vendredi 18 avril 2025
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« Tout une moitié du monde », ouvre les fenêtres de la fiction

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« Ce livre est un livre d’écrivaine mais sans doute avant tout un livre de lectrice. […] Si on considère ce livre comme un essai, il ne se comportera pas tout à fait bien. Il désobéira ici ou là. Il manquera à ses obligations de sérieux. Si on le considère comme une rêverie autour de la fiction, il péchera au contraire par excès de sérieux de temps à autre. » Ainsi écrit Alice Zeniter dans le premier chapitre de son nouvel opus Toute une moitié du monde, annonçant par là un texte original, érudit et léger à la fois, commencé pendant la pandémie, à un moment où elle ne trouvait dans les fictions qu’elle lisait que « des modèles obsolètes », incapables de répondre à son « état impuissant et suspendu ». De son soupçon croissant vis-à-vis des fictions traditionnelles est née l’envie de s’interroger sur ce qui pourrait constituer la fiction à venir. Une forme romanesque tout sauf habituelle, au sein de laquelle « toute une moitié du monde », c’est-à-dire les femmes, serait enfin correctement représentée. Puisant dans ses souvenirs de lectrice, très anciens ou ultra contemporains, comme dans ses impressionnantes références universitaires, Zeniter propose une réflexion, pointue mais jamais pesante, sur les notions de forme, de personnage, de récit choral…. Et on déguste cet « essai », mené avec un brio et un humour remarquables, comme on le ferait d’une belle histoire que l’écrivaine nous conterait à l’oreille. Bravo, l’autrice !

FRED ROBERT

Tout une moitié du monde, Alice Zeniter
Flammarion
21€

L’écrivaine sera présente aux prochaines Correspondances de Manosque, du 21 au 25 septembre.

« La Treizième Heure », un hymne à l’amour

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La Treizième Heure, Emmanuelle Bayamack-Tam, éditions P.O.L

La Treizième Heure, c’est le titre d’un vieux film de Maurice Tourneur. C’est aussi le nom d’un parfum de Cartier. C’est surtout le titre du nouveau roman d’Emmanuelle Bayamack-Tam et et c’est le nom d’une église. L’Église de la Treizième Heure a été fondée par Lenny Maurier, l’un des principaux protagonistes de ce récit choral. Cette petite église (une centaine de membres à tout casser) accueille sans discrimination ceux que la vie a cabossés et qui attendent la treizième heure, celle qui verra s’inverser un ordre social inique, revenir Dieu sur terre et triompher l’amour. Vaste programme auquel frères et sœurs de la congrégation s’efforcent d’œuvrer à coup de messes poétiques, célébrations échevelées, ateliers de danse, fabrication de bougies, etc. Bref, « juste une communauté qui croit que la souffrance et la mort n’auront pas le dernier mot ». Une sorte de famille élargie qui vibre à l’unisson en scandant des poèmes, dont le fameux sonnet de Nerval qui évoque… « la treizième heure ». Au sein de cette étrange mais bien inoffensive « secte », une famille, étrange elle aussi. Farah, Lenny, Hind : la fille, le père, la « mère ». Les trois pointes d’un triangle hors-normes. Et les trois fils narratifs successifs du roman qui, certes, tient les annales de l’Église de la Treizième Heure, mais relate surtout l’amour fou de Lenny pour Hind, la trans sublime qui l’a un jour renversée autant que la poésie l’avait fait plus tôt dans sa vie ; leur passion fulgurante puis la naissance de Farah. Le récit est habilement mené, les points de vue alternent et l’histoire s’enrichit des passés qu’elle dévoile peu à peu. On retrouve avec délectation l’humour caustique de l’autrice, son aptitude à imaginer des parcours et des figures peu ordinaires, son goût pour le mélange des registres, son aisance à insérer des citations, qui font cohabiter sans distinction les grands noms de la poésie et ceux de la variété la plus populaire. Un style hybride, à l’image de l’identité de ses personnages. Un vibrant hymne à l’amour sous toutes ses formes, et à l’acceptation joyeuse des différences.

FRED ROBERT

La Treizième Heure, Emmanuelle Bayamack-Tam
P.O.L
23€ 

La romancière sera présente aux prochaines Correspondances de Manosque, du 21 au 25 septembre.

