mercredi 2 octobre 2024
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Effervescence Marseillaise

Marseille Jazz des Cinq Continents se clôt en majesté au Palais Longchamp

C’est une soirée particulièrement généreuse qui s’est offerte aux Marseillais en cette veille de fête nationale. De la Plaine, où s’est tenu un concert solidaire des artistes en exil, au Vieux Port qui accueillait la grande Véronique Sanson dans le cadre de L’Été Marseillais, les occasions de découvrir en plein air des concerts qui feront date étaient nombreuses !

Cuba virtuose

Mais c’est peut-être au Palais Longchamp que la soirée la plus emblématique de la vie estivale phocéenne s’est déroulée, dans ce parc qui a vu se succéder depuis 25 ans des artistes précieux. Donné en conclusion de cette belle série, le set de Roberto Fonseca incarnait déjà à lui seul l’esprit d’un festival abolissant d’inutiles frontières entre jazz et musiques du monde. Heureux de revenir dans cette ville qui a « toujours su accueillir et comprendre sa musique », le pianiste cubain échange facétieusement avec le public, évoque dans un français imagé son amour d’Oscar Peterson ou de Glenn Gould, son rapport à son instrument ou encore ce professeur ayant juré qu’il ne deviendrait jamais musicien professionnel. Et si la virtuosité de Fonseca impressionne encore aujourd’hui, c’est évidemment pour sa propension à l’échafaudage, à la vélocité et à la mouvance rythmique comme harmonique qui fait la qualité de tous les jazzmen les plus aguerris ; mais aussi sa générosité avec ses compagnons de route, croisés notamment au Buena Vista Social Club, son goût du chant et de la danse qui ne sacrifie jamais sur l’autel de la performance la musicalité et la sensualité. Un jazz qui respire, en somme, plutôt que de se refermer sur ses propres mécanismes. Habitué du festival de la première heure, Roberto Fonseca sait saisir ce public plus jeune, moins snob et moins fortuné que celui d’autres festivals voisins : le faire chanter sur des échappées improvisées vers les Beatles ou Besame Mucho, se déhancher sur un standard havanais ou rêver sur des envolées plus mélancoliques – le très beau Mercedes dédié à sa chère mère.

Marseille résiste

La soirée s’était ouverte sur deux artistes pour qui Marseille aura également joué un rôle crucial, jusqu’à leur émergence déjà lointaine en tant qu’artistes : Marion Rampal et David Walters, représentants d’un jazz flirtant avec la poésie, le blues « de quand t’as trop de vaisselle à la main » et même la pop pour elle ; et la soul teintée d’harmonies caraïbéennes sophistiquées pour lui. De chaleureuses sessions qui semblent s’écouler en quelques minutes et prennent tout de même le temps d’évoquer, entre deux morceaux, la mobilisation politique récente de la ville autour des élections, la nécessité d’un espoir. La chanteuse et guitariste salue la possibilité pour l’art de « complexifier » et d’ainsi résoudre les nœuds et conflits de l’époque ; le chanteur tous terrains félicite les Marseillais qui « [l’] auront accueilli mieux que personne » pour le faible score alloué au rassemblement national. 

SUZANNE CANESSA

Marseille Jazz des 5 continents s’est clôturé le 13 juillet au Palais Longchamp

Suzanne Canessa
Suzanne Canessa
Docteure en littérature comparée, passionnée de langues, Suzanne a consacré sa thèse de doctorat à Jean-Sébastien Bach. Elle enseigne le français, la littérature et l’histoire de l’Opéra à l’Institute for American Universities et à Sciences Po Aix. Collaboratrice régulière du journal Zébuline, elle publie dans les rubriques Musiques, Livres, Cinéma, Spectacle vivant et Arts Visuels.
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