mercredi 2 octobre 2024
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The Quiet Girl, un été salvateur

Porté par la performance de la jeune actrice Catherine Clinch, Colm Bairéad évoque la complexité des sentiments avec une grande maîtrise

Après un court métrage semi-autobiographique, Le Fils de son père, le réalisateur irlandais  Colm Bairéad reste dans une thématique familiale pour son premier long métrage : The Quiet Girl.

Est-elle si tranquille que ça cette fillette aux yeux saphir perçant le masque lisse d’un visage au teint pâle ? Cette gamine au verbe rare et bas, presque chuchoté, aux longues jambes qui lui permettent de courir vite, de s’enfuir pour se cacher sans cesse ? « La vagabonde », comme l’étiquette son père sans l’ombre d’une intention affective. Cáit (Catherine Clinch) ne rit jamais. Isolée à l’école où elle peine à déchiffrer. Seule dans une fratrie nombreuse, sans complicité. Négligée par sa mère, une nouvelle fois enceinte, peinant à nourrir la marmaille, tandis que le père boit des bières au pub et joue l’argent du ménage. 

Scénario ténu

Nous sommes dans la campagne irlandaise des années 1980. On parle gaélique et anglais. Les pâturages jouxtent la mer. Et, comme d’habitude, on cherche Cáit, dans les hautes herbes des champs. Pour se débarrasser d’elle, le temps des grandes vacances, on l’abandonne à trois heures de route de là, chez de vagues cousins : un vieux couple de fermiers sans enfants : Eibblin et Séan Kinsella (Carrie Crowley, Andrew Bennett). Auprès d’eux, elle va découvrir la tendresse, le respect, l’écoute de l’autre, l’entraide ainsi que le fantôme qui hante les lieux et leurs cœurs.  

Il est des étés de l’enfance initiatiques, où on grandit plus vite que durant tous les mois précédents. C’est ce que fera Cáit : elle aura grandi, changé. Sans bruit, sans fureur, sans crise mais en profondeur. Adapté d’une nouvelle de Claire Keegan, Foster (titre français : Les Trois Lumières), le scénario est ténu. La progression dramatique se fait, pas à pas, suivant l’évolution des rapports entre Cáit et sa famille d’accueil, par le déplacement infime des sentiments à travers les gestes quotidiens : la toilette, le bain, la préparation des repas, les soins apportés aux bêtes, la corvée de l’eau, le nettoyage des étables. À travers les rituels concrets qui s’installent, tissent les liens. Foster signifie à la fois adoption et nourriture, les Kinsella dans cette parenthèse estivale jouent bien les deux rôles, d’adoptants et de nourriciers. Cáit (merveilleuse performance de la jeune primo-actrice) est de tous les plans. Regardée regardant. Ses émotions jamais exprimées se lisent à livre ouvert. The Quiet Girl est un film simple sur la complexité des sentiments. Une observation sensible de ce qui palpite sous les silences. 

Grand Prix Génération Kplus à la Berlinale 2022, nommé aux Oscars 2023, primé dans de nombreux festivals, The Quiet Girl sans effets tapageurs et avec une grande maîtrise, sait trouver les notes justes pour nous émouvoir.

ÉLISE PADOVANI

The Quiet Girl, de Colm Bairéad
En salle depuis le 12 avril
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