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Cellules nerveuses

Ce 25 mars à la Friche la Belle de Mai, Otomo Yoshihide, Tom Malmendier et Émilie Skrijelj ont offert une expérience sonore remarquable, avec platines et batterie débridées

La « noise » se limiterait-elle au bruit ? Et le bruit lui-même n’aurait-il pas le droit d’acquérir ses lettres de noblesse musicale ? Depuis cinquante ans, beaucoup de musiciens répondent à ces questions par l’affirmative. Otomo Yoshihide, Tom Malmendier et Émilie Skrijelj ont poursuivi la réflexion sur le Grand plateau de la Friche la Belle de Mai ce 25 mars à l’invitation du GMEM, Centre national de création musicale. 

Ça joue Technics

Sur la scène, trois postes se dressent. Une batterie typée jazz au milieu, et de chaque côté une paire de platines et sa table de mixage. C’est Tom Malmendier qui lance les hostilités, et dès les premiers coups de baguette, on comprend qu’on entre dans un terrain mouvant, loin des repères de la musique « conventionnelle », et c’est tant mieux. Les deux platines arrivent à leur tour dans les secondes qui suivent. Otomo Yoshihide triture un disque avec une carte (bancaire ?) – qu’on imagine équipée d’un micro – et dessine un son d’alarme, strident, et perturbant. De l’autre côté Émilie Skrijelj joue de la platine avec scratch, donnant du corps et du rythme à l’ensemble. Pendant une quinzaine de minutes, ce sera un déchainement de douce-violence musicale, une accroche qui interpelle d’abord, puis qui emporte. Otomo Yoshihide s’essaie aussi à la balle rebondissante sur la MK2, puis balance sa cellule sur une cymbale qui fait office de disque – on aura souvent mal pour le diamant – mais les effets fonctionnent et fascinent. 

Le reste de la performance saura jouer de l’intensité, notamment grâce à Tom Malmendier qui donnera le tempo avec brillance, s’illustrant lui aussi par son inventivité : chaîne en métal sur la caisse claire (oui on l’a déjà vu mais ça marche), et brosse à laver sur le tom medium. Avant une fin en apothéose sonore, où Otomo Yoshihide frappe d’autant plus franchement sur ses platines, jusqu’à les taper violemment contre sa table. 

On pourrait s’essayer à deviner ce qu’ont voulu raconter les trois artistes sur scène. Mais il serait trop facile d’entendre ici les bruits de la guerre, là de la ville, ou de l’industrie… ils arrivent simplement à produire une musique puissante, un feu d’artifice sonore aussi vif qu’un coup de fusil, et aussi pur que du platine. 

NICOLAS SANTUCCI 

Concert donné le 26 mars au Grand Plateau de la Friche la Belle de Mai, Marseille.
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