mercredi 2 octobre 2024
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Faire face

Ce sont de bien funestes festivités pascales qui s’achèvent. À l’heure où nous écrivons, les disparus sont évalués au nombre de huit, et six corps sans vie ont été retrouvés sous les décombres. Nombreux sont ceux qui, horrifiés par ces effondrements de la rue de Tivoli, évoquent les souvenirs encore brûlants de la rue d’Aubagne. « Notre cauchemar se répète », soupire Jean-Claude Gaudin dans un communiqué de presse déroutant. Tout en prenant soin d’omettre sa responsabilité d’ex-maire dans les effondrements des immeubles de ces numéros 63 et 65, immeubles dont le grave état d’insalubrité lui avait pourtant été signalé à de nombreuses reprises. La tentation est grande de chercher de nouveau l’origine, l’explication de cette explosion meurtrière : une fuite de gaz, selon toute vraisemblance, qui a déjà échauffé les esprits d’adeptes de théories du complot. Ou encore de trouver un réceptacle quelconque à notre colère. Notre ministre de l’Intérieur, jamais à une indignité près, était sans doute le candidat idéal à l’acrimonie générale. Venu pour une paire d’heures à Marseille en jet privé – la fin de l’abondance ne concerne décidément pas les membres de l’exécutif – Gérald Darmanin aurait réclamé à être accompagné, tout au long de sa visite des lieux encore enfumés, par une équipe de journalistes. Rien d’étonnant, donc, à ce que ces mots de soutien ne s’adressent qu’aux « forces de secours » : les victimes, pour ces politiciens-là, n’ont ni corps, ni existence.

Pensée tragique
On aurait également envie de reprendre ceux qui, au sujet de la rue d’Aubagne comme de celle de Tivoli, évoquent un « drame » : comme si ce mot que l’on pensait réservé à la fiction et à ses rebondissements pouvait dire le désespoir et la douleur de celles et ceux qui sont confrontés à une pareille horreur. Peut-être lui préfèrera-t-on cette fois celui de tragédie : ce terme qui dit la violence et l’effroi qui s’emparent de nous tous. Car il ne nous reste aujourd’hui qu’à faire face à la terreur et au deuil. Et à saluer la présence des collectivités, mais aussi les initiatives associatives et citoyennes qui fleurissent depuis ce bien morne dimanche de Pâques.

SUZANNE CANESSA

Suzanne Canessa
Suzanne Canessa
Docteure en littérature comparée, passionnée de langues, Suzanne a consacré sa thèse de doctorat à Jean-Sébastien Bach. Elle enseigne le français, la littérature et l’histoire de l’Opéra à l’Institute for American Universities et à Sciences Po Aix. Collaboratrice régulière du journal Zébuline, elle publie dans les rubriques Musiques, Livres, Cinéma, Spectacle vivant et Arts Visuels.
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