Les ouvertures créatives d’actoral

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La peau de l'espace ©Anne-Laure Lechat

On se surprend parfois à s’évader en pensées, se déconnectant quelques secondes de la réalité de l’instant. Pour la plupart d’entre nous, ces rêveries diurnes ont peu d’effet sur le quotidien. Au mieux, elles sont un refuge qui nous aide, nous stimule dans le cheminement d’une réflexion. Mais pour d’autres, ce phénomène porte un nom, le trouble de la rêverie compulsive, et se transforme en obsession. Concept psychologique découvert seulement en 2002, ce trouble relève d’une impossibilité à contrôler ses rêves éveillés. Ceux-ci peuvent occuper plusieurs heures par jour jusqu’à former un monde imaginaire précis et complexe, aux scénarios et personnages récurrents. Une vie parallèle, intérieure et secrète, qui prend l’ascendant sur la vie réelle. C’est à ces rêveurs de l’extrême que s’est intéressé le metteur en scène suédois Marcus Lindeen. Dans Wild Minds, le public, disposé en cercle, participe à ce que pourrait être une thérapie de groupe pour rêveurs extrêmes.

Rêveurs compulsifs

Cinq performeurs équipés d’oreillettes prêtent leurs voix aux récits de rêveurs compulsifs dont les témoignages ont été recueillis par Marcus Lindeen lui-même. Pathologie ou disposition psychique à une créativité débordante ? Expérience scénique troublante entre théâtre documentaire et performance, Wild Minds pose la question.
Travaillant depuis plusieurs années sur l’articulation de l’immobilité et du mouvement en même temps et dans le même corps, Yasmine Hugonnet a imaginé La Peau de l’Espace comme un tissage entre les fictions anatomiques et la poésie de l’espace que peuvent percevoir les spectateurs·trices. Dans ce solo, elle invite le public à devenir complice de son laboratoire sensible et personnel. Avec l’envie de faire sentir, voir et entendre les pensées motrices qui animent le travail de création.

Invisibles et imaginaires

Pour la chorégraphe suisse, « la danse fait naître des figures mais aussi des espaces hors du corps ou parfois même des objets invisibles. Le spectacle n’est pas une histoire, c’est une danse qui voyage avec des apparitions. Ce qui persiste, c’est la relation entre la danseuse et le public qui ensemble entrent en contact avec des imaginaires ». Ce sont ces invisibles que La Peau de l’Espace cherche à révéler dans une forme dansée oratoire qui expérimente la pensée en mouvement.
Dans This Song Father Used to Sing (Three Days in May), l’auteur et metteur en scène Wichaya Artamat explore la façon dont une société se souvient de l’histoire et la dissimule. Figure de la nouvelle scène thaïlandaise, il fait ici référence à des épisodes politiques particulièrement violents qui ont marqué l’histoire récente son pays : les manifestations durement réprimées en 1992 et 2010 et le coup d’État de la junte militaire en 2014.

Refuge thaï

À Bangkok, dans la maison abandonnée de leur père défunt, un frère et une sœur conversent au rythme des bières qu’ils sirotent et des plats qui mijotent. Témoins d’une histoire qui se répète mais de laquelle ils s’extraient comme pour trouver refuge, les deux personnages vieillissent dans une temporalité où passé, présent et futur s’entremêlent avec étrangeté.
Troisième étape de la série de lectures de Maquette, roman de l’auteur marseillais Théo Casciani en cours d’écriture et à paraître en 2023, Version est un film peuplé d’avatars, de sosies, d’hologrammes et de fantômes. Ce moyen-métrage de science-fiction co-réalisé avec Lou Rambert Preiss rassemble des médiums différents et sera simultanément diffusé le 9 septembre 2022 dans un ensemble de lieux en France et à l’étranger. Entre dédoublements et sorties de corps, les personnages de ce chapitre se croisent, se perdent puis se retrouvent dans des territoires urbains ou virtuels pour se disputer la mémoire et imaginer le devenir d’une identité disparue.

