mercredi 2 octobre 2024
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Entrer dans la ronde

Les pas hantés d’Alessandro Sciarroni ont foulé le studio du Pavillon Noir à Aix-en-Provence

Cela semblait une évidence, et c’est pourtant une première : le festival Parallèle et le Pavillon Noir ont uni leurs forces pour programmer une soirée ambitieuse. Soit l’accueil de deux pièces de l’italien Alessandro Sciarroni, interprétés dans le studio d’Aix-en-Provence par successivement cinq et deux danseurs et danseuses. 

Le projet Turning mûrit depuis bientôt dix ans : c’est son dernier aboutissement, Orlando’s version qui a été proposé à un public assis à hauteur de ses interprètes et à peine séparé de la scène par une ligne blanche. Intimiste, le dispositif donne à voir les jeunes danseurs en plein essayage de leurs chaussons et répétition de micro-gestes. Le rituel se met ensuite en place, et se verra toujours tronqué. 

Désir de résurrection
Menée par les mimiques, gestes et inspirations sonores de Lucrezia Gabrieli, la petite troupe chaussée de pointes opère une série de rotations à géométrie variable. Bras en couronne, arabesques, relevés sur pointes s’enchaînent, unissant et distinguant tour à tour les corps. Dont celui de Francsco Saverio Cavallere, se prêtant avec grâce à l’exercice, mais aussi celui, très musculeux, de Marissa Parzei

Plus proches de l’imaginaire du ballet classique, les physiques tout en longueur de Sofia Magnani et Roberta Racis se révèlent moins moteurs que liants. La complicité à l’œuvre entre les interprètes achève d’humaniser cet exercice de style qui sait aussi se révéler troublant dans sa dynamique. Envoûtante, jamais entièrement « quadraturée », celle-ci évoque en premier lieu les vols gracieux et capricieux d’oiseaux migrateurs. 

Au retour de l’entracte, ce sont deux hommes délestés de pointes mais pourvus de chemises seventies qui nous accueillent : chargés de ressuscités les pas acrobatiques d’une danse bolognaise – la polka chinata – Gianmaria Borzillo et Giovanfrancesco Giannini s’élancent et tournoient de concert, enserrés l’un à l’autre. Save the last dance for me fait, de même que Turning, du geste chorégraphique un désir de résurrection, et ne livre qu’une grammaire hantée. Sans doute aurait-il fallu, sinon le bousculer, le laisser davantage à l’air libre.

SUZANNE CANESSA

Turning : Orlando’s version et Save the last dance for me ont été donnés le 8 décembre au Pavillon Noir, Aix-en-Provence.
Suzanne Canessa
Suzanne Canessa
Docteure en littérature comparée, passionnée de langues, Suzanne a consacré sa thèse de doctorat à Jean-Sébastien Bach. Elle enseigne le français, la littérature et l’histoire de l’Opéra à l’Institute for American Universities et à Sciences Po Aix. Collaboratrice régulière du journal Zébuline, elle publie dans les rubriques Musiques, Livres, Cinéma, Spectacle vivant et Arts Visuels.
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