon) qui présente Le Petit Prince m’a dit, le concert d’Iraka, Flore Vialet qui met en scène Océan pour un portait de Dorian Gray tendance queer, un texte de Sharon Tulloch, artiste marseillaise expulsée de son logement par  arrêté de péril en 2015, mise en scène par Eva Doumbia, une lecture de la prochaine création de Michel Bellier et Joëlle Cattino… 

Les générations se croisent, avec beaucoup de femmes, une vraie diversité esthétique des propositions… et peu de danse ?

Effectivement, pas cette année. Deux concerts, le reste est du théâtre. Les compagnies présenteront leurs spectacles le 2 novembre à l’ouverture, avant un concert des étudiants de la Satis, Satisfaction !


Les compagnies trouvent ici un appui à la production, mais où en est la Distillerie ? 

Il y a désormais une volonté politique des institutions de nous soutenir, mais notre économie reste fragile. Je suis le seul salarié en CDI, je travaille avec des intermittents à la production, la technique, la com’… Cette précarité nuit évidemment à la stabilité de note démarche de soutien. Pourtant sans soutien à la création et aux compagnies, sans appui à la production, c’est tout le secteur qui s’écroule… 

ENTRETIEN REALISE PAR AGNÈS FRESCHEL

L’Uruguayen
25 et  26 octobre
La Distillerie, Aubagne

Place aux Compagnies
Du 2 novembre au 14 décembre
Divers lieux, Aubagne

Le Droit en sale État 

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Qu’est-ce qu’un État de droit, dont Bruno Retailleau, ministre d’un gouvernement qui n’est pas sorti des urnes, rappelle, menaçant, qu’il n’est pas immuable ? C’est un pays qui affirme que le droit des personnes, physiques ou morales, prévaut sur le pouvoir politique. Remettre en cause cette hiérarchie serait consacrer la toute puissance du pouvoir politique sur les droits des citoyens. Ce serait, au sens propre, l’avènement d’une dictature.

Le droit français

L’État de droit français s’appuie sur trois piliers qui sont aujourd’hui attaqués de l’intérieur comme par des termites.

Le premier pilier qui garantit cet État repose sur la hiérarchisation des normes. En France, le Parlement ne peut voter de lois qui vont à l’encontre de la Constitution de 1958, du Préambule de 1946, de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 et de la Charte de l’environnement de 2004. La loi « Asile et Immigration » votée par le Parlement macronien en janvier 2024 a été retoquée sur 32 de ses propositions par le Conseil Constitutionnel qui garantit cette hiérarchisation. Pourtant certains de ses principes s’appliquent, comme l’obligation pour les étrangers de signer un contrat de respect des valeurs de la République, que les Français ne signent pas.

Le deuxième pilier est la garantie de l’égalité des citoyen·ne·s. Celle-ci est remise en cause quand  Bruno Retailleau parle de « Français de papier », mais elle l’est aussi quand les scènes labellisées refusent d’élaborer des programmations paritaires, comme la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création* le leur prescrit pourtant. Notre hebdo de ce jour, alors que la rédaction fait le choix de mettre en avant les œuvres des femmes, reflète une actualité culturelle encore largement dominée par des hommes. 

Le troisième pilier est la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Elle est clairement battue en brèche depuis des années, et caricaturalement depuis les élections législatives, puisque l’exécutif, c’est à dire le gouvernement, est aujourd’hui celui qui décide des lois, à coups de 49.3. Quant au pouvoir judiciaire, affaibli par ses manques chroniques de moyens, il est trop lent pour condamner efficacement, durant leurs mandats, les politiques qui dérapent, ou escroquent.

Droit international 

Ces attaques nationales de l’État de Droit sont aujourd’hui renforcées de façon spectaculaire par l’actualité internationale. La menace d’un retour au pouvoir de Donald Trump plane sur les peuples les plus dépendants du Droit international. Si la démocratie américaine s’effondre, lesquelles tiendront sans l’appui des Nations unies ? Que deviendra l’Ukraine ? 

On sait que depuis plus de 10 ans le droit maritime est remis en cause et qu’on accuse impunément SOS Méditerranée, malgré le soutien de l’Unesco, de favoriser l’immigration. Ces entorses inhumaines au droit international habituent les Français à l’idée que les vies humaines ne se valent pas et qu’une préférence nationale est possible. Tendre la main à un être humain qui se noie, l’accueillir et le soigner, défendre le droit d’asile cher aux grecs antiques ne serait plus un devoir sacré, un devoir humain ? 

