mercredi 2 octobre 2024
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THÉÂTRE DU BOIS DE L’AUNE : Jamais trop grand le théâtre !

En préambule du programme de la saison nouvelle du Bois de l’Aune, ce théâtre atypique aux spectacles entièrement gratuits, son directeur, Patrick Ranchain, débute par « il faut continuer à voir trop grand »…

Zébuline. Pourquoi ce mot d’ordre « voir trop grand » ? 

Patrick Ranchain. Justement ! Il faut voir trop grand dans un monde étriqué et continuer à envisager le futur. Est-ce un rapport au monde naïf ? Les gens ne viennent pas au théâtre pour voir ce qu’il y aux infos. Dans le « trop grand » j’aimerais inclure les représentations, les multiplier, faire vivre les spectacles sur une réelle durée. La production c’est bien, l’aide qui l’accompagne aussi, mais 90% des structures ont dans leur cahier des charges cette fonction de soutien à la création, et il n’y a pas suffisamment de suivi pour la diffusion. 

On parle toujours de la gratuité comme facteur incitatif…

Faux, totalement ! La gratuité vient en fait au secours des personnes qui ont déjà l’habitude d’aller au théâtre et qui, par raison économique, ne peuvent plus se permettre d’assister à des représentations. Ce n’est pas la gratuité qui amène les gens au théâtre. Le meilleur endroit de la gratuité est celui qui permettrait à ceux qui ne sont jamais venus au théâtre et n’en ont pas éprouvé le besoin de s’y rendre et d’y revenir. La rencontre de l’imaginaire des autres, la confrontation des idées, des esthétiques, ne semblent ni nécessaires ni urgentes, mais, et c’est la beauté des arts, sont justement pour cela nécessaires et urgentes.

Il y a une responsabilité des théâtres ? Ce sont des lieux engagés?

Le théâtre est politique au sens qu’il est dans la cité, et qu’il a donc une responsabilité citoyenne. Ainsi, alors que le spectre du RN se profile avec de plus en plus de force, il ne faut pas se cantonner dans une lettre ouverte collective et indignée, deux mois avant les élections. C’est aujourd’hui que nous devons être dynamiques. Il me plaît de croire encore que les petits gestes que l’on fait au théâtre modifient les choses. Les mots doivent être justes, à l’endroit de nos actes. 

Tout part du plateau dans un théâtre, c’est toujours ça, quel que soit le théâtre. Si le plateau est beau, on fait un rétroplanning et tout devient beau. Quand on passe la porte du hall du Bois de l’Aune, se passe quelque chose de l’ordre de l’hospitalité. L’équipe y est dynamique parce que le plateau est beau. Désormais on peut venir prendre un café, lire les journaux C’est ça une maison dans laquelle on se sent bien, un lieu ouvert, au sens de l’agora.

Comment s’élabore la saison ? 

Ce ne sont pas les spectacles qui importent mais les personnes, leurs démarches artistiques. Cette année, je me suis rendu compte que la majorité des spectacles racontent des histoires. Il y a beaucoup de compagnies de la région, des compagnonnages, des nouveaux, les projets participatifs de Taoufik Izzediou et Élise Vigneron, le projet au long cours de Marie Vialle, la générosité d’Agnès Régolo, l’incroyable présence de Julien Anduvar à qui j’ai confié l’ouverture de saison, une énergie iconoclaste et d’une hospitalité attentive… J’aime à reprendre la phrase du poète portugais Miguel Torga, « l’universel c’est le local moins les murs »… 

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR MARYVONNE COLOMBANI

Théâtre du Bois de l’Aune
Aix-en-Provence
04 88 71 74 80 
boisdelaune.fr
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