samedi 2 août 2025
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Quand la culture soutient SOS Méditerranée 

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Zamdane et ses amis occuperont la scène pendant plus de deux heures © DR

Le décompte fait froid dans le dos. Depuis 2014, l’Organisation internationale pour les migrations estime à plus de 26 000 le nombre de migrants morts en traversant la mer Méditerranée, un chiffre certainement sous-estimé. Dernière tragédie en date, le naufrage d’un chalutier vétuste au large de la Grèce, transportant plusieurs centaines de personnes, pour seulement 78 survivants. Face à cette tragédie, des associations prennent la mer, et viennent en aide aux naufragés. C’est le cas de SOS Méditerranée, qui depuis 2016 a secouru plus de 37 000 personnes à bord de l’Aquarius puis de l’Ocean Viking. Une démarche salvatrice qui a un coût (14 000 euros pour une seule journée en mer), et qui nécessite le soutien de la société. Depuis plusieurs années, des artistes ont décidé d’aider l’association, pour chercher des fonds d’une part, mais aussi pour sensibiliser la population. 

C’est cette volonté de sensibilisation qui a poussé Mikhaël Piccone, fondateur de Calms (Collectif des artistes lyriques et musiciens pour la solidarité), à écrire son spectacle Sans Frontières Fixes, donné au Théâtre Toursky le 26 mai dernier. « Ce n’est pas un concert juste pour récolter de l’argent, c’est un véritable spectacle qui témoigne de ce que vivent les gens qui traversent la méditerranée », explique-t-il. Et d’ajouter que cette œuvre permet au public de « prendre conscience que ces personnes ont une histoire, des vies, et que la nécessité de les aider est fondamentale ». 

Un engagement vital

Pour Sabine Grenard, responsable événementiel pour SOS Méditerranée, cet engagement des artistes est « vital ». « Puisque le financement de l’association provient à 90% de la générosité publique, le soutien des artistes est absolument crucial pour sauver des vies en mer. » Elle souligne aussi que cet engagement de leur part est courageux, car l’action de l’association « peut-être décriée par une certaine partie de la population. » Une question que Mickhaël Piccone a lui rapidement évacué : « C’est une urgence humaine qui n’a pas de parti, ça dépasse toutes les couleurs politiques et toutes les croyances », tranche-t-il.

Ce 24 juin, sur l’esplanade du J4 à Marseille, c’est la première fois que SOS Méditerranée organise un concert de cette ampleur – avec l’aide de la Fédération des mutuelles de France. « Nous attendons 10 000 personnes, avec l’objectif de financer une semaine d’opération à bord de l’Ocean Viking », nous dit Sabine Grenard. Pour ramener tout ce monde, l’association a fait de nouveau appel à Zamdane, qui s’était déjà engagé pour eux l’année dernière. Après avoir répondu « très très rapidement » à la sollicitation, il a réussi à fédérer plus de quinze rappeurs (Bekar, Di-Meh, Rim’K, Hatik…) et se partageront la scène pendant deux heures. À leurs côtés, défileront aussi l’électro de Fakear, un DJ set du Massilia Sound System, ou encore le reggae de Gang Jah Mind, dont le dernier album s’intitule Refugees

MATHIEU FRECHE ET NICOLAS SANTUCCI

SOS, concert solidaire pour sauver des vies en mer
24 juin
Esplanade du J4, Marseille
sosmediterranee.fr

Les mots de l’enfance s’impriment à La Criée 

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L'ENFANCE A L'OEUVRE © Christophe RAYNAUD DELAGE

Conçu autour de tubes littéraires et musicaux des XIXe et XXe siècles, le spectacle L’Enfance à l’œuvre, conçu et interprété par Robin Renucci et Nicolas Stavy, avait connu un succès certain lors de sa création en 2017 au Festival d’Avignon. Six ans plus tard, le directeur du théâtre de La Criée l’a transposé sur la scène de sa grande salle, renommée Déméter par ses soins.

Si le dispositif semble au premier abord simple, l’idée centrale du spectacle étant d’établir une conversation entre littérature et musique, le thème commun des œuvres n’a rien de simpliste : il s’agit ici de revisiter l’enfance et de comprendre comment certains souvenirs permettent aux individus de se développer, et au désir d’écriture de naître. Les textes autobiographiques de Romain Gary et Marcel Proust, centrés sur des figures maternelles imposantes, dialoguent avec la mélancolie et le souffle romanesque des œuvres de Schumann, Tchaïkovski, Rachmaninov et César Franck. Les envolées poétiques d’Arthur Rimbaud et Paul Valéry s’immiscent entre les Poèmes de Scriabine et les mélodies de Schubert.