LUDOVIC TOMAS

Week-end d’ouverture d’actoral
Les 9, 10 et 11 septembre
Divers lieux, Marseille 
actoral.org

L’été indien des Cinq Continents

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M.O.M avec Louis Moutin, Jowee Omicil et François Moutin © Jean-Baptiste Millot

Si l’on ne pouvait jazzer qu’en période estivale, ce serait bien dommage ! Heureusement le Jazz des Cinq Continents pense à nous, et se fait fort d’ambiancer la rentrée de septembre, bien au-delà de la cité phocéenne. Au programme des derniers jours de l’été, trois dates à retenir. Le 8 septembre, au Cloître Saint-Jérôme de Marseille, le trio M.O.M, aka Louis Moutin à la batterie, Jowee Omicil aux saxophones et François Moutin à la contrebasse, délivre un jazz à la fois joyeux, intense, profond et spontané.

Le 16 septembre, le jazz s’invite dans les arts plastiques. A l’occasion du vernissage de l’exposition Le poids du monde de Luciana Lamothe, aux Baux-de-Provence, les jazzeux des Cinq Continents se chargent de la mise en musique de ce rendez-vous prévu dans la salle de l’Hôtel de la Tour de Brau. L’œuvre, une sculpture produite par l’artiste lors d’une résidence à l’Atelier Ni de Marseille, est quant à elle présentée jusqu’au 13 novembre.

Enfin, le 17 septembre, le village fortifié de Mont-Dauphin, dans les Hautes-Alpes, qui accueille une exposition de Ousmane Sow, ouvre ses portes au trio de l’explosif Cyril Benhamou, pour une traversée de l’histoire du jazz.

MARC VOIRY

Jazz des Cinq Continents
8, 16 et 17 septembre
Marseille, Les-Baux-de-Provence, Mont-Dauphin (05)
04 95 09 32 57 marseillejazz.com

La Belle et le Connard

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Cher connard, Virginie Despentes (Grasset)

Difficile de ne pas parler du nouveau roman de Virginie Despentes. Cher connard : dès sa parution, interviews, chroniques et émissions ont déferlé à propos de « l’événement littéraire de la rentrée ». Les uns l’encensent, d’autres le descendent en flèche. Despentes laisse rarement indifférent. Roman épistolaire, Cher connard se lit sous la forme d’un échange de lettres entre Rebecca Latté, une actrice célèbre, et Oscar Jayack, un écrivain en passe de le devenir. Commencé sur le ton de l’insulte, cet échange va très vite prendre un autre tour, pour se muer en amitié. Car avant de devenir un auteur à succès, Oscar a été le petit frère de Corinne, une amie d’enfance de Rebecca. Tous deux viennent de la même région, du même milieu aussi, dans lequel faire des films ou des livres était juste impensable. Leur « dialogue » est régulièrement ponctué par les posts virulents de la blogueuse féministe Zoé Katana (ex-attachée de presse de la maison d’édition d’Oscar, elle vient, au début du roman, de le « metooïser »). L’époque ultra récente circule dans ce texte à trois voix : le confinement, les harcèlements sur les réseaux sociaux, les addictions, l’univers des médias, du cinéma et de l’édition… Ces lettres charrient leur pesant de provocations et de diatribes, mais aussi tout un flot d’émotions et d’empathie pour les personnages, même pour celui que Rebecca appelle « cher connard ». Un homme, deux femmes ; deux trentenaires, une quinqua ; trois hétéros. Et finalement, une réflexion aiguë sur le monde tel qu’il ne va pas, par trois personnages qui le scrutent sans indulgence, mais pas sans amour.
Despentes n’est jamais là où on l’attend. Alors on lui pardonnera certaines envolées douteuses, quelques (rares) passages virant lourdement à la thèse, pour ne garder que ce qu’on aime chez elle depuis le début : sa façon de ne jamais être dans les clous, sa sincérité radicale et souvent à contre-courant, son sens aigu de la formule-choc, son style parfois trash et si drôle, sa capacité inentamée à la révolte, sa recherche perpétuelle de l’émancipation… Pour ses personnages comme pour elle sans doute.

FRED ROBERT

Cher connard, Virginie Despentes
Éditions Grasset
22 €
Des extraits de Cher connard seront lus par Anna Mouglalis, lors des prochaines Correspondances de Manosque, du 21 au 25 septembre.