Que dire, enfin, quand la bande de Gaza est minutieusement et totalement détruite, quand les morts civils sous les bombes se chiffrent, mot horrible, par dizaines de milliers, quand après avoir massacré tout un peuple c’est vers le voisin libanais que se poursuit une attaque qui multiplie les crimes de guerre ? La sidération de nos politiques, de nos médias, se poursuit… 

Alliés contre Hitler

Notre République n’est sortie de l’État de droit que sous le régime de Pétain. Elle risque aujourd’hui, en proie à un antisémitisme renouvelé et à un déni des crimes de guerre d’Israël, de voir renaître ses démons, ceux qui naissent de l’opposition de communautés historiquement et culturellement cousines. Celles qu’Hitler tentait d’opposer en déclarant : « Les peuples régis par l’Islam seront toujours plus proches de nous que la France, en dépit de la parenté du sang qui coule dans nos veines. Le malheur veut que la France ait été subvertie par l’esprit juif et condamnée à faire une politique juive. » Musulmans et juifs n’ont pas cédé à ces fausses oppositions et se sont joints aux Alliés pour vaincre le nazisme et rétablir l’État de droit dans l’Hexagone, puis dans les colonies libérées. Y parviendrons-nous aujourd’hui ? 

AGNÈS FRESCHEL

* « Les établissements labellisés de la création artistique doivent respecter les principes  d’égalité d’accès des femmes et des hommes aux responsabilités »

Carré d’Art à Nîmes : Lituanie contemporaine

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Une maquette et son artiste Aleksandra Kasuba. 1973. Réalisé au Carborundum Museum of Ceramics, Niagara Falls, New York.

Imaginé dans le cadre de la la Saison 2024 de la Lituanie en France, Imaginer le futur et The Softest Hard présentent les œuvres au Carré d’Art de deux artistes lituaniennes de générations différentes : Aleksandra Kasuba est née en 1923 à Ginkūnai en Lituanie, a étudié la sculpture et le textile à l’école des arts de Kaunas et à l’Académie des Arts de Vilnius, a émigré aux Etats-Unis avec son mari sculpteur à la fin de la seconde guerre mondiale, où elle a développé des œuvres à grande échelle dans les espaces publics et des environnements textiles architecturaux. Elle est décédée en 2019 à Albuquerque, Nouveau-Mexique. 

Marija Olsauskaite est née en 1989 à Vilnius, et développe un travail de sculpture qui utilise de façon privilégiée le verre (mais aussi le silicone), influencé par les traditions de l’artisanat et de l’ornement des artisans lituaniens, en explorant les thèmes des relations, de l’ouverture, de l’intimité et de l’appartenance. 

Sans angles droits

Imaginer le futur est la première rétrospective en France et en Europe d’Aleksandra Kasuba, parfois surnommée « la pionnière du design sans angles droits », une artiste à la pratique pluridisciplinaire au seuil du design, de l’architecture et de l’art, fascinée par les formes organiques, habitée par des visions futuristes de coexistence avec l’environnement naturel. Ses œuvres exposées au Carré d’Art sont complétées par des documents d’archives et ses collaborations avec des artistes tels que Jonas Mekas et George Maciunas. L’une de ses pièces emblématiques, Spectrum, An Afterthought (1975) est une installation lumineuse, où le spectateur explore un univers sans angles, baigné dans des néons et des filtres colorés, la lumière se divisant en couleurs en traversant l’environnement. Une œuvre qui incarne la quête de l’artiste pour créer des espaces sans contraintes géométriques, et favoriser une immersion sensorielle totale. Sous le titre « Laboratory of Environments » sont présentés une série de ses travaux liés à son implication dans le mouvement Experiments in Art and Technology (E.A.T.) aux États-Unis dans les années 1960, notamment des reliefs et des structures en plexiglas (Gateway, 1968). Et sous celui de « Environments for the Soul » sont présentés ses œuvres conçues « pour éveiller l’âme et les sens », réalisées soit au sein de sa propre maison à New York en 1971-1972, soit construits dans différents espaces publics. L’exposition se termine par l’histoire de la construction de sa maison, la Rock Hill House, dans le désert du Nouveau-Mexique (2001-2005), inspirée par ses réflexions sur les liens entre l’humain et la nature.

