Le seul nom de Renaud Capuçon suffit aujourd’hui à un théâtre pour faire salle combleavant même l’ouverture d’une saison. Non content de rassembler sans peine autour du répertoire peu considéré de la musique classique, le célébrissime violoniste a souvent donné de son nom, et de sa personne, pour soutenir à Aix-en-Provence des projets loin des sentiers battus – notamment autour de Nouveaux Horizons, festival malheureusement disparu depuis cette saison.
C’est de nouveau en compagnie de jeunes révélations qu’il s’est produit le 28 février dans un effectif somme toute rare : le quatuor à cordes avec piano. Paul Zientara à l’alto, nommé aux Victoires de la musique classique, la prodige salzbourgeoise Julia Hagen au violoncelle et le pianiste Guillaume Bellom, disciple impressionnant d’Angelich, ont ainsi fait corps autour de Capuçon, prouvant qu’ils n’ont aujourd’hui plus rien à envier à leurs aînés. Les musiciens ont tour à tour brillé sur leurs parties solistes, notamment sur le très bel opus 45 de Fauré. La cantilène de l’adagio ma non troppo a notamment mobilisé tout particulièrement l’alto doux et chantant de Paul Zientara, avant de se propager avec la même intensité chez ses voisins.

Pari tenu
Les extrémités étaient davantage sollicitées sur la magnifique pièce de jeunesse de Mahler : brahmsien, encore marqué par la forme sonate, ce quatuor plus bref regorge de thèmes entêtants. Marqué par ces sauts de sixte mineures scandés avec fougue et désespoir par le violon de Capuçon, il reluit au son des brillants chromatismes exécutés avec dextérité et émotion par Julia Hagen, articulés sur la même inflexion, et attestant ainsi d’une réelle complicité nouée entre les interprètes.
Plus conséquent, le quatuor de Strauss sollicite tout particulièrement le piano subtil, mélancolique et incantatoire de Guillaume Bellom. Lyrique, riche et complexe, la pièce démontre dans ses développements les plus versatiles que les musiciens disposent d’un sens de l’écoute rare, et d’une complicité digne d’ensembles bien installés. Un beau pari, donc, magnifiquement tenu.

SUZANNE CANESSA
Concert donné le 28 février au Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence.
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