Art-o-rama : quand l’art fait son marché

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Art-o-rama 2022, stand de la villa Noailles, Hyères, crédit Margot Montigny

Pour la première fois depuis sa création, Art-o-rama n’est pas prolongé par une exposition d’une quinzaine de jours, qui offrait la possibilité d’une présentation des œuvres et des galeries à un plus vaste public. La raison ? La location par La Friche de l’espace de la Cartonnerie pour des manifestations privées, ressources financières dont elle ne peut se passer, nous a indiqué Jérôme Pantalacci, directeur du salon. Un rendez-vous réduit à quatre jours donc, qui a accueilli dans la Cartonnerie 42 galeries (France, Belgique, Suisse, Allemagne, Espagne, Angleterre, Italie, Autriche, Chypre, Estonie, Roumanie, États-Unis), les lauréates des prix François Bret et Région Sud au Studio, et le volet édition d’art du salon, élargi cette année au design, regroupant une vingtaine d’acteurs, au 3e étage de la tour.

Cartonnerie

Dans le dédale des galeries, beaucoup d’art figuratif et/ou de couleur, prolongeant un tournant amorcé depuis quelques éditions. Dès l’entrée, on était accueilli par les aquarelles vives et colorées, fantastiques et imaginaires de Flaminia Veronesi, réalisées in-situ sur le stand de la galerie milanaise Castiglioni. Un peu plus loin, les huiles de Katharina Höglinger, sur carton d’emballage ou sur toile, aux touches et compositions décidées, pétries à l’histoire de la peinture, présentés par la galerie viennoise Wonnerth Dejaco, se vendaient presque comme des petits pains. La galerie marseillaise Sissi Club avait recouvert ses murs complètement en noir, pour exposer les rêveries langoureuses et interrogatives d’Inès di Folco, inspirées par un voyage au Caire. Au détour des allées, on trouvait des duos d’artistes imaginés spécialement par certains galeristes pour le salon : Nir Altman de Munich mettait ainsi en dialogue les portraits de la tout juste diplômée de l’École des Beaux-Arts de Marseille Neïla Czermak Ichti avec les sculptures de queues (du diable ?) de Tarek Lakhrissi. Et les galeries Air de Paris de Romainville et LambdalambdaLambda de Pristina proposaient des sculptures de Mégane Brauer et des peintures de Brilant Milazimi, expressions acerbes de la dureté de certaines conditions de vie.

Studio

Dans le Studio, on pouvait voir notamment les œuvres lauréates des prix François Bret et Région Sud. Pour le premier, en design, le travail de Lucie Constantin, invitant vivement les visiteurs, à travers photographies et injonctions écrites, à aller voir Marseille depuis des ailleurs, répertoriés par ses soins, hors-circuits touristiques. Zoé Ledoux, en art, liait sculpture, architecture et alimentaire, en infiltrant des spaghettis cuits dans une grille d’aération, et en plaçant un accordéon vertical de toasts grillés derrière une porte, l’empêchant de se fermer. Le prix Région Sud, décerné le 1er jour du salon, a lui été attribué à Hayoung, qui, à partir de la fréquentation d’un site internet qu’elle a créé et de ses cookies, se saisit des données capturées pour élaborer « l’odeur internet », sous forme de parfum, de chacun de ses visiteurs.

MARC VOIRY

Art-o-rama s’est tenu du 25 au 28 août à la Friche la Belle de Mai, Marseille.

La Guinguette Sonore, ce détecteur de trésors

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Trampqueen © Florian Puech

Nul besoin de détecteur de métaux pour avoir de belles surprises sur la plage de la Romaniquette (suite aux prévisions météorologiques, le festival est déplacé au domaine de Sulauze, Miramas) les 2 et 3 septembre prochains. Déjà parce que La Guinguette Sonore affiche une programmation plus rock indépendant que métal, et surtout, parce que l’affiche est à la hauteur de ce qu’elle nous propose depuis quatre ans. Un subtil mélange entre pépites locales, nationales et internationales. Une démarche d’autant plus louable que la famille du rock régional manque de tels rendez-vous.

Le son de la veine

C’est que la région n’en manque pas, des groupes de rock. À commencer par Glitch. Il y a tout juste deux ans, ils faisaient leur premier concert dans une soirée étouffante à La Salle Gueule de Marseille. Les gens présents avaient été soufflés par la qualité de cette jeune formation post-punk. Ils ont depuis été lauréats des tremplins Class’Eurock et des Inouïs du Printemps de Bourges : fulgurant. Autres représentants de la région, on retrouve la voodoo-trap de Trampqueen ou encore le psyché de Kriegelstein.

