mercredi 20 novembre 2024
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Voix de femmes

Avec Mémoire d’un corps brûlant, la Costaricienne Antonella Sudasassi Furniss donne la parole à des femmes âgées, qui se sont souvent tues toute leur vie

Dès le début de Mémoires d’un corps brûlant (Memorias de un cuerpo que arde), le dispositif est clairement énoncé : on va entendre la parole de femmes septuagénaires et une comédienne va les incarner. Dans un plan séquence, tourné caméra à l’épaule, on assiste aux préparatifs du tournage : maquillage de l’actrice (Sol Carballo), équipe technique en action et le clap. La comédienne déambule à travers un appartement, époussette des cadres, ouvre des tiroirs, manipule des boites en fer, passant de pièce en pièce, répétant les mêmes gestes. Ce corps est l’incarnation de trois femmes, Ana, Patricia et Mayela qui ont osé parler, sans tabous de leur vie, de leur sexualité. Tour à tour, elles évoquent leur enfance, parfois difficile, leurs premières amours, leur premier baiser, leurs rêves souvent déçus, la solitude, la peur de mourir seules. Elles confient leurs plaisirs ou leurs frustrations, leur ignorance face à ce qui leur arrivait, les règles ou une grossesse, la baisse de la libido à la ménopause. Rien ne les préparait à leur vie de femme. Elles se souviennent de la recherche de l’invisibilité, seule armure face aux agressions sexuelles. L’une a reçu coups après coups, 17 années de terreur où le viol conjugal était de règle : « Tu dois tenir bon parce que c’est ta croix ! » l’encourageait sa mère ! Une femme physiquement détruite mais qui a réussi à remonter la pente même si les « souvenirs prennent de la place. »

« J’ai besoin d’un pompier »

Antonella Sudasassi Furniss a recueilli la voix des femmes de la génération de sa grand-mère et a choisi de mettre en scène ces moments évoqués, tricotant ensemble scènes de jeunesse et d’âge mur, images et voix, en longs plans séquences. Des voix fortes, des voix sincères, remplies d’humour parfois, des voix de femmes qui, malgré l’oppression, sont encore vivantes. « Pour éteindre le feu qui m’habite, j’ai besoin d’un pompier », plaisante l’une d’elle. Une parole qui a donné son titre, Mémoires d’un corps brûlant, à ce film, nécessaire dans cette période où le procès de Mazan nous rappelle que, pour certains, une femme appartient à un homme. Comme le dit une des trois protagonistes « Aujourd’hui, c’est la meilleure période de ma vie, parce que je suis complètement libre. »

ANNIE GAVA

Mémoires d’un corps brûlant, d’Antonella Sudasassi Furniss
En salles le 20 novembre

Après avoir déjà obtenu le prix du public de la section Panorama à la dernière Berlinale, il représentera le Costa Rica aux Oscars 2025.

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