dimanche 9 novembre 2025
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Traversées marines à Correns

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Miquèu Montanaro, Correns © M.C

En préambule le musicien apportait quelques explications « Je suis né au bord de la mer. Depuis tout petit je m’y suis baigné. Maintenant, je n’y arrive plus »… Une série de poèmes en provençal est née au fil des actualités tragiques qui hantent les eaux de la Méditerranée. Autour de ces poèmes le fil des mélodies s’est tissé. Le compositeur improvise sur l’instrument traditionnel qu’est le galoubet-tambourin dont il métamorphose les accents par des boucles électro, utilisant un ensemble de flûtes de tailles différentes, « mais toutes à trois trous », et mêle son jeu à celui des sons enregistrés de la guitare électrique (Fabien Mornet), de la contrebasse (Romain Berthet), des violon et violon baryton (Baltazar Montanaro), de la flûte traversière (Miquèu Montanaro) et des tambourins (Frédéric Nevchéhirlian et Christian Sébille). 

Les ressacs du temps

Les poèmes sont en provençal mais portés par des voix de locuteurs issus de diverses régions de l’Occitanie : « si les mots ne changent pas, les intonations changent et donnent une saveur, une géographie différente », sourit le poète. Seul en scène, Miquèu Montanaro utilise les fonctionnalités toutes nouvelles du Logelloop mis au point par Philippe Ollivier : les mélodies, les voix des récitants et les rythmes pré-enregistrés apportent leurs tessitures et leurs harmonies, liées intimement aux images vidéo projetées sur une toile qui occupe tout le mur de scène. Le son du tambour éclot derrière les spectateurs bientôt accompagné d’une flûte aérienne. Homme-orchestre, le musicien monte sur scène, semble invoquer le grand poème de la mer avant que les images répétitives et hypnotiques des fonds marins et des vagues ne viennent ombrer le plateau de leurs écumes. Le sable laisse entendre les pas d’un être absent, les eaux impriment leur ressac aux amarres, reflètent la silhouette d’un bateau vide, les vagues se fracassent sur des rochers, contrastant avec l’apparente innocuité des étendues bleues. 

« Avant l’aube, le corps dans la vague mauvaise » est observé par le récitant : « le corps venait de l’autre côté du monde, de l’autre côté de l’espoir. » La mer des mythologies se transforme en cimetière, les volutes harmoniques se font incantatoires, épousent les émotions, composent un poème symphonique bouleversant, hymne à la liberté des peuples et des êtres. Il s’agit cependant d’une symphonie et non d’un requiem. La fin est emplie d’espérance et de fraternelle humanité. 

MARYVONNE COLOMBANI

Mar, Simfonia Maritima a été présenté le 24 novembre au Chantier de Correns.

Danser au féminin

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Intro de Mellina Boubetra © T. Lejolivet

C’est dans le domaine du hip-hop que Mellina Boubetra et Nach ont fait leurs premières armes. L’une y a trouvé un jeu sans cesse renouveler sur l’ancrage, la gravité et la désarticulation des corps ; l’autre, en s’immisçant dans le mouvement Krump dès le milieu des années 2000, une obsession pour la danse rituelle et le goût du récit. 

Créées respectivement en 2018 et 2021, Intro et Rehgma se pensent comme des dialogues à trois voix. La toute première pièce conçue par Mellina Boubetra vise ainsi moins l’introduction que l’introspection collective : celle d’Allison Faye, Katia Lharaig et Fiona Pincé, questionnant les possibles et limites de leurs corps raidis, exultants, discourants. Tantôt à l’unisson, tantôt en décalage, voire en réponse l’une à l’autre, les danseuses n’en dévoilent que davantage leur individualité, portées chacune à leur façon par la musique de Patrick de Oliveira. Musique qui devient, dans Rehgma, un protagoniste à part entière, incarné par un piano que Noé Chapsal et la chorégraphe elle-même viendront explorer le temps de boucles envoûtantes et d’envolées toujours surprenante. C’est ici, plus encore que la gestuelle saccadée et l’exploration de mouvements contenus dans des points de fixation différés, la capacité des thèmes et développements à toujours surprendre, à toujours adopter de nouvelles tournures, qui enthousiasme le plus durablement. Et avec elle le goût de l’abstraction qui se refuse à dénuder les corps, préférant leur offrir de nouvelles possibilités d’incarnation.