Puissante et empressée

Les effets sont rares mais toujours efficace : l’acteur s’assied sur une chaise, ouvre un livre, le repose sur un bureau, module sa voix pour imiter l’accent russe de la mère ou la voix haut perchée de la petite fille qui hantent les souvenirs de Romain Gary. Le piano de Nicolas Stavy est tout aussi expressif, et mu par une passion tangible pour le répertoire choisi : les morceaux parfois doux, légers et optimistes se muent en un simple phrasé en tragédies fortes, puissantes et empressée. L’avancée d’un bout à l’autre est perceptible et progressive : le décor de fond opère une transition entre les fleurs vivantes et des fleurs fanées et imite le mouvement du lecteur qui commence à gauche de la scène et finit à droite. Les souvenirs voyagent à travers le temps, jusqu’à leur évanouissement final. Tout juste pourra-t-on regretter qu’ils ne relatent qu’une expérience masculine et un peu désuète, là où les tropismes enfantins d’une Nathalie Sarraute auraient, par exemple, eu toute leur place.

KARLA CILIEN ET ISABELLA MILLER

L’Enfance à l’œuvre a été donnée du 15 au 17 juin à La Criée, théâtre national de Marseille.

La Fierté des artistes

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La Pride de Marseille en 2021 © Chris Boyer

Zibeline. La Pride, dans l’esprit de tous, c’est une Marche, et des événements festifs. Pourtant à Marseille la programmation artistique associée semble prendre de l’ampleur. Est-ce votre volonté ?

Didier Garcia. La Pride fête ses trente ans à Marseille, et la programmation culturelle associée existe, sous cette forme, depuis quatre ans. Au départ, il s’agissait pour le comité de pilotage de fédérer et rendre visibles les initiatives des associations et des commerces LGBTQI+, initiatives essentiellement festives, ou réflexives, militantes. On s’est dit l’an denier que ce serait bien d’y ajouter des propositions artistiques portées directement par le comité de pilotage, et liées aux activités que nous avons à l’année.

En quoi sont-elles différentes de celles des associations ? 

Elles ne sont pas différentes, elles les complètent ! On essaie de s’ouvrir sur tous les genres artistiques et de travailler avec les opérateurs culturels du territoire. L’an dernier avec les Instants Videos, cette année avec le Ballet national de Marseille, qui assurera l’arrivée de la marche à la mairie. On essaie aussi de fédérer : le mouvement drag est très présent à Marseille, porté par des associations nombreuses. Il faut se méfier de la concurrence dans ces cas-là, et notre soirée drag les regroupe tous. On en est assez fiers !

Ces événements sont-ils surtout destinés aux communautés LGBTQI+, ou ont-ils vocation à médiatiser ces questions au-delà ? 

Le deux ! Les LGBTQI+ ont besoin de se retrouver autour des problématiques qu’ils partagent, de se pencher aussi sur les spécificités des autres branches du mouvement, identité de genre, homoparentalité, préférences sexuelles, réfugiés, LGBT…  Mais nous voulons aussi des événements culturels qui se partagent avec tous nos alliés, et qui ouvrent les yeux de ceux qui ne le sont pas. 

Qui parlent donc de toutes les questions L, G, B, T et plus ?

Oui, on essaie d’être le plus inclusif possible. On sollicite toutes les « lettres », mais certains répondent peu, les « bi » en particulier qui restent éloignés de la militance, et dans une moindre mesure les jeunes lesbiennes qui en ce moment semblent davantage préoccupées par la construction de familles, ou le combat féministe, que par la Pride. Mais attention, on n’est pas que des gays blancs ! À Marseille, nous voulons mettre en lumière les communautés qui sont les plus en difficulté, en particulier les racisés, les réfugiés, les jeunes en rupture familiale, les trans. 

À propos des trans, est-ce que la médiatisation actuelle des questions de genre déplace les habitudes et point de vue du comité de pilotage de la Pride ? Est ce qu’on a évolué de la notion de préférence sexuelle vers celle d’une définition, intime, de son propre genre ? 

Ces questions ne sont pas nouvelles pour nous. Transat propose des événements et l’association est très active dans le comité de pilotage, qui change chaque année.  Nous genrons chacun comme il le désire. Mais nous voulons rester davantage dans la fabrique des choses que dans la discussion théorique. 

Qu’avez-vous programmé ensemble ? 

La projection de trois films au Pathé Madeleine, Tom Boy le 27 juin, parce que certains ne l’ont toujours pas vu, Nuit noire en Anatolie le 30 juin, qui résonne particulièrement aujourd’hui avec la réélection d’Erdogan et la catastrophe que cela induit pour les LGBT en Turquie, et Last Dance le 26 juin, un film très émouvant sur la dernière prestation de drag de Vince, aka Lady Vinsantos. On projette aussi Guet-Apens le documentaire de Mediapart sur les violences homophobes aujourd’hui, avec un débat en présence des réalisateurs. Une soirée importante pour parler de leur recrudescence incroyable, qui passe sous les radars des médias. 

Des expos sont installées à Marseille 3013… 

Oui, c’est notre QG depuis samedi 17 juin. Il y a plusieurs expositions : Ordinaire, des portraits de migrants LGBT photographiés par Adel Nouar. On accède à leurs voix, à leurs récits de vies avec un QR code. Indivisibles et Visibles, une exposition de, par et pour les jeunes du Refuge,en butte au rejet familial. Familia, une exposition de Mag Rodrigues, proposée par le consulat du Portugal, sur l’homoparentalité. La photographe portugaise s’attache à montrer la normalité de ces familles dans leur foyer. Une installation vidéo de la compagnie Essevesse, La Commedia, autour de la Comédie de Dante, qui donnera lieu à une performance dansée le 2 juillet. Et Les 30 Glorieux·ses, une exposition de Sun Afrika aka Gemma Muse, un·e artiste pluridisciplinaire, qui se photographie en Vénus naissant dans la fontaine de Longchamp et s’expose, solaire… Iel est aussi DJ, racisé·e, militant·e, et extrêmement positif·ve et joyeux·se !