MARIJA OLSAUSKAITE – Never act in Haste (Baby), 2024
Verre, charnières 
Vue de l’installation de l’exposition Never Act in Haste, PM8/Francisco Salas, Vigo © Francisco Salas 

Liquide ou solide ?

The Softest Hard de Marija Olšauskaitė proposé au deuxième étage du Carré dans le Projet Room est une plongée dans un univers artistique qui interroge les frontières entre l’artisanat et la sculpture, et réfléchit sur les transformations des objets dans le temps, à travers des sculptures qui semblent parfois évoluer entre l’état liquide et solide. Sont présentées notamment ses sculptures en silicone (Softeners), un ensemble de grandes sculptures de verre horizontales, réalisées à partir de plaques de verre lituaniennes (Ponds), de grand papiers ressemblant à des vitraux représentent des natures mortes, des vies tranquilles, des souvenirs de la petite enfance (Tranquility Extension).

Une artiste pour qui tous les objets de l’exposition sont dans une dynamique familiale, ont des jumeaux, des frères ou des sœurs, en dialogue les uns avec les autres.

MARC VOIRY

Imaginer le futur - The Softest Hard
Du 25 octobre au 23 mars 
Expositions organisées dans le cadre de la Saison de la Lituanie en France 2024
Carré d’Art – Musée d’art contemporain de Nîmes

Musicatreize invite l’ensemble Orfeo Futuro

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L'ensemble Orfeo Futuro © X-DR

Il Giardino delle mele d’oro (Le jardin aux pommes d’or) est une œuvre commandée par l’ensemble Musicatreize au compositeur Gianvincenso Cresta, l’un des compositeurs les plus actifs de sa génération. Son catalogue comprend, outre de nombreuses pièces solistes, des œuvres pour ensembles, voix, orchestres et électronique. Sa musique est régulièrement jouée dans les festivals les plus importants d’Europe. Pour l’interpréter, l’ensemble vocal sera accompagné par les musiciens italiens d’Orfeo Futuro, spécialistes de l’interprétation baroque sur instruments historiques dirigés par Gioacchino de Padava avec la présence du violoniste à la carrière internationale Francesco d’Orazio

Des rives de la Méditerranée à l’Adriatique, Musicatreize va voyager vers la côte des Pouilles et ses villes somptueuses pour trois concerts italiens. À Marseille, une seule date est prévue : le 23 octobre. Autant dire que cette soirée est immanquable. Autour du Jardin aux pommes d’or, on pourra entendre des œuvres du répertoire italien mêlant, pièces sacrées et profanes, musique ancienne comme celle de Claudio Monteverdi ou de Pietro Andréa Ziani et contemporaine avec le Canto della tenebra de Luca Antignani, (1908-1988) ou Tre canti sacri de Giacinto Scelsi,compositeur vivant. « C’est une œuvre que nous adorons, s’enthousiasme le chef Roland Hayrabédian. Nous avons commencé à la chanter au tout début de Musicatreize et nous la réinterprétons toujours avec une joie immense. »

En répétition

À deux jours du concert, les chanteurs sont réunis salle Musicatreize pour une dernière répétition avant l’arrivée le lendemain des musiciens italiens. La séance de travail porte sur le spirituel Beatus Vir de Claudio Monteverdi : « Un véritable génie précurseur du baroque qui a introduit la basse continue dans ses compositions » explique Roland Hayrabedian. Regroupés en cercle par pupitres, soprani, mezzos, alti, ténors et basses lui font face. Si la joie et la bonne humeur sont au rendez-vous, le chef ne laisse passer aucune imperfection. Il recherche avec obstination le son juste, la beauté, la pureté. Dans les aigus, Les sopranes dialoguent avec les ténors, les basses répondent aux alti. Les chanteurs font et refont en suivant avec précision les indications d’un chef bienveillant mais qui ne lâche rien tant qu’il n’a pas obtenu la juste interprétation qu’il attend… Et le résultat est là : les voix s’harmonisent, les pupitres se fondent, vibrent d’un même souffle et battent d’un même cœur.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Le jardin aux pommes d’or 
23 octobre
Salle Musicatreize, Marseille