Beauté brute

C’est avant tout de corps, de physicalité et de jouissance qu’il est question chez Nach. La danseuse formée au Krump rappelle le temps d’une conférence dansée plutôt inspirée ce que ce courant né dans les ghettos de Los Angeles contient de nouveau mais aussi d’éternel en termes de rage, de rite et de théâtralité. Le flamenco et son « duende », le butô et le kathakali se frayent un chemin dans ce récit de formation se bornant à la première personne mais aussi dans une autre première pièce, Cellule, plaidant pour l’exploration sensorielle, l’expérience des limites et le goût de la beauté brute.

SUZANNE CANESSA

Spectacle donné les 23 et 25 novembre dans le cadre du cycle ChoreograpHer au Pavillon Noir, Aix-en-Provence.

MUCEM : Bleuets, digitales, chardons, pensées…

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Rene Perrot Dans un fossé de mon village, 1956. Coton chaine laine trame. Mobilier national Paris © Adagp Paris, 2023/photo Collection du Mobilier national, Philippe Sebert

Qu’il est intrigant, ce titre de la nouvelle exposition du Mucem ! Mon pauvre cœur est un hibou est une citation issue du Bestiaire de Guillaume Apollinaire. Or René Perrot, l’artiste à l’honneur dans le bel espace Rivière, en haut du fort Saint-Jean, aimait les bêtes et débordait de compassion pour les oiseaux de nuit, à son époque trop souvent cloués sur les portes des granges. Il en a peint, gravé, tissé, et a même ouvert son atelier à la cohabitation avec une chouette chevêche, Grisette.

Un homme attentif

C’est ce qui frappe au sortir de cette exposition monographique : la profonde humanité imprégnant son œuvre protéiforme, son attention prêtée tant aux humains qu’aux animaux et aux plantes. Dans l’entrée, une immense tapisserie : loin de toute ostentation, René Perrot l’a intitulée Dans un fossé de mon village. Y éclate l’heureuse foison de décennies pré-glyphosate, chaque espèce de fleur ou de papillon détaillée dans son puissant élan vital. Très ingénieusement ouverte aux regards sur ses faces avant et arrière, elle dévoile le travail de précision des tapissiers de l’ombre, les artisans de la Manufacture d’Aubusson. Une scénographie rendant hommage à un homme attentif, toute sa vie (1912-1979), aux métiers et usages vernaculaires, notamment dans les campagnes, longtemps parcourues pour le compte de l’ancêtre du Mucem, le Musée des Arts et Traditions populaires.

Alice Bernadac, conservatrice de la Cité internationale de la Tapisserie, a assuré le commissariat avec Marie-Charlotte Calafat et Raphaël Bories, conservateurs du Mucem. Tous trois ne dissimulent pas leur admiration, leur respect pour un artiste traumatisé par deux guerres mondiales, résolument anti-militariste, et qui n’en a pas moins honoré la vie avec tout son talent. Excellent affichiste, ancien élève de Cassandre et Jean Carlu aux Arts décoratifs, il a notamment réalisé un frappant poilu crucifié, qui figure dans le parcours. Prendre le temps, aujourd’hui, de s’y arrêter alors qu’à nouveau les bruits de bottes résonnent de plus en plus à travers le monde, est une expérience forte. On vous recommande, aussi, de ne pas sortir du bâtiment sans avoir découvert les archives audiovisuelles dans la salle de projection : voir et entendre René Perrot réconcilie, un peu, avec l’humanité.