Puis, avant la Marche, l’événement sur les escaliers de Saint-Charles ?

Oui, une pluie arc-en-ciel d’événements de rue, déploiement des couleurs du rainbow flag avec de grandes voiles, pour fêter les trente ans de la marche à l’endroit où elle a commencé. Et mesurer le chemin parcouru, même s’il reste long encore.

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL 

Pride 2 weeks
Programmation culturelle de la Pride Marseille
Jusqu’au 2 juillet
Pride-marseile.com

Jean-Marc Coppola : « nous vivons une année très enthousiasmante »

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Zébuline. À quoi est dû, selon vous, le plébiscite des Marseillaises et Marseillais pour leur politique culturelle ?

Jean-Marc Coppola. Il serait facile de prendre pour acquis un sondage – j’aurais, pour ma part, tendance à m’en méfier. Ce qui m’intéresse, c’est le contact direct avec les Marseillaises et les Marseillais. Il se révèle généralement très encourageant. Il faut aussi reconnaître que nous avons eu de la chance : au moment où des théâtres déprogramment et ferment partout en France, nous vivons une année très enthousiasmante, marquée par la réouverture du Mac mais aussi d’un lieu de création et de résidence au Théâtre de Lenche. Et il faut enfin admettre que notre volonté de mettre en place une véritable politique culturelle a été perçue et entendue. Je sens une réelle reconnaissance vis-à-vis de notre engagement. L’offre culturelle de Marseille a toujours été très importante et très diverse, mais elle n’était pas mise en avant, accompagnée par une politique culturelle digne de ce nom. Pas simplement de lieux ou d’argents dédiés à la culture, mais d’une réelle politique. Un vrai travail de communication a été fait : il ne s’agit pas de communiquer pour communiquer, mais de valoriser des pépites culturelles méconnues. Nous ne disposons pas, par exemple, d’un support qui donnerait l’ampleur de cette offre culturelle à l’échelle municipale. Plusieurs médias, et Zébuline tout particulièrement, en rendent compte avec un regard critique, et c’est un regard qui est plus que précieux, essentiel, pour accompagner cette vie culturelle.

Quels ont été les moyens techniques déployés pour pérenniser et développer l’offre culturelle actuelle ? Quels modes de financements avez-vous privilégiés ?

Les subventions d’investissement étaient trop peu nombreuses sous Gaudin. Tout était prioritaire et rien ne l’était… Nous avons appuyé là-dessus. Il a fallu convaincre l’équipe municipale de leur nécessité. Et je sais que beaucoup jalousent mon budget ; nous sommes passés de 27 à 28 millions de subventions, sans compter les 20 millions mobilisés pour l’Opéra de Marseille. Notre budget est donc plus que stable, et le caractère essentiel et prioritaire de la culture est plus que reconnu, ici. L’enveloppe est également plus important : 160 nouvelles associations ont été accompagnées, et ce sont désormais 500 associations culturelles et artistiques que nous soutenons.

« Notre obligation vis-à-vis de Montévidéo n’est pas juridique : elle est morale et politique. »

Cela implique-t-il de baisser d’autres subventions de fonctionnement ? Que répondez-vous à celles et ceux qui craignent des baisses de budgets pour certaines structures au profit de nouveaux venus ?

Certaines subventions ont en effet fait l’objet de baisses après de nombreuses discussions : celle de Marseille Jazz des Cinq Continents, du Gymnase, du Toursky bien évidemment… L’Inseamm a également connu une baisse certaine. Nous avons aussi envisagé et mis en place des économies en internes : dans notre façon de concevoir les expositions, moins nombreuses mais présentes plus longtemps à l’affiche, car cela nous semblait correspondre à la politique mise en place par la municipalité. J’entends évidemment les inquiétudes quant à l’augmentation des coûts généraux, qui est un réel problème : nous y faisons face également ! L’augmentation du prix de l’énergie, les conventions salariales et l’inflation, réelle, impactent considérablement le fonctionnement des municipalités. Je sais notamment que le Cirva a subi, en raison de l’augmentation impressionnante des prix de l’énergie, une multiplication par deux de son budget. Nous arrivons au bout d’un cycle concernant la fiscalité et son fonctionnement en termes de répartition des richesses. Nous constatons également avec beaucoup de tristesse que nous ne sommes ni en mesure de rattraper en si peu de temps des années de politique du renoncement, ni de nous substituer au rôle de l’État, de la région et surtout du département. Cela pourra sembler un peu démagogique de ma part, mais je l’assume : l’État consacre 413 milliards [entre 2024 et 2030, ndlr] de budget à l’armée. Ne peut-il pas augmenter ne serait-ce que minimement son budget consacré à la culture ?

