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Terres de gauche, de droite, ou de fantasmes ? 

Loin de la vision d’un terroir comme lieu de repli identitaire, Samuel Grzybowski, enseignant à Sciences-Po, parle dans Les Terroirs et la gauche d’un espace qui a toujours mobilisé les luttes sociales

Depuis Charles Maurras et Maurice Barrès, le terroir est le symbole de bastions à défendre face à ce qui vient du « dehors ». Aujourd’hui encore le terroir est instrumentalisé ; d’un côté par l’extrême droite qui véhicule l’imaginaire d’une France qui n’a jamais vraiment existé, et de l’autre par le capitalisme. Les industriels ont bien compris que les produits dits du « terroir », gages de qualité, faisaient vendre. Or le terroir, ce n’est pas la lessive à la lavande ou au savon de Marseille, c’est d’abord le circuit court, le respect de la vie, l’écoute des climats, la communauté solidaire. L’actualité du terroir, c’est sa dimension écologique et sociale. 

S’appuyant sur des recherches de sociologues, d’historiens, de géographes, Samuel Grzybowski, enseignant à Sciences-Po, cofondateur de Coexister, mouvement d’éducation populaire pour la laïcité et directeur d’une coopérative de tiers-lieux écologiques et solidaires (CitéCoop), revient sur l’histoire du terroir, la vraie, pas celle idéologisée pour en faire un lieu de repli identitaire. Un espace « commun » qui a toujours mobilisé les luttes sociales : celles des mineurs du Nord issus de l’immigration, des sardinières de Douarnenez, des ouvriers de Sochaux auxquels nous pourrions rajouter les ouvriers des chantiers navals de La Ciotat ou les mineurs de Gardanne ; un terroir qui aujourd’hui crée des communautés de résistance face au surtourisme, et aux airbnb. 

L’auteur définit quatre branches au terroir : un lieu, des gens, une production liée à une terre ou un climat et la transmission de traditions et de pratiques. En cela il peut aussi bien s’incarner dans le sel de Camargue que dans les fest-noz de Bretagne ou le rap en Seine-Saint-Denis. Cet ancrage dans une terre à partir de laquelle on peut lutter est liée au droit du sol à l’origine de la conception de gauche de la nation. C’est la vie dans un lieu qui légitime son lien à celui-ci, non pas la filiation raciale et biologique d’anciens propriétaires déconnectés du terrain. L’auteur nous parle de ces tiers lieux paysans qui impliquent les communautés locales, des parcs naturels qui soutiennent les activités compatibles avec l’environnement comme celui de Camargue qui favorise l’élevage extensive de taureaux et de chevaux, la riziculture biologique et le tourisme ornithologique ou le parc national de Port Cros qui soutient la pêche artisanale et l’écotourisme. Un livre salutaire.

ANNE-MARIE THOMAZEAU

Les Terroirs et la gauche, de Samuel Grzybowski
Éditions du Faubourg – 19 €
Sorti le 13 septembre 
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