mercredi 2 octobre 2024
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Panique identitaire sur le corps des femmes

La rentrée des classes a vu l’humiliation de centaines de lycéennes et collégiennes françaises, renvoyées chez elles parce qu’elles portaient des vêtements trop amples, trop couvrants ou trop longs. Trop pour qui ? 

La laïcité française nécessite donc qu’on montre les mollets des femmes, la forme de leurs seins de leurs fesses ? Plus de la moitié des jeunes filles qui se sont vu refuser l’entrée dans des établissements publics financés par les impôts de leurs parents ne portaient pas d’abayas. Certaines d’entre elles, adolescentes, n’étaient simplement pas à l’aise avec le fait de changer de formes, et portaient des vêtements amples. Toutes n’étaient pas musulmanes. Mais toutes, bien sûr, étaient racisées.

Comment l’État français en est il arrivé à produire des situations si fortement discriminatoires, si humiliantes, si révoltantes ? 

Alors que tous les théâtres régionaux programment des spectacles qui mettent en scène les difficultés sociales des racisés, le désir d’égalité des femmes, la violence des clivages sociaux, l’importance de l’image du corps, les histoires des exils, les musiques du monde… alors que tout ce travail patient, minutieux, de terrain, de tolérance, d’écoute, de bienveillance, est mené dans tous les établissements culturels, voilà qu’on impose aux établissements scolaires de discriminer leurs élèves à l’entrée ? Aux professeurs de leur refuser leur enseignement ? Au nom d’un principe de laïcité qui ne se fonde plus sur des « signes ostentatoires », mais sur une manière, culturelle, de se vêtir et de concevoir la pudeur ? 

Le corps des jeunes filles restera-t-il toujours un terrain de luttes ? Quand va-t-on les laisser s’habiller comme elles le veulent sans subir de jugement ou de regard inquisiteur ? 

La planète brûle, le climat s’emballe, la guerre s’installe, les candidats à l’exil se noient dans notre mer, mais l’enjeu important de cette rentrée serait d’interdire les abayas et de rétablir l’uniforme ? D’équarrir les singularités, les corps, les différences ? 

S’en prendre au corps des musulmanes, ou supposées telles, n’est qu’un piètre dérivatif, révoltant, de nos angoisses de l’avenir. Boucs émissaires et victimes d’une société incapable de faire face aux changements impérieux et nécessaires qu’elle doit s’imposer, l’autre est redevenu l’ennemi d’une République Française qui n’en finit pas de se croire blanche, catholique et masculine.

AGNÈS FRECHEL

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