C’est notamment une aide de l’État que vous préconisez pour venir en aide à Hubert Colas et éviter de perdre Montévidéo ?

Nous aurons en effet du mal à nous passer de cette aide. Je soutiens complètement Hubert Colas, il a tout à fait raison de craindre et de protester contre la dernière décision de la Cour de Cassation qui, en mai dernier, a soutenu le propriétaire et sa volonté de faire de la promotion immobilière sur ce lieu pourtant emblématique de création, de résidence et d’écriture. Beaucoup d’associations se retrouvent dans une situation similaire, et sont pourtant moins entendues. La compagnie Dodescaden fait face aux réclamations d’un autre propriétaire privé sur son lieu du boulevard des Dames. Nous devons l’accompagner dans un changement de lieu, qui implique de déménager 35 tonnes d’équipements. La mairie n’est pas propriétaire de ces lieux et n’a ni obligation, ni pouvoir sur eux. Préempter les lieux est une option délicate, surtout sans capacité d’investissement pour la restauration et la rénovation. De plus, si nous devenons propriétaires des lieux, nous devrons en vertu de l’Ordonnance de 2017 lancer un appel à une mise en concurrence, susceptible de priver Hubert Colas de ce lieu. Et nous ne voulons voir disparaître ni ce lieu, ni l’association, ni le festival. Nous travaillons donc à des solutions en collaboration avec la Drac, la région et le département, qui impliqueraient de conserver une partie du lieu, ou d’investir de façon plus pérenne la Cômerie, des écoles désaffectées le temps de trouver mieux… Notre obligation vis-à-vis de Montévidéo n’est pas juridique : elle est morale et politique. Et il serait criminel, et contraire à notre conception de l’art et de la culture, d’assister les bras croisés à sa disparition. Nous nous battrons.

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR SUZANNE CANESSA

Marseille, la culture en capitale

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Benoît Payan lors de l'inauguration du [Mac] © Ville de Marseille

Zébuline. Selon un sondage Ifop pour La Tribune et Public Sénat paru au début du mois, 68% des Marseillais se disent satisfaits de l’action culturelle de la municipalité. Êtes-vous surpris par ce chiffre ? 

Benoît Payan. Non, je ne suis pas surpris. Nous voulons faire en sorte que la culture soit accessible à toutes et tous, que la création et les équipements culturels soient soutenus au mieux. Les Marseillaises et Marseillais sont des amoureux de culture. C’est la politique culturelle qui doit être mieux orientée vers leurs attentes et c’est ce à quoi nous nous employons depuis trois ans. Ce plébiscite montre que nous sommes sur le bon chemin, que les Marseillais nous encouragent à poursuivre dans ce sens, c’est une belle réussite.

À quoi est dû selon vous ce succès ?

Il est d’abord le résultat d’une réflexion profonde sur la visée de la culture. Nous pensons qu’elle doit être accessible à tous, qu’elle doit ouvrir au monde et faire réfléchir aux enjeux de société. À partir de cette conviction, la politique culturelle qui en découle est volontariste et tournée vers les Marseillaises et les Marseillais, pour qu’ils s’approprient de plus en plus et de mieux en mieux l’offre culturelle de la ville. Et ça marche ! Il n’y a jamais eu autant de monde dans nos musées par exemple (680.568 visiteurs en 2022), où la fréquentation est même plus forte aujourd’hui qu’en 2019, avant la crise sanitaire. La vivacité de la scène artistique marseillaise est incroyable, reconnue de tous. Il faut donc générer les conditions qui permettent aux artistes de créer et de présenter leur travail devant un public le plus large et divers possible. C’est pour cela que nous avons entrepris un travail de fond pour structurer et développer un soutien public équilibré, aux équipements, aux festivals, à la création, à l’éducation artistique et culturelle. Ce travail commence à porter ses fruits.

« Il n’y a jamais eu autant de monde dans nos musées »

Qu’aimez-vous particulièrement dans la culture et l’offre culturelle de la ville ? Qu’a-t-elle de particulier ?

Ce qu’elle a de particulier est bien évidemment lié à l’histoire de la ville, à son patrimoine culturel, à la diversité de sa population et de ses sensibilités. À Marseille on peut – et on veut ! – découvrir les œuvres d’une formidable artiste moderne algérienne, écouter en terrasse un groupe de cumbia, s’initier à la céramique provençale et voir Nabucco à l’Opéra… dans la même journée !

Avez-vous encore le temps d’avoir une vie culturelle ? D’aller à l’Opéra, de peindre…?

En tant que Maire, ma priorité c’est Marseille et les Marseillais, j’y consacre tout mon temps et mon énergie, c’est mon engagement et je m’y tiens. Il ne reste donc plus beaucoup de place pour autre chose. Mais dès que mon emploi du temps me le permet, c’est vers la culture que je me tourne. Écouter un opéra, voir une belle exposition, découvrir le travail d’un jeune artiste, croquer un paysage sur un bout de feuille de papier. C’est ma respiration, mon oxygène. Ça me donne de la force pour avancer.

De quelles mesures et projets menés depuis 2020 êtes-vous particulièrement fier ?

Je suis heureux que tous les Marseillais puissent maintenant profiter gratuitement des bibliothèques et des musées municipaux, qu’on puisse proposer une programmation variée et gratuite partout dans la ville dans le cadre de l’Été Marseillais. La gratuité ne fait pas tout, mais elle supprime une barrière inutile et majeure à la fréquentation par toutes et tous des lieux et des manifestations culturels. Et les Marseillais sont plus qu’au rendez-vous, c’est ça ma plus grande fierté !

Et puis je suis très fier de la réouverture du Musée d’Art Contemporain de Marseille. Nous avons mis de l’énergie pour relancer ce chantier qui était quasiment à l’arrêt alors qu’il suscitait beaucoup d’attente, de la part des professionnels mais aussi des Marseillais. L’énorme succès populaire de sa réouverture en témoigne, sa résonance nationale aussi. J’en suis d’autant plus fier que la manière dont nous avons pensé sa réouverture et ses premiers mois d’existence représente l’esprit de notre politique culturelle : créer des espaces et des temps ouverts, attirants, où l’excellence artistique et scientifique est mise en partage, où l’exigence de qualité et l’ouverture à tous ne sont plus mises en contradiction.

« Dès que mon emploi du temps me le permet, c’est vers la culture que je me tourne »

Quels projets auraient mérité d’être mieux développés ? Et quels chantiers restent à mener selon vous, concernant la politique culturelle mais également d’autres missions liées à celle-ci ?

Nous avons avancé sur beaucoup de fronts en trois ans. Rouvrir un musée et deux bibliothèques (celles du Panier et des Cinq-Avenues), lancer la création d’une dixième bibliothèque municipale dans le 3e arrondissement, assurer le soutien d’un secteur culturel fragilisé par la crise sanitaire, renouveler les modes de gestion d’équipements culturels importants, à commencer par nos propres musées, ce n’est pas rien. Ce sont des engagements que nous avions pris et qui ont été tenus. Nous avons aussi passé un cap important sur la question du patrimoine, en proposant le classement de quarante nouveaux édifices, validés par le ministère de la Culture.

Mais il reste bien sûr beaucoup de travail à accomplir. Les Marseillais doivent pouvoir compter sur le service public culturel qu’ils méritent. Nous devons pouvoir assurer un service de lecture publique de qualité, avec des bibliothèques vivantes, ouvertes à des horaires adaptés à la vie des étudiants et des familles, animées par des équipes qui retrouvent du sens à leur travail. C’est la feuille de route de la nouvelle directrice de la Lecture Publique Sophie Geffrotin qui vient de nous rejoindre en juin. La question de la lecture publique est le fondement d’une politique culturelle ambitieuse et inclusive, elle est intrinsèquement liée aux grands chantiers que nous menons sur les écoles et l’éducation. Nous avons également un grand travail de fond à accomplir sur l’Opéra, nous voulons progresser sur qualité de l’accueil dans nos musées et continuer à faire grandir l’Été Marseillais, pour qu’il devienne le grand rendez-vous estival que les Marseillais méritent d’avoir. Mais aussi trouver, en dialogue avec les acteurs du territoire, les voies et moyens pour soutenir et développer la scène artistique et culturelle marseillaise, qui fait face, comme partout, à des enjeux sociaux, économiques et environnementaux inédits. Recoudre Marseille du Nord au Sud, réduire les fractures sociales et les inégalités territoriales, répondre aux défis environnementaux, ce sont aussi des questions qui se posent en matière culturelle. Les chantiers ne manquent pas ! Mais la détermination est là, nous avons la volonté farouche d’être à la hauteur des attentes.

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR SUZANNE CANESSA

Papillotes et didascalies

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Chaque année, un auteur est associé au travail de la Compagnie d’entraînement du Théâtre des Ateliers. Les élèves comédiens se livrent à une auscultation de l’œuvre, rencontrent l’auteur, travaillent avec lui au cours d’un séminaire de trois jours en vue de la création en juin de l’une de ses œuvres et ce pour sept représentations, ce qui leur permet d’approfondir leur jeu, d’expérimenter, d’explorer. 

Cette année l’auteur de référence était la dramaturge Mariette Navarro dont le premier roman Ultramarins publié en 2021 a reçu le prix Frontières au printemps et le prix Léopold Sedar Senghor en septembre 2022. 

Les comédiennes avaient choisi dans le corpus proposé, Les Célébrations ou le brouhaha des retrouvailles, texte dont la forme première n’est pas celle, « classique », d’une pièce de théâtre. Le texte s’orchestre en courts paragraphes, chacun destiné à décrire à la troisième personne ce que le personnage fait ou ressent. Sont en scène « Le Premier », « La Seconde », « Le Troisième », « L’une », « L’autre », « Celle-Ci », « Celle-Là ». La distanciation, établie d’emblée, permet une approche espiègle souvent ironique de ces personnages rassemblés à l’instigation du Premier, pour une fête de retrouvailles. Ce dernier « remet en marche comme une mécanique ancienne l’association ancienne »… 

Une pièce réglée au cordeau

On cherche un appareil photo, on se laisse aller à des gestes potaches, on fouille dans ses souvenirs, on est paralysé par une paire de chaussures trop étroites, un gargouillement intempestif, on guette un clin d’œil on tente de l’interpréter, on rit un peu trop fort, on raconte des anecdotes, on cherche à se reconnaître… Ce qui les unit, c’est leur année de naissance, est-ce une réunion de promo autour d’un buffet campagnard, on ne le saura jamais vraiment (le terme « scolarité » seul nous indique l’origine probable de cette scène de retrouvailles), l’important n’est pas là, il réside plutôt dans l’approche fine des mécanismes de la sociabilité. Les pantins s’animent, courent, sont en retard ou en avance, boitent, se raclent la gorge, s’approchent de groupes qui s’ouvrent ou se referment. L’un arbore un nez rouge de clown, l’autre grimpe désespérément à une échelle… Il faut faire attention à ses lèvres, à sa voiture, à sa tenue. Les vêtements portés sont les costumes de scène que réclament les conventions de la société dans ce théâtre qu’est le monde.

Pas une réplique ne sera prononcée, si ce n’est inaudible chaque fois que sera mis en scène le « brouhaha » : les mots de la communication importent peu. Les corps sont en scène. C’est par eux que seront rendus sensibles les mouvements de l’âme, les incertitudes, les interrogations, les malaises, les peurs et les disputes anciennes. Magistrales, Pauline AugierLucie BondouxSarah BrunelSiham GharnitMargaux MaignanLéa MainierNoémie Sarcey, interprètent avec justesse et passion cette œuvre délicate dans la mise en scène réglée au cordeau d’Alain Simon. Est-ce que ces jeunes artistes conviendront d’un « brouhaha de retrouvailles » dans quelques années ?  Bravo !

MARYVONNE COLOMBANI

Les sept représentations ont été données du 8 au 16 juin au Théâtre des Ateliers, Aix-en-Provence.

Musiques à Bagatelle : la jeunesse à l’honneur 

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Magnifiques © Jean Barak

A tous·tes les mélomanes qui n’en auraient pas eu assez le soir de la Fête de la Musique, Musiques à Bagatelle a pensé à vous. Le festival met cette année l’accent sur la jeunesse, avec la participation active du Conservatoire Pierre Barbizet de Marseille. Trois jours, le jeudi (22), le samedi (24) et le dimanche (25), qui font la part belle aux étudiants.
Et puisque jeunesse rime avec liberté, Musique à Bagatelle s’ouvre avec une jam session de la classe de jazz. Les musiciens·nes vont jouer de leurs instruments en improvisant et en laissant faire la dynamique musicale collective. La jam laisse parler les jeunes, et leur laisse raconter ensemble leur musique au public. 

Les jeunes étudiant·es du conservatoire seront aussi mis à l’honneur par la représentation du groupe lauréat de la classe de jazz à partir de 20h30, mais aussi lors du récital des classes de piano du Conservatoire, en ouverture de la programmation du samedi 24 juin. Enfin, le dimanche 25 juin, les étudiant·es de l’École Nationale de Danse de Marseille (ENDM) ouvrent la soirée dès 20h15, entre répertoire classique – Coppélia d’Arthur Saint-Léon, adapté par les professeurs de l’ENDM – et pièces contemporaines : BREAK d’Arnaud Baldaquin et Déserts d’Amour de Dominique Bagouet, remonté par Michel Kelemenis

Jeunes et pros 

C’est d’ailleurs le travail de Michel Kelemenis qui finit de mettre la jeunesse en avant dans la programmation de cette édition de Musiques à Bagatelle. Le festival se conclut cette année sur la représentation de Magnifiques, un hommage aux danseuses et aux danseurs, mais surtout un hymne à la vie, à la liberté et la jeunesse. « Un (de mes jeunes) printemps, écoutant Bach, les fenêtres s’ouvrent sur l’extérieur invitant l’air encore frais et le chant des oiseaux à entrer ; plus que le sentiment d’un beau jour, celui d’une belle vie à son début… » explique le chorégraphe.
Michel Kelemenis considère la jeunesse comme une « force qui filtre le monde vers un autre lendemain », et c’est cette force qu’il est question de célébrer au travers de la redécouverte du Magnificat de Jean-Sébastien Bach. La musique fait le lien avec la jeunesse dans Magnifiques, grâce à l’intervention du compositeur de musique électronique Angelos Liaros Copola, fidèle collaborateur de Kelemenis, qui vient apporter de nouvelles sonorités à l’œuvre baroque de Bach. 

Et aussi 

La soirée jazz du jeudi 22 juin se conclut en beauté, avec un concert de la chanteuse Celia Kameni, accompagnée par des musiciens·nes comme Raphael Imbert (saxophoniste et directeur du Conservatoire Pierre Barbizet), Romain Morello (trombone), Vincent Lafont (trombone), Fabien Ottones (claviers, basse) et Julie Saury (batterie). 

Enfin, la soirée Fusion du vendredi 23 juin avec une programmation 100% féminine : le duo de jumelles marseillaises Isaya et leur musique protéiforme qui navigue entre les sonorités percutantes, les rythmes smooth et les ambiances vocales ; et les barcelonaises de KeTeKalles, aux chansons nerveuses et envoûtantes oscillant entre rumba, hip-hop et reggaeton depuis la sortie de Enciendo le 9 juin dernier. Un programme riche pour écouter ou danser (et pourquoi pas les deux) dans le parc de Bagatelle ! 

MATHIEU FRECHE

Musiques à Bagatelle
Du 22 au 25 juin
Parc de Bagatelle, Marseille
mairie-marseille6-8.fr

Culture des arts et des sciences

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©Scientifica

Ce n’est pas tous les jours que des badauds, y compris des enfants, s’autorisent à entrer à la fac. Le festival Scientifica, deux journées « interactives et participatives » organisées par la Mission Interdisciplinarité(s) d’Aix-Marseille Université, les y a invités. Le 16 juin, une table ronde portait sur une tendance qui se renforce ces dernières années, visant à rapprocher les arts et les sciences. « Les séparer, comme cela a été le cas au XXe siècle, n’a pas vraiment de sens historiquement », soulignait Erwan Geffroy, en charge de ces sujets à l’Université de Brest. En effet, nul doute que Léonard de Vinci aurait bien ri de ce cloisonnement. Sa consœur Constance Moréteau, coordinatrice scientifique de l’Iméra (institut d’études avancées d’Aix-Marseille) voit dans ces retrouvailles un avantage énorme : confronter les cadres de pensée entre tous les champs des sciences, qu’elles soient « sociales » ou « dures », avec les pratiques artistiques les plus variées, procure un appel d’air frais d’un côté comme de l’autre.

Un lit de pixels

Bien-sûr, parmi les exemples de collaborations, les démonstrations et les expérimentations proposées aux visiteurs, on notait l’omniprésence du numérique, point de rencontre apparemment difficile à éviter pour les artistes et les scientifiques. Casque de réalité virtuelle sur les oreilles, certains s’essayaient à BeMed, une appli de sensibilisation aux effets du changement climatique en Méditerranée. Très impressionnantes, ses fonctionnalités permettent de s’immerger dans l’eau ou de prendre de la hauteur sur un paysage des Calanques. Encore plus éloquent, un escape game conçu par une chimiste et une spécialiste de littérature médiévale. L’affaire Pétrarque est une enquête policière sur fond de manuscrit enluminé, conduisant les participants à mesurer à quel point la collaboration entre champs disciplinaires permet d’aller plus loin pour résoudre les mystères de l’histoire. Si vous voulez essayer, le jeu sera en accès libre sur le site d’Amu à partir du mois de septembre.

GAËLLE CLOAREC

Scientifica #2 s’est tenu les 16 et 17 juin sur le campus Robert Schuman, à Aix-en-Provence.

Fleurs d’azur

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© X-DR

Au domaine de Fontblanche de Vitrolles, la pianiste classique Amandine Habib, co-directrice artistique de la compagnie Nine Spirit et directrice artistique du festival, propose un nouveau spectacle, Enfant Azur. Plutôt que de formuler les mots « autisme », ou « TSA (trouble du spectre de l’autisme) », le texte du spectacle évoque un « enfant atypique ». On le suit dans son quotidien. Sans doute « Azur fait beaucoup de choses qui vont à contresens. Mais de quel sens parle-t-on ? Du sens où les gens ont l’habitude d’aller ? Le sens tout droit de tout le monde n’intéresse pas cet enfant », explique Amandine Habib dans l’introduction de son propos. 

Un autre regard

Ces voies de traverse, ces pas sur le côté, deviennent l’essence d’un récit poétique et initiatique. La distanciation nécessaire à la naissance d’une œuvre se voit ici posée naturellement, et ainsi fleurissent les poétiques efflorescences chères au festival. Les pièces de musique classique se marient à des compositions personnelles, des improvisations, invitent la danse de Vito Giotta et Angel Martinez Hernandez, danseurs contemporains de la compagnie Labotilar, tandis que le rappeur, beatmaker et pianiste MoonK convie les mots à ourler les phrases musicales de leur supplément de sens, contrepoint éloquent d’une vie urbaine et foisonnante aux frontières de la poésie, enserrée dans ses rythmiques propres. Ces élans apportent un regard autre sur la différence et surtout sur le handicap invisible, forme de handicap souvent incomprise, minimisée, niée, car justement elle ne se voit pas. L’imagination débridée de l’histoire de L’enfant Azur est souvent drôle, colorée, et rend sensibles les difficultés et les stigmates qui marquent le quotidien de cet enfant neuroatypique. Azur, prénom empli d’espoir et de lumière, ouvre une porte de compréhension et d’acceptation. 

MARYVONNE COLOMBANI

Enfant Azur
24 juin
Jardin du Domaine de Fontblanche, Vitrolles
pianoenfleurs.com

Montévidéo, dos aux murs

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Montevidéo © X-DR

Zebuline. Qu’est ce qui a déclenché le contentieux juridique vis-à-vis du propriétaire du lieu il y a sept ans ?

Hubert Colas. En 2016, on s’est retrouvé avec un renouvellement de bail qui n’était pas celui que nous avions signé au préalable en compagnie du Grim et de Jean-Marc Montera [co-fondateur de Montévidéo, qui fait plus partie du projet aujourd’hui, ndlr]. Et ce nouveau bail ne nous a pas semblé conforme à la situation dans laquelle on était (bail civil au lieu d’un bail professionnel), il permettait au propriétaire de nous demander de partir. Donc on l’a dénoncé. Notre démarche a permis de faire placer Montevideo sous « l’ordonnance 1945 », qui dit que les lieux culturels, et notamment les théâtres, ne peuvent pas être réaffectés sans l’accord du ministère de la Culture. Et d’ouvrir un dialogue avec le propriétaire et les institutions pour réfléchir dans un temps calme et posé à l’avenir du projet. Chose qui n’a pas vraiment pu exister. Avec la Ville, sous la précédente municipalité, la possibilité de déplacer le lieu a été évoquée : deux espaces sur le périmètre d’Euroméditerranée (un à côté des ateliers Jeanne Barret, l’autre dans une ancienne savonnerie) auraient pu convenir, notamment pour toute la partie résidence d’artistes. Mais finalement la municipalité a souhaité que l’on reste à Montévidéo. La situation s’est ensuite engluée dans un attentisme permanent. L’ensemble des institutions a laissé courir le temps de la procédure jusqu’à son terme, en avril dernier, où le pourvoi en cassation a été rejeté. 

Hubert Colas © Marc-Antoine Serra

Aujourd’hui le propriétaire peut vous demander de partir à n’importe quel moment. Il le fait ?

Pour l’instant, le propriétaire cherche un acquéreur, que ce soit un acquéreur public ou un acquéreur privé. Je ne suis pas dans sa tête, mais je pense qu’il souhaite trouver une solution au plus vite, et nous aussi. Il est un fait que dans les jours ou dans les semaines qui viennent, (l’été est là, avec ses périodes de vacances, on peut craindre de retrouver des scellés sur la porte à notre retour…) il pourrait nous envoyer un huissier, pour nous stipuler de partir.

Quelles sont les perspectives ? 

Si la Ville achète le bâtiment, ça rentre dans les prérogatives de normalisation de sécurité des bâtiments publics, les normes de la Ville s’imposeraient, et la totalité des travaux devraient être faits. Mais aujourd’hui, hormis l’organisme qui est la Sogima (société de gestion immobilière de la ville de Marseille) qui pourrait racheter le lieu, et nous garder à l’intérieur, la Ville ne souhaite pas racheter Montévidéo. L’autre solution serait de voir la capacité d’emprunt de Montévidéo, qui malheureusement n’est pas forte, et qui impliquerait de plus, dans un second temps, un autre apport d’argent, de 20%, sur les investissements. Aujourd’hui, Montévidéo est sous-doté financièrement (300 000 euros environ), par rapport aux exercices que nous menons ici, tant sur le festival actoral que sur Montévidéo, que sur ma Cie Diphtong, pour pouvoir envisager un apport conséquent en cas de rachat. Donc on cherche des apports privés, ou d’autres possibilités de regroupement, ou de fondations. En sachant que si nous arrivions à être acquéreurs, un étalement des travaux serait possible.

L’hypothèse d’une relocalisation de Montévidéo est définitivement abandonnée ?

J’ai ouvert la possibilité d’un dialogue de relocalisation de Montévidéo à la Cômerie [ancien couvent très proche de Montévidéo, investi depuis trois ans par un projet de centre d’art et de culture, piloté par Hubert Colas, ndlr]. Certes, il manque une salle, mais cette salle pourrait être construite dans une économie d’échelle similaire à l’achat de Montévidéo. La Cômerie est un bâtiment public, c’est une chose que j’ai mise sur la table, mais qui n’a pas été retenue. Donc pour l’instant, nous sommes dans l’attente d’une décision qui sauvera le bâtiment dans lequel nous sommes aujourd’hui. 

Il va y avoir une réunion le 5 juillet prochain : qui sera autour de la table ?

Il y aura l’ensemble des collectivités territoriales, la Drac, la Région, le Département et la Ville, suite à la réunion du 5 juin, au cours de laquelle il nous a été demandé un certain nombre de remises à niveau des devis d’investissement du lieu en cas de rachat. En sachant qu’effectivement, depuis six ou sept ans, le bâtiment vit comme il est, avec peu de moyens. Il y a des rénovations très simples à faire, des chambres des résidences d’artistes, des toilettes, des choses comme ça, mais aussi, ce qu’on attend depuis longtemps, une remise en état de la sécurité du bâtiment, pour un accueil plus grand du public. Montévidéo aujourd’hui ne peut accueillir que de toutes petites formes, avec une jauge restreinte. Ce qui bloque notamment la possibilité d’une billetterie plus importante, et les possibilités de location de l’espace. On est parfaitement conscient qu’il y a aujourd’hui une nécessité pour les associations culturelles de trouver des fonds parallèles aux subsides des différentes collectivités territoriales. Et nous le faisons depuis le début, que ce soit avec la fondation Pernod-Ricard, ou avec d’autres fondations, ou avec des centres internationaux, qui nous aident. 

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR MARC VOIRY