GAËLLE CLOAREC

René Perrot
Mon pauvre cœur est un hibou
Jusqu'au 10 mars
Mucem, Marseille
mucem.org

Le Noël progressiste du PCF 13

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Bertold Brecht © X-DR

La programmation interroge l’histoire et les mémoires mais construit aussi le présent. Après une rencontre autour de Lucien Sève le 1er à 18 h, la journée du samedi débutera avec Jean-Louis Robert. L’historien a achevé les trois volumes de sa Nouvelle Histoire de la Commune de Paris, une somme considérable fondée sur une analyse minutieuse d’archives de presse et d’état civil, qui mettent au jour de nouvelles caractéristiques de ces 72 jours si particuliers… qui ont instauré le premier gouvernement populaire ! Jean-Louis Robert présentera également son ouvrage à la mairie des 1/7 (le 1er  décembre à 14h) ainsi qu’à l’université populaire d’Aix, au Café 3C (le 2 à 14h). 

Passé et présents 

La journée du 2 décembre se poursuivra par un débat intitulé « Quelle République pour les quartiers populaires ? » animé par Léo Purguette, directeur de La Marseillaise, avec le maire de Grigny, Philippe Rio, déclaré « meilleur maire du monde » en 2021 et qui place la culture et l’éducation au cœur de sa politique ; à ses cotés Karim Touche (Ligue de l’enseignement 13), Marie Didier, directrice du Festival de Marseille et Marina Gomes, chorégraphe de la compagnie de hip-hop Hylel qui travaille dans les quartiers populaires de Marseille, et a en particulier créé un Bach Nord bouleversant d’intelligence, d’émotion et de force politique. 

La journée se finira en chanson, textes et contextes de l’œuvre de Brecht. Michèle Rivat ravivera les Songs de Kurt Weill et la force anti-capitaliste de l’œuvre du dramaturge dans une conférence spectacle où le passé résonnera profondément avec notre présent.

N’oublions pas le stand tenu par la librairie Jean-Jacques Rousseau (Chambéry), qui rassemblera des auteurs venus présenter et signer leurs ouvrages, pour nous permettre d’anticiper des cadeaux de fin d’année militants !

AGNÈS FRESCHEL

Le Noël de la Culture
Les 1er et 2 Décembre
Fédération du PCF 13, Marseille

Souvenir d’un meurtre de masse

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Nuit d'Octobre © Rémi Blasquez

Les faits sont simples. Alors que la Guerre d’Algérie, qui ne portait pas encore ce nom, s’acheminait clairement vers la fin de la colonisation et l’Indépendance, 30 000 « Français musulmans d’Algérie » se donnent rendez-vous sur les bords de Seine pour défiler silencieusement, contre le couvre-feu que le gouvernement vient de décréter pour eux seuls. La manifestation est interdite, elle avance pacifiquement, la police tire, encercle, nasse, jette à l’eau ceux qui ne savent pas nager et entrave les autres. Torture, mutile, secondée par des harkis appelés pour les faire parler.

Le bilan est inédit dans la répression d’une manifestation en France : 120 morts officiellement, sans doute plus de 200 puisqu’ils n’ont pas été dénombrés. Le plus sidérant étant sans doute la chappe de plomb qui a pesé sur ce crime d’État. Maurice Papon – qui reste à ce jour seul haut fonctionnaire français à avoir été condamné pour crime contre l’humanité pour son rôle actif dans la déportation des juifs durant l’Occupation – déclarait le 18 octobre 1961 « le pire a été évité » et « la bataille de Paris est gagnée ». Les journaux se taisent, Le Figaro parle de deux morts et de « blessés parmi les services d’ordre », Le Parisien parle de « manifestations violentes » où les « commandos » ont pour consigne de charger la police… 

« Je recommande très vivement aux Français musulmans d’Algérie, de la façon la plus pressante de ne pas sortir entre 20h30 et 5 heures, leurs cafés étant fermés dès 19h30. » 

Maurice Papon, Préfet de Police de Paris, 4 octobre 1961

Sables mouvants de l’histoire

Il faudra quarante ans pour que les archives s’ouvrent, qu’un travail réel d’historien et de recueil de témoignages puisse avoir lieu, que le rôle des harkis qui suppléaient aussi la police française soit établi.

Pour témoigner de cette histoire Louise Vignaud met en scène un texte qu’elle a coécrit avec Myriam Boudenia, mais qui ne relève pas du théâtre documentaire. Si les deux autrices s’appuient sur des personnages réels, une adolescente noyée et déclarée suicidée, un vieux travailleur algérien, ce sont des histoires qu’elles veulent construire, pour faire éprouver la terreur, la révolte, l’effacement, le silence, les bégaiements de l’histoire. Charonne un an plus tard toujours réprimé par Papon, le sable radioactif du Sahara après les essais nucléaires de 1960, la pluie qui efface les graffitis – « Ici on noie les Algériens » –, le sable qui remonte, parfois, depuis le désert saharien.

AGNÈS FRESCHEL

Nuit d’Octobre 
Du 29 octobre au 3 décembre
La Criée, théâtre national de Marseille
Dans le cadre de la programmation du Gymnase hors les murs.

Maison Jean Vilar : de l’Ubu dans l’air

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Documents de travail, de communication et presse autour de la mise en scène d'Ubu par Jean Vilar en 1958 - fonds Jean Vilar © Association Jean Vilar

Le 8 septembre 1873, naissait Alfred Henri Jarry. Poète, romancier, dramaturge, dessinateur, graveur sur bois, l’écrivain aimait aussi la bicyclette et le canot. La Maison Jean Vilar fête les 150 ans de sa naissance par une série de manifestations réunies sous le titre Bon anniversaire Alfred !. Au cœur de cet anniversaire, l’Association Jean Vilar orchestre autour de l’œuvre maîtresse de l’auteur de Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien, Ubu roi, une série d’ateliers et manifestations en partenariat avec l’École Supérieure d’Art d’Avignon, des partenaires éducatifs et sociaux ainsi que la compagnie avignonnaise de Théâtre et Marionnette, Deraïdenz

Ateliers, théâtre, cinéma

Véritable portrait de Monsieur Ubu. Gravure d’Alfred Jarry

Les participants sont invités à un travail passionnant à partir des archives exceptionnelles conservées à la Maison Jean Vilar du spectacle Ubu que le Théâtre National Populaire a créé dans une mise en scène de Jean Vilar le 5 mars 1958 au Palais de Chaillot. L’exposition Y a d’l’Ubu permettra de découvrir les maquettes des costumes et décors dues à Jacques Lagrange (Mon oncle de Tati), les merveilleuses photographies d’Agnès Varda, les documents de travail de Jean Vilar, les enregistrements sonores de Maurice Jarre qui composa la musique et les chansons du spectacle. De larges extraits des Almanachs du Père Ubu seront lus lors du vernissage (1er décembre) par les ateliers du Théâtre à la Maison avec la complicité de Michel Lebert. Ubu roi d’Averty sera projeté le 2 décembre et une soirée Ubu Atomic, Cabaret/Un merdredi soir ! déclinera ses frasques loufoques le 20 décembre. Un focus sera posé aussi sur les années 1930 avec la mise en scène de Sylvain Itkine dans des décors signés Max Ernst et sur les éditions les plus récentes de cette pièce qui n’en finit pas de pourfendre avec ses effets hénaurmes les travers et les absurdités qui désespérément restent intemporelles. « Merdre aux assis » !

MARYVONNE COLOMBANI

Bon anniversaire Alfred !
Du 1er décembre au 31 mai 2024
Maison Jean Vilar, Avignon
04 90 86 59 64 
maisonjeanvilar.org

La danse, côté Azur

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Etay Axelroad © Ascaf

La biennale de la danse de Cannes prend ses quartiers sur la Croisette et propose ses spectacles sur la Côte d’Azur, avec une nouvelle direction et des invités prestigieux.

Une première édition pour Didier Deschamps, qui a quitté la direction du Théâtre National de Chaillot après 10 ans de programmation des plus grands chorégraphes internationaux actuels. Le programme du Festival de Danse de Cannes prend les mêmes tonalités, attaché à une danse physique, souvent narrative, qui se pose la question de sa transmission et de son écriture. En particulier avec les films de danse, qui voyagent en archives mais aussi en thématiques, comme la gravité. 

De Nice à Draguignan

Après Sharon Eyal, Thierry Malandain et la compagnie nationale norvégienne en ouverture, programmés lors du premier week-end, d’autres grands ballets internationaux se produiront, la Trisha Brown Company, le Grand Ballet de Genève, le Cloud Gate Dance de Taiwan qui clôturera le festival au Palais le 10 décembre. 

Entretemps on pourra voir, de Nice à Draguignan, quelques compagnies précieuses, celle de Michèle Noiret, le magnifique Magnifiques de Michel Kéléménis, Thomas Lebrun, Amala Dianor… et quelques incursions vers des formes plus conceptuelles, ou déjantées, ou radicales, comme celle d’Etay Axelroad, d’Alexander Vantournhout ou la création de Kor’sia… 

Le festival s’ouvre aussi à de nouvelles voies : Antoine le Ménestrel grimpe une façade en hommage à Harold Lloyd, le flamenco fait son entrée avec la Compania Paula Comitre, Jan Gallois danse dans la rue, le cirque s’installe avec la compagnie hongroise Recirquel. Bientôt le hip-hop, le Ballet national de Marseille et son École Supérieure ? 

AGNÈS FRESCHEL

Festival de danse de Cannes
Jusqu’au 10 décembre
festivaldedanse-cannes.com

Les bons offices de Jean Claude Pennetier

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Jean Claude Pennetier © Jean-Baptiste Millot

On ne présente plus Jean-Claude Pennetier. Atypique pianiste français, invité sur de nombreuses scènes internationales, ordonné prêtre orthodoxe depuis une vingtaine d’années, il a au cours de sa longue carrière créé des œuvres de Maurice Ohana, enregistré l’intégrale des œuvres de Fauré et Debussy, célébré Mozart, Schumann, Beethoven… Autant de compositeurs et de chemins parcourus qu’il revisitera avec le public du Théâtre national de La Criée le 4 décembre dans le cadre de Marseille Concerts, lui dont les apparitions se font plus rares depuis qu’il est recteur de la paroisse de Chartres.

Nouvelle lecture

Le programme qui sera donné reprend celui de son grand concert donné au Théâtre des Champs Elysées l’année dernière, qui célébrait son quatre-vingtième anniversaire. L’on retrouvera bien sûr des grands classiques des concerts pianistiques, comme un des Impromptus op. 142 de Franz Schubert, les Mazurkas op. 41 de Frédéric Chopin, Et la lune descend sur le temple qui fût extrait des Images de Claude Debussy, ou les célèbres Scènes d’Enfants de Robert Schumann. Autant de chefs d’œuvre auxquels Jean-Claude Pennetier saura, comme à son habitude, apporter une nouvelle lecture, alimenter une nouvelle quête de sens.

D’autres œuvres plus intimes seront au programme, comme le Caprice n°3 de Maurice Ohana, deux Pièces op. 11 d’Arnold Schönberg ou la Barcarolle n°3 et la Nocturne n°12 de Gabriel Fauré. Et après la Sonate n°60 en ut majeur de Joseph Haydn, comment oublier Beethoven, dont la sublime et déchirante Sonate n°31 en la bémol majeur clôturera cet ambitieux programme et ce non moins passionnante voyage intérieur.

PAUL CANESSA

Jean-Claude Pennetier
4 décembre
La Criée, théâtre national de Marseille
theatre-lacriee.com

Ce Gami qui nous veut du bien 

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Voilà maintenant quelques années que le nom de Gami est apparu dans la scène musicale de la région. Un projet pop-rock porté par une femme, Capucine Totrobas – ce n’est pas si courant – et qui a su très vite se faire repérer : le groupe a été lauréat du dispositif Quart2tour, et soutenu par Tandem et le 6mic. À côté de cette reconnaissance « institutionnelle », le trio sortait également son premier EP Make a Path, qui s’était distingué par la qualité de ses compositions, et l’univers aux accents trip-hop anglo-saxon. Avec Step By Step, son nouveau disque, le groupe poursuit son aventure dans les contrées anglaises des années 1990, toujours avec la même inventivité. 

Ça accroche

Dès l’écoute du premier morceau, Step by Step (moon), on est frappé par la qualité de l’enregistrement. Le travail sur les sons de guitare, de batterie et de clavier participent à donner une couleur très chaude au morceau, le tout augmenté par la rondeur et la tonicité de la voix de la chanteuse. Le plaisir orchestral se poursuit dans Kid Memorial, avec cette fois un rythme plus engagé. On note de nouveau la richesse de la composition, qui nous balade ici dans la douceur, plus loin dans la violence, emmené ici par un pont, là-bas par un break. 

La suite de l’EP connaît la même énergie. On soulignera quand même les cordes frottées qui viennent avec justesse agrémenter Great Sorrow, la fin quasi metal de Wasting, ou la clôture du disque toute en subtilité de Sun above the Clouds. Avec cet opus, Gami propose cinq titres au fort pouvoir accrocheur, porté tantôt avec sensibilité, tantôt avec puissance. Une réussite qui l’emmènera, on l’espère, à s’imposer encore un peu plus dans le milieu musical français.   

NICOLAS SANTUCCI

Step by Step, de Gami
B-side prod

Une dystopie inquiétante

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Etat d'urgence © A Giorgetta

Seconde sortie de résidence pour la Cie La Briqueterie avec un texte fort de Falk Richter. La femme, l’homme, le fils, sont contraints de vivre dans un espace clos, lui-même enfermé dans un ensemble d’habitations cernées de barbelés que des gens de l’extérieur tentent régulièrement de franchir et en meurent. Trop protégés, les habitants sont en fait prisonniers. Une haute autorité les contrôle, les obligeant à un travail et des résultats performants. À défaut, la perte de leur confort et l’expulsion les guettent.

Sans liberté et sans avenir

Si le spectacle commence par une cérémonie de mariage avec voile de tulle blanc et cloches à la volée, il déraille tout de suite par un accouplement qui se termine en étranglements réciproques. Sur un lit immense, l’homme pianote sur son ordinateur tandis que la femme, Irène Ranson, présence tendue et fragile, lui demande s’il est sûr d’aller bien et lui reproche son manque d’enthousiasme pour son boulot. Son inquiétude est perceptible quand elle scrute les bruits de l’extérieur. Tandis qu’elle entend des bruits de balles, il ne perçoit que celui des vagues. Lequel a raison ? Quoiqu’il en soit une menace sourde pèse et la peur s’insinue. Le metteur en scène, Jean-Jacques Rouvière, qui joue avec conviction et une certaine désespérance le rôle de l’homme, a introduit un personnage qui n’existe pas dans la pièce, une sorte d’humanoïde androgyne et glacial (Astrid Giorgetta), qui les surveille tout en entretenant un carré d’herbes, vestige d’un monde disparu.

Le fils (Ivan Gueudet) étouffe, veut sortir, s’oppose violemment au père dont il conteste l’autorité tandis que le couple n’arrive plus à se comprendre. Un univers qui, sans être daté, devient une sorte de miroir déformant de nos sociétés actuelles, déchirées par la violence des guerres et des famines.

CHRIS BOURGUE

État d’urgence de Falk Richter a été donné ce 25 novembre à La Distillerie, Aubagne.