Drapeau oranje

Plus habitués aux rives de la mer du Nord que celles du Sud de la France, les Néerlandais de Banji viennent eux aussi fouler le sable istréens. Le « coup de cœur » des programmateurs replonge dans les – très à la mode – années 90. On pense à Weezer et aux Dandy Warhols, avec un petit côté rock californien qui ne dénote pas à l’ambiance du festival.

Si certains regretteront le manque de grosses têtes d’affiche à la programmation, c’est bien au contraire ce qui fait la force de ce rendez-vous. Ne pas refourguer un menu « maxi best of » à ses festivaliers comme on le voit souvent, mais donner envie de découvrir, et aller vers de nouveaux rivages.

NICOLAS SANTUCCI

La Guinguette Sonore
Les 2 et 3 septembre
Changement de lieu pour cause d'intempéries :
Domaine de Sulauze, Miramas
laguinguettesonore.fr

Jardin polaire au parc Longchamp

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Après un été dense du côté des quartiers Nord de Marseille, avec la coordination de l’opération Un été aux Aygalades au sein de la Cité des arts de la rue, c’est en plein cœur de ville que le Centre national des arts de la rue Lieux Publics lance sa rentrée. Pour inaugurer un premier trimestre majoritairement axé autour des arts plastiques, place à une installation monumentale, nommée Borealis, et qui devrait faire tourner les têtes du 8 au 10 septembre : l’artiste suisse Dan Acher propose de faire naître une aurore boréale en plein parc Longchamp, pas moins ! La promesse de pouvoir admirer dans les cieux les couleurs planantes et moirées des lueurs polaires – déclinant toute une palette de couleurs allant du bleu à l’orange en passant par le vert – pour accompagner ces premières soirées d’allure automnale. Après Tokyo, Adélaïde, Londres ou encore Rennes, c’est donc au tour de Marseille d’accueillir cette expérience insolite et grandiose défiant les sens. Derrière l’appel à la contemplation, l’œuvre aborde en sous-texte la force muette et inattendue de la nature, et la nécessaire humilité qui devrait en découler de notre part. Au cœur du propos : les changements climatiques et les remises en question de nos comportements, autant de sujets qui habitent la démarche d’un artiviste international qui aime à bousculer nos routines urbaines. L’installation sera aussi visible à Aix-en-Provence, sur le Cours Mirabeau, les 11 et 12 novembre, dans le cadre des Nuits d’ouverture de la 3e édition de la Biennale des imaginaires numériques organisée parChroniques. 

JULIE BORDENAVE

Borealis, de Dan Acher
Du 8 au 10 septembre, de 21 heures à minuit
Palais Longchamp, Marseille
lieuxpublics.com

À Lourmarin, le classique fait renaissance

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©Château de Lourmarin

Le festival emblématique du château de Lourmarin souffle ses vingt-quatre bougies cette année et demeure fidèle à sa tradition incubatrice. Elle met ainsi à l’honneur les musiciens en résidence : Maxime Alberti sur un programme Schubert et Chopin le 14 juillet, Nicolas Garrigues et Rodolphe Menguy sur Brahms, Schumann mais également Britten et Jongen le 25 août. On retrouve John Gade le 28 septembre pour un récital dédié à Chopin, Scriabine et Ravel, et enfin le Quatuor Mona sur Beethoven et Debussy. De quoi redonner à ces pages romantiquissimes un nouveau bain de jouvence !

D’autres jeunes interprètes plus que prometteurs vont s’imposer sans effort : passées maîtresses dans l’art du quatre mains, Chiara et Fiona Alaimo s’attellent les 28 juillet et 1er août aux classiques du genre – Schubert, Liszt, Stravinsky – tout en proposant quelques pièces solistes. On attend également de pied ferme le récital de Célia Oneto Bensaid le 28 septembre. La jeune pianiste, particulièrement remarquée au festival Nouveaux Horizons de l’hiver dernier, rend ses lettres de noblesse à Charlotte Sohy. Les pièces lyriques en diable de cette compositrice injustement oubliée côtoieront les œuvres plus rebattues mais non moins passionnantes de Schubert et Liszt.

Le Trac en plus

Riche en soirées alléchantes, la programmation des Musiques d’été de Lourmarin s’est également dotée de deux rendez-vous quelque peu éloignés du répertoire de musique classique qu’elle affectionne. Soit une représentation des Fourberies de Scapin par la bien mal nommée troupe Trac le 18 juillet et une soirée de jazz concoctée par Jean-François Bonnel le 6 août. Celle-ci s’attelle à un pari un peu fou, mais quelque peu prisé depuis le tournant de 2020 : recréer le jazz traditionnel des années folles. Pour lequel on espère pouvoir sortir ses plus belles chaussures de danse !

SUZANNE CANESSA

Musiques d'été
Château de Lourmarin
04 90 68 15 23 chateau-de-lourmarin.com

Paréidolie fait toujours bonne mine

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Magali DANIAUX & Cédric PIGOT, Brille, 2022, encre sur papier, 75 x 110 cm © Magali Daniaux & Cédric Pigot ­ Courtesy Polaris, Istres

Du territoire

Qu’est-ce qu’une poule ? Si la question ne vous est jamais venue à l’esprit, une réponse était néanmoins accrochée juste à l’entrée de Paréidolie, sous forme de deux grands dessins de Jean-Jacques Ceccarelli : une poule, c’est un rythme, dans une forme. Un hommage à cet artiste marseillais, décédé en 2017, par Territoires partagés, l’une des deux galeries « du territoire » invitées du salon, en sus des quatorze internationales sélectionnées. L’autre étant Polaris, nouveau lieu d’art à Istres, qui montrait deux paysages imaginaires, réalisés à l’encre bleue, par Magali Daniaux et Cédric Pigot.

Également invitées « du territoire », deux artistes : la première, Mayura Torii, s’amusait à épuiser quelques supports à fantasmes ordinaires – couvertures de magazine de charme, jeux d’argent à gratter, tickets de caisse ; tandis que la seconde, Jeanne Susplugas, proposait un projet en « réalité virtuelle », où, muni d’un casque ad-hoc, on plongeait à l’intérieur d’un cerveau, dessiné par l’artiste.

De la figuration

Même si l’on trouvait de l’abstraction (trames, géométries, calligraphies…) Paréidolie penchait plutôt, cette année encore, vers le dessin figuratif. Quelques exemples parmi d’autres, avec la galerie Modulab de Metz et Roxane Lumeret, auteure-illustratrice de BD et de livres jeunesse, présentant des tableaux aux scènes étranges, teintées de surréalisme, couronnées, à l’issue du salon, du prix Pébéo. Ou avec les œuvres, fragiles et précieuses, de la Marseillaise Karine Rougier, lauréate du prix Drawing Now 2022, représentée par deux galeries : Espace à vendre de Nice, avec de petites boîtes à images, accrochées au mur, et Backslash de Paris, des dessins autour de l’ésotérisme, des dieux, de la nature, du corps féminin, en dialogue délicat avec ceux, plus éthérés, d’Odonchimeg Davaadorj. La galerie parisienne 8+4 présentait les scènes sadiques imaginées par Amélie Barnathan, explorant, façon Jérôme Bosch, l’inconscient torturé de jeunes filles. Ou bien encore, présentés par la galerie Bernard Jordan, les dessins noirs, hantés, angoissants, d’Odile Maarek, se référant à des contes célèbres.

De l’humour

Autre inclinaison du salon : l’humour. Et, mis à part l’ironie de Mayura Torii citée plus haut, un humour s’appuyant assez souvent sur des jeux textes-images : dans le stand de la galerie niçoise Eva Vautier, on pouvait par exemple rire (jaune) avec les décalages illustrations-légendes de Gérald Panighi, résonnant avec les petites ou grandes défaites de la vie. Espace à vendre proposait quelques propositions comiques de Thierry Lagalla, réalisant des « self-vanity (slow version) », affirmant que « L’erreur est une naine », ou examinant « l’importance du retournement lors de l’épiphanie de la saucisse ». Et, dans un registre plus pince-sans-rire, présentés par la galerie Laurent Godin, quelques œuvres de Claude Closky : le laconisme hilarant d’un « Before – After » en gommettes, ou celui de grilles de loto, cochées avec beaucoup d’application et de désinvolture.

MARC VOIRY

Paréidolie, salon International du dessin contemporain s’est tenu les 27 et 28 août, au Château de Servières, à Marseille.