mercredi 2 octobre 2024
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Ce qui reste

Pippo Delbono, programmé par le Gymnase à La Criée, reste en retrait de son œuvre. Comme hors les murs

On a tant aimé et détesté Pippo Delbono, l’ennui dans ses successions de séquences vaines, le soudain choc d’une image si juste qu’elle vous bouleverse à jamais. Il est devenu plus rare sur les scènes françaises depuis une dizaine d’années, surtout depuis la mort de Bobó, son merveilleux comédien microcéphale. C’est d’ailleurs de mort, plus que d’amour, qu’Amore nous parle. Deuil, vieillissement, disparition, douleur. Sur le plateau de belles images statiques s’enchaînent, mais peinent à émouvoir dès qu’elles se mettent en mouvement. Le corps vieilli de Gianluca, trisomique, de Nelson le clochard, n’ont plus la force d’évocation et de tendresse qu’ils dégageaient. Pippo lui même, qui parle au micro depuis la salle, peine à imposer sa présence. Pour compenser, reste la musique. Le fado, ses artistes, chanteurs et chanteuses, guitaristes, qui rappellent la difficulté d’aimer en dictature salazarienne, en Angola colonisé. Des chants d’amour si tristes, pourtant joués trop forts, artificiellement sonorisés, enrichis de guitares enregistrées… 

La magie de Pippo, ce soir-là, ne franchissait pas la scène, malgré les images, malgré les mots douloureux du poète au micro, malgré l’attente d’une salle prête à s’émouvoir de ce tableau du deuil amoureux, du silence de la solitude, de la vieillesse qui approche. Peut-être, d’autres soirs, la fragile étincelle des spectacles de Delbono parvient-elle à allumer, comme dans le passé, des flambées superbes. 

AGNÈS FRESCHEL

Amore a été joué du 6 au 10 décembre au Théâtre de la Criée dans le cadre de la programmation du Gymnase hors